La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/10/2022 | FRANCE | N°21/06583

France | France, Cour d'appel de Rennes, 5ème chambre, 12 octobre 2022, 21/06583


5ème Chambre





ARRÊT N°-296



N° RG 21/06583 - N° Portalis DBVL-V-B7F-SEHD













S.C.I. [Adresse 6]



C/



S.A.R.L. MODULOBOX



















Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours















Copie exécutoire délivrée



le :



à :









<

br>
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 12 OCTOBRE 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie PARENT, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,





G...

5ème Chambre

ARRÊT N°-296

N° RG 21/06583 - N° Portalis DBVL-V-B7F-SEHD

S.C.I. [Adresse 6]

C/

S.A.R.L. MODULOBOX

Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 12 OCTOBRE 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie PARENT, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 22 Juin 2022

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 12 Octobre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

S.C.I. [Adresse 6] Société civile immobilière au capital social de 1.524,49 € immatriculée au RCS de Rennes sous le n° D 325 203 800 agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Marie-Caroline CLAEYS de la SELARL HSA, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉE :

S.A.R.L. MODULOBOX prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Jean-Maurice CHAUVIN de la SELARL CHAUVIN JEAN-MAURICE, Plaidant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Luc BOURGES de la SELARL LUC BOURGES, Postulant, avocat au barreau de RENNES

La SCI [Adresse 6] est propriétaire d'un local d'activité sis [Adresse 7] à usage de stockage et de bureau, d'une superficie de 2 232 m². Par acte en date du 27 juillet 2006, la SCI [Adresse 6] a donné ces locaux à bail commercial à la SARL Modulobox.

Le bail a pour objet la mise à disposition en libre-service auprès des entreprises et des particuliers de surfaces de petites dimensions modulables destinées à l'entreposage, le stockage ou l'archivage de marchandises, matériels ou consommables et accessoire destinés à l'emballage. La sous-location est interdite sans le consentement du bailleur.

En 2008, M. [U], représentant de la SCI [Adresse 6] indique avoir découvert l'existence d'un panneau 'Bureaux à louer' avec un numéro de téléphone à l'entrée des locaux loués à la société Modulobox.

Au mois d'août 2012, M. [U] a constaté que les noms de 17 sociétés figurent sur la boîte aux lettres.

Par constat d'huissier en date du 8 novembre 2012, M. [U] a fait constater que, outre la société Modulobox, cinq autres sociétés occupent les lieux :

- la société Bip-Bip Courses depuis le 15 mars 2010 (bureau),

- la société Quasi Web depuis le 23 avril 2007 (bureau + box),

- la SCI Grimault depuis le 23 avril 2010 (bureau),

- la société Tact Factory depuis le 14 mai 2012 (bureau),

- la société Tyco depuis le 2 octobre 2012.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 14 janvier 2013, la SCI [Adresse 6] a rappelé à son locataire les clauses du bail relatives à la destination des lieux et à l'interdiction de la sous-location en adressant la copie du constat d'huissier dressé le 8 novembre 2012.

La SCI [Adresse 6] a saisi le juge des loyers commerciaux près le tribunal de grande instance de Rennes aux fins de réajustement du montant du loyer pour tenir compte des sous-locations existantes. Elle a notifié un mémoire préalable à la saisine du juge des loyers commerciaux le 19 juin 2013.

Par jugement en date du 15 avril 2014, le juge des loyers commerciaux s'est déclaré incompétent pour connaître du litige et a renvoyé l'affaire devant le tribunal de grande instance de Rennes.

Par jugement en date du 7 mars 2017, le tribunal de grande instance de Rennes a :

- débouté la SCI [Adresse 6] de l'ensemble de ses demandes,

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SCI [Adresse 6] aux entiers dépens.

Ce jugement a été confirmé par arrêt de la cour d'appel de Rennes du 1er juin 2020 qui a ajouté que la demande de la SCI [Adresse 6] est irrecevable comme prescrite.

La SCI [Adresse 6] a formé un pourvoi en cassation à l'encontre de cette décision.

Par arrêt du 9 septembre 2021, la Cour de cassation a cassé l'arrêt de la cour d'appel au motif que « la prescription de l'action en augmentation du loyer en raison de l'existence d'une sous-location commence à courir à compter du jour où le bailleur a connaissance du montant du loyer du sous-bail ».

Le 15 octobre 2021, la cour d'appel a été saisie sur renvoi après cassation.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 8 juin 2022, la SCI [Adresse 6] demande à la cour de :

- infirmer le jugement du 7 mars 2017,

A titre principal,

- constater l'existence de contrats de sous-location portant sur l'ensemble immobilier loué sis [Adresse 7],

- déclarer recevable et bien-fondée son action en réajustement du loyer principal,

- a titre liminaire, condamner la société Modulobox à communiquer à la SCI [Adresse 6], sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par contrat, les pièces suivantes :

* le contrat signé avec la société Identification Système,

* le contrat signé avec la société Grimault Print International (GPI),

* le contrat signé avec la société Edition Populaire,

* le contrat signé avec la société Elucide,

* le contrat signé avec la société Côté Sud,

* le contrat signé avec la société E-import Concept,

* le contrat signé avec la société E boutique Concept (Nom Commercial : « Le Coin Plaisir et « Boutique Chien-Chat »),

* le contrat signé avec la société Emeraude Echafaudage,

- dans l'attente de la communication des pièces ci-dessus visées, fixer à titre provisionnel, le montant du loyer réajusté à la somme de 94 018,15 euros HT/an à compter du 1er janvier 2012,

- juger que le loyer ajusté du fait des sous-locations, s'appliquera également pour le bail renouvelé le 1er janvier 2017,

A titre subsidiaire,

- désigner tel expert qu'il plaira, et dire qu'il aura notamment pour mission de fournir au Tribunal les éléments permettant d'apprécier le bénéfice tiré par le locataire du fait de la sous-location,

A titre infra subsidiaire,

- dire et juger en outre que la société Modulobox a manqué à ses obligations nées du bail,

- dire et juger qu'en conséquence que la société Modulobox doit être condamnée à réparer le préjudice qu'elle a subi, qui doit être évalué à la différence entre la somme 95 074, 20 euros HT et le loyer annuel perçu, depuis le 1er janvier 2012, ou à tout le moins à une perte de change égale à 99 %,

En tout état de cause,

- condamner la société Modulobox à lui payer une somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens qui comprendront ceux de la requête aux fins de désignation d'un huissier ainsi que le coût du constat de maître [E] du 8 novembre 2012,

- débouter la société Modulobox de toutes demandes plus amples ou contraires.

Par dernières conclusions notifiées le 2 juin 2022, la société Modulobox demande à la cour de :

- A titre principal,

- déclarer irrecevable comme prescrite l'action en requalification et en réajustement des loyers de la SCI [Adresse 6],

A titre subsidiaire,

- Si par impossible l'action était déclarée recevable, qualifier les contrats liant la société Modulobox à ses clients de contrats de prestation de services et rejeter la qualification de sous-location,

- déclarer tant irrecevable comme prescrite que mal fondée la demande de

condamnation de la société Modulobox sur le fondement du manquement à ses obligations nées du bail,

- confirmer en conséquence le jugement du tribunal de grande instance de

Rennes en ce qu'il a débouté la SCI [Adresse 6] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

À titre infiniment subsidiaire,

- si par impossible la cour considérait que l'action en revalorisation de loyer fondée sur l'article L.145-31 du code de commerce diligentée par la SCI [Adresse 6] était recevable, constater que cette action ne pourra concerner que le bail conclu pour la période conventionnelle du 1er août 2006 au 31 juillet 2015, et qui s'est poursuivi par tacite prolongation jusqu'au 31 décembre 2016, et pendant ce bail, pour la période postérieure au 19 juin 2013 jusqu'à la fin de ce bail, c'est-à dire le 31 décembre 2016,

- dire qu'en toute hypothèse l'action en revalorisation du loyer pour sous- location prohibée est prescrite pour le bail renouvelé à compter du 1er janvier 2017, faute d'acte interruptif depuis cette date de la prescription biennale de l'article L 145-60 du code de commerce,

- désigner tel expert qu'il plaira aux frais avancés de la SCI [Adresse 6] avec pour mission de fournir à la cour tout élément de nature à justifier d'un éventuel supplément de loyer pour sous-location pour la seule période due,

- dans ce cas, et dans l'attente de ce rapport, réserver les dépens,

En toute hypothèse,

- condamner la SCI [Adresse 6] à lui payer la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens qui seront recouvrés par maître Luc Bourges, Selarl, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 9 juin 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

- Sur la recevabilité de la demande

La SCI [Adresse 6] soutient que sa demande est parfaitement recevable car non prescrite. Elle indique que conformément à l'arrêt de la Cour de cassation, le délai de deux ans prévu par les dispositions de l'article L.145-60 du code de commerce doit courir à compter du jour où elle a connu les conditions financières de la sous-location soit en l'espèce à compter du constat d'huissier du 8 novembre 2012 et que ce délai de deux ans a été interrompu par la notification du mémoire préalable à la saisine du juge des loyers commerciaux le 19 juin 2013.

La société Modulobox rétorque que le délai de deux ans doit courir à compter du 3 novembre 2008 date à laquelle la bailleresse a adressé une lettre recommandée avec accusé de réception pour dénoncer une prétendue sous-location ou à tout le moins au 12 février 2009, date à laquelle la SCI [Adresse 6] avait librement accès aux tarifs proposés pour le service de mise à disposition de bureaux équipés en consultant le site internet de la société Modulobox. Elle produit un constat d'huissier qui relève qu'elle a mis en ligne ses conditions tarifaires de manière accessible et continue jusqu'au 22 octobre 2013.

A titre surabondant, elle expose que le silence du bailleur pendant plus de cinq ans s'analyse comme une renonciation implicite à une demande de réajustement du loyer.

En application des dispositions de l'article L.145-60 du code de commerce toutes les actions exercées en vertu du chapitre 5, relatif au bail commercial, se prescrivent par deux ans.

L'action en réajustement de loyer en raison d'une sous-location présentée par la SCI [Adresse 6] est soumise à la prescription biennale dudit article qui commence à courir à compter du jour où le bailleur a eu connaissance du montant du sous-bail.

La SCI [Adresse 6] justifie avoir eu connaissance des conditions financières de la sous-location qu'elle invoque à compter du constat d'huissier du 8 novembre 2012. Le preneur soutient qu'elle était en mesure de connaître ces conditions financières dès 2009 en consultant son site internet qui mentionnait les tarifs pratiqués. Or le point de départ de la prescription est à la date à laquelle le bailleur a connaissance des conditions financières du sous-bail comme l'a précisé la Cour de cassation dans son arrêt du 9 septembre 2021 qui a censuré la présente cour qui avait relevé que le bailleur, ayant découvert en 2008 la mise en location d'espace de bureaux, pouvait obtenir de son locataire tout renseignement sur les conditions de location. Le point de départ de la prescription ne peut, dès lors, être fixé au jour où le bailleur aurait du ou était en mesure d'en avoir connaissance mais à la date où il en a eu effectivement connaissance soit le 8 novembre 2012, date du constat d'huissier dressé à la demande de la SCI [Adresse 6].

Il est constant que le délai biennal de prescription a été interrompu par la notification du mémoire préalable à la saisine du juge des loyers commerciaux en date du 19 juin 2013.

Par conséquent, l'action en réajustement de loyer de la SCI Thomas est parfaitement recevable.

Il n'y a pas lieu de considérer que le silence du bailleur pendant plus de cinq après la connaissance des sous-locations s'analyse comme une renonciation implicite à une demande de réajustement du loyer dans la mesure où le bailleur a intenté une action judiciaire seulement sept mois après avoir eu connaissance des conditions financières des sous-locations. L'intimée sera déboutée de sa demande à ce titre.

- Sur la demande de constat de l'existence de contrats de sous-locations passés par la société Modulobox dans les locaux loués à son profit par la SCI [Adresse 6]

La SCI [Adresse 6] indique que la juridiction doit donner aux faits et aux actes leur exacte qualification sans s'arrêter à la qualification des contrats conclus par la société Modulobox dénommés 'contrat de prestation de service et de mise à disposition de bureaux'.

Elle soutient que ces contrats conclus par la société Modulobox doivent être qualifiés de sous-location puisque, selon elle, les trois conditions imposées par l'article 1709 du code civil sont réunies. A cet égard, elle argue que les clients de la société Modulobox se voient mettre à leur disposition des locaux à titre exclusif et que l'objet principal du contrat est la mise à disposition de bureaux en contrepartie du versement d'une redevance. Elle ajoute que les prestations comprises dans le montant de la redevance constituent des charges locatives accessoires aux locaux qui ne peuvent, selon elle, être qualifiées de prestations de services. Elle conteste le fait que l'activité de mise à disposition de bureaux est connexe ou complémentaire à l'activité de la société Modulobox qui est relative à la location de box de stockage. Elle demande de voir constater l'existence de plusieurs contrats de sous-locations portant sur les locaux loués par la société Modulobox à la SCI [Adresse 6].

En réponse, la société Modulobox conteste l'action en requalification du bailleur des contrats de prestations de services qu'elle a passés avec ses clients en contrats de sous-locations et soutient qu'aucune des conditions fixées par la jurisprudence en application des dispositions de l'article 1709 du code civil n'est remplie en l'espèce.

Elle indique que la mise à disposition des locaux qu'elle fournit à ses clients présente un caractère temporaire et précaire comme dans le cadre d'un centre d'affaires et que la jouissance des locaux à ses clients n'est pas exclusive en ce qu'elle garde à sa charge l'assurance, l'entretien des locaux, l'installation et le suivi des équipements, le contrôle de l'accueil et de la sécurité et le fonctionnement des moyens matériels. Elle ajoute que sa rémunération ne résulte pas de la seule mise à disposition de l'immeuble mais est le fruit de son activité qui ne peut être assimilée à un sous-loyer mais au prix d'une prestation de services globale et forfaitaire.

Aux termes des dispositions de l'article 1709 du code civil, 'le louage des choses est un contrat par lequel l'une des parties s'oblige à faire jouir l'autre d'une chose pendant un certain temps, et moyennant un certain prix que celle-ci s'oblige de lui payer'.

Le contrat de bail commercial conclu entre la SCI [Adresse 6] et la société Modulobox en date du 27 juillet 2006 désigne comme bien loué : un local d'activité de 2 232 m2 environ comprenant une partie stockage d'environ 2 000 m2 et une partie bureau sur deux niveaux. Il indique à titre de destination : 'le bien loué devra servir exclusivement à usage de mise à disposition en libre service auprès des entreprises et des particuliers des surfaces de petites dimensions modulables destinées à l'entreposage, le stockage ou l'archivage de marchandises, matériels ou documents administratifs, commercialisation de tous produits consommables et accessoires destinés à l'emballage. Le locataire ne pourra exercer dans les lieux loués, même à titre temporaire, aucune autre activité'. Le présent bail est consenti moyennant un loyer annuel de 56 000 euros HT.

S'agissant de l'identification des parties, la société Modulobox est inscrite au registre du commerce et des sociétés sous le code NAF 5210 B 'entreposage et stockage non frigorifique'.

Il est constant que des bureaux sont mis à disposition d'entreprises tiers au contrat de bail par la société Modulobox dans les locaux loués dans le cadre du bail commercial. Les parties s'opposent sur la qualification de la nature de ces contrats, le bailleur considère qu'il s'agit de sous-locations alors que le preneur indique qu'il s'agit de contrats de prestation de services.

Au vu du constat d'huissier dressé le 8 novembre 2012 à la demande de la SCI [Adresse 6], il apparaît qu'occupent les lieux en plus de la société Modulobox, cinq sociétés dont quatre d'entre elles n'occupent qu'un bureau, seule une société occupant un bureau et un box. Au vu des contrats et factures joints au constat d'huissier, il apparaît que le contrat de mise à disposition d'un bureau au profit d'une entreprise mentionne précisément le numéro de bureau qui lui est affecté ainsi que sa surface.

Ce contrat prévoit une contrepartie financière qui est fixée notamment en fonction de la superficie du bureau et pas seulement par la prestation de services. En effet, les bons de commande mentionnent comme libellé de la prestation Modulobox 'prestations de services et mise à disposition du bureau de 14m2 par mois' s'agissant par exemple du bon de commande [Localité 5] étant précisé que les bons de commande produits sont tous rédigés sur le même modèle.

Ce contrat indique que les entreprises ayant souscrit le contrat ont accès à leur bureau sept jours sur sept et vingt quatre heures sur vingt quatre, qu'elles s'engagent à le maintenir dans un bon état d'entretien et en assurent la fermeture. S'agissant de la durée des contrats de mise à disposition, elle est fixée à un mois mais renouvelable par tacite reconduction. Le constat d'huissier établit que la société Bip Bip Courses occupe les locaux depuis le 15 mars 2010, la société Quasi Web depuis le 23 avril 2007, la SCI Grimault depuis le 23 avril 2010, la société Tact Factory depuis le 14 mai 2012 et la société Tyco depuis le 2 octobre 2012. Cette mise à disposition ne peut ainsi être qualifiée de temporaire et précaire comme tente de le soutenir la société Modulobox. Au contraire, il résulte de ces éléments que les entreprises ayant conclu le contrat de mise à disposition avec la société Modulobox disposent d'une jouissance exclusive du bureau qu'elles louent sans limitation dans le temps.

Il en résulte que la prestation essentielle du contrat passé avec la société Modulobox est bien la mise à disposition de bureaux et non la fourniture de prestations. Les prestations fournies comme l'entretien, l'accueil et la sécurité, l'assurance et la wifi ne sont, en l'espèce, que des prestations accessoires à la fourniture de bureaux.

Par ailleurs, il apparaît que la mise à disposition de bureaux n'entre pas dans le champs de l'activité de la société Modulobox. En effet, il a été précédemment indiqué qu'elle était inscrite, au moment de la conclusion du bail commercial, au registre du commerce et des sociétés sous le code NAF 5210 B 'entreposage et stockage non frigorifique'. La SCI [Adresse 6] produit les statuts de la société Modulobox qui définissent l'objet social de la société comme 'la mise à disposition en libre-service auprès des entreprises et des particuliers de surfaces de petite dimension modulables destinées à l'entreposage, le stockage ou l'archivage de marchandises, matériels ou documents administratifs. La commercialisation de tous produits consommables et accessoires destinés à l'emballage : cartons, adhésifs, films de matière plastique, etc. La création, l'acquisition, l'exploitation, la vente, la prise en gérance libre de tous fonds de commerce et d'industrie se rattachant directement à l'objet de ceux-ci. Et généralement toutes opérations financières, commerciales, industrielles, mobilières et immobilières pouvant se rattacher directement ou indirectement à l'objet ci-dessus ou à tous les objets similaires ou connexes, de nature à favoriser son développement et son extension'.

L'objet social de la société ne comprend en aucun cas la mise à disposition de bureaux avec prestations. La société Modulobox soutient qu'elle doit être assimilée à un centre d'affaires et verse aux débats une copie d'une page d'écran de son site internet mentionnant la mise à disposition de bureaux or cette activité mise en avant sur son site internet ne correspond nullement à son activité déclarée au registre du commerce et des sociétés. Il convient de relever que la société Modulobox n'a pas produit d'extrait K-Bis récent ou de modification de statuts relative à son objet social.

L'activité de mise à disposition de bureaux ne peut pas être non plus considérée comme une activité connexe ou complémentaire de son activité principale de mise à disposition de lieux de stockage. En effet, comme le relève à juste titre l'appelant dans ses écritures, cela concerne deux activités différentes qui reposent sur des aménagements et des modes d'exploitation distincts et sont pratiquées de manière indépendante. Le constat d'huissier précité avait d'ailleurs relevé que seule une des entreprises utilisatrices des bureaux mis à disposition utilisaient également un box. En tout état de cause, il n'est pas contesté que la société Modulobox n'a formé aucune demande de déspécialisation ni sollicité l'autorisation de son bailleur.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, il convient de constater l'existence de plusieurs contrats de sous-locations portant sur les lieux loués par la SCI [Adresse 6] à la société Modulobox. Le jugement sera ainsi intégralement réformé.

- Sur l'action en réajustement de loyers

La SCI [Adresse 6] demande de voir condamner la société Modulobox à lui communiquer sous astreinte de 100 euros par jour de retard les huit contrats souscrits et dans l'attente de la communication de fixer à titre provisionnel le montant du loyer réajusté à 94 018,15 euros HT/ an à compter du 1er janvier 2012 ou à titre subsidiaire de désigner un expert pour déterminer le bénéfice tiré par la locataire du fait de sa sous-location.

La société Modulobox n'a pas répondu sur la demande de production de pièces sous astreinte. Elle s'oppose à cette action en réajustement de loyers. A titre subsidiaire, elle demande de voir limiter cette action au bail conclu pour la période du 1er août 2006 au 31 juillet 2015 et pour ce bail de retenir comme date la période postérieure au 19 juin 2013 correspondant à la date de l'action engagée par le bailleur et jusqu'au 31 décembre 2016. Elle précise que le bail a été renouvelé le 1er janvier 2017 sans que le bailleur n'ait formulé la moindre demande.

Elle demande de voir ordonner une expertise pour apprécier le bien fondé du quantum des demandes de revalorisation du loyer proposée par le bailleur.

Aux termes des dispositions de l'article L.145-31 alinéa 3 du code de commerce : 'lorsque le loyer de la sous-location est supérieur au prix de la location principale, le propriétaire a la faculté d'exiger une augmentation correspondante du loyer de la location principale, augmentation qui, à défaut d'accord, entre les parties, est déterminée selon une procédure fixée par décret en conseil d'Etat en application des dispositions de l'article L.145-56 du code de commerce'.

La SCI [Adresse 6] indique que le loyer actuel est de 67 978,15 euros HT par an. Elle justifie par la production des contrats de mise à disposition de bureaux auprès de cinq entreprises figurant dans le constat d'huissier versé aux débats que la société perçoit une somme de 2 712 euros HT par mois soit 32 544 HT par an pour 217 m2 soit un prix au m2 de 150 euros/m2/an. La société Modulobox ne conteste pas ces éléments et n'a produit aucune pièce sur le montant des loyers perçus ni aucun élément chiffré sur son activité de mise à disposition de bureaux.

Compte tenu de ces éléments et de l'ancienneté des faits, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de production de pièces sous astreinte sollicitée par le bailleur. Il convient de fixer le montant du loyer réajusté au vu des éléments produits à la somme de 94 018,15 euros HT (67 978,15 euros HT + 120 euros x 217 m2) par an tel que sollicité par le bailleur mais pour la période du 19 juin 2013, date à laquelle la SCI [Adresse 6] a initié son action au 31 décembre 2016 puisqu'il est constant que lors du renouvellement du bail le 1er janvier 2017, la SCI [Adresse 6] n'a formulé aucune demande.

- Sur les frais irrépétibles

Succombant, la société Modulobox sera condamnée à verser la somme de 3 000 euros à la SCI [Adresse 6] au titre des frais irrépétibles de première instance et en cause d'appel ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et en cause d'appel qui comprendront le coût du constat d'huissier de maître [E] du 8 novembre 2012. Le jugement sera ainsi réformé.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,

Déboute la société Modulobox de sa demande de fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action en réajustement de loyers engagée par la SCI [Adresse 6] ;

Déclare recevable de l'action en réajustement de loyers engagée par la SCI [Adresse 6] ;

Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Constate l'existence de contrats de sous-location portant sur le bien immobilier loué par la SCI [Adresse 6] à la société Modulobox sis zone d'activités des basses forges à Noyal-Sur-Vilaine ;

Fait droit à la demande de réajustement du loyer principal engagée par la SCI [Adresse 6] ;

Fixe le montant du loyer réajusté à la somme de 94 018,15 euros HT par an pour la période du 19 juin 2013 au 31 décembre 2016 ;

Condamne la société Modulobox à payer à la SCI [Adresse 6] la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et en cause d'appel ;

Condamne la société Modulobox aux entiers dépens de première instance et en cause d'appel qui comprendront le coût du constat d'huissier de Me [E] du 8 novembre 2012 ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes, fins et conclusions.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21/06583
Date de la décision : 12/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-12;21.06583 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award