2ème Chambre
ARRÊT N° 509
N° RG 19/04359 - N° Portalis DBVL-V-B7D-P4TA
(1)
Mme [H] [B]
M. [U] [T]
C/
SA CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE BRETAGNE - PAYS DE LOIRE
Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
- Me Olivier COUESPEL DU MESNIL
-Me Bruno CRESSARD
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 07 OCTOBRE 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,
Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,
GREFFIER :
Mme Aichat ASSOUMANI, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 28 Juin 2022
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 07 Octobre 2022 par mise à disposition au greffe
****
APPELANTS :
Madame [H] [B]
née le [Date naissance 1] 1955 à [Localité 7]
Lieu dit [Localité 8]
[Localité 3]
Représentée par Me Olivier COUESPEL DU MESNIL de la SELARL CM AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VANNES
Monsieur [U] [T]
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représenté par Me Olivier COUESPEL DU MESNIL de la SELARL CM AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VANNES
INTIMÉE :
CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE BRETAGNE - PAYS DE LOIRE
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentée par Me Bruno CRESSARD de la SELARL CRESSARD & LE GOFF, AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
2
EXPOSÉ DU LITIGE :
Par contrats du 28 août 2012, la Caisse d'épargne et de prévoyance Bretagne-Pays de Loire (la Caisse d'épargne) a, en vue de financer les besoins en fonds de roulement de l'entreprise, consenti à la société HS Immo un prêt n° 077 de 42 000 euros au taux de 4,90 % l'an, remboursable en 36 mensualités de 1 258,02 euros hors assurance.
Par actes sous signature privée du même jour annexés au contrat, Mme [H] [B] épouse [T], gérante de la société emprunteuse, et M. [U] [T], son conjoint, se sont portés cautions solidaires de ce prêt dans la limite de 54 600 euros.
D'autre part, par un second contrat du 28 août 2012, la Caisse d'épargne a, en vue de financer le remboursement d'un concours antérieur, consenti à la société HS Immo un prêt n° 325 de 18 000 euros au taux de 4,96 % l'an, remboursable en 36 mensualités de 539,15 euros hors assurance.
Par actes sous signature privée du même jour annexés au contrat, les époux [T] se sont portés cautions solidaires de ce prêt dans la limite de 23 400 euros.
Par jugement du 24 octobre 2012, le tribunal de commerce de Vannes a prononcé la liquidation judiciaire de la société HS Immo.
Le prêteur a déclaré ses créances devenues irrécouvrables selon certificat du liquidateur du 2 juillet 2013, et, après avoir mis les cautions en demeure d'honorer leurs engagements par lettres recommandées avec accusé de réception du 7 décembre 2012, il les a, par acte du 1er décembre 2016, fait assigner en paiement devant le tribunal de grande instance de Vannes.
Les cautions ont invoqué la nullité de l'assignation et la disproportion de leurs engagements.
Par jugement du 15 janvier 2019, le premier juge a :
rejeté l'exception de nullité de l'assignation,
déclaré les engagements de cautions des époux [T] valables,
condamné les époux [T] à payer à la Caisse d'épargne les sommes de :
44 218,74 euros au titre du prêt n° 077 arrêtés au 24 octobre 2012, outre intérêts au taux contractuel majoré de 5 points et capitalisation de ceux-ci annuellement,
19 050,12 euros au titre du prêt n° 325, somme arrêtée au 24 octobre 2012, outre intérêts au taux contractuel majoré de 5 points et capitalisation de ceux-ci annuellement,
condamné les époux [T] à payer à la Caisse d'épargne une indemnité de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné les époux [T] aux dépens,
prononcé l'exécution provisoire.
Les époux [T] ont relevé appel de cette décision le 1er juillet 2019.
Par ordonnance du 15 mai 2020 confirmée, sur déféré, par arrêt du 20 novembre 2020, le conseiller de la mise en état a déclaré l'appel formé par M. [T] irrecevable comme tardif.
Les époux [T] avaient préalablement conclu le 30 septembre 2019, pour demander à la cour de :
réformer le jugement attaqué,
in limine litis, dire que les assignations délivrées à la requête de la Caisse d'épargne aux époux [T] sont nulles,
dire que les engagements de caution étaient manifestement disproportionnés et que la banque ne peut s'en prévaloir,
débouter en conséquence la Caisse d'épargne de toutes ses demandes,
condamner la Caisse d'épargne au paiement d'une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions du 6 avril 2022, la Caisse d'épargne demande quant à elle à la cour
de :
rappeler que l'appel de M. [T] a été déclaré irrecevable,
confirmer le jugement attaqué dans ses dispositions concernant Mme [T],
y ajoutant, condamner Mme [T] au paiement d'une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées pour Mme [T] le 30 septembre 2019 et pour la Caisse d'épargne le 6 avril 2022, l'ordonnance de clôture ayant été rendue le 14 avril 2022.
EXPOSÉ DES MOTIFS :
Par ordonnance du 15 mai 2020 confirmée sur déféré par arrêt du 20 novembre 2020, le conseiller de la mise en état a déclaré l'appel formé par M. [T] irrecevable comme tardif.
Cette décision a, conformément à l'article 914 du code de procédure civile, autorité de chose jugée au principal, de sorte que la procédure d'appel ne se poursuit que dans les rapports entre la Caisse d'épargne et Mme [T].
À cet égard, Mme [T] prétend d'abord que l'assignation introductive d'instance serait nulle, au motif qu'elle ne viserait aucun fondement juridique et ne comporterait pas certaines mentions obligatoires relatives aux règles de la postulation territoriale des avocats.
Sur ce dernier point, l'appelante ne précise pas quelles mentions prévues à peine de nullité de l'acte seraient manquantes, et, s'agissant de l'indication du fondement juridique de la demanderesse, il sera observé que l'assignation vise expressément l'article 1134 du code civil et précise clairement l'objet de la demande, à savoir la condamnation solidaire des époux [T] en leur qualité de cautions au titre des prêts n° 077 et 325.
Le texte visé ne pouvait être que celui en vigueur avant le 1er octobre 2016, au regard de la date des contrats en cause, de sorte que c'est donc à juste titre que le premier juge a relevé que l'assignation contenait les moyens qui ont pu valablement être développés et débattus au cours l'instance.
Au surplus, l'appelante ne démontre pas avoir subi le moindre grief en lien causal avec les prétendues irrégularités alléguées, ayant été à même de constituer avocat en temps utile et de présenter ses moyens de défense devant le tribunal de grande instance puis devant la cour.
Il convient donc de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a rejeté cette exception de procédure.
Par ailleurs, il résulte de l'article L. 341-4 devenu L. 332-1 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la cause qu'un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution ne lui permette de faire face à ses obligations au moment où elle est appelée.
Cependant, les époux [T] ont établi le 13 juillet 2012 une fiche de renseignements patrimoniaux, de laquelle il ressort qu'ils sont mariés sous le régime de la séparation des biens, que les revenus de l'épouse étaient de 21 600 euros par an, le mari déclarant un revenu annuel de 24 000 euros par an, et que le couple devait assumer la charge de remboursement d'un prêt immobilier et d'un crédit automobile pour une charge mensuelle de remboursement de 2 275 euros (1 600 + 675) et était propriétaire une maison d'habitation estimée à 500 000 euros, sa valeur nette après déduction du capital restant dû sur le crédit immobilier ayant financé son acquisition étant de 305 000 euros.
La banque n'avait pas, sauf anomalie apparente inexistante en l'occurrence, à vérifier l'exactitude et l'exhaustivité de ces déclarations, dès lors que les cautions avaient été explicitement interrogées sur l'ensemble des éléments de leur actif et de leur passif patrimonial tels qu'ils apparaissaient au moment de leur engagement de caution.
Il s'en déduit que, même au regard des seuls droits de Mme [T] sur l'immeuble indivis, ses engagements de caution, consentis dans la limite globale de 78 000 euros (54 600 + 23 400), n'étaient pas manifestement disproportionnés à ses biens et à ses revenus.
Pour ces motifs et ceux, non contraires, du premier juge, il convient de déclarer que la Caisse d'épargne peut se prévaloir de ces engagements de caution.
Le jugement attaqué sera donc confirmé en tous points, sauf à préciser que les condamnations prononcées s'entendent dans la limite, en principal et intérêts contractuels de retard, de 54 600 euros au titre du prêt n° 077 et de 23 400 au titre du prêt n° 325.
Il serait enfin inéquitable de laisser à la charge de la Caisse d'épargne l'intégralité des frais exposés par elle à l'occasion de l'instance d'appel et non compris dans les dépens, en sorte qu'il lui sera alloué une somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :
Statuant dans les limites de l'instance d'appel opposant la Caisse d'épargne et de prévoyance Bretagne-Pays de Loire à Mme [H] [B] épouse [T],
Confirme le jugement attaqué en toutes ses dispositions concernant Mme [H] [B] épouse [T], sauf à préciser que les condamnations prononcées s'entendent dans la limite, en principal et intérêts contractuels de retard, de 54 600 euros au titre du prêt n° 077 et de 23 400 au titre du prêt n° 325 ;
Condamne Mme [H] [B] épouse [T] à payer à la Caisse d'épargne et de prévoyance Bretagne-Pays de Loire une somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile;
Condamne Mme [H] [B] épouse [T] aux dépens d'appel.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT