2ème Chambre
ARRÊT N° 534
N° RG 19/05026 - N° Portalis DBVL-V-B7D-P7JA
(1)
M. [U] [B]
Mme [W] [C] épouse [B]
C/
SA CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE BRETAGNE - PAYS DE LOIRE
Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
- Me Patrick EVENO
-Me Bruno CRESSARD
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 21 OCTOBRE 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,
Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,
GREFFIER :
Mme Aichat ASSOUMANI, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 06 Septembre 2022
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 21 Octobre 2022 par mise à disposition au greffe
****
APPELANTS :
Monsieur [U] [B]
né le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 7]
[Adresse 6]
[Localité 5]
Représenté par Me Patrick EVENO de la SELARL P & A, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VANNES
Madame [W] [C] épouse [B]
née le [Date naissance 2] 1959 à [Localité 8]
[Adresse 6]
[Localité 5]
Représentée par Me Patrick EVENO de la SELARL P & A, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VANNES
INTIMÉE :
SA CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE BRETAGNE - PAYS DE LOIRE
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Bruno CRESSARD de la SELARL CRESSARD & LE GOFF, AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
2
EXPOSÉ DU LITIGE :
Selon offre préalable de crédit immobilier émise le 23 août 2010 et acceptée le 4 septembre 2010, la Caisse d'épargne et de prévoyance Bretagne Pays de Loire (ci-après la Caisse d'épargne) a, en vue de financer la vente en état futur d'achèvement d'un appartement à usage locatif, consenti à M. [U] [B] et Mme [W] [C] (les époux [B]), un prêt in fine de 382 401 euros au taux de 3,97 % l'an, remboursable en 143 mensualités de 1 520,05 euros, assurance emprunteur incluse, et une 144ème échéance de 383 921,05 euros.
Prétendant que le taux effectif global (TEG) de 4,85 % mentionné dans cette offre serait erroné comme ne prenant pas en compte la totalité des frais liés à l'octroi du crédit, et que la clause de calcul des intérêts sur la base d'une année de 360 jours était illicite, les époux [B] ont, par acte du 27 mars 2015, fait assigner la Caisse d'épargne devant le tribunal de grande instance de Vannes en annulation de la stipulation d'intérêts du prêt et restitution du trop-perçu d'intérêts.
Après avoir relevé que la seule sanction applicable était la déchéance du droit du prêteur aux intérêts, non demandée, les premiers juges ont, par jugement du 17 décembre 2018 :
débouté les époux [B] de leurs demandes de nullité de la stipulation conventionnelle, de remboursement d'intérêts versés, de substitution d'intérêts au taux légal et de remise d'un tableau d'amortissement rectifié,
débouté la Caisse d'épargne de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive,
condamné les époux [B] au paiement d'une indemnité de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire,
condamné les époux [B] aux dépens.
Les époux [B] ont relevé appel de ce jugement le 25 juillet 2019, pour demander à la cour de le réformer et de :
dire la Caisse d'épargne irrecevable et mal fondée en ses demandes et l'en débouter,
prononcer la nullité de la stipulation d'intérêts contenue dans l'acte de prêt liant les parties,
condamner la Caisse d'épargne au paiement de la somme, éventuellement à parfaire ou à compléter, de 58 995,05 euros au titre de la restitution du trop-perçu d'intérêts, augmentée des intérêts au taux légal courant à compter de la signification de l'assignation,
condamner la Caisse d'épargne à substituer le taux d'intérêt légal au taux d'intérêt conventionnel initialement stipulé, et ce jusqu'à la dernière échéance du crédit immobilier litigieux,
condamner la Caisse d'épargne à remettre aux époux [B], sous astreinte de 200 euros par jour de retard courant dans le mois suivant la signification du 'jugement' à intervenir, un tableau d'amortissement rectificatif substituant au taux d'intérêt conventionnel le taux d'intérêt légal,
condamner la Caisse d'épargne au paiement d'une indemnité de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
La Caisse d'épargne conclut quant à elle à la confirmation du jugement attaqué, sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages-intérêts.
Elle sollicite à cet égard la condamnation des époux [B] au paiement d'une somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive, ainsi que d'une indemnité de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en tous les dépens.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision ainsi qu'aux dernières conclusions déposées pour les époux [B] le 25 octobre 2019 et pour la Caisse d'épargne le 16 janvier 2020, l'ordonnance de clôture ayant été rendue le 9 juin 2022.
EXPOSÉ DES MOTIFS :
La Caisse d'épargne soutient que la demande d'annulation de la stipulation d'intérêts formée par les emprunteurs serait irrecevable, la déchéance du droit du prêteur aux intérêts étant la seule sanction applicable en cas d'inexactitude du TEG ou de stipulation d'une clause de calcul des intérêts sur une base autre que l'année civile.
Pourtant, la question de la nature de la sanction applicable au prêteur en cas d'inexactitude du TEG ou de calcul des intérêts conventionnels sur une base autre que l'année civile relève du débat au fond, et non d'une fin de non-recevoir.
À cet égard, il est en effet de principe que la seule sanction de l'inexactitude du TEG ou du calcul des intérêts sur une base autre que l'année civile est la déchéance du droit du prêteur aux intérêts dans la proportion fixée par le juge, au regard notamment du préjudice de l'emprunteur, y compris pour les contrats de prêt conclus avant l'entrée en vigueur de l'article L. 341-48-1 du code de la consommation dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 17 juillet 2019.
Or, en dépit de ce que les premiers juges ont rejeté leurs demandes pour ce motif et que la Caisse d'épargne a conclu expressément que la nullité de la stipulation d'intérêts n'était pas la sanction applicable, les époux [B] se sont bornés, dans le dispositif de leurs ultimes conclusions d'appel qui, seul, saisi la cour en application de l'article 954 du code de procédure civile, à demander exclusivement l'annulation de la stipulation d'intérêts et la substitution du taux légal au taux contractuel.
La cour ne pourra donc, à l'instar des premiers juges, que les débouter de telles demandes.
Le prêteur ne démontre en revanche pas que le droit des emprunteurs d'agir en justice et d'utiliser les voies de recours ouvertes par la loi ait en l'espèce dégénéré en abus.
Sa demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts a donc été pertinemment rejetée par les premiers juges.
Dès lors, la cour ne pourra que confirmer le jugement attaqué en tous points.
Il serait enfin inéquitable de laisser à la charge de la Caisse d'épargne l'intégralité des frais exposés par elle à l'occasion de l'instance d'appel et non compris dans les dépens, en sorte qu'il lui sera alloué une somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :
Confirme le jugement rendu le 17 décembre 2018 par le tribunal de grande instance de Vannes en toutes ses dispositions ;
Condamne les époux [B] à payer à la Caisse d'épargne et de prévoyance Bretagne Pays de Loire une somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne les époux [B] aux dépens d'appel ;
Rejette toutes autres demandes contraires ou plus amples.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT