La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/10/2022 | FRANCE | N°19/04600

France | France, Cour d'appel de Rennes, 2ème chambre, 07 octobre 2022, 19/04600


2ème Chambre





ARRÊT N° 512



N° RG 19/04600 - N° Portalis DBVL-V-B7D-P5NT





(2)







M. [J] [R]

Mme [X] [K]



C/



SA CIC OUEST



















Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours















Copie exécutoire délivrée



le :



à :

- Me Sylvie PELOIS
>-Me Jean-Paul RENAUDIN











RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 07 OCTOBRE 2022



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseil...

2ème Chambre

ARRÊT N° 512

N° RG 19/04600 - N° Portalis DBVL-V-B7D-P5NT

(2)

M. [J] [R]

Mme [X] [K]

C/

SA CIC OUEST

Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Sylvie PELOIS

-Me Jean-Paul RENAUDIN

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 07 OCTOBRE 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,

Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,

GREFFIER :

Mme Aichat ASSOUMANI, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 28 Juin 2022

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 07 Octobre 2022 par mise à disposition au greffe

****

APPELANTS :

Monsieur [J] [R]

né le [Date naissance 4] 1968 à [Localité 7] (44)

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représenté par Me Sylvie PELOIS de la SELARL AB LITIS / PÉLOIS & AMOYEL-VICQUELIN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

Madame [X] [K]

née le [Date naissance 2] 1969 à [Localité 5] (44)

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Sylvie PELOIS de la SELARL AB LITIS / PÉLOIS & AMOYEL-VICQUELIN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉE :

SA CIC OUEST

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Jean-Louis VIGNERON de la SELARL ASKE 3, Plaidant, avocat au barreau de NANTES

Représentée par Me Jean-Paul RENAUDIN de la SCP GUILLOU-RENAUDIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES

2

EXPOSÉ DU LITIGE :

Par acte sous seings privés du 18 juin 2015, la société Idées gourmandes a ouvert un compte courant professionnel dans les livres de la Banque CIC Ouest (le CIC Ouest).

Par acte sous seings privés du 25 juin 2015, la société Idées gourmandes a souscrit auprès de la Banque CIC Ouest un prêt professionnel d'un montant de 270 000 euros remboursable en 89 mensualités au taux nominal de 1,49% l'an.

Aux termes du même acte, Mme [X] [K] et M. [J] [R] se sont portés, cautions solidaires des engagements de l'emprunteuse dans la limite de la somme de 135 000 euros.

Par acte sous seings privés du 25 juin 2015 Mme [K] et M. [R] se sont également portés cautions de tous les engagements de la société Idées gourmandes dans la limite de la somme de 60 000 euros.

La société Idées gourmandes a été placée en redressement judiciaire le 13 janvier 2016 puis en liquidation judiciaire le 10 février 2016.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 1er mars 2016, la Banque CIC Ouest a mis en demeure les cautions de lui payer la somme de 135 000 euros au titre du prêt et la somme de 10 291,63 euros au titre du solde du compte courant.

La mise en demeure s'étant révélée infructueuse, la Banque CIC Ouest a fait assigner Mme [K] et M. [R] devant le tribunal de grande instance de Nantes qui par jugement du 28 mai 2019 et avec exécution provisoire a:

Condamné Mme [X] [K] et M. [J] [R] solidairement à payer à la société Banque CIC Ouest la somme de 142 872,02 euros avec intérêts au taux légal à compte du 7 avril 2016 ;

Dit que les intérêts échus pour une année entière produiront intérêts dans les conditions prévues à l'article 1343-2 du code civil ;

Rejeté la demandes de délais de paiement.

Condamné Mme [X] [K] et M. [J] [R] in solidum aux dépens de l'instance avec recouvrement direct dans les conditions prévues à l'article 699 du code de procédure civile.

Dit n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Mme [K] et M. [R] sont appelants du jugement et par dernières conclusions notifiées le 18 février 2020 ils demandent de :

- Débouter le CIC Ouest de toutes ses demandes,

Subsidiairement,

- Octroyer à M. [R] et à Mme [K] un délai de grâce de deux ans pour leur permettre d'apurer la créance dont ils seraient éventuellement reconnus redevables envers le CIC Ouest,

- Dire et juger que les intérêts sur la somme ainsi reportée ne pourront excéder le taux d'intérêt légal,

- Débouter le CIC Ouest de toutes ses demandes plus amples ou contraires,

- Débouter le CIC Ouest de toutes ses demandes, fins et prétentions.

- Condamner le CIC Ouest au paiement de la somme de 800,00 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile au profit de M. [R] et Mme [K],

- Condamner le CIC Ouest aux entiers dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 17 mars 2020, le CIC Ouest demande confirmation du jugement et la condamnation de M. [R] et Mme [K] au paiement d'une somme de 6 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions visées.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 avril 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

M. [R] et Mme [K] sollicitent l'infirmation du jugement en soutenant que les cautionnements donnés étaient manifestement disproportionnés à leurs engagements.

Par application des dispositions de l'article L. 341-4 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la date des engagements litigieux, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

Il appartient à la caution de rapporter la preuve de la disproportion à la date de son engagement.

Il ressort des pièces produites qu'antérieurement à la souscription des engagements de caution, M. [R] et Mme [K] avaient établi le 22 avril 2015 une fiche de renseignements patrimoniaux dont il ressort qu'ils vivaient en union libre ; qu'ils ont déclaré des revenus annuels de 26 000 euros par an pour M. [R] et 24 000 euros pour Mme [K] outre des revenus locatifs de 1 400 euros par mois et les allocations familiales pour leurs 3 enfants communs.

A titre de charges, ils ont déclaré un loyer de 1 500 euros par mois.

M. [R] et Mme [K] ont fait état de l'existence de cautionnements donnés antérieurement au profit de la BNP en garantie d'engagements de la société Idées gourmandes tout en précisant que ces engagements venaient à échéance au mois de juin 2015, de sorte qu'ils n'avaient plus de charges à ce titre à la date de leurs cautionnements.

Au titre de leur patrimoine immobilier, ils ont déclaré la propriété d'un immeuble d'habitation acquis en 1997 d'une valeur estimée à la somme de 350 000 euros et détenu en indivision à concurrence de 63 % pour M. [R] et 37 % pour Mme [K].

L'immeuble a été vendu pour la somme de 250 000 euros le 5 janvier 2016.

S'agissant de Mme [K], il sera constaté que son patrimoine à la date de ses engagements de caution se limitaient à 37 % de la valeur de l'immeuble indivis soit une somme maximale de 129 500 euros en tenant compte de l'estimation de 350 000 euros retenue lors de l'établissement de la fiche patrimoniale.

Les revenus du ménage n'excédant pas de manière significative les charges courantes du couple compte tenu notamment de leurs charges de famille, il apparaît que les cautionnements donnés par Mme [K] pour un total de 195 000 euros étaient à la date de la souscription disproportionnés à ses biens et revenus.

Mme [K] a été appelée à exécuter son engagement de caution par assignation délivrée le 7 avril 2016.

Il sera constaté qu'à cette date l'immeuble indivis avait été vendu pour la somme de 250 000 euros suivant acte du 5 janvier 2016 soit 240 000 euros nets vendeurs.

Mme [K] et M. [R] ne justifient aucunement de l'emploi qu'ils auraient fait des fonds ainsi perçus entre le 5 janvier et le 7 avril 2016 de sorte qu'il sera retenu qu'ils disposaient toujours de cette somme à la date où ils ont été appelés.

Au regard de ses droits dans l'immeuble, le patrimoine de Mme [K] à la date où elle a été appelée s'élevait à la somme de 88 800 euros soit une somme ne lui permettant pas de faire face aux obligations résultant des cautionnements souscrits le 25 juin 2015 pour un total supérieur à 140 000 euros.

Les engagements de Mme [K] étant disproportionnés à ses biens et revenus et son patrimoine à la date à laquelle elle a été appelée ne lui permettant pas de faire face à ces obligations, le CIC Ouest sera débouté de ses demandes à son encontre et le jugement sera infirmé de ce chef.

S'agissant de M. [R] sur la base de l'estimation de 350 000 euros et de droits indivis pour 67 %, la valeur de son patrimoine à la date de souscription de ses engagements de caution s'élevait à la somme de 220 500 euros soit une somme supérieure à la valeur de ses engagements de cautions qui n'apparaissaient pas dès lors disproportionnés.

Il sera néanmoins constaté que l'immeuble a été vendu pour une somme de 250 000 euros suivant compromis du 20 octobre 2015 de sorte que compte tenu de la proximité des dates de vente et des cautionnements, il pourra être retenu que ce prix de vente correspond à la valeur réelle de l'immeuble à la date des cautionnements.

Il en résulte que la valeur du patrimoine de M. [R] à la date des cautionnements s'établissait à la somme de 157 500 euros manifestement disproportionnée à ses engagements de caution souscrits pour la somme de 195 000 euros.

Il conviendra cependant de constater que pas davantage que Mme [K], M. [R] ne justifie de l'emploi des fonds perçus en suite de la régularisation de la vente par acte authentique du 5 janvier 2016 et lui ayant procuré une somme de 151 200 euros. Il apparaît dès lors qu'il disposait des fonds lui permettant de faire face à la somme de 145 291,63 euros qui lui était réclamée par assignation du 7 avril 2016 de la banque en exécution des obligations résultant de ses cautionnements. M. [R] ne saurait sur ce point utilement se prévaloir de l'emploi des capitaux qu'il a pu faire postérieurement à cette date.

M. [R] sera en conséquence condamné à exécuter les engagements de caution souscrits le jugement étant confirmé sur ce point.

S'agissant des sommes dues, la banque admet ne pouvoir prétendre au paiement des intérêts conventionnels faute d'être en mesure de justifier avoir accompli son obligation d'information annuelle et demande confirmation du jugement qui après imputation des intérêts versés par le débiteur sur le montant des cautionnements, a retenu que les cautions restaient devoir la somme de 133 387,19 euros au titre du cautionnement de l'emprunt et la somme de 9 484,83 euros au titre du solde débiteur du compte.

M. [R] sollicite l'infirmation du jugement en faisant valoir que si la banque a produit la décision d'admission de sa créance au passif de la liquidation au titre de l'emprunt, elle n'en a produit aucune au titre du solde débiteur de compte ; que par ailleurs elle ne justifie pas des sommes ayant pu être perçues dans le cadre de la procédure collective ou par suite de l'intervention de la société BPI France qui garantissait le remboursement de l'emprunt à hauteur de 50 %.

Le CIC Ouest expose qu'il n'a perçu aucune somme dans le cadre de la procédure collective et fait valoir que la garantie de la société BPI France est subsidiaire et instaurée à son seul profit après épuisement des voies de recours. Il convient en tout état de cause de constater que la garantie de la société BPI France est limitée à 50 % des sommes dues en exécution de l'emprunt et que dans la mesure où il est constant que la créance de la banque au titre de cet emprunt a été admise au passif pour la somme de 277 662,86 euros à titre privilégié et il est dès lors manifeste que l'intervention de cet organisme n'est pas susceptible d'affecter les sommes susceptibles d'être réclamées aux cautions.

S'agissant du compte courant, s'il est constant que le CIC Ouest a déclaré sa créance au passif le 1er mars 2016 sans justifier d'une décision d'admission, il n'est pas contesté que cette absence de production résulte de la décision de dispense de vérification du passif chirographaire prise conformément aux dispositions de l'article L. 641-4 du code de commerce.

Il sera constaté qu'à l'appui de sa réclamation, la banque produit aux débats, les relevés du compte courant de la société Idées gourmandes arrêtés au 18 janvier 2016 établissant ainsi le bien fondé de sa réclamation.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu après déduction des intérêts compte tenu de la déchéance encourue par la banque, que cette dernière était fondée en sa réclamation d'une somme de 9 484,83 euros.

M. [R] qui a la charge de la preuve de ce qu'il est libéré de ses obligations ne fournit aucun élément de nature à contredire la banque qui précise qu'elle n'a perçu aucune somme de la procédure de liquidation de la société Idées gourmandes.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné M. [R] au paiement au titre des cautionnements donnés.

Compte tenu de l'ancienneté de la créance et des délais dont M. [R] a d'ores et déjà disposé pour s'en acquitter, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de délais de paiement.

Le CIC Ouest succombant en ses demandes formées contre Mme [K], sera condamné aux dépens de la mise en cause de Mme [K] et à lui payer une somme de 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement sera confirmé en ses autres dispositions non critiquées.

M. [R] sera condamné aux surplus des dépens sans qu'il y ait lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit du CIC Ouest.

PAR CES MOTIFS :

Infirme le jugement rendu le 28 mai 2019 par le tribunal de grande instance de Nantes en ce qu'il a condamné Mme [X] [K] à payer à la banque CIC Ouest la somme de 142 872,02 euros avec intérêts au taux légal à compte du 7 avril 2016 ainsi qu'aux dépens de l'instance.

Statuant à nouveau,

Déboute la banque CIC Ouest de ses demandes à l'encontre de Mme [X] [K].

Condamne la banque CIC Ouest aux dépens de la mise en cause de Mme [K] et à payer à celle-ci une somme de 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Confirme le jugement pour le surplus.

Condamne M. [R] aux dépens d'appel.

Accorde le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19/04600
Date de la décision : 07/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-07;19.04600 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award