2ème Chambre
ARRÊT N°513
N° RG 19/03331
N° Portalis DBVL-V-B7D-PY7L
(1)
M. [T] [Z]
Mme [N] [Z]
C/
Caisse de Crédit Mutuel CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE [Localité 4] QUESSOY
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
- Me MARION
- Me DOUARD
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 14 OCTOBRE 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,
Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,
GREFFIER :
Madame Ludivine MARTIN, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 05 Juillet 2022
ARRÊT :
Rendue par défaut, prononcé publiquement le 14 Octobre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTS :
Monsieur [T] [Z]
né le [Date naissance 1] 1995 à [Localité 11]
[Adresse 9]
[Localité 3]
Madame [N] [Z]
née le [Date naissance 2] 1998 à [Localité 11]
[Adresse 5]
[Localité 3]
Représentés par Me Chrystelle MARION de la SCP MARION-LEROUX-SIBILLOTTE-ENGLISH-COURCOUX, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC
INTIMÉE :
CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE [Localité 4] QUESSOY
[Adresse 8]
[Localité 4]
Représentée par Me Valérie DOUARD de la SELARL RAVET & ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
INTERVENANT :
DIRECTION REGIONALE DES FINANCES PUBLIQUES
POLE GESTION DES PATRIMOINES PRIVES
[Adresse 10]
[Localité 7]
Assigné par acte d'huissier en date du 17/02/2022, délivré à étude, n'ayant pas constitué
EXPOSÉ DU LITIGE
Selon offre préalable acceptée le 12 juin 2009, la Caisse de crédit mutuel de [Localité 4]-Quessoy (ci-après le Crédit mutuel) a, afin de financer l'achat d'un véhicule, consenti à Mme [K] [S] un prêt n° 201de 25 000 euros au taux de 4,90 % l'an, remboursable en 60 mensualités.
Puis, selon offre préalable de crédit immobilier acceptée le 30 novembre 2010, il lui a, en vue de financer des travaux d'agrandissement de sa résidence principale, consenti un prêt immobilier n° 203 de 30 150 euros au taux de 3,68 % l'an, remboursable en 180 mensualités.
[K] [S] est décédée le [Date décès 6] 2013 et, à compter du mois d'octobre 2013, les échéances de remboursement n'ont plus été honorées.
Par acte du 29 juillet 2015, le Crédit mutuel a fait assigner en paiement les enfants et héritiers de l'emprunteuse, Mme [J] [Z], M. [T] [Z] et M. [F] [Z], ès-qualités de représentant légal de sa fille mineure [N] [Z], devant le tribunal de grande instance de Saint-Brieuc.
Par déclaration enregistrée au greffe du tribunal de grande instance de Saint-Brieuc le 25 septembre 2015, Mme [J] [Z] a renoncé à la succession de sa mère.
Par actes des 18 décembre 2015 et 26 octobre '2015' (délivré le 26 octobre 2016), le Crédit mutuel a respectivement sommé M. [T] [Z] et Mme [N] [Z], devenue majeure, de prendre parti sur la succession de leur mère.
Par déclarations enregistrées au greffe le 29 août 2017, M. [T] [Z] et Mme [N] [Z] ont à leur tour renoncé à la succession de leur mère.
Par ordonnance du 21 octobre 2021, le président du tribunal judiciaire de Saint-Brieuc a déclaré la succession de [K] [S] vacante et désigné le directeur régional des finances publiques de Bretagne (le DFIP) en qualité de curateur de cette succession.
Corrélativement, l'affaire engagée le 29 juillet 2015 devant le tribunal de grande instance de Saint-Brieuc avait fait l'objet d'un retrait du rôle le 24 mai 2016.
Prétendant qu'à défaut d'avoir renoncé à la succession dans les deux mois de la sommation, M. [T] [Z] et Mme [N] [Z] étaient réputés l'avoir acceptée purement et simplement, le Crédit mutuel les a, par acte du 28 juillet 2017, fait assigner en reprise d'instance.
Par jugement du 12 avril 2019, les premiers juges ont :
constaté que Mme [J] [Z] a valablement renoncé à la succession,
déclaré M. [T] [Z] et Mme [N] [Z] irrecevables en leur exception de péremption d'instance,
constaté la reprise d'instance,
déclaré le Crédit mutuel recevable en son action à l'égard de M. [T] [Z] et Mme [N] [Z] en tant qu'héritiers de [K] [S],
constaté que la créance du Crédit mutuel à l'égard de M. [T] [Z] et Mme [N] [Z] n'est pas prescrite,
condamné solidairement M. [T] [Z] et Mme [N] [Z] à payer au Crédit mutuel la somme de 4 706,40 euros au titre du prêt n° 201, outre les intérêts de retard au taux du prêt majoré de 3 points à compter du 29 juillet 2015,
condamné solidairement M. [T] [Z] et Mme [N] [Z] à payer au Crédit mutuel la somme de 25 928,72 euros au titre du prêt immobilier n° 203, avec intérêt au taux légal à compter du jugement,
ordonné la capitalisation des intérêts dus pour au moins une année entière,
rejeté toute autre demande plus amples ou contraires,
condamné in solidum M. [T] [Z] et Mme [N] [Z] aux dépens.
Mme [N] [Z] et M. [T] [Z] ont relevé appel de ce jugement le 17 mai 2019.
Par acte du 17 février 2022, le Crédit mutuel a fait assigner en intervention forcée devant la cour le DFIP, ès qualités de curateur à la succession de [K] [S].
Mme [N] [Z] et M. [T] [Z] demandent à la cour de :
Avant-dire droit,
enjoindre de communiquer le courrier en date du 16 décembre 2021 reçu de la Direction régionale des finances publiques de Bretagne ;
enjoindre de communiquer la décision judiciaire du 21 octobre 2021 ;
À titre principal,
dire que les sommations de prendre parti sur la succession sont irrégulières,
dire que les déclarations de renonciation à la succession sont opposables à la banque et qu'en conséquence, Mme [N] [Z] et M. [T] [Z] n'ont pas la qualité d'héritiers,
déclarer en conséquence les demandes de la banque à leur encontre irrecevables,
condamner le Crédit mutuel à régler à Mme [N] [Z] et M. [T] [Z] une indemnité de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner le Crédit mutuel aux entiers dépens,
À titre subsidiaire,
dire que l'action du Crédit mutuel est prescrite,
dire que le Crédit mutuel ne justifie pas de créances exigibles à l'encontre de Mme [N] [Z] et M. [T] [Z],
débouter en conséquence le Crédit mutuel de l'ensemble de ses demandes,
déclarer irrecevable la demande en résiliation judiciaire du contrat formée pour la première fois devant la cour,
condamner le Crédit mutuel à régler à Mme [N] [Z] et M. [T] [Z] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,
À titre infiniment subsidiaire,
dire qu'il y aura lieu à substitution de l'intérêt légal au taux contractuel s'agissant du prêt immobilier n° 203.
Le Crédit mutuel conclut quant à lui à la confirmation du jugement attaqué, sauf en ce qu'il a appliqué le taux d'intérêt légal à la condamnation prononcée au titre du prêt immobilier n° 203 et à déclarer la décision à intervenir opposable au DFIP.
Il sollicite à cet égard la condamnation solidaire de M. [T] [Z] et Mme [N] [Z] au paiement de la somme de 27 603,36 euros au titre du prêt immobilier n° 203, outre les intérêts normaux et de retard au taux contractuel depuis le 22 juillet 2015.
Subsidiairement, pour le cas où il serait jugé que la déchéance du terme n'était pas acquise contractuellement pour le prêt immobilier n° 203, prononcer sa résiliation judiciaire à la date du 22 juillet 2015 ou, à tout le moins, constater que la banque est recevable et bien fondée à réclamer à M. [T] [Z] et Mlle [N] [Z] l'ensemble des échéances échues impayées à ce jour et condamner ceux-ci à reprendre le cours des échéances tel que prévu au contrat de prêt.
En tout état de cause, le Crédit mutuel demande à la cour de débouter M. [T] [Z] et Mme [N] [Z] de leurs demandes et de les condamner in solidum au paiement d'une indemnité de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Le DFIP n'a pas comparu devant la cour
Mme [J] [Z] n'a pas été intimée devant la cour.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées pour Mme [N] [Z] et M. [T] [Z] le 9 juin 2022 et pour la Caisse de crédit mutuel de [Localité 4]-Quessoy le 22 juin 2022, l'ordonnance de clôture ayant été rendue à l'audience du 5 juillet 2022 avant l'ouverture des débats.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Sur la qualité d'héritier des appelants
Pour s'opposer aux prétentions du Crédit mutuel, Mme [N] [Z] et M. [T] [Z] soutiennent d'abord que, n'ayant pas encore été sommés de prendre parti sur la succession au moment de l'assignation introductive d'instance du 29 juillet 2015, ils ne pouvaient alors être regardés comme les héritiers de leur mère, que l'assignation en reprise d'instance du 28 juillet 2017 ne saurait avoir couvert les 'irrégularités' de l'assignation initiale, et qu'en toute hypothèse, si la banque a déféré à la sommation de produire l'ordonnance désignant le DFIP en qualité de curateur à la succession de [K] [S], elle s'est abstenue d'agir en rétractation de cette décision constatant pourtant la vacance de la succession.
Il résulte cependant de l'article 724 du code civil que les héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt, de sorte que les enfants de [K] [S] pouvaient être poursuivis par le Crédit mutuel, sauf pour eux à renoncer à la succession.
Dès lors, la circonstance que ce créancier ne les a sommés d'exercer leur droit d'option héréditaire que postérieurement à l'engagement de ses poursuites est inopérante sur la régularité de l'assignation ou la recevabilité de l'action, les héritiers disposant simplement dans ce cas de l'exception dilatoire des articles 108 à 111 du code de procédure civile pour faire l'inventaire de la succession et exercer leur droit d'option.
D'autre part, l'ordonnance constatant la vacance de la succession, rendue le 21 octobre 2021sur requête du Ministère public sans qu'il soit démontré qu'elle ait été signifiée au Crédit mutuel, ne saurait avoir pour effet de priver celui-ci de son droit d'agir en paiement de sa créance, exercé dès le 29 juillet 2015 contre des héritiers réputés acceptant pour ne pas avoir renoncé à la succession dans le délai de deux mois suivant la sommation d'avoir à prendre parti délivrée antérieurement à cette décision.
Les appelants soutiennent encore qu'ils avaient, avant même d'être sommés de prendre parti, exprimé leur intention de renoncer à la succession auprès du notaire chargé de la liquider, ce dont la banque était informée puisque cela ressort du courrier adressé par le notaire au juge des tutelles le 1er septembre 2015 que le Crédit mutuel produit lui-même, et qu'en toute hypothèse le délai d'option héréditaire n'a pu courir avant l'enregistrement de leurs renonciations du 29 août 2017 dès lors que la sommation délivrée à Mme [N] [Z] est irrégulière en ce qu'elle mentionne une date erronée du 26 octobre '2015" et que celle délivrée à M. [T] [Z] ne lui a pas été remise à personne.
Il résulte cependant de l'article 804 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause, que la renonciation à une succession ne se présume pas et doit, pour être opposable aux tiers, être adressée ou déposée au tribunal dans le ressort duquel la succession s'est ouverte, de sorte que, quand bien même les appelants auraient tous deux exprimé leur intention de renoncer à la succession auprès du notaire chargé de la liquider avant même d'être sommés de prendre parti, et quand bien même Mme [N] [Z] aurait régularisé un acte de renonciation dès le 3 décembre 2016, avant l'expiration du délai pour prendre parti de deux mois courant à compter de la sommation du 26 octobre 2016, il demeure que leurs renonciations n'ont été enregistrées au greffe du tribunal de grande instance de Saint-Brieuc que le 29 août 2017 et ne sont donc opposables au Crédit mutuel qu'à compter de cette date.
Si ces circonstances, telles qu'elles ressortent des explications des parties et des pièces produites à la cour, dénotent sans doute l'incurie du notaire, elles sont cependant impropres à priver la banque de son droit de poursuivre ces deux héritiers, légalement réputés avoir accepté la succession.
D'autre part, si la copie de la sommation délivrée à Mme [N] [Z] et conservée par le Crédit mutuel mentionne la date erronée du 26 octobre '2015", l'original de l'acte détenu par l'huissier instrumentaire comporte bien quant à lui une rectification manuscrite de l'année délivrance (2016) et, faute pour elle d'avoir produit l'exemplaire de cet acte qui lui a été adressé par courrier, Mme [Z] ne démontre pas suffisamment l'existence de cette irrégularité.
En tout état de cause, ce vice de forme n'a pu causer aucun grief à son destinataire, dès lors qu'il est expressément mentionné sur la page de l'acte consacrée à ses modalités de remise qu'il a été délivré le 26 octobre 2016 et qu'à cette date, l'huissier instrumentaire a laissé un avis de passage dans la boîte aux lettres et lui a adressé un courrier contenant une copie de celui-ci.
Il s'en évince que, conformément à l'article 114 du code de procédure civile, la nullité de la sommation ne peut prononcée.
Par ailleurs, la signification d'actes de procédure peut être valablement et efficacement effectuée selon les modalités de l'article 656 du code de procédure civile, comme ce fût le cas pour les sommations délivrées les 18 décembre 2015 et 26 octobre 2016 à M. [T] [Z] puis à Mme [N] [Z], dès lors qu'ils n'ont pu être remis à personne ou à domicile en l'absence des destinataires ou d'un tiers présent à leur domicile.
La circonstance que ces actes n'ont pas été remis à personne ne saurait donc avoir eu pour effet de ne pas faire courir le délai d'option héréditaire.
Il se déduit de ce qui précède que Mme [N] [Z] et M. [T] [Z] sont bien héritiers de [K] [S] réputés avoir, à tout le moins à l'égard du Crédit mutuel, accepté la succession de celle-ci, de sorte que la banque est recevable à les poursuivre en paiement de sa créance.
Sur la prescription
Il résulte de l'article L. 218-2 du code de la consommation que l'action en paiement du prêteur exercée contre un consommateur emprunteur au titre d'un prêt se prescrit par deux ans, commençant à courir, s'agissant d'une dette payable par termes successifs, à compter de la date d'exigibilité de chacune des échéances de remboursement impayées et, pour le capital restant après déchéance du terme, à compter de la date de cette dernière.
Étant observé que les premières échéances échues impayées étaient celles d'octobre 2013, l'action, introduite par assignation du 29 juillet 2015, a donc été exercée avant l'expiration de ce délai.
Pour invoquer néanmoins cette fin de non-recevoir en déniant à l'assignation tout effet interruptif de prescription, Mme [N] [Z] et M. [T] [Z] faisaient valoir devant le premier juge la péremption de l'instance ainsi introduite, plus de deux ans s'étant écoulés sans diligences entre le 29 juillet 2015 et l'assignation en reprise d'instance du 28 juillet 2017.
Par des motifs exempts de critiques, le jugement attaqué a cependant pertinemment relevé que la péremption aurait dû, à peine d'irrecevabilité et conformément à l'article 388 du code de procédure civile, être demandée ou opposée avant tout autre moyen, mais qu'en l'espèce Mme [N] [Z] et M. [T] [Z] n'avaient invoqué la péremption de l'instance, au surplus interrompue par l'avènement de la majorité de Mme [N] [Z], née le [Date naissance 2] 1998, qu'à titre subsidiaire, après avoir conclu sur le fond.
Devant la cour, les appelants émettent un doute sur la date de la première échéance échue impayée, la banque prétendant que les mensualités des 10 août et 10 septembre 2013 avaient été honorées alors que [K] [S] était décédée le [Date décès 6] précédent, et soutiennent qu'en toute hypothèse, l'assignation introductive d'instance du 29 juillet 2015 serait sans effet interruptif puisque délivrée avant qu'ils aient été sommés de prendre parti sur la succession et que la déchéance du terme leur ait été notifiée.
Toutefois, à supposer même que les échéances d'août et septembre 2013 aient été prélevées irrégulièrement sur le compte de la défunte qui aurait dû être bloqué, il demeure que l'action a en tout état de cause été introduite le 29 juillet 2015, moins de deux ans après ce premier incident de paiement du 10 août 2013.
Par ailleurs, il résulte des articles 2241 et 2242 du code civil que la demande en justice, même nulle, interrompt le délai de prescription, et que cet effet interruptif produit ses effets jusqu'à l'extinction de l'instance, de sorte que les contestations relatives à la régularité ou à la recevabilité de l'action sont inopérantes sur la présente procédure.
Sur les créances de la banque
Pour s'opposer à la demande en paiement du Crédit mutuel, Mme [N] [Z] et M. [T] [Z] contestent enfin l'exigibilité de ses créances, en faisant valoir que la déchéance du terme, prononcée sans avoir été précédée d'une mise en demeure préalable, serait irrégulière, et que la demande en résiliation judiciaire des prêts, formée pour la première fois en cause d'appel, serait irrecevable comme nouvelle.
Le prêteur fait cependant à juste titre observer que le prêt n° 201 du 12 juin 2009, conclu pour une durée de cinq ans, était arrivé à son terme contractuel le 10 juin 2014.
Ainsi, la totalité des sommes réclamées était exigible lorsque l'assignation du 29 juillet 2015 a été délivrée, sans qu'il y ait eu matière à déchéance du terme.
S'agissant du prêt immobilier n° 203 du 30 novembre 2010, conclu pour une durée de quinze ans, il ressort de l'offre que la banque pouvait se prévaloir de la clause d'exigibilité immédiate de la totalité des sommes dues en cas d'utilisation des fonds non conforme à leur destination et en cas de non-paiement des échéances de remboursement, mais non du décès de l'emprunteur, et il ressort de l'historique du compte que le Crédit mutuel s'est prévalu de la déchéance du terme au 22 juillet 2015 alors que les échéances étaient impayées depuis celle du 10 octobre 2013.
Il est par ailleurs de principe que, si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.
Or, le Crédit mutuel s'est affranchi de cette obligation alors qu'aucune disposition contractuelle ne l'en dispensait, et, contrairement à ce qu'il soutient, son assignation ne saurait valoir mise en demeure dès lors qu'elle réclame aux héritiers de l'emprunteuse la totalité des sommes dues au titre du prêt, sans leur offrir la faculté de régulariser l'arriéré et de reprendre le paiement des mensualités courantes.
En revanche, la banque fait valoir à juste titre que la défaillance dans le remboursement du prêt perdure depuis octobre 2013 et qu'elle est bien fondée à solliciter la résiliation judiciaire du contrat en application de l'article 1184 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause, le paiement des échéances de remboursement à bonne date étant en effet une obligation essentielle de l'emprunteur.
Mme [N] [Z] et M. [T] [Z] soutiennent à tort qu'il s'agirait d'une demande nouvelle irrecevable en cause d'appel, alors que, conformément aux dispositions de l'article 565 du code de procédure civile, elle tend aux mêmes fins que la demande de constatation de la résolution de plein droit du contrat formée devant le premier juge.
Il résulte de l'offre, du tableau d'amortissement et de l'historique du compte qu'il reste dû au Crédit mutuel au titre du prêt n° 201 la somme de 4 706,40 euros correspondant au montant total des échéances échues impayées d' octobre 2013 à juillet 2014 (470,64 euros x 10), avec intérêts au taux contractuel de 4,90 % majoré de trois points.
Il résulte de l'offre, du tableau d'amortissement et de l'historique du compte qu'il reste dû au Crédit mutuel au titre du prêt n° 203 :
4 800,62 euros au titre des échéances échues impayées (218,21 x 22),
22 777,12 euros euros au titre du capital restant dû, soit, au total, 27 577,74 euros, avec intérêts au taux contractuel de 3,68 % à compter de l'arrêté de compte du 22 juillet 2015.
C'est en effet à tort que le premier juge a prononcé condamnation au paiement des intérêts de retard au taux légal, au motif que la contrat ne prévoyait pas de stipulation expresse de maintien des intérêts contractuels postérieurement au décès de l'emprunteur, alors qu'il résultait des conditions générales de l'offre qu'en cas de non-paiement d'une échéance à son terme, le prêteur pouvait exiger le remboursement immédiat de la totalité des sommes dues, celles-ci 'produisant des intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt' et que les héritiers réputés avoir accepté la succession sont tenus de s'acquitter des dettes de la succession.
Mais, c'est aussi à tort que le premier juge a autorisé la capitalisation des intérêts de retard au titre du prêt n° 203, alors qu'il s'agit d'une opération de crédit immobilier soumise aux dispositions de l'article L. 312-23 devenu L. 313-49, aux termes duquel aucune indemnité, ni aucun coût autres que ceux prévu par ce code ne peuvent être mis à la charge de l'emprunteur dans les cas de remboursement par anticipation ou d'exigibilité immédiate.
Il doit enfin être relevé que les deux contrats de prêt comportent une clause aux termes de laquelle 'la créance du prêteur est indivisible et pourra être réclamée à chacun des emprunteurs, à chacune des cautions et à chacun de leurs héritiers'.
Il résulte en outre de l'article 1221, 5° du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause, que le principe de divisibilité des créances à l'égard des héritiers peut être écarté lorsqu'il résulte de l'engagement des contractants que l'obligation contractée est stipulée indivisible.
Dès lors, il convient de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a condamné solidairement M. [T] [Z] et Mme [N] [Z] à payer au Crédit mutuel la somme de 4 706,40 euros au titre du prêt n° 201, avec intérêts de retard au taux du prêt majoré de trois points à compter du 29 juillet 2015 capitalisables par années entières, et, le réformant de ce chef, de les condamner solidairement au paiement de la somme de 27 577,74 euros, avec intérêts au taux contractuel de 3,68 % à compter de l'arrêté de compte du 22 juillet 2015, sans capitalisation des intérêts.
Il n'y a enfin pas matière à application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de quiconque.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :
Confirme le jugement rendu le 12 avril 2019 par le tribunal de grande instance de Saint-Brieuc, sauf en ce qu'il a condamné solidairement M. [T] [Z] et Mme [N] [Z] au paiement de la somme de 25 928,72 euros au titre du prêt immobilier n° 203, avec intérêt au taux légal à compter du jugement et capitalisation de ceux-ci par années entières ;
Prononce la résiliation judiciaire du contrat de prêt n° 203 conclu par offre acceptée le 30 novembre 2010 ;
Condamne solidairement M. [T] [Z] et Mme [N] [Z] à payer à la Caisse de crédit mutuel de [Localité 4]-Quessoy la somme de 27 577,74 euros au titre du prêt immobilier n° 203, avec intérêts au taux contractuel de 3,68 % à compter du 22 juillet 2015 ;
Rejette la demande de capitalisation des intérêts des sommes dues au titre du prêt n° 203 ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne in solidum M. [T] [Z] et Mme [N] [Z] aux dépens d'appel ;
Accorde le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
Rejette toutes autres demandes contraires ou plus amples.
Déclare le présent arrêt opposable au directeur régional des finances publiques de Bretagne, ès qualités de curateur à la succession de [K] [S].
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT