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20/09/2022 | FRANCE | N°22/02271

France | France, Cour d'appel de Rennes, 6ème chambre b, 20 septembre 2022, 22/02271


6ème Chambre B





ARRÊT N° 363



N° RG 22/02271 - N° Portalis DBVL-V-B7G-SUQY













M. [L] [Y]



C/



Mme [N] [X] épouse [G]

































Copie exécutoire délivrée

le :20/09/2022



à :





REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 20 SEPTEMBRE 2022
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COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Véronique CADORET, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Emmanuelle GOSSELIN, Conseillère,

Assesseur : Monsieur Marc JANIN, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles,



GREFFIER :



Madame Ludivine MARTIN, lors des débats, e...

6ème Chambre B

ARRÊT N° 363

N° RG 22/02271 - N° Portalis DBVL-V-B7G-SUQY

M. [L] [Y]

C/

Mme [N] [X] épouse [G]

Copie exécutoire délivrée

le :20/09/2022

à :

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 20 SEPTEMBRE 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Véronique CADORET, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Emmanuelle GOSSELIN, Conseillère,

Assesseur : Monsieur Marc JANIN, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles,

GREFFIER :

Madame Ludivine MARTIN, lors des débats, et Madame Morgane LIZEE, lors du prononcé,

DÉBATS :

En chambre du Conseil du 13 Juin 2022

devant Madame Véronique CADORET, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 20 Septembre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANT :

Monsieur [L] [Y]

né le 09 Avril 1947 à [Localité 4]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Alain LE MAGUER de la SELARL LE MAGUER-RINCAZAUX, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de LORIENT

INTIMÉE :

Madame [N] [X] épouse [G]

née le 03 Février 1951 à [Localité 3] (Maroc)

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Arnaud COUSIN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Madame [N] [X] et Monsieur [L] [Y] se sont mariés le 12 mai 1973 à [Localité 7], sous le régime de la séparation de biens adopté suivant contrat de mariage en date du 5 mai 1973 régularisé en l'étude de Maître [E], notaire à [Localité 8].

Au cours du mariage, les époux ont acquis une maison d'habitation située en ESPAGNE, à [Localité 5] Villa 'Las Brisas' suivant acte en date du 29 juillet 1987, acquisition financée pour partie au moyen d'un emprunt de 800.000 francs (121.959,21 euros) consenti par le Crédit Lyonnais suivant acte en date du 27 juin 1987.

Par jugement en date du 12 octobre 1995, le divorce des époux a été prononcé, la liquidation des intérêts patrimoniaux des époux ayant par ailleurs été ordonnée et Maître [K], notaire à [Localité 8], a été commis pour procéder aux opérations de liquidation et partage. Le même jugement a fixé au bénéfice de Madame [X] et à la charge de Monsieur [Y] une prestation compensatoire sous la forme d'une rente viagère dont, par arrêt en date 04 novembre 1996, réformant ledit jugement, la cour d'appel de RENNES a fixé le montant à 6.000 francs par mois jusqu'au 1er juillet 2012 et 4.000 francs au-delà.

Par un nouveau jugement du 30 juin 2005, le montant de ladite rente a été abaissé par le juge aux affaires familiales au tribunal de grande instance de RENNES à 300 euros par mois à compter du 30 septembre 2004. Enfin, par arrêt en date du 14 janvier 2020, infirmant un jugement du 9 février 2017, la cour d'appel de RENNES a supprimé ladite rente viagère à compter de la demande de Monsieur [Y].

Entretemps, un procès-verbal de difficultés a été dressé le 04 mars 2008 par Maître [I], notaire à [Localité 6].

Monsieur [Y] a fait assigner Madame [X] épouse [G] devant le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de RENNES afin de la condamner à lui payer les sommes suivantes :

- la moitié des frais de réparation et d'entretien, dont il avait fait l'avance pour permettre la conservation de l'immeuble indivis, soit la somme de 113079,20 euros avec intérêts au taux légal capitalisés de l'assignation jusqu'à parfait règlement,

- la somme de 22 615,84 euros, au titre de sa rémunération de gérant de l'indivision, avec intérêt au taux légal capitalisés de l'assignation jusqu'à parfait règlement,

- la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Par ordonnance en date du 17 mars 2022, le juge de la mise en état au tribunal judiciaire de RENNES a :

- déclaré irrecevable la demande de créance de Monsieur [Y],

- condamné Monsieur [Y] aux dépens et au paiement à Madame [G] de la somme de 1000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration en date du 08 avril 2022, Monsieur [Y] a interjeté appel de ladite ordonnance en toutes ses dispositions.

Aux termes de ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 10 juin 2022, Monsieur [Y] demande à la cour de :

- infirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions expressément critiquées,

par conséquent,

- débouter Madame [G] de l'ensemble de ses demandes,

- déclarer recevable la demande formulée à l'encontre de Madame [G] sur le fondement de l'article 815-2 du code civil et tendant au remboursement de la moitié des dépenses faites par lui pour la conservation du bien indivis et au paiement d'une somme au titre de sa rémunération en qualité de gestionnaire de l'indivision,

à titre subsidiaire,

- déclarer recevable la demande formulée par Monsieur [Y] sur le fondement de l'article 815-13 du Code civil tendant à la prise en compte des dépenses faites par lui pour la conservation du bien indivis,

en tout état de cause,

- renvoyer les parties devant le tribunal judiciaire de RENNES pour qu'il soit statué sur le fond,

- condamner Madame [G] à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner Madame [G] aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 10 juin 2022, Madame [G] demande à la cour de :

- 'confirmer l'ordonnance entreprise, au besoin par substitution de motifs et, le cas échéant, vu l'article 2224 du Code civil, 2241 et 2243 du même code, en tant que de besoin, au préalable, constater la caducité de l'assignation du 22 octobre 2015 pour défaut d'enrôlement au greffe',

et, subsidiairement,

- déclarer Monsieur [Y] irrecevable en ses demandes pour la période antérieure au 17 novembre 2015,

plus subsidiairement,

- déclarer Monsieur [Y] irrecevable en ses demandes pour la période antérieure au 25 mai 1997,

en tout état de cause,

- condamner Monsieur [Y] à payer à Madame [G] la somme de 1500 euros au titre des frais irrépétibles,

- condamner Monsieur [Y] aux dépens d'appel.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 07 juin 2022.

Il sera renvoyé, pour plus ample exposé des faits de la cause, des prétentions et moyens des parties, à leurs dernières conclusions sus-visées par application de l'article 455 du Code civil.

MOTIFS

I- Sur la caducité de l'assignation pour défaut d'enrôlement de l'assignation au greffe

En application de l'article 954 du Code civil, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

En l'espèce la demande de Madame [G], tendant à constater la caducité de l'assignation du 22 octobre 2015 pour défaut d'enrôlement au greffe, n'est formulée au dispositif de ses conclusions d'intimée que 'en tant que de besoin, au préalable' et ne donne lieu à aucun développement ni à l'énoncé d'aucun moyen dans la partie discussion des mêmes conclusions.

Aussi la cour ne peut par hypothèse porter aucune appréciation sur aucun moyen expressément formulé par l'appelante, faute de moyen soutenu, dans la discussion, du chef de la caducité de l'assignation.

Elle ne peut même considérer que Madame [G] s'en rapporte de ce chef aux motifs du premier juge et est réputée s'approprier ces motifs, dès lors en effet que le jugement déféré n'a motivé et statué que sur la recevabilité de la prétention de Monsieur [Y] à la créance litigieuse.

Il n'y a dès lors pas lieu de répondre sur la caducité de l'assignation soutenue par des moyens dans la discussion et du reste formulée 'en tant que de besoin'.

II- Sur la fin de non-recevoir tirée de la violation de l'article 837 ancien du Code civil

1°) sur l'application au cas d'espèce de cet article 837 ancien du Code civil

Il résulte de l'article 837 ancien du Code civil dans sa version antérieure à la loi n°2006-728 du 23 juin 2006 applicable au 1er janvier 2007 que si, dans les opérations renvoyées devant un notaire, il s'élève des contestations, le notaire dressera procès-verbal des difficultés et des dires respectifs des parties, les renverra devant le commissaire nommé pour le partage ; et, au surplus, il sera procédé suivant les formes prescrites par les lois sur la procédure.

Il ne peut être renoncé que du consentement de toutes les parties aux dispositions de cet article dans cette rédaction ancienne, lorsqu'elle est applicable au litige.

Il résulte par ailleurs de l'article 47 II de ladite loi que, lorsque l'instance a été introduite avant l'entrée en vigueur de la loi, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne, laquelle s'applique également en appel et en cassation.

En l'espèce, Madame [G] fait valoir que les demandes de Monsieur [Y], soutenues devant le premier juge puis devant la cour d'appel, n'avaient pas été soumises au débat devant le notaire commis et n'avaient donné lieu à aucune mention au procès-verbal de difficultés établi en 2008, de sorte qu'elles sont irrecevables au regard de l'article 837 ancien précité applicable, selon l'intimée, en ce qu'une instance était en cours au 1er janvier 2007 eu égard au partage ordonné avant 2007.

Monsieur [Y] reprend à hauteur d'appel sa contestation de ce moyen et fait ainsi valoir que l'article 837 précité n'est pas applicable, en ce que le seul divorce des époux séparés de biens ne peut être tenu pour une ouverture des opérations de partage de l'indivision relative à l'immeuble litigieux. Il ajoute que 'les opérations de liquidation de la communauté existant entre les époux, ordonnée par le jugement du 12 octobre 1995", n'ont jamais abouti à la sortie de l'indivision 'dans la mesure où le partage de l'indivision n'entrait pas dans la mission confiée au Notaire', Maître [K], de sorte qu'il n'avait formulé aucune demande en rapport à l'indivision lors de leur divorce.

Or, en matière de divorce, l'article 837 ancien du Code civil précité s'applique aux partages ouverts par un divorce prononcé par jugement antérieur au 1er janvier 2007 ayant par ailleurs ordonné le partage des intérêts patrimoniaux des époux et commis un notaire pour y procéder. Les partages ainsi ordonnés se poursuivent selon la loi ancienne.

Le divorce et la liquidation des intétêts patrimoniaux des époux ayant en l'espèce été prononcés avec la désignation concomitante de Maître [K], notaire, par un jugement du 12 octobre 1995, il en est résulté l'ouverture d'opérations de partage qui, antérieures à l'entrée en vigueur de la loi du 23 juin 2006, sont soumises à la loi ancienne et notamment aux dispositions précitées de l'article 837 ancien.

De plus, en ordonnant l'ouverture des opérations de liquidation et partage, non pas du reste de 'la communauté' comme le soutient Monsieur [Y] mais du régime de la séparation de biens sous lequel étaient mariées les parties, et en commettant pour ce faire un notaire, le juge du divorce n'a aucunement exclu de la mission de ce notaire les intérêts patrimoniaux liés à l'immeuble situé en ESPAGNE, acquis en cours de mariage et qui aurait donné lieu à divers actes de conservation, entretien et gestion au cours de ce mariage.

Il est constant cependant qu'au procès-verbal de difficultés dressé en 2008, à la suite du prononcé du divorce des parties par jugement du 12 octobre 1995 et de la désignation du notaire pour procéder aux opérations de liquidation des intérêts patrimoniaux des époux, ne sont évoquées aucune des questions litigieuses faisant l'objet d'une saisine directe de la juridiction de première instance par Monsieur [Y] puis du présent appel. Il y est en effet mentionné que 'Monsieur [Y] a déclaré avoir effectué des frais de remise en état et d'entretien de cet immeuble pour un montant de 73.015,26 euros', sans que pour autant aucune revendication de créance ne soit actée ni aucune créance au passif d'indivision ne soit inscrite pour des frais d'entretien, de conservation ou pour une indemnité de gestion.

Il est par ailleurs vérifié que Madame [G] s'oppose à renoncer aux dispositions précitées et applicables de l'article 837 ancien.

Dès lors que l'ouverture des opérations de liquidation est antérieure à l'action dont s'agit engagée par Monsieur [Y] et à l'entrée en vigueur, au 1er janvier 2007, de la loi du 23 juin 2006, l'article 837 ancien du Code civil est bien applicable.

2°) sur une recevabilité de la demande en ce qu'elle porte sur des dépenses relevant des règles de l'indivision

Il résulte de l'article 815-2 du Code civil que tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis même si elles ne présentent pas un caractère d'urgence.

Il peut employer à cet effet les fonds de l'indivision détenus par lui et il est réputé en avoir la libre disposition à l'égard des tiers.

A défaut de fonds de l'indivision, il peut obliger ses coïndivisaires à faire avec lui les dépenses nécessaires.

Aux termes de l'article 815-13 du Code civil, lorqu'un indivisaire a amélioré à ses frais l'état d'un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l'aliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des dépenses nécessaires qu'il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdites biens, encore qu'elles ne les aient point améliorés.

L'article 815-2 précité ne prévoit certes aucun report, à l'issue des opérations de partage, du remboursement de dépenses nécessaires réalisées par un indivisaire et, en régime de séparation de biens, un époux a la possibilité d'engager une action en paiement de certaines créances à l'encontre de l'autre époux sans attendre le partage ou l'aliénation du bien, en ce que le règlement des créances entre époux séparés de biens ne constitue pas une opération de partage.

Il reste que la liquidation à laquelle il est procédé en cas de divorce englobe tous les rapports pécuniaires entre les parties et il appartient à celles-ci de faire valoir leurs créances entre elles ou sur l'indivision, quelle que soit la nature desdites créances, selon les règles applicables à leur régime matrimonial, lors de l'établissement des comptes s'y rapportant.

Aussi et en ce compris pour les dépenses de conservation, Monsieur [Y] est irrecevable en sa demande directe tendant à revendiquer sa créance dans une instance distincte des opérations de liquidation des droits respectifs des parties, dont l'ouverture a, préalablement au 1er janvier 2007, été ordonnée accessoirement au prononcé du divorce par une disposition devenue de longue date irrévocable. Il lui appartient le cas échéant de former sa demande devant la notaire désigné au titre des opérations liquidatives, de faire dresser, en cas de contestation sur cette demande, un procès-verbal de difficultés puis faire trancher sur rapport du juge commis cette éventuelle contestation relative au bien indivis sans qu'aucune des parties ne soit ensuite privée de la possibilité d'émettre de nouvelles contestations sur le projet d'acte liquidatif et de partage dès lors que ces contestations porteront sur des points non déjà tranchés.

Dès lors, la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a fait droit à la fin de non-recevoir soulevée par Madame [G] et tirée de l'article 837 ancien du Code civil.

III- Sur les frais et dépens

Les dispositions de la décision déférée, portant sur les dépens et sur l'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, seront confirmées.

Par ailleurs, partie qui succombe également en appel, Monsieur [Y] sera condamné aux dépens d'appel.

L'équité commande de ne pas prononcer en cause d'appel de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme la décision déférée en toutes ses dispositions contestées ;

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à condamnation au titre l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne Monsieur [Y] aux dépens d'appel ;

Rejette toute autre ou plus ample demande.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 6ème chambre b
Numéro d'arrêt : 22/02271
Date de la décision : 20/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-20;22.02271 ?
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