4ème Chambre
ARRÊT N° 319
N° RG 21/03503
N° Portalis DBVL-V-B7F-RW2X
BD/FB
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 22 SEPTEMBRE 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, Présidente de chambre,
Assesseur : Madame Hélène RAULINE, Présidente de chambre,
Assesseur : Madame Nathalie MALARDEL, Conseillère,
GREFFIER :
Madame Françoise BERNARD, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 16 Juin 2022
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 22 Septembre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTS :
Madame [R] [E] épouse [A]
née le 07 Janvier 1953 à [Localité 14] (72)
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Marie VERRANDO de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Vadim HAGER, Plaidant, avocat au barreau de COLMAR
Monsieur [V] [A]
né le 06 Juillet 1951 à [Localité 11] (22)
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représenté par Me Marie VERRANDO de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me Vadim HAGER, Plaidant, avocat au barreau de COLMAR
INTIMÉS :
Monsieur [P] [M]
né le 31 Mai 1975 à [Localité 12] (95)
[Adresse 7]
[Localité 8]
Représenté par Me Katell GUENEUC, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC
Madame [Y] [Z] épouse [M]
née le 13 Juillet 1975 à [Localité 12] (95)
[Adresse 7]
[Localité 8]
Représentée par Me Katell GUENEUC, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC
S.N.C. GEOXIA OUEST
inscrite au RCS de NANTES sous le n°449 083 324
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représentée par Me Sandrine GAUTIER de la SCP ELGHOZI-GEANTY-GAUTIER-PENNEC, Postulant, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC
Représentée par Me Elizabeth MENESGUEN, Plaidant, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE
Société XL INSURANCE COMPANY SE
agissant par l'intermédiaire de sa succursale française sis [Adresse 9], immatriculée au RCS PARIS sous le N° 419408927, venant aux droits d'AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES par suite d'une fusion absorption emportant transfert de portefeuille, prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège [Adresse 3] IRLANDE
[Adresse 9]
[Localité 10]
Représentée par Me Sandrine GAUTIER de la SCP ELGHOZI-GEANTY-GAUTIER-PENNEC, Postulant, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC
Représentée par Me Elizabeth MENESGUEN, Plaidant, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE
****
Exposé du litige:
M. et Mme [M] ont confié à la société Geoxia Ouest la construction d'une maison d'habitation [Adresse 1] moyennant un coût total de 181591€.
Les maîtres d'ouvrage s'étaient réservés l'exécution de travaux pour un montant de 16790€. Ils ont été confiés à la société Sato, ainsi que l'exécution d'un drainage périphérique.
Un contrat d'assurance dommages-ouvrage a été souscrit auprès de la société Axa Corporate Solutions Assurances.
Les travaux de la société Geoxia Ouest ont été réceptionnés selon procès-verbal du 19 mars 2009, avec des réserves levées le 17 octobre 2011.
La société Sato a fait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire et a été radiée suite à un jugement de clôture pour insuffisance d'actif du tribunal de commerce de Saint-Brieuc du 6 avril 2011.
Suivant acte authentique du 22 février 2014, les époux [M] ont vendu à M. et Mme [A] la maison moyennant le prix de 180 000 euros, l'acte précisant que le système d'assainissement consistant en une micro station était non conforme et que l'acquéreur déclarait faire son affaire personnelle des conséquences éventuelles de cette situation sans recours contre le vendeur notamment pour les vices apparents révélés par le contrôle du service d'assainissement non collectif et décharger le vendeur de toute responsabilité à ce sujet.
Rapidement, les époux [A] ont constaté la présence d'humidité dans le sous-sol, associée à des moisissures, ainsi que différents désordres affectant l'ouvrage. Ils ont déclaré un sinistre à l'assureur dommages-ouvrages le 15 octobre 2014, lequel a refusé sa garantie.
A leur demande, par ordonnance du 11 février 2016, le juge des référés du tribunal de grande instance de Saint-Brieuc a ordonné une expertise et désigné M. [N] à cet effet. Celui-ci a déposé son rapport le 28 juin 2017.
Par actes d'huissier en date des 4, 10 et 11 avril 2019, M. et Mme [A] ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de St Brieuc les époux [M], la société Geoxia Ouest et la société Axa Corporate Solutions Assurances, aux fins de voir ordonner une contre-expertise et engager la responsabilité de ces derniers.
Par un jugement assorti de l'exécution provisoire en date du 13 avril 2021, le tribunal judiciaire de Saint-Brieuc a :
- débouté M. et Mme [A] de leur demande visant à ordonner une contre-expertise ;
- dit que les désordres dont se plaignent M. et Mme [A] ne relèvent pas de la garantie décennale des constructeurs et débouté ces derniers de toutes leurs demandes sur le fondement de l'article 1792 du code civil ;
- dit que le montant sous poinçon de la charpente et la ferme sont affectés d'une non-finition qui relève de la responsabilité civile contractuelle de droit commun de la société Geoxia Ouest ;
- constaté que les époux [A] n'ont pas formé de demande de réparation concernant cette non-finition ;
- débouté M. et Mme [A] de toutes leurs autres demandes relatives aux défauts, non conformités et absence d'ouvrage ;
- débouté M. et Mme [A] de leurs demandes portant sur la responsabilité contractuelle de M. et Mme [M] ;
- débouté M. et Mme [A] de leur demande visant à dire que la société Axa Corporate Solutions Assurances est tenue d'indemniser leur préjudice;
- débouté les mêmes de leur demande visant à réserver leur droit de chiffrer leur préjudice ;
- débouté M. et Mme [M] de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;
- dit n'y avoir lieu à faire droit à la demande de M. et Mme [M] visant à être garantis par la société Geoxia Ouest et par la société Axa Corporate Solutions Assurances ;
- condamné in solidum M. et Mme [A] à payer aux époux [M] la somme de 1 200 euros et à la société Axa Corporate Solutions Assurances la somme de 1 200 euros également, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
- condamné in solidum M. et Mme [A] aux dépens, en ce compris ceux de l'instance de référé et les frais et honoraires de l'expert judiciaire.
M. et Mme [A] ont interjeté appel de ce jugement par déclaration du 9 juin 2021, intimant M. et Mme [M] et les sociétés Geoxia Ouest et XL Insurance Company, venant aux droits de la société Axa Corporate Solutions Assurances.
Dans leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 25 mai 2022,M. et Mme [A] au visa des articles 1231 à 1231-7, 1240, 1792 et suivants du code civil, demandent à la cour de :
- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il les a déboutés de leur demande de contre-expertise ; de toutes leurs demandes sur le fondement de la garantie décennale ; de toutes leurs autres demandes relatives aux défauts, non conformités et absence d'ouvrage ; de leurs demandes portant sur la responsabilité contractuelle de M. et Mme [M] ; de leur demande de garantie contre la société Axa Corporate Solutions Assurances; les a condamnés in solidum à payer aux époux [M] la somme de 1 200 euros et à la société Axa Corporate Solutions Assurances la somme de 1 200 euros également, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; ainsi qu'aux dépens en ce compris ceux de l'instance de référé et les frais et honoraires de l'expert judiciaire ;
Statuant à nouveau sur ces points,
- déclarer la demande de M. et Mme [A] recevable et bien fondée ;
En conséquence,
Avant dire droit,
- ordonner une contre-expertise judiciaire et désigné tel expert qu'il plaira à la juridiction de nommer avec pour mission, les parties et leurs conseils préalablement convoqués de :
- se rendre sur les lieux situés [Adresse 1] ;
- procéder à la constatation et aux relevés précis et détaillés des désordres, malfaçons, non-façons, et non-conformités, relevés dans le rapport d'expertise de M. [U] ;
- décrire les malfaçons qui pourraient être constatées et réunir les éléments d'information permettant au tribunal d'apprécier si elles sont de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou le rendre impropre à sa destination ;
- donner un avis motivé sur les causes et origines des désordres et malfaçons relevés, en précisant s'ils sont imputables à la conception, à un défaut de direction ou de surveillance, ou à un défaut d'exécution, et, en cas de cause multiple, d'évaluer les proportions relevant de chacune de ces causes ;
- rechercher l'origine et les causes de chacun des désordres en précisant s'ils proviennent d'une non-conformité au document contractuel, ou d'une inexécution des obligations contractuellement définies, d'un manquement aux règles de l'art, d'une exécution défectueuse, d'un vice du matériau, ou de toute autre cause ;
- en cas de pluralité de causes à l'origine des désordres, préciser leur importance respective ;
- indiquer la nature et le coût des travaux nécessaires pour remédier à la situation actuelle en tenant compte, si nécessaire, du trouble de jouissance affectant les lieux ;
- faire le cas échéant toutes autres constatations utiles, et fournir au tribunal tous éléments nécessaires à la détermination des responsabilités encourues et à l'évaluation du préjudice subi ;
- s'expliquer techniquement sur les dires que les parties pourront formuler dans un délai de 30 jours après avoir reçu copie du pré-rapport que l'expert établira et leur aura communiqué ;
- donner acte à M. et Mme [A] de leur accord pour le versement de l'avance sur frais d'expertise ;
Au fond,
- déclarer que M. et Mme [M] et la société Geoxia Ouest sont responsables in solidum et de plein droit envers M. et Mme [A] des désordres affectant leur maison d'habitation ;
- déclarer que la société XL Insurance Company est tenue d'indemniser le préjudice subi par M. et Mme [A] solidairement avec les époux [M] et la société Geoxia Ouest ;
- déclarer, à titre subsidiaire, que la responsabilité civile contractuelle de droit commun est engagée solidairement à l'égard de M. et Mme [A] par M. et Mme [M] ainsi que la société Geoxia Ouest ;
- réserver le droit de M. et Mme [A] de chiffrer leur entier préjudice lié aux désordres après le dépôt par l'expert judiciaire de son rapport d'expertise ;
Le cas échéant,
- condamner in solidum M. et Mme [M], la société Geoxia Ouest, et la compagnie XL Insurance Company à payer à M. et Mme [A] les montants indemnitaires suivants :
- 25 000 euros pour la mise en conformité du drainage ;
- 21 033,60 euros au titre du problème d'humidité en sous-sol ;
- 11 777,81 euros au titre de l'assainissement ;
- réserver les droits de M. et Mme [A] pour le surplus des désordres, malfaçons, non-façons et non-conformités ;
En tout état de cause,
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les époux [M] de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;
- débouter M. et Mme [M], la société Geoxia Ouest, et la compagnie XL Insurance Company de l'intégralité de leurs fins, demandes et conclusions dirigées à l'encontre de M. et Mme [A] ;
- condamner in solidum M. et Mme [M], la société Geoxia Ouest, et la compagnie XL Insurance Company à payer aux époux [A] la somme de 8 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner in solidum M. et Mme [M], la société Geoxia Ouest, et la compagnie XL Insurance Company aux dépens, y compris ceux de la procédure de référé-expertise, avec distraction au profit de l'avocat soussigné aux offres de droit.
Les appelants font valoir que la société XL Insurance Company ne peut opposer l'irrecevabilité de leur appel au motif qu'ils n'ont pas réglé la somme de 1200€ mise à leur charge au titre des frais irrépétibles, alors que le défaut d'exécution du jugement ne constitue pas une cause d'irrecevabilité de l'appel, point qui relève de la compétence du conseiller de la mise en état et non de la cour.
Ils observent que M et Mme [M], vendeurs de la maison après son achèvement, sont assimilés à des constructeurs par l'article 1792-1-2°du code civil, que, comme la société Geoxia, ils engagent leur responsabilité pour les désordres de nature décennale au sens de l'article 1792 sans pouvoir opposer de clause de non garantie tirée de l'acte de vente . Ils ajoutent que la compagnie AXA en sa double qualité d'assureur de la société Geoxia et d'assureur dommages ouvrage leur doit sa garantie pour ces désordres.
A titre subsidiaire, ils recherchent la responsabilité contractuelle des époux [M] et de la société Geoxia.
Se fondant sur le rapport établi par M. [U] le 10 octobre 2017, ils soutiennent qu'ils sont fondés à solliciter une contra expertise dès lors que le rapport de l'expert judiciaire est insuffisant et imprécis et que ce dernier n'a pas entièrement rempli sa mission au regard des termes de l'ordonnance de référé du 11 février 2016, qui lui demandaient de rechercher les malfaçons, non-façons et non conformités aux documents contractuels, aux règles de l'art ou aux prescriptions d'utilisation des matériaux, les défaut de conception, d'exécution ou les vices des matériaux. Ils ajoutent que si M. [U] a identifié d'autres désordres et non conformités, son rapport remet en cause les conclusions de l'expert relativement au périmètre de la mission de l'expert judiciaire défini à partir du contenu de l'assignation et des pièces produites devant le juge des référés.
Ils insistent sur les conclusions totalement opposées des deux experts notamment sur l'existence d'un drainage et les défauts de la charpente et des fondations, pour en déduire qu'il appartenait au tribunal de comparer les deux analyses sur chaque point sans pouvoir écarter l'analyse de M. [U] au seul motif qu'elle n'avait été réalisée contradictoirement, ce d'autant qu'elle est corroborée par le constat d'huissier du 19 novembre 2019. Ils relèvent qu'à partir du moment où l'expert judiciaire n'a constaté aucun désordre, il s'est abstenu d'examiner l'existence de non conformité aux normes de construction ou au contrat de construction, alors que l'expert de l'assureur dommages ouvrage ayant examiné le sous-sol avait relevé dès 2014 des anomalies constructives concernant le cuvelage réalisé et le dispositif de drainage comme origine possible des infiltrations dans le sous-sol.
Ils font observer que le rapport de M. [U] révèle l'existence d'autres désordres qui n'ont pas été relevés par M. [N].
En l'absence de nouvelle expertise, ils sollicitent l'indemnisation de la mise en conformité du drainage, du traitement de l'humidité en sous- sol et de la remise en état de l'assainissement.
Ils demandent la confirmation du jugement qui a rejeté la demande de dommages et intérêts des époux [M] pour procédure abusive et font valoir qu'ils n'étaient pas avisés avant la signature de l'acte de vente de la non conformité de l'assainissement, qu'il n'y a eu aucune négociation du prix de vente à ce sujet et qu'ils n'ont pas commis de faute de nature à faire dégénérer leur droit d'agir en justice en abus.
Dans leurs dernières conclusions en date du 5 novembre 2021, M. et Mme [M] demandent à la cour de :
- infirmer le jugement uniquement en ce qu'il a débouté Monsieur [V] [A] et Madame [R] [A] de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
- confirmer le jugement dont appel en ses autres dispositions ;
A titre principal,
- débouter M. et Mme [A] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
- dire et juger que la demande de contre-expertise judiciaire n'est pas fondée;
- condamner M. et Mme [A] à leur verser la somme de 5 000 euros au titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;
A titre subsidiaire,
- condamner les sociétés Geoxia Ouest et Axa Corporate Solutions Assurances à garantir M. et Mme [A] de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre ;
- condamner M. et Mme [A] à verser à M. et Mme [M] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
M et Mme [M] font observer que les travaux restés à leur charge aux termes du contrat de construction, ont été réalisés par la société SATO, notamment la fourniture et la pose du drainage périphérique et de l'assainissement, lesquels ont été totalement réglés. Ils ajoutent que lors de la vente M. [A] avait visité à plusieurs reprises la maison et que les acquéreurs avaient été parfaitement informés de l'état du système d'assainissement ce qui a donné lieu à une négociation du prix.
Ils s'opposent à la demande de contre-expertise et observent qu'un rapport d'expertise amiable n'est pas suffisant pour fonder une décision de justice et qu'une demande de contre-expertise ne peut être sollicitée que si les éléments produits laissent planer un doute sérieux sur l'exactitude des conclusions de l'expert, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
Ils relèvent que l'expert judiciaire a repris les désordres et non conformités invoqués par M et Mme [A], que si ces derniers contestaient les conclusions de l'expert ou estimaient ses investigations insuffisantes, ils pouvaient déposer des dires ou saisir le juge en charge du contrôle de la mesure, ce qu'ils n'ont pas fait.
Les intimés font observer que M. [N] a mis en évidence des modifications des éléments d'équipement ayant conduit à certains désordres et que les constatations réalisées par M. [U] sur les seules explications de M et Mme [A] sont douteuses. Ils ajoutent que le constat d'huissier établi en 2014 comme le rapport d la société ACTE, antérieurs à l'expertise judiciaire ne peuvent être pris en compte pour corroborer les conclusions de M. [U], puisque l'expert judiciaire ne les a pas corroborés ; que le constat d'huissier établi en 2019 émane du même huissier qui ne pouvait pas se contredire et a recueilli les seules explications des acquéreurs. Ils estiment que les appelants tirent des conclusions erronées du rapport de la société Eurisk, non daté, et qui n'a pas examiné l'installation d'assainissement.
M et Mme [M] rappellent que l'expert a exclu l'humidité dans le sous-sol à l'issue de deux réunions, en mai et décembre 2016, soit en hiver, alors que l'immeuble n'avait pas été habité pendant deux ans ; qu'il en est de même s'agissant des fissures du dallage en sous-sol. Ils s'étonnent que les traces d'humidité soient apparues quelques mois après la dernière réunion d'expertise de décembre 2016.
Ils relèvent qu'aucun désordre n'a été constaté sur les fondations, que l'expert a mis en garde M. [A] sur le terrassement effectué , modification postérieure à la construction. Ils ajoutent que M. [U] fait état d'une non conformité grave des fondations sans relever d'atteinte à la solidité et à la stabilité de la maison et que le dispositif de pompage des eaux de drainage récupérés depuis le caniveau en bas de la rampe a subi de nombreuses modifications depuis l'acquisition, que sur ce point, M et Mme [A] n'ont pas visé dans l'assignation en référé de 2015 leur responsabilité contractuelle et sont forclos désormais à agir sur ce fondement, qu'en outre, il n'est démontré aucune faute de leur part de nature à fonder cette responsabilité et qu'il n'est pas non plus établi de nature décennale de ce désordre.
Ils ajoutent que la charpente est conforme aux dispositions du contrat, que la non finition de relevée par l'expert sur cette partie de l'ouvrage ne leur est pas imputable et que la non conformité de l'isolation du plancher haut ou du rampant n'était pas visée dans l'assignation.
Ils soutiennent que les autres demandes relatives à des désordres non dénoncés dans le cadre de l'expertise judiciaire, sont forclos compte tenu de la date de l'assignation du 11 avril 2019.
Concernent l'assainissement, ils se réfèrent à la clause de l'acte de vente qui met à la charge des acquéreurs tous les travaux nécessaires à la mise en conformité sans recours contre les vendeurs.
Ils estiment que l'attitude de M et Mme [A] pendant l'expertise et postérieurement est caractéristique de leur mauvaise foi et d'un acharnement injustifié qui fondent leur demande indemnitaire pour procédure abusive.
Dans leurs dernières conclusions en date du 4 mai 2022, les sociétés Geoxia Ouest et XL Insurance Company demandent à la cour de :
- dire M. et Mme [A] irrecevables en leur appel, faute d'avoir exécuté les condamnations prononcées par la décision entreprise ;
- subsidiairement au fond, dire M. et Mme [A] mal fondés en leur appel et les en débouter purement et simplement ;
- confirmer par conséquent en toutes ses dispositions le jugement ;
- y ajoutant, condamner solidairement M. et Mme [A] à payer tant à la société Geoxia Ouest qu'à la société XL Insurance Company la somme de 2 500 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile ;
- les condamner enfin en tous les dépens de première instance et d'appel.
Elles soutiennent que l'appel des époux [A] est irrecevable faute de paiement de l'ensemble des condamnations prononcées par le tribunal.
Sur le fond, elles font observer que certaines des doléances de M et Mme [A] ne concernent pas le constructeur, puisqu'elles se rapportent à des travaux qu'il n'a pas exécutés ou que M. [A] est intervenu de façon inadaptée pour modifier les ouvrages.
Les intimées rappellent que peu de temps après leur entrée dans les lieux, M et Mme [A] ont dénoncé des désordres et régularisé une déclaration de sinistre qui a donné lieu à une expertise de la société Eurisk qui n'a pas constaté de dysfonctionnement , ni d'impropriété à destination.
Sans méconnaître qu'un rapport d'expertise amiable, établi contradictoirement ou non et régulièrement versé aux débats, ne peut être écarté sans examen, elles relèvent que c'est précisément suite à cet examen que le tribunal a estimé que le rapport produit par les appelants ne constituait pas un élément de preuve suffisant pour justifier une contre expertise. Elles font observer que M. [U], qui est un économiste de la construction, a oeuvré notamment sans se faire remettre l'ensemble des éléments utiles à l'examen du litige et en se fiant aux seuls assertions des acquéreurs, à la différence de l'expert judiciaire auquel les appelants n'ont adressé aucun dire en rapport avec ses constatations ou sa méthode.
Elles rappellent que M. [N] n'a pas observé dans le sous-sol d'infiltrations et qu'en tout état de cause des traces d'humidité sont tolérées dans des murs de catégorie 2, que des percements dans les fissures du sol imputables à M. [A] ont été constatées, dont M. [U] n'a pas été informées. Elles font observer que la pompe vide cave a été remplacée par M. [A] et que le revêtement de la finition de roulement de la descente n'est pas en place de sorte qu'elle ne collecte que partiellement les eaux de ruissellement de la pente, ce qui n'est pas imputable au constructeur, ni aux vendeurs ; que le dispositif des eaux de drainage récupérées dans le caniveau en bas de pente a aussi subi des modifications par les appelants, ce dont leur expert privé n'était pas informé. Elles ajoutent qu'aucune dalle béton n'était prévue dans la descente d'accès au garage, ce qui n'empêche par un accès piéton ou automobile, que le drainage a été réalisé par une société Sato et non par le constructeur.
En ce qui concerne la charpente, elles allèguent que les documents contractuels démontrent qu'elle est conforme à ce qui était prévu et que le désordre constaté par l'expert peut être repris pour un coût modeste. Elles ajoutent que la non-conformité de l'assainissement était clairement mentionnée dans l'acte de vente, que les époux [A] qui devaient procéder à la mise en conformité ne l'ont pas fait, ce dont ils sont seuls responsables. Elles rejoignent l'argumentation des vendeurs sur l'acquisition de la forclusion pour les autres désordres qui n'ont pas été dénoncés dans le délai décennal.
L'instruction a été clôturée le 31 mai 2022.
Motifs :
-Sur la recevabilité de l'appel des époux [A]:
M et Mme [A] relèvent à juste titre que la circonstance qu'ils n'ont pas totalement réglé les condamnations à leur charge dans le cadre de l'exécution provisoire du jugement ne constitue pas un motif d'irrecevabilité de leur appel. Cette situation aurait été de nature à justifier une demande de radiation en application de l'article 526 du code de procédure civile dans sa rédaction antérieure au décret du 11 décembre 2019 laquelle aurait été au demeurant de la compétence du conseiller de la mise en état. En conséquence, fin de non recevoir de la société Geoxia ne peut être accueillie.
-Sur la demande de contre-expertise des appelants:
Pour contredire les conclusions de l'expert et présenter cette demande, M et Mme [A] se fondent sur le rapport établi le 10 octobre 2017 par M. [U] et sur le constat d'huissier dressé par maître [W] le 19 novembre 2019.
Ces pièces ont certes été établies à la demande des appelants. Toutefois, cette situation n'est pas en elle-même de nature à justifier qu'elles ne soient pas examinées et prises en considération dès lors qu'elles ont été régulièrement versées aux débats et soumises à la discussion de l'ensemble des parties, ce qui est le cas. La circonstance que M et Mme [A] n'aient pas adressé de dires à l'expert judiciaire, n'étant pas alors assistés d'un technicien de la construction ou n'aient pas saisi le juge en charge du contrôle des expertises d'une contestation des investigations menées par l'expert s'ils les estimaient insuffisantes ne peut les priver de la possibilité de contester ses conclusions et de demander une nouvelle expertise.
La mission de l'expert judiciaire conformément aux termes de l'ordonnance de référé du 11 février 2016 était circonscrite aux désordres mentionnés dans l'assignation, ainsi que dans le constat d'huissier du 23 mai 2014 et le courrier de la société SFTS du 18 novembre 2014. Selon ces pièces, à défaut de demandes d'extension ultérieures de l'expertise à d'autres désordres ou non conformités, l'expertise de M. [N] se rapportait donc uniquement aux différents points énumérés en page 5 de son rapport, dont il a rappelé qu'ils avaient été déterminés lors du premier accedit en présence des parties. Il ne pouvait examiner d'autres désordres et notamment, l'absence de tirants verticaux aux angles de la maison, le tassement de la terre et des pavages à la périphérie de la maison, la contre-pente du tuyau d'évacuation des eaux pluviales en façade sud, la cuve de récupération des eaux pluviales hors service, les défauts de pose des menuiseries extérieures, le défaut d'isolation du plancher des combles et des rampants, évoqués dans le rapport de M. [U] .
Le rapport de celui-ci qui précise être économiste de la construction et non un expert en pathologie des constructions, rappelle que ses conclusions sont fondées sur la base du constat d'huissier du 23 mai 2014, du courrier de la société SFTS du 28 novembre 2015 et une visite des lieux le 28 juillet 2017.
Les photographies annexées à son rapport relatives à l'état du sous-sol comme celles du constat d'huissier de novembre 2019 ne diffèrent pas des descriptions de son état par l'expert judiciaire ni des photographies annexées au premier constat d'huissier de 2014. Elles ne mettent pas en évidence une dégradation de l'état des murs depuis le dépôt du rapport d'expertise à raison notamment d'un choix de matériau inadapté ou d'une interprétation erronée par M. [N] du niveau d'humidité du sous-sol.
Les commentaires de M. [U], notamment en ce qui concerne les fissures dans le dallage du sous-sol, démontrent qu'il a repris de fait les informations fournies par M. [A] quant aux remontées d'eau à ces endroits en période hivernale sans s'être mis en mesure de les constater lui-même compte tenu de l'époque de son déplacement sur les lieux pendant l'été, à la différence de M. [N]. L'huissier qui a établi son constat en novembre 2019 ne fait pas non plus état de ces remontées par les fissures, alors même qu'il indique avoir constaté la présence d'eau sous la dalle évacuée par un dispositif de pompage des eaux de drainage.
M. [U] a conclu à une non conformité grave des fondations, selon lui d'une dimension insuffisante par rapport à la notice descriptive de nature à porter atteinte à la solidité et à la stabilité de la maison, sur la foi d'un seul contrôle opéré par le trou de dimension limitée comme le montre la photographie annexée au rapport, accueillant la pompe vide cave installée par M. [A] dans le sous-sol.
A supposer qu'il dispose des compétences à cet effet, il n'explique pas comment il a pu établir ce sous-dimensionnement généralisé sans procéder à d'autres sondages. Il convient de rappeler que huit ans après la réception de la maison, il n'a jamais été fait état ou constaté sur l'immeuble de phénomènes (fissuration importante du gros oeuvre, tassements) de nature à faire suspecter des désordres structurels en relation avec des fondations insuffisantes. Cette affirmation n'est donc fondée sur aucune analyse technique fiable et complète.
Il en est de même de l'état de la charpente dont il estime qu'elle n'est pas conforme au contrat et qu'elle porte atteinte à la solidité et à la stabilité de l'immeuble ce qui implique selon lui sa réfection complète sans préciser en quoi les défauts de clouage limités et de contreventement relevés mettent en péril la maison et ne peuvent pas faire l'objet de travaux de reprise.
Par ailleurs, il est manifeste que M. [U] n'a pas été avisé des modifications réalisées sur l'ouvrage par les appelants notamment en ce qui concerne les dispositifs de pompage des eaux de drainage et leur évacuation.
Dès lors, ce rapport qui conclut à la nécessaire démolition de l'immeuble comme le constat d'huissier de novembre 2019 ne peuvent constituer des éléments de preuve techniquement étayés et sérieux démontrant l'insuffisance des constatations et analyses de l'expert judiciaire de nature à justifier la désignation d'un nouvel expert pour réexaminer les désordres visés dans l'ordonnance de référé du 11 février 2016. Le jugement est confirmé de ce chef.
- Sur les responsabilités des époux [M] et de la société Geoxia:
L'article 1792 du code civil met à la charge de tout constructeur une responsabilité de plein droit des désordres imputables à ses travaux dès lors qu'ils compromettent la solidité de l'ouvrage ou l'affectant dans un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement le rendent impropres à sa destination. Il ne peut s'exonérer de cette responsabilité que par la preuve d'une cause étrangère.
L'article 1792-1-2° du même code assimile à un constructeur toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire.
Par ailleurs, la responsabilité contractuelle du constructeur ou du constructeur assimilé peut être recherchée après réception au titre des désordres intermédiaires dès lors que le propriétaire de l'ouvrage rapporte la preuve d'une faute et d'un lien de causalité avec le désordre.
Le constructeur engage au surplus sa responsabilité en cas de non conformité constructive par rapport au contrat, même en l'absence de désordre sur l'ouvrage.
Il convient en conséquence d'examiner les désordres et non conformités soumis à l'expert judiciaire, étant observé, comme le relève à juste titre la société Geoxia que les autres désordres évoqués dans le rapport de M. [U] et rappelés plus haut n'ont pas été déclarés dans le délai décennal à compter de la réception du 19 mars 2009 et sont atteints par la forclusion, compte tenu de la date des assignations, les 4, 10 et 11 avril 2019.
* Sur l'humidité en sous-sol, salpêtres et moisissures, manque de ventilation et odeurs en empêchant l'utilisation:
La maison construite par la société Geoxia correspond au modèle Magnolia 4135 et dispose d'un sous-sol complet C1 décrit à la page 19 de la notice descriptive signée des époux [M] dont les murs extérieurs sont en blocs creux de béton de 0,20m d'épaisseur, pourvu d'un enduit hydrofuge assurant l'imperméabilisation des parties enterrées. Il résulte des pièces produites qu'une intervention sur les murs intérieurs du sous-sol a été réalisée en septembre 2011 et financée par la société Geoxia pour un montant de 5315,02€, consistant en un cuvelage par l'application d'un produit hydrofuge.
L'expert judiciaire a précisé avoir constaté des traces d'efflorescences sur les murs, sans écoulement au sol. Il a rappelé que lors du premier accedit en mai 2016, il avait été décidé de mettre le site en observation pour pouvoir observer les phases humides évoquées par les appelants, que lors du second accedit en décembre suivant, il n'a pas non plus été constaté de traces nouvelles, ce qui n'a fait l'objet d'aucune observation contraire de M et Mme [A] qui ne font d'ailleurs pas état d'alertes adressées à l'expert pendant cette période en lien avec le constat d'infiltrations ou d'écoulements par les murs.
M. [N] a rappelé que dans ce type de locaux de seconde catégorie qui ne sont pas destinés à l'habitation et n'ont pas à présenter des parois étanches, la présence d'humidité est tolérée. Cette analyse rejoint celle de la société SFTS, mandatée par l'assureur dommages ouvrage, dans son rapport du 18 novembre 2014 qui avait rappelé cette tolérance de même que la société Eurisk ( pièce 5 de la société Geoxia) dans un rapport non daté. Cette circonstance n'a de fait pas été prise en compte par M. [U] dans son analyse.
L'existence d'odeurs interdisant l'utilisation de cet espace n'a jamais été confirmée, ni par l'expert judiciaire ou M. [U], ni lors des constats d'huissier de 2014 et 2019 ou par les experts intervenus à la demande de l'assureur dommages ouvrage. Dans ces conditions, la matérialité même d'un désordre affectant les murs du sous-sol n'est pas établie, ni l'impossibilité de l'utiliser. La responsabilité du constructeur comme des époux [M] ne peut donc être engagée. Le jugement est confirmé.
*Sur les fissures du dallage du sous-sol:
Seules, les fissures devaient être examinées par l'expert selon les termes de l'ordonnance qui l'a désigné au motif qu'elles auraient généré des remontées d'eau dans le sous-sol. Elles ont été qualifiées de légères par l'expert et il n'a pas relevé la présence d'humidité en sous-face, ni dans le terrassement effectué par M. [A] pour mettre en place une pompe de relevage lors des deux réunions et notamment en décembre 2016.
Le phénomène de remontées d'eau par les fissures, allégué par les appelants n'a pas été constaté par M. [U] qui, en page 8 de son rapport, reprend les informations fournies par M. [A] sur ce point. M. [U] impute ces fissures à une absence de joints périphériques et de fractionnement tout en indiquant que l'eau remonte au droit de ces joints. Par ailleurs, il fait état du mauvais positionnement du treillis soudé sous le dallage, d'une cueillie en mortier à la base et à la périphérie des murs, sans que ces problématiques aient un lien avec le désordre évoqué par les appelants. Le constat d'huissier de novembre 2019 ne décrit pas des remontées d'eau par les fissures, ce d'autant qu'une pompe vide cave avait été installée dans l'accès au garage. Par ailleurs, ont été constatés des percements dans ces fissures effectués par M. [A] sans explication de sa part. N'est pas par suite caractérisé de désordre susceptible d'engager la responsabilité décennale ou contractuelle des intimés.
*Sur les fondations :
Selon la notice descriptive, les fondations devaient être réalisées par semelles filantes en béton armé de 0.50m de largeur et de 0.30m de hauteur.
M et Mme [A] s'emparent des conclusions de M. [U] pour invoquer une non-conformité du dimensionnement des fondations portant atteinte à la solidité de l'immeuble. Toutefois, comme indiqué plus haut, cette non conformité n'est étayée par aucune constatation et analyse technique sérieuse. L'expert judiciaire n'a identifié aucune non conformité des fondations, ni de désordres en lien avec une section insuffisante. Sur ce point, il convient d'observer que le constat d'huissier du 23 mai 2014 faisait seulement état de 'réserves sur la qualité des fondations' dans sa partie relative à l'humidité dans le sous-sol et que leur défaut ou leur non conformité n'a jamais été évoquée dans les rapports d'experts ayant examiné l'immeuble à la demande de l'assureur dommages ouvrage. En l'absence de non conformité ou de désordre démontré, la responsabilité des intimés ne peut être engagée.
*Sur le drainage :
L'expert judiciaire a indiqué ne pas avoir réalisé de relevé précis du nivellement, mais a conclu à la non conformité du drainage périphérique. Il a en effet relevé que son positionnement altimétrique par rapport au niveau intérieur est non conforme et inadapté, puisque son exutoire est visible sensiblement au niveau du dallage et que n'ont pas été réalisés les regards exigés aux changements de direction du drain. M. [U] indique de son côté que le drain posé était un drain agricole inadapté pour ce type de drainage, qui en outre n'était pas inséré dans un ensemble de matériaux drainants ( lits de gravier, sable ou géotextile), ce que confirme le constat d'huissier de 2014. Cependant, il n'a été constaté aucun désordre en lien avec cette non conformité du drainage, puisqu'elle ne génère pas dans le sous sol des infiltrations au delà de l'humidité permise dans ce type de local et qu'il n'a été relevé aucune humidité dans la partie habitable de l'immeuble.
Il résulte de la notice descriptive applicable aux maisons avec sous-sol que ce drainage devait être réalisé si nécessaire en périphérie de la construction et constitué d'un tuyau PVC diamètre 100 perforé type assainissement, recouvert de cailloux et enveloppé d'un feutre géotextile et qu'il n'était pas inclus dans le prix. Il a été effectué par la société Sato qui l'a facturé aux
époux [M] le 7 avril 2008. Ces travaux n'incombant pas à la société Geoxia, elle ne peut être condamnée à en assurer la réfection à raison d'une non conformité contractuelle.
En l'absence de désordre de nature décennale et à supposer qu'il figure dans l'assiette du contrat dommages ouvrage, la garantie de la société XL Insurance Company ne peut être mobilisée. La responsabilité décennale des époux [M] ne peut être engagée, ni même leur responsabilité contractuelle dès lors qu'il n'est démontré aucune faute de leur part à l'origine de la pose et du matériau inadaptés du drain. En conséquence, la demande subsidiaire en paiement du coût des travaux des époux [A] à ce titre ne peut être accueillie.
*Sur la rampe:
Selon la notice descriptive (page 20) la rampe d'accès au garage devait rester brute de terrassement. Il ne peut donc être fait grief à la société Geoxia de ne pas y avoir réalisé un dallage étant observé qu'un caniveau était prévu en partie basse pour récupérer les eaux de ruissellement à la charge des maitres d'ouvrage, lequel a été réalisé.
Il n'est nullement établi que l'absence de dallage ne permet pas à un piéton ou un véhicule d'accéder au garage. Le constat d'huissier du 23 mai 2014 reprend sur ce point les déclarations qu'un voisin aurait faites à M. [A], sans aucun constat objectif de difficulté d'y circuler avec un véhicule.
La responsabilité tant décennale que contractuelle du constructeur comme des époux [M] ne peut être engagée. Le jugement est confirmé.
*Sur la charpente:
La charpente, selon la notice, devait être réalisée en fermettes en sapin sur deux appuis avec solivage intermédiaire ou espacées de 0.60m sans solivage intermédiaire et adaptée au modèle de maison choisie par les maîtres d'ouvrage comportant des combles aménagés (page 12). M. [N] a indiqué que le choix avait été fait de deux appuis avec solivage intermédiaire et confirme que la charpente est une charpente à fermettes, comme la légende accompagnant le photographie prise par M. [U].
L'expert judiciaire a relevé qu'un montant sous poinçon de la charpente à gauche de l'accès en comble n'était pas entièrement solidarisé à la ferme pour reprendre la membrure inférieure qui liaisonne les pieds de ferme, que M. [A] avait mis en oeuvre deux serre- joints et ajouté une pointe de maintien sur l'entrait horizontal. Il a conseillé de mettre en oeuvre d'autres pointes pour mieux assurer la liaison et a estimé qu'il s'agissait d'une absence de finition, sans conséquence sur la solidité de l'ensemble. Cependant, les photographies annexées au rapport de
M. [U] postérieures à l'expertise judiciaire mettent en évidence d'autres assemblages de poinçons pouvant se déboîter aisément et une anomalie de contreventement que n'a pas évoquée M. [N], ce qui justifie d'ordonner un complément d'expertise afin de recueillir son avis sur ces points, sur les conséquences de ses constatations et l'évaluation du coût du travaux de reprise.
*Sur les remblais périphériques et l'évacuation des eaux pluviales:
Le tribunal a relevé à juste titre que la question relative à l'affaissement des remblais autour de la maison n'était pas visée dans les pièces qui déterminaient le périmètre de la mission de l'expert. Il ne peut donc lui être fait grief de ne pas l'avoir examiné. Seul M. [U] évoque ce point dans son rapport en l'imputant à un mauvais compactage au moment de l'exécution des remblais. Comme le rappellent M et Mme [M] faute d'extension de la mesure d'expertise à ce désordre dans le délai décennal, cette demande est désormais forclose.
Concernant l'évacuation des eaux pluviales, travaux ont été exécutés par la société Sato, mandatée par les maîtres d'ouvrage, l'expert a eu à en connaître lors de l'examen de la pompe vide-cave située en bas de l'accès au garage et du défaut de raccordement d'une gouttière. Il a constaté que la pompe remplacée par M. [A] fonctionnait et que la gouttière avait été raccordée, de sorte que ces désordres n'existaient plus. M. [N] a surtout indiqué que le dispositif d'évacuation de ces eaux avait subi de nombreuses modifications de la part de M. [A], qu'ainsi le raccord de relevage des eaux en bas de la rampe avait été reporté plus loin vers l'avant de la maison et que la seconde pompe dans le citerneau en bas de l'accès au sous-sol rejetait l'eau dans un exutoire non identifié. Dès lors, il n'est pas possible de déterminer l'état initial du dispositif d'évacuation de ces eaux, de sorte que la matérialité d'un désordre ou d'une non conformité n'est pas établie et que la demande des appelants ne peut être accueillie.
*Sur les eaux usées et l'assainissement :
Ces travaux d'assainissement, selon les termes du contrat, étaient à la charge des maîtres d'ouvrage. M et Mme [A] ne peuvent soutenir pour voir retenir la responsabilité contractuelle de la société Geoxia que cette disposition méconnaît l'article L 231-2 du code de la construction dans sa rédaction applicable à la date du contrat soit celle issue de la loi du 19 décembre 1990, lequel imposait au contrat de prévoir 'les caractéristiques techniques du bâtiment à construire comportant tous les travaux d'adaptation au sol, les raccordements aux réseaux divers et tous les travaux d'équipement intérieur ou extérieur indispensables à l'implantation et à l'utilisation de l'immeuble'.
Cet article permettait au maître de l'ouvrage de se réserver l'exécution de certains travaux dès lors qu'ils étaient décrits et chiffrés par le constructeur et faisaient l'objet, de la part du maître de l'ouvrage, d'une clause manuscrite spécifique et paraphée par laquelle il en accepte le coût et la charge, ce qui est le cas en l'espèce, les travaux d'assainissement individuel ayant été évalués à 6000€ pour une fosse de 4000 litres. La clause manuscrite a été régulièrement apposée par les maîtres de l'ouvrage.
Le contrôle de l'assainissement effectué le 24 novembre 2011 et annexé à l'acte de vente, conclut que la micro station réalisée n'est pas conforme, ni acceptable. Le rapport rappelle que l'installation a été faite sans contrôle de bonne exécution, qu'elle n'est pas conforme à l'arrêté du 7 septembre 2009 (dispositif d'assainissement non agréé), ce qui conduit à la considérer uniquement comme un système de pré-traitement. Il mentionne qu'afin d'éviter toute pollution du milieu naturel et tout risque sanitaire, devait être prévue l'installation d'un dispositif agrée.
M. [N] a indiqué que la non conformité de l'assainissement était sans conséquence dommageable mais qu'elle rendait l'usage de ce dispositif impropre à sa destination. Dès lors que la réalisation de l'assainissement n'a pas été contrôlée, que le mode choisi n'était pas agréé et génère un risque de pollution ou sanitaire, il ne doit pas être utilisé, ce qui entraîne une impropriété à destination de l'immeuble relevant de la garantie décennale.
Or, comme le remarquent à juste titre les appelants, les constructeurs, comme les vendeurs qui leur sont assimilés, ne peuvent en application de l'article 1792-5 du code civil, se prévaloir de clauses contenues dans tout contrat ayant pour objet de limiter ou d'exclure leur responsabilité décennale, régime d'ordre public. De telles clauses sont réputées non écrites. La circonstance que l'état de l'assainissement avait été porté à la connaissance de M et Mme [A] lors de la vente et qu'ils avaient alors indiqué en faire leur affaire est à cet égard indifférent, dès lors que cet état s'est manifesté dans les dix ans de la mise en place par la société Sato de cette installation utilisée par M et Mme [M] et réglée par eux, ce qui ne pas fait débat.
Il s'en déduit que la responsabilité décennale de la société Geoxia qui n'a pas fait ces travaux ne peut être engagée.
M et Mme [A] ne développent aucune argumentation au soutien de leur demande de condamnation de la société XL Insurance Company, assureur dommage ouvrage, à garantir le désordre de cet équipement resté hors du marché de construction, étant observé que l'état non conforme de l'installation ayant donné lieu à une déclaration de sinistre en décembre 2011 l'expert mandaté par l'assureur avait relevé cette difficulté et il n'apparaît pas que la position de non garantie ait été discutée.
Seule la responsabilité décennale de M et Mme [M] est engagée à l'égard des appelants pour ce désordre.
Les appelants sollicitent le paiement d'une somme de 11777,81€ sur la base d'un devis ancien de 2013 tandis que l'expert a évalué le coût des travaux de reprise à 7500€ HT. Or, il est nécessaire de s'assurer de la conformité et de l'adaptation à l'immeuble du système proposé, ce qui implique de recueillir l'avis de M. [N] sur les modalités de réfection de l'assainissement adapté et son coût dans le cadre du complément d'expertise.
Les autres désordres examinés par l'expert, soit les points C, F,G, H,I,J K, L,M,N,O, P, Q et R, énoncés en page 5 du rapport de l'expert ne sont pas repris devant la cour par M et Mme [A] ayant été solutionnés. Les autres désordres énoncés dans le rapport de M. [U] distincts des points objets de l'expertise n'ont pas été dénoncés dans le délai de 10 ans à compter de la réception et sont forclos comme rappelé plus haut.
Il sera sursis à statuer sur les autres demandes dans l'attente du dépôt du complément d'expertise.
Par ces motifs :
La cour,
Statuant publiquement, contradictoirement en dernier ressort,
Confirme le jugement sauf en ce qui concerne les désordres de la charpente et la responsabilité de M et Mme [M] aux titre de l'installation d'assainissement,
Statuant à nouveau,
Déclare M et Mme [M] responsables sur le fondement décennal du désordre affectant l'installation d'assainissement,
Avant dire droit, ordonne un complément d'expertise relatif aux désordres affectant la charpente et à l'installation d'assainissement, confié à M. [N], [Adresse 2] Mél. [Courriel 13],
Avec mission de se rendre sur les lieux, [Adresse 1], les parties présentes ou dûment convoquées, de prendre connaissance de toutes pièces utiles et notamment du rapport de M. [U] concernant la charpente,
- dire si les désordres, malfaçons et non conformités relevées par M. [U] existent,
- dire si les désordres constatés par l'expert dans son rapport du 28 juin 2017 se sont aggravés,
- dans l'affirmative, en indiquer la nature et l'importance ; en rechercher la ou les causes,
- dire si les désordres, malfaçons ou non conformités compromettent la solidité de l'ouvrage ou le rendent impropre à sa destination,
- dire s'ils proviennent d'une non conformité aux documents contractuels, aux règles de l'art ou aux prescriptions d'utilisation des matériaux ou éléments d'ouvrage mis en 'uvre, d'un défaut de conception, d'une exécution défectueuse, ou d'un vice des matériaux, ou de toute autre cause,
- fournir tous éléments techniques et de fait de nature à permettre de statuer sur les responsabilités encourues,
- décrire les travaux de reprise nécessaires pour remédier aux désordres, préciser leur durée,
- s'agissant de l'installation d'assainissement,
- prendre connaissance du devis de l'Eurl Marchesse-Donné du 10 février 2013,
- indiquer si l'installation prévue est adaptée aux besoins de l'immeuble,
- dans l'affirmative, donner un avis sur le coût actuel de ces travaux,
-dans la négative, en préciser le motif et définir les travaux conformes aux besoins de l'immeuble, en préciser le coût,
- faire toutes observations utiles à la solution du litige,
Dit que lors de la première réunion qui devra se dérouler dans un délai maximum d'un mois à compter de l'avis donné par le greffe de la consignation de la provision, l'expert devra, en concertation avec les parties, dresser un programme de ses investigations et proposer d'une manière aussi précise que possible le montant prévisible de ses honoraires, de ses frais et débours, ainsi que la date de dépôt de son rapport avant d'adresser ces informations au juge chargé du contrôle lequel rendra, si nécessaire, une ordonnance complémentaire fixant le montant de la provision complémentaire ainsi que le délai prévu pour le dépôt du rapport ;
Invite l'expert à solliciter, en leur adressant un pré-rapport, les observations des parties dans un délai qu'il fixera et à y répondre dans son rapport définitif conformément aux dispositions de l'article 276 du code de procédure civile;
Rappelle que l'expert peut s'adjoindre d'initiative, si besoin est, un technicien dans une autre spécialité que la sienne dont le rapport sera joint à son rapport définitif en application des articles 278 et 282 du code de procédure civile et/ou se faire assister par une personne de son choix intervenant sous son contrôle et sa responsabilité en application de l'article 278-1 du code de procédure civile ;
Fixe à la somme de 2000 euros la provision à valoir sur la rémunération de l'expert que M et Mme [A] devront consigner au moyen d'un chèque émis à l'ordre du régisseur de la cour d'appel de Rennes dans un délai de 2 mois à compter du présent arrêt ;
Dit que l'expert devra déposer son rapport dans un délai de 3 mois à compter du jour où il sera informé de la consignation sauf demande de prorogation motivée de ce délai adressée au juge chargé du contrôle des expertises ;
Dit qu'en cas de difficulté, il en sera référé par simple requête de la partie la plus diligente au juge chargé du contrôle des expertises ;
Dit qu'en cas d'empêchement de l'expert désigné il pourra être pourvu à son remplacement par ordonnance prise par le juge chargé du contrôle des expertises ;
Désigne le conseiller de la mise en état pour suivre l'exécution de la présente mesure d'expertise
RENVOIE l'affaire à la mise en état à l'audience du 7 mars 2023 à 10h30
Surseoit à statuer sur les demandes relatives à la charpente, à l'indemnisation de l'installation d'assainissement et à la demande pour procédure abusive,
Réserve l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.
Le Greffier, Le Président,