La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/11/2022 | FRANCE | N°19/03947

France | France, Cour d'appel de Rennes, 9ème ch sécurité sociale, 09 novembre 2022, 19/03947


9ème Ch Sécurité Sociale





ARRÊT N°



N° RG 19/03947 - N° Portalis DBVL-V-B7D-P3KV













[7]



C/



URSSAF BRETAGNE































Copie exécutoire délivrée

le :



à :











Copie certifiée conforme délivrée

le:



à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAISr>


COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 09 NOVEMBRE 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Elisabeth SERRIN, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère,

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère,



GREFFIER :



Monsieur Philippe LE BOUDEC, lors des déba...

9ème Ch Sécurité Sociale

ARRÊT N°

N° RG 19/03947 - N° Portalis DBVL-V-B7D-P3KV

[7]

C/

URSSAF BRETAGNE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Copie certifiée conforme délivrée

le:

à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 09 NOVEMBRE 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Elisabeth SERRIN, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère,

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Philippe LE BOUDEC, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 14 Septembre 2022

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 09 Novembre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats ;

Arrêt signé par Madame Véronique PUJES, pour la présidente empêchée, conformément à l'article 456 du code de procédure civile ;

DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:

Date de la décision attaquée : 25 Avril 2019

Décision attaquée : Jugement

Juridiction : Tribunal de Grande Instance de SAINT-BRIEUC - Pôle Social

Références : 18/00428

****

APPELANTE :

LA SAS [7]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Jean-Jacques TOUATI, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

L'UNION DE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SÉCURITÉ SOCIALE BRETAGNE

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 3]

représentée par Mme [V] [S] en vertu d'un pouvoir spécial

EXPOSÉ DU LITIGE

A la suite d'un contrôle de l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garanties des salaires 'AGS', opéré par l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale Bretagne (l'URSSAF) sur la période allant du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013, la [7] (la société) s'est vue notifier une lettre d'observations du 5 août 2014 portant sur sept chefs de redressement et une observation pour l'avenir, pour un montant de 60 002 euros.

Par lettre du 2 septembre 2014, la société a formulé des observations sur les chefs de redressement suivants :

- 'annulation des exonérations suite à absence de négociation annuelle obligatoire' (chef n°1);

- 'avantage en nature nourriture : évaluation pour les salariés des entreprises de restauration' (chef n°2) ;

- 'frais professionnels - déduction forfaitaire spécifique : conditions d'option' (chef n°3).

En réponse, par lettre du 26 septembre 2014, l'inspecteur du recouvrement a annulé le chef de redressement 'frais professionnels - déduction forfaitaire spécifique : conditions d'option' d'un montant de 2 677 euros mais a maintenu les deux autres chefs contestés, ramenant ainsi le montant total du redressement à 57 325 euros.

Par lettre recommandée avec accusé de réception signé le 28 octobre 2014, l'URSSAF a notifié à la société une mise en demeure datée du 27 octobre 2014 pour un montant de 64 543 euros.

Par lettre du 14 novembre 2014, la société a saisi la commission de recours amiable de l'organisme, laquelle, par décision du 21 mai 2015, a confirmé le bien-fondé et le montant des chefs de redressement 'annulation des exonérations suite à absence de négociation annuelle obligatoire' et 'avantage en nature nourriture : évaluation pour les salariés des entreprises de restauration'.

Le 10 août 2015, la société a contesté cette décision devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Saint-Brieuc.

Par jugement du 25 avril 2019, ce tribunal, devenu le pôle social du tribunal de grande instance de Saint-Brieuc, a :

- annulé le redressement uniquement sur la base de calcul des cotisations se rapportant aux indemnités compensatrices correspondant aux repas des personnels et dit que le redressement est maintenu dans son principe et ses autres modalités mais selon un calcul de 0,06 euros par contribution nourriture et qu'il appartiendra à l'URSSAF Bretagne de justifier de ce calcul à la société ;

- confirmé pour le surplus le redressement, la décision de la commission de recours amiable du 21 mai 2015 et la mise en demeure du 27 octobre 2014 sous réserve des majorations de retard complémentaires ;

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de la société aux fins de mainlevée totale du nantissement pratiqué par l'URSSAF Bretagne ;

- débouté les parties pour le surplus ;

- dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.

Par déclaration adressée le 11 juin 2019, la société a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 6 juin 2019.

Par ses écritures visées à l'audience auxquelles s'est référé et qu'a développées son conseil à l'audience, la société demande à la cour de :

- juger la procédure de contrôle en cause nulle et donc la procédure de recouvrement nulle ;

Subsidiairement,

- juger la mise en demeure nulle et la procédure de recouvrement et celle de redressement nulles quant à la forme substantielle ce qui lui interdit d'examiner le fond du redressement ;

Très subsidiairement,

- juger que les majorations de retard n'ont pas de fondement légal pour des raisons de forme substantielle ;

- sur le fond juger que le redressement de l'URSSAF est sans fondement et nul sur chacun de ses chefs, infirmer le jugement entrepris en tant qu'il n'annule pas :

* le redressement relatif à la réduction dite 'Fillon' ;

* le redressement lié à l'indemnité compensatrice des repas et très subsidiairement, si la cour confirmait le redressement relatif à l'obligation de nourriture, juger que l'obligation de nourriture est limitée au personnel de la restauration et confirmer le jugement en tant qu'il condamne l'URSSAF à recalculer le montant de l'indemnité compensatrice selon un montant de 0,06 euros par repas.

Et en tout état de cause,

- prendre acte de l'annulation de ce chef de redressement par l'URSSAF décidée de son propre mouvement en raison de la jurisprudence de la Cour de cassation ;

Et :

- annuler le redressement de ces chefs ;

En tout état de cause :

- ordonner la mainlevée et juger la mainlevée du nantissement inscrit par l'URSSAF de Bretagne, procédure brutale et infondée ;

- condamner l'URSSAF à lui verser 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ses conclusions n°3 parvenues au greffe le 10 février 2022 auxquelles s'est référée et qu'a développées sa représentante à l'audience, l'URSSAF demande à la cour de :

- constater que la société ne conteste pas les chefs de redressement n° 4, 5, 6, 7, et 8 notifiés par lettre d'observations du 5 août 2014 ;

- constater que le chef de redressement n°3 a été annulé par courrier du 26 septembre 2014 pour un montant de 2 677 euros en cotisations ;

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

- confirmer le bien-fondé du chef de redressement n°1 'annulation des exonérations suite à absence de négociation annuelle obligatoire' pour son montant de 24 600 euros notifié par lettre d'observations du 5 août 2014 ;

- prendre acte de l'annulation du chef de redressement n°2 'avantage en nature nourriture : évaluation pour les salariés des entreprises de restauration', ramené à 467 euros en première instance ;

- confirmer la mise en demeure pour un montant ramené à 30 190 euros en cotisations et 3 801 euros de majorations de retard soit 33 991 euros sous réserve du calcul des majorations de retard complémentaires prévues aux articles R. 243-18 et suivants du code de procédure civile ;

- condamner la société à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeter la demande d'article 700 du code de procédure civile de la société ;

- délivrer un arrêt revêtu de la formule exécutoire ;

- débouter la société de l'ensemble de ses demandes.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I- Sur la régularité du contrôle

La société soutient que le contrôle est nul en ce que :

- l'avis de contrôle ne mentionne pas la faculté de se faire assister d'un conseil de son choix pendant le contrôle ;

- la mise en demeure est nulle car :

* elle ne mentionne pas la nature, le montant et l'assiette du redressement,

* elle indique des montants différents de ceux précisés dans la lettre d'observations,

* elle ne mentionne pas le destinataire du contrôle, ni son signataire ni encore le montant exact dû.

I-1 Sur l'avis de contrôle

L'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale prévoit que l'avis de contrôle adressé par l'organisme de recouvrement à l'employeur ou au travailleur indépendant doit mentionner le droit de se faire assister du conseil de son choix pendant le contrôle.

En l'espèce, l'avis de contrôle du 24 avril 2014 porte la mention suivante :

'En outre, vous avez la faculté de vous faire assister au cours de cette vérification par le conseil de votre choix'.

Force est donc de constater que l'avis répond à l'exigence posée par le texte susvisé, la cour ajoutant au surplus qu'y figurent également la date du contrôle et la mention de la charte du cotisant avec l'adresse électronique à laquelle elle peut être consultée.

I-2 Sur la mise en demeure

En application des articles L. 244-2 et R. 244-1 du code de la sécurité sociale, la mise en demeure qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans un délai imparti doit permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation. A cette fin, il importe qu'elle précise, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elle se rapporte, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice (2e Civ., 9 février 2017, n° 16-12.189).

La mise en demeure qui se rapporte à un exercice donné, indique la nature des cotisations réclamées et distingue le montant dû au principal des majorations de retard, permet au cotisant de connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation (2e Civ., 24 septembre 2020, n°19-17.802).

La mise en demeure du 27 octobre 2014 est produite aux débats, a été notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception du 28 octobre 2017, lequel est signé.

Cette mise en demeure mentionne, outre le délai d'un mois pour s'acquitter des sommes réclamées :

- le motif de recouvrement : 'l'examen de votre compte fait ressortir que vous restez redevable d'une somme dont vous trouverez le détail ci-dessous' suivi de la mention : 'Contrôle. Chefs de redressement notifiés le 06/08/14- article R. 243-59 du code de la sécurité sociale' ;

- la nature des cotisations (régime général) ;

- la période de référence (les années 2011 à 2013);

- les montants en cotisations, contributions et majorations de retard pour un montant total de 64 543 euros (57 325 euros de cotisations et contributions et 7 218 euros de majorations de retard).

Force est de constater que ces mentions précises et complètes permettaient à la société, qui avait reçu la lettre d'observations détaillant la nature et les modalités de calcul des cotisations/contributions, présenté ses observations à l'inspecteur du recouvrement et obtenu une réponse motivée et chiffrée de ce dernier le 26 septembre 2014, de connaître la cause, la nature et l'étendue de ses obligations.

S'agissant de la différence de montants entre la lettre d'observations (60 002 euros) et la mise en demeure (57 325 euros), la cour rappelle que c'est à la suite des observations présentées par la société le 2 septembre 2014 que l'inspecteur du recouvrement, aux termes de sa lettre du 26 septembre 2014, a annulé le chef de redressement n°3 pour son montant de 2 677 euros, lequel concernait les 'extras' croupiers, et ramené ainsi le redressement total à 57 325 euros comme indiqué dans cette lettre. Aucune confusion ne peut être faite avec l'observation pour l'avenir, non chiffrée, portée au chef n°8, 'Frais professionnels-déduction forfaitaire spécifique:conditions d'option', rappelant la nécessité pour la société de demander aux salariés d'opter ou non pour la déduction forfaitaire spécifique.

Le fait que la mise en demeure, qui indique le montant des cotisations et des majorations dues, ne précise pas s'il s'agit de sommes en net ou en brut, ne la rend pas davantage irrégulière.

Par ailleurs, la date du 6 août 2014 mentionnée dans la mise en demeure correspond à la date à laquelle la société a reçu la lettre d'observations datée du 5 août 2014, comme elle l'indique elle-même dans sa lettre du 2 septembre 2014 ; la mention de la date de réception de la lettre d'observations aux lieu et place de la date de cette dernière est sans conséquence juridique dès lors qu'il n'en résulte aucune ambiguïté ou atteinte aux droits de la société, qui a bien été destinataire de la lettre d'observations.

En outre, si la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 en son article 4, alinéa 2, prévoit que toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci, l'omission de ces mentions n'affecte pas la validité de la mise en demeure prévue par l'article L. 244-2 du code de la sécurité sociale, dès lors que celle-ci précise la dénomination de l'organisme qui l'a émise. (Civ 2ème 5 juillet 2005, n° 04-30.196).

Force est de constater en l'espèce que la mise en demeure du 27 octobre 2014 mentionne tant le destinataire de l'acte ('SAS [7]', suivi de l'adresse de la cotisante) que l'organisme émetteur ('URSSAF Bretagne' suivi de l'adresse) ; l'identité du directeur y est au surplus mentionnée ([P] [G]) suivie de sa signature.

Par suite, les moyens tirés de la nullité de la mise en demeure soulevés par l'appelante ne sauraient prospérer.

II- Sur le bien fondé du redressement

L'URSSAF indique avoir totalement annulé le chef de redressement n°2 concernant les avantages en nature nourriture, qui avait fait l'objet d'une minoration en première instance à hauteur de 467 euros.

Les parties s'accordent dans ces conditions pour considérer qu'il ne subsiste en discussion devant la cour que le chef n°1 'annulation des exonérations suite absence de négociation annuelle obligatoire'.

Lors de ses opérations de contrôle, l'inspecteur du recouvrement a constaté :

- qu'en 2012, la société n'avait pas respecté l'obligation d'engager une négociation sur les salaires telle que définie au 1° de l'article L.2242-8 du code du travail dans les conditions prévues aux articles L.2242-1 à L.2242-4;

- qu'en 2013, la société n'avait pas non plus effectué la négociation au cours de l'année civile puisque le procès-verbal de désaccord datait du 16 juin 2014 ; que de plus, la société n'avait toujours pas reçu le récépissé de dépôt de la DIRECCTE à la date du contrôle.

L'inspecteur a en conséquence opéré une réduction de 10% du montant des allégements de cotisations patronales appliqués au titre des rémunérations versées ces mêmes années ; il en est résulté une diminution des réductions Fillon de 12 192 euros pour 2012 et de 12 408 euros pour 2013.

La société soutient que les négociations obligatoires ont bien eu lieu en 2012 et 2013, tandis que l'URSSAF maintient que l'appelante ne justifie pas avoir engagé des négociations ces années-là.

Sur ce :

Dans sa rédaction applicable au litige, l'article L. 241-13 -VII du code de la sécurité sociale dispose :

'Lorsque l'employeur n'a pas rempli au cours d'une année civile l'obligation définie au 1° de l'article L. 2242-8 du code du travail dans les conditions prévues aux articles L. 2242-1 à L. 2242-4 du même code, le montant de la réduction est diminué de 10 % au titre des rémunérations versées cette même année. Il est diminué de 100 % lorsque l'employeur ne remplit pas cette obligation pour la troisième année consécutive.'

L'article L. 2242-8 du code du travail dans sa version en vigueur du 1er juin 2009 au 1er janvier 2016 applicable en l'espèce dispose que :

'Chaque année, l'employeur engage une négociation annuelle obligatoire portant sur :

1° Les salaires effectifs ;

2° La durée effective et l'organisation du temps de travail, notamment la mise en place du travail à temps partiel ou l'augmentation de la durée du travail à la demande des salariés.

Cette négociation peut également porter sur la formation ou la réduction du temps de travail.'

L'article L. 2242-1 du même code, dans sa rédaction en vigueur du 1er mai 2008 au 1er janvier 2016, dispose :

'Dans les entreprises où sont constituées une ou plusieurs sections syndicales d'organisations représentatives, l'employeur engage chaque année une négociation sur les matières prévues par le présent chapitre.

A défaut d'une initiative de l'employeur depuis plus de douze mois suivant la précédente négociation, celle-ci s'engage obligatoirement à la demande d'une organisation syndicale représentative.

La demande de négociation formulée par l'organisation syndicale est transmise dans les huit jours par l'employeur aux autres organisations représentatives.

Dans les quinze jours qui suivent la demande formulée par une organisation syndicale, l'employeur convoque les parties à la négociation annuelle.'

L'article L. 2242-2 du même code, dans sa version en vigueur du 1er mai 2008 au 6 août 2014, dispose que :

'Lors de la première réunion sont précisés :

1° Le lieu et le calendrier des réunions ;

2° Les informations que l'employeur remettra aux délégués syndicaux et aux salariés composant la délégation sur les matières prévues par le présent chapitre et la date de cette remise. Ces informations doivent permettre une analyse comparée de la situation des hommes et des femmes concernant les emplois et les qualifications, les salaires payés, les horaires effectués et l'organisation du temps de travail. Elles font apparaître les raisons de ces situations.'

L'article L. 2242-4 du même code, dans sa version en vigueur du 1er mai 2008 au 24 septembre 2017, prévoit que :

'Si, au terme de la négociation, aucun accord n'a été conclu, il est établi un procès-verbal de désaccord dans lequel sont consignées, en leur dernier état, les propositions respectives des parties et les mesures que l'employeur entend appliquer unilatéralement.

Ce procès-verbal donne lieu à dépôt, à l'initiative de la partie la plus diligente, dans des conditions prévues par voie réglementaire.'

L'article D. 2231-2 du même code, dans sa version du 1er janvier 2009 au 1er septembre 2017, dispose :

'Les conventions et accords, ainsi que leurs avenants et annexes, sont déposés par la partie la plus diligente auprès des services du ministre chargé du travail.

Le dépôt est opéré en deux exemplaires, dont une version sur support papier signée des parties et une version sur support électronique.

La partie la plus diligente remet également un exemplaire de chaque convention ou accord au greffe du conseil de prud'hommes du lieu de conclusion.'

Conformément à la lettre circulaire DSS/5C/DGT n°2011-092 du 7 mars 2011, en l'absence de procès-verbal d'accord ou de désaccord ou de son récépissé de dépôt de la négociation annuelle obligatoire sur les salaires, si l'employeur prouve par d'autres documents ou moyens utiles qu'il a engagé des négociations loyales et sérieuses, il n'y a pas lieu d'appliquer la réduction au titre de l'année considérée. La preuve de l'engagement des négociations et de leur caractère loyal et sérieux pourra être apportée par la production de documents tels que les convocations aux réunions de négociation, un projet soumis à la négociation des documents transmis aux négociateurs ou des propositions des organisations syndicales faites au cours des négociations.

- la situation pour 2012

Aucun procès-verbal de désaccord sur la négociation annuelle obligatoire régulièrement déposé à la DIRECCTE n'est produit par la société pour 2012.

Pour établir l'existence de négociations loyales et sérieuses, la société verse aux débats l'attestation de M. [F], dont il n'est pas contesté qu'il était le seul délégué syndical, en l'occurrence [4], datée du 22 août 2014, qui indique avoir négocié en 2012 une revalorisation générale des salaires de 4% avec le directeur général, M. [N], en précisant que l'habitude avait été prise d'effectuer les négociations lors des réunions du comité d'entreprise dont il était le secrétaire ; que sa demande avait été favorablement accueillie par M. [N] lors de la réunion de la délégation unique du personnel du 21 août 2012 mais avait été rejetée par le conseil d'administration du groupe [5] en octobre 2012.

L'absence de pièce d'identité jointe à cette attestation n'est pas de nature à retirer toute force probante à ce document, la cour, à l'instar du tribunal, observant que la signature qui y figure est la même que celle portée sous le nom de M. [F] en qualité de secrétaire du comité d'entreprise au bas des procès-verbaux des réunions de la délégation unique du personnel versés aux débats.

Outre l'attestation précitée, la société verse :

- le procès-verbal de la réunion de la délégation unique du personnel du 21 août 2012, signé le 2 septembre 2012 par le nouveau directeur et M. [F], mentionnant que le budget 2012/2013 qui sera présenté au groupe pour acceptation intègre une revalorisation des salaires de 4% ;

- le procès-verbal de la réunion de la délégation unique du personnel du 23 octobre 2012 signé le 19 novembre 2012 par les mêmes personnes faisant état du rejet de la revalorisation de 4% au vu des pertes cumulées sur les deux derniers exercices.

La seule mention d'une revalorisation envisagée de 4% sans autre précision notamment quant aux informations transmises au délégué syndical devant permettre une analyse comparée de la situation des hommes et des femmes concernant les emplois et les qualifications, les salaires payés, les horaires effectués et l'organisation du temps de travail, ne saurait caractériser l'engagement de négociations loyales et sérieuses.

Le redressement opéré sur ce point est donc justifié, le jugement étant confirmé.

- la situation pour 2013

L'appelante verse aux débats un procès-verbal de désaccord pour 2013 daté et signé le 16 juin 2014 et déposé à la DIRECCTE le 2 juillet 2014 (pièce n° 20 de ses productions).

L'URSSAF indique que ce document ne permet pas d'établir que les négociations ont eu lieu en 2013, celles-ci ayant en effet pu se tenir entre le 1er janvier 2014 et le 16 juin 2014.

Dans son attestation susvisée, M. [F] indique qu'au cours d'une réunion du comité d'entreprise du 18 juin 2013, il a demandé la tenue d'une réunion de négociation annuelle obligatoire pour le 2 juillet suivant, ce qui a été accepté ; qu'à cette date, il a présenté des demandes de revalorisation salariales en fonction des dates d'embauche, de revalorisation des grilles annuelles salariales du personnel de jeux traditionnels, de prise en charge des tenues de travail, et de hausse du budget action sociale du comité d'entreprise ; que toutes ces demandes ont été rejetées lors d'une réunion, très brève, du 20 août 2013 ; qu'en raison d'un dialogue social réduit à néant, la signature d'un procès-verbal de désaccord a été tardive.

Si la société verse aux débats la convocation à la réunion de la délégation unique du personnel du 18 juin 2013 avec la mention de l'élaboration d'un calendrier pour les négociations annuelles obligatoires à l'ordre du jour, le procès-verbal de cette réunion n'est pas produit de sorte que la cour n'est pas mise en mesure de vérifier ce qui a pu être effectivement débattu le 18 juin 2013 et notamment si un calendrier des négociations a été fixé.

La cour observe également qu'aucun compte rendu d'une réunion qui se serait tenue le 2 juillet 2013 au cours de laquelle M. [F] aurait soumis un certain nombre de propositions dans le cadre de négociations annuelles obligatoires n'est communiqué.

Aucun des autres procès-verbaux de réunion de la délégation unique du personnel produits aux débats jusqu'au 17 décembre 2013 ne font état de l'engagement ou de négociations annuelles obligatoires en cours.

Le procès-verbal d'une réunion du 30 juillet 2013 fait tout au plus état de ce que 'l'accord sur la reconnaissance de l'ancienneté des employés débutants hors jeux sera intégré dans les NAO', au sujet desquelles aucune précision (quant à leur engagement, leur cadre ou leur objet) n'est apportée. Ce projet d'accord était du reste encore en discussion lors des réunions des 12 novembre et 17 décembre 2013 et dont l'examen était une fois de plus reporté à une autre date.

Les éléments qui précèdent ne permettent pas de caractériser l'engagement de négociations annuelles obligatoires loyales et sérieuses pour 2013 avant le 1er janvier 2014.

Le redressement opéré sur ce point est donc justifié.

Les premiers juges doivent dans ces conditions être approuvés en ce qu'ils ont confirmé le chef de redressement n°1 pour un montant de 24 600 euros.

Les autres chefs de redressement non contestés par la société s'établissant à la somme de 5 590 euros, la mise en demeure est fondée à hauteur d'un montant total de 30 190 euros.

III- Les majorations de retard

Au visa de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, la société reproche à l'inspecteur de ne pas avoir indiqué dans la lettre d'observations le mode de calcul et le montant des éventuelles majorations auxquelles elle s'exposait, et soutient que ce manquement justifie l'annulation des majorations appliquées en l'espèce par l'URSSAF au visa de l'article R. 243-18 du code de la sécurité sociale.

Sur ce :

Il résulte de l'article R 243-59 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au litige, qu'à l'issue du contrôle, les inspecteurs du recouvrement communiquent à l'employeur ou au travailleur indépendant un document daté et signé par eux mentionnant l'objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle. Ce document mentionne, s'il y a lieu, notamment les observations faites au cours du contrôle, assorties de l'indication de la nature, du mode de calcul et du montant des redressements envisagés et des éventuelles majorations et pénalités définies aux articles L.243-7-2, L.243-7-6 et L.243-7-7 envisagés. L'ensemble de ces éléments permet d'assurer le respect du principe du contradictoire.

L'article R. 243-59 ne prévoit aucunement l'obligation pour l'URSSAF de mentionner dans la lettre d'observations le mode de calcul et le montant des majorations de retard prévues à l'article R. 243-18 du code de la sécurité sociale, cette exigence ne concernant que les pénalités en cas d'abus de droit (L. 243-7-2), les majorations en cas d'absence de mise en conformité (L. 243-7-6) et les majorations en cas de travail dissimulé (L. 243-7-7).

La lettre d'observations du 5 août 2014 porte mention de ce que des majorations de retard seront réclamées par application des dispositions de l'article R. 243-18 du code de la sécurité sociale à défaut de paiement après envoi de 'l'avis de mise en recouvrement'.

Aucune autre obligation ne s'imposant à l'URSSAF s'agissant des majorations de retard visées à l'article R.243-18, le moyen tiré de l'irrégularité sera écarté.

Le montant des majorations de retard à hauteur de 3 801 euros n'est pas remis en cause à titre subsidiaire par la société. S'y ajouteront les majorations de retard complémentaires jusqu'au paiement complet de la somme due.

IV- Sur les frais irrépétibles et les dépens

Il n'apparaît pas équitable de laisser à la charge de l'URSSAF ses frais irrépétibles.

La société sera en conséquence condamnée à lui verser à ce titre la somme de 1 000 euros.

S'agissant des dépens, l'article R.144-10 du code de la sécurité sociale disposant que la procédure est gratuite et sans frais en matière de sécurité sociale est abrogé depuis le 1er janvier 2019.

Il s'ensuit que l'article R.144-10 précité reste applicable aux procédures en cours jusqu'à la date du 31 décembre 2018 et qu'à partir du 1er janvier 2019 s'appliquent les dispositions des articles 695 et 696 du code de procédure civile relatives à la charge des dépens.

En conséquence, les dépens de la présente procédure exposés postérieurement au 31 décembre 2018 seront laissés à la charge de la société qui succombe à l'instance.

PAR CES MOTIFS :

La COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

Dit que la procédure de contrôle et de recouvrement est régulière en la forme ;

Réforme le jugement entrepris et dit que le présent dispositif se substitue au dispositif dudit jugement ;

Confirme le redressement pour un montant ramené à 30 190 euros en cotisations et 3 801 euros de majorations de retard auxquelles s'ajoutent les majorations de retard complémentaires ;

Condamne la [7] à verser à l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale Bretagne une indemnité de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la [7] aux dépens, pour ceux exposés postérieurement au 31 décembre 2018.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 9ème ch sécurité sociale
Numéro d'arrêt : 19/03947
Date de la décision : 09/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-09;19.03947 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award