3ème Chambre Commerciale
ARRÊT N°460
N° RG 22/00871
N° Portalis
DBVL-V-B7G-SO6T
JONCTION avec le N° RG 22/906
S.A.S. SUSTY WASTES SOLUTIONS FRANCE
C/
S.A.S. AR.VAL
Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me GUILLEUX
Me BOMMELAER
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 20 SEPTEMBRE 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,
Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,
Assesseur : Monsieur Dominique GARET, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Frédérique HABARE, lors des débats et Madame Julie ROUET lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 23 Juin 2022 devant Madame Olivia JEORGER-LE GAC, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 20 Septembre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTES :
S.A.S. SUSTY WASTES SOLUTIONS TEAM, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de VANNES sous le numéro 890 922 131, prise en la personne de son représentant légal domicilié au siège
[Adresse 6]
[Localité 2]
S.A.S. SUSTY WASTES SOLUTIONS FRANCE, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de VANNES sous le numéro 892 451 808, prise en la personne de son représentant légal domicilié au siège
[Adresse 6]
[Localité 2]
Représentées par Me Géraldine GUILLEUX, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentées par Me Slimane GACHI, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉE :
S.A.S. AR.VAL, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de VANNES sous le numéro 429 676 067, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Roxane LE HEN substituant Me Nicolas DE LA TASTE de la SELARL CVS, Plaidant, avocat au barreau de NANTES
Représentée par Me Benoît BOMMELAER de la SELARL CVS, Postulant, avocat au barreau de RENNES
La SAS ARVAL, inscrite au RCS de Vannes, a pour activité la conception et la réalisation d'équipements de process et de manutention pour l'industrie du traitement des déchets ménagers et industriels.
Elle fait partie du groupe CERES présidé par M. [B]
M. [BB] [N], embauché en 2010, était son directeur général jusqu'à ce qu'il fasse l'objet d'une procédure de licenciement avec mise à pied conservatoire le 27 avril 2020, pour plusieurs motifs tenant globalement à l'irrespect des consignes du groupe et plus particulièrement de celles données par M. [B], avec une gestion déficitaire de la société qualifiée 'd'opaque' par sa société mère.
Dans les semaines ayant suivi, la société ARVAL aurait alors fait face à la démission d'une vingtaine de salariés (sur soixante salariés), dont celles des principaux cadres, soit le directeur du site, M. [P] [Y] et le responsable SAV M. [BB] [H].
Il est apparu qu'alors que Messieurs [N], [Y] et [H] étaient encore salariés de la société ARVAL, ils ont immatriculé en Belgique, le 16 avril 2020, une société MGC HOLDING.
Puis, avec une société de droit polonais, POLMECANIC GROUP, par ailleurs sous-traitant habituel de la société AR VAL (20% des achats de biens d'équipements de la société AR VAL), la société MGC HOLDING a créé le 23 avril 2020, une société de droit belge SUSTY WASTE SOLUTIONS (SWS) ayant une activité similaire à celle de la société AR VAL.
Quelques mois plus tard ont été créées des sociétés de droit français SWS TEAM (au RCS de Vannes, soit proche de la société AR VAL) et SWS FRANCE, aux activités directement concurrentes de celles de la société AR VAL.
Un rapport de surveillance privé, daté de la fin du mois de novembre 2020, a été établi que se trouvaient régulièrement présents sur le site de la société SWS TEAM, présidée par M. [N], cinq anciens salariés de la société AR VAL soit Messieurs [M], [E], [F], [I], [W].
Il est aussi apparu que douze anciens salariés de la société AR VAL avaient une adresse de courriel se terminant par suzywaste.com.
Le groupe CERES et la société AR VAL auraient ensuite découvert que M. [N], dans les mois précédant son départ, aurait volontairement et durablement affaibli la société AR VAL, en signant ou tentant de signer des contrats contraires à ses intérêts :
- d'une part il aurait accordé des conditions commerciales atipyques et désavantageuses au sous traitant POLMECANIC GOUPE, passant de conditions de paiement usuelles en 2018 (30% à la commande, 60% selon avancement mensuel, 5% après mise en route, 5% à réception client final) à 100% du paiement avant livraison et sans garantie en avril 2020,
- d'autre part en signant un marché ruineux avec une collectivité publique, que la société AR VAL a dû poursuivre à perte (un million d'euros),
- ensuite en ne demandant pas l'agrément nécessaire à l'obtention d'un marché public en Belgique, dont la société AR VAL avait pourtant remporté l'appel d'offres, conduisant celle-ci à être ensuite, le 25 mai 2020, évincée par la collectivité lorsqu'elle n'a pu justifier de l'agrément.
La société AR VAL a appris que le marché avait été attribué le 20 Octobre 2010 à un groupement de sociétés constitué des sociétés SWS, POMECANIC GROUP, ID AUTOMATION.
Enfin, la société AR VAL et son sous-traitant la société PMF avait conçu et mis en oeuvre une nouvelle chaîne de tri sur un site exploité dans l'Hérault ([Localité 4]) par la société DELTA RECYCLAGE, filiale d'une société PAPREC.
Avant réception, au mois d'août 2019, un incendie a détruit une partie de l'installation.
Alors que la société AR VAL, par son directeur général M. [N], était en discussion avec son client pour obtenir le marché du démontage de la chaîne de tri, celui-ci a été attribué au mois de juin 2020 à la société PMF qui est une filiale de la société POLMECANIC.
La société AR VAL a ensuite découvert que l'un de ses anciens salariés, M. [O], embauché chez SWS, aurait transféré à cette entreprise un document que lui-même avait établi pour ce projet alors qu'il travaillait chez AR VAL.
La société AR VAL suppose dès lors qu'en fait la société SWS se soit vue attribuer le marché du démontage, en utilisant ses propres plans et son propre sous-traitant, la société PMF.
En dernier lieu :
- la société AR VAL, qui rémunère une soixantaine de licence d'un logiciel de conception coûteux, dénommé SOLIDWORKS, a été avisée par son fournisseur que l'une d'elle avait été détournée et utilisée frauduleusement,
- la société AR VAL, après fait examiner au mois de juillet 2020 l'ordinateur de M. [N], aurait découvert que l'utilisation d'un logiciel spécifique, M. [N] aurait supprimé toutes les données y figurant.
Ces circonstances ont conduit la société AR VAL a déposer une requête visant à être autorisée à organiser une mesure de constat non contradictoire au siège des sociétés SWS FRANCE et SWS TEAM dans les termes suivants :
- se rendre, assisté, d'un informaticien,au siège de la société SUSTY WASTE SOLUTIONS TEAM et la société SUSTY WASTE SOLUTIONS FRANCE, se trouvant chacune [Adresse 5],
- y pénétrer,
- rechercher la présence sur papiers, sur tous supports informatiques de SWS, ordinateurs (bureau/portable), le ou les téléphones portables de Monsieur [BB] [N] et de ses associés Messieurs [Y] et [H], l'ensemble des documents commerciaux, techniques ou autres, et notamment les fichiers clients, tarifs, correspondances, devis (plus particulièrement une liste des devis supra) factures, provenant de la société AR VAL ; à cette fin, l'huissier pourra se référer aux documents techniques et commerciaux qui lui seront préalablement remis par la société AR VAL,
- constater si ces documents font l'objet d'une exploitation commerciale au nom et pour le compte de la société SWS,
- prendre copie des supports identifiés et intéressant la mission de l'huissier sur tous supports y compris informatiques, par tous moyens, ou s'en faire remettre copie sur tous supports, au besoin sur place et conserver lesdites copies aussitôt les opérations de constat effectuées,
- accéder aux fichiers clients, aux fichiers propects et aux devis de la société
SWS depuis sa constitution de manière à permettre une comparaison avec ceux de la société AR VAL préalablement remis à l'huissier et ce, afin de mettre en évidence par quelque moyen que ce soit l'apparition dans les fichiers de la société SWS des clients de la société AR VAL,
- vérifier la bonne régularité des licences SOLIDWORKS qui sont utilisées par la société SWS pour la CAO,
- ne prendre en aucun cas copie du fichier client ou du fichier prospect de la société SWS sauf en cas de nécessité pour l'accomplissement de sa mission et dans ce cas conserver cette copie en son étude et n'en confier en aucun cas un tirage à la requérante,
- prend connaissance et au besoin copie du registre du personnel de manière à dresser la liste des anciens salariés d'ARVAL qui ont été recrutés par SWS et/ou d'identifier la situation des personnes suivantes tous ex salariés d' AR VAL: [BB] [N], [P] [Y], [BB] [H], [D] [I], [X] [U], [J] [NE], [A] [O], [V] [E], [R] [F], [Z] [L], [S] [M], [G] [C], [ZE] [K],
- pouvoir évaluer le rapport des anciens salariés de la société AR VAL remis au service de SWS par rapport aux réels nouveaux recrutés,
- prendre copie toutes les factures fournisseurs car certains anciens salariés seraient exploités en tant qu'autoentrepreneurs et ne feraient pas partie des salariés ([ZE] [K], [Z] [L] etc ...),
- prendre copie de l'ensemble des mails de SWS et de [BB] [N] en réception/envoi vers les adresses avec le nom de domaine suivant :
@arval.fr
@sogefa.fr
@ceres-groupe.fr
Par ordonnance du 16 février 2021, le Président du Tribunal de commerce de Vannes a rendu une ordonnance sur requête conforme à la requête.
Cette ordonnance a été exécutée le 15 mars 2021.
Le directeur général de la société SWS FRANCE, M. [Y], a refusé de laisser l'huissier accéder aux fichiers et documents et a répondu à certaines questions.
La société AR VAL a alors déposé une nouvelle requête, et le 22 mars 2021, le Président du tribunal de commerce de Vannes a rendu une deuxième ordonnance, autorisant l'huissier, avec la même mission que précédemment, à se rendre au siège des sociétés accompagné d'un serrurier, de la force publique et à défaut, de deux témoins majeurs.
Cette ordonnance a été exécutée le 1er avril 2021.
Par acte du 05 mai 2021, les sociétés SWS TEAM et SWS FRANCE ont assigné la société AR VAL en référés rétractation.
Par ordonnance du 21 janvier 2022, le juge des référés du tribunal de commerce de Vannes a :
- débouté les sociétés SWS TEAM et SWS FRANCE de leurs prétentions,
- confirmé les ordonnances des 16 février 2021 et 22 mars 2021 dans leurs dispositions relatives aux sociétés SWS TEAM et SWS FRANCE,
- condamné in solidum les sociétés SWS TEAM et SWS FRANCE à payer à la société AR VAL la somme de 3.000 euros de frais irrépétibles,
- les a condamnées aux dépens.
La société SWS TEAM a fait appel selon dossier RG 22/906 et la société SWS FRANCE a fait appel selon dossier RG 22/00871.
Dans les deux dossiers, leurs conclusions sont prises au nom des deux sociétés.
Les sociétés SWS TEAM et SWS FRANCE, dans leurs conclusions du 31 mai 2022, ont demandé que la Cour :
- infirme l'ordonnance déférée,
- rétracte l'ordonnance du 16 février 2021,
- rétracte l'ordonnance du 22 mars 2021,
- prononce la nullité des mesures subséquentes,
- ordonne la remise aux sociétés SWS TEAM et SWS FRANCE des différents documents, supports, matériels informatiques remis, copiés, produits, reproduits à l'occasion de l'exécution des orodnnances,
- condamne la société AR VAL au paiement de la somme de 15.000 euros pour procédure abusive,
- condamne la société AR VAL au paiement de la somme de 10.000 euros pour frai irrépétibles de première instance et de 10.000 euros pour frais irrépétibles d'appel,
- la condamne aux dépens.
Par conclusions du 03 juin 2022 prises contre la société SWS FRANCE, la société AR VAL a demandé que la Cour :
- déboute la société SWS FRANCE de ses demandes,
- confirme l'ordonnance de référés du 21 janvier 2022,
- condamne la société SWS FRANCE au paiement de la somme de 10.000 euros de frais irrépétibles et aux dépens.
Par conclusions du 03 juin 2022 prises contre la société SWS TEAM, la société AR VAL a demandé que la Cour :
- déboute la société SWS TEAM de ses demandes,
- confirme l'ordonnance de réféés du 21 janvier 2022,
- condamne la socité SWS TEAM aux dépens.
MOTIFS DE LA DÉCISION:
Sur la procédure d'appel :
Les deux déclarations d'appel concernent la même décision de première instance.
Une bonne admnistration de la justice justifie dès lors que soit prononcée la jonction des procédures 22/00871 et 22/906.
Sur l'ordonnance du 16 février 2021 :
Les sociétés SWS FRANCE et SWS TEAM font grief à la société AR VAL :
- d'avoir violé les disposition de l'article 495 du code de procédure civile en ne leur présentant pas la minute de l'ordonnance antérieurement au commencement des mesures de constat, alors qu'il s'agit d'une condition essentielle de sa validité,
- de n'avoir pas signifié l'ordonnance à Messieurs [N], [Y] et [H], alors même leurs téléphones portables étaient expressément visés dans l'ordonnance et qu'ainsi, au même titre que les sociétés SWS FRANCE et SWS TEAM, ils auraient été des personnes à qui la mesure était opposée.
La société AR VAL répond en premier lieu qu'il n'appartient pas au juge de la rétractation de vérifier les conditions d'exécution de l'ordonnance qu'il lui est demandé de rétracter.
Cette thèse est inexacte lorsque le grief concerne les modalités de signification de l'ordonnance sur requête, une irrégularité en la matière pouvant être cause de sa rétractation.
En premier lieu, l'ordonnance prévoyait que l'huissier devait 'rechercher la présence sur papiers, sur tous supports informatiques de SWS, ordinateurs (bureau/portable), le ou les téléphones portables de Monsieur [BB] [N] et de ses associés Messieurs [Y] et [H], l'ensemble des documents commerciaux, techniques ou autres, et notamment les fichiers clients, tarifs, correspondances, devis (plus particulièrement une liste des devis supra) factures, provenant de la société AR VAL; à cette fin, l'huissier pourra se référer aux documents techniques et commerciaux qui lui seront préalablement remis par la société AR VAL' (souligné par la Cour).
Messieurs [N], [Y] et [H] faisaient donc partie des personnes auxquelles l'ordonnance était opposée, et auxquelles l'ordonnance devait être signifiée.
Il n'est pas contesté qu'elle ne l'a pas été.
Pour autant, seuls les intéressés pouvaient se prévaloir de cette irrégularité pour demander la rétractation de l'ordonnance ; or, ils ne se sont pas joints à la procédure en référé-rétractation diligentée par les sociétés SWS FRANCE et SWS TEAM, ce dont il résulte que le grief ne peut être évoqué par ces dernières.
En second lieu, l'examen de l'acte de signification du 15 mars 2021 concernant la société SWS FRANCE démontre que l'huissier a indiqué 'signifier et laisser copie d'une ordonnance (0/2021/87) du Président du Tribunal de Commerce de Vannes en date du 16 février 2021, rendu sur requête en date du 19 janvier 2021 rectifiée le 04 février 2021, dont copie vous est donnée par le présent acte'.
L'acte a été signifié à [P] [Y], directeur d'unité, ayant déclaré être habilité à recevoir l'acte.
L'examen de l'acte de signification du 15 mars 2021 concernant la société SWS TEAM démontre que l'huissier a indiqué 'signifier et laisser copie d'une ordonnance (0/2021/87) du Président du Tribunal de Commerce de Vannes en date du 16 février 2021, rendu sur requête en date du 19 janvier 2021 rectifiée le 04 février 2021, dont copie vous est donnée par le présent acte'.
L'acte a été signifié à domicile et remis à M. [Y], ce dernier n'étant pas habilité à recevoir les actes concernant cette société.
Il est constant qu'il n'est pas indiqué sur les actes de signification que l'huissier a présenté la minute de l'ordonnance.
Il est sans incidence que Maître [T], huissier de justice instrumentaire, ait rédigé une attestation, le 31 mai 2021, déclarant avoir présenté la minute et procédé à sa lecture en présence des représentants des sociétés SWS TEAM et SWS FRANCE.
Cette attestation ne peut pallier l'omission d'une mention dans un acte de signification, un tel acte devant, aux termes des dispositions de l'article 663 du code de procédure civile, se suffire à lui-même et mentionner toutes les diligences acomplies.
Il ne peut donc qu'être constaté que la minute de l'ordonnance n'a pas été présentée au représentant de la société SWS FRANCE - elle n'avait pas à être présentée pour SWS TEAM en l'absence de personne habilitée à la représenter.
En vertu des dispositions des articles 502 et 503 du code de procédure civile, nul jugement, nul acte, ne peut être mis à exécution que sur présentation d'une expédition revêtue de la formule exécutoire à moins que la loi n'en dispose autrement, et les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu'après leur avoir éténotifiés, à moins que l'exécution n'en soit volontaire. En cas d'exécution au seul vu de la minute, la présentation de celle-ci vaut notification.
En l'espèce, en vertu des dispositions de l'article 495 du code de procédure civile, l'ordonnance sur requête du 16 février 2021 ayant autorisé les mesures de constat au siège des sociétés SWS TEAM et SWS FRANCE était exécutoire sur minute.
Il se déduit des dispositions précitées que cette ordonnance pouvait ainsi être exécutée :
- soit au vu de sa minute, c'est-à-dire de l'original de l'ordonnance, les dispositions de l'article 494 du code de procédure civile prévoyant que la requête soit présentée en double exemplaire, permettant ainsi que soient établis deux doubles originaux,
l'un conservé au greffe de la juridiction, l'autre remis à l'avocat du requérant,
- soit en en signifiant une copie revêtue de la formule exécutoire,
- soit volontairement par les personnes auxquelles elle était opposée.
La présentation de la minute n'a pas eu lieu.
S'agissant de signification d'une copie revêtue de la formule exécutoire, la Cour relève, à l'examen de la copie de l'ordonnance figurant aux dossiers des parties, que celle-ci est signée par le Président et le greffier et comporte un cachet avec la Marianne du Tribunal de commerce de Vannes et un tampon 'Déposé au Greffe du Tribunal de commerce de Vannes le 16 février 2021".
Selon les dispositions du décret 47-1047 du 12 juin 1947 relatif à la formule exécutoire, celle-ci, apposée par le greffier, est la suivante :
"République française
"Au nom du peuple français ",
"En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt (ou ledit jugement, etc.) à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d'y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu'ils en seront légalement requis.
"En foi de quoi, le présent arrêt (ou jugement, etc.) a été signé par...".
Les deux cachets figurant sur la copie de l'ordonnance remise aux sociétés SWS FRANCE et SWS TEAM ne peuvent donc faire office de formule exécutoire.
Enfin, aucune exécution volontaire n'a eu lieu de la part des sociétés SWS FRANCE et SWS TEAM, M. [Y] s'étant opposé à ce que l'huissier consulte les supports informatiques et ayant uniquement accepté de répondre à certaines questions, dont les réponses ont été retranscrites sur un procès-verbal du 15 mars 2021.
A l'examen de ce procès-verbal, Me [T] n'a pris connaissance d'aucun document et s'est borné à constater le refus de M. [Y] de lui laisser l'accès aux documents et fichiers et à reproduire ses réponses volontaires aux questions qu'il lui posait.
Dès lors, s'il convient, au regard de l'irrégularité des significations, de rétracter l'ordonnance du 16 février 2021, il n'y a pas lieu d'annuler le procès-verbal de constat du 15 mars 2021, celui-ci n'étant que la reproduction des propos volontairement tenus par M. [Y] et en aucun cas le résultat des mesures d'investigations prescrites par ladite ordonnance.
Sur l'ordonnance du 22 mars 2021:
Le 22 mars 2021, le Président du tribunal de commerce de Vannes a rendu une deuxième ordonnance, autorisant l'huissier, avec la même mission que précédemment, à se rendre au siège des sociétés accompagné d'un serrurier, de la force publique et à défaut, de deux témoins majeurs.
Cette ordonnance a été exécutée le 1er avril 2021 et quoique la Cour ne dispose pas du procès-verbal de constat, il est acquis aux débats que l'huissier a cette fois eu accès aux documents et supports informatiques.
Cette ordonnance a été signifiée le 1er avril 2021 pour la société SWS TEAM, à la personne de M. [N], qui a déclaré être habilité à recevoir l'acte et pour la société SWS FRANCE à la personne de M. [Y] qui a déclaré être habilité à recevoir l'acte.
Les modalités de signification ont été identiques à celles de l'ordonnance du 16 février 2021 :
- aucune signification à Messieurs [N], [Y] et [H],
- aucune mention dans les deux significations que la minute de l'ordonnance ait été présentée aux personnes auxquelles l'ordonnance devait être opposée,
- aucune formule exécutoire apposée sur l'ordonnance ayant été signifiée.
Ainsi qu'il a été dit plus haut, les sociétés SWS FRANCE et SWS TEAM ne peuvent se prévaloir du défaut de signification de l'ordonnance à Messieurs [N], [Y], et [H].
En revanche, elles invoquent à raison l'absence de présentation de la minute de l'ordonnance, à laquelle n'a pu être substituée la signification d'une ordonnance revêtue de la formule exécutoire.
L'ordonnance est donc rétractée, avec toutes conséquences sur la validité des opérations réalisées en son exécution, lesquelles sont déclarées nulles, la société AR VAL devant restituer toutes les pièces copiées ou saisies et ne pouvant en faire usage pour quelque motif que ce soit.
Sur la demande de dommages et intérêts :
Les société SWS FRANCE et SWS TEAM ne démontrant pas que l'action de la société AR VAL ait eu d'autre objet que la recherche ou la conservation de preuves nécessaires à faire valoir ses droits, leur demande de dommages et intérêts est rejetée.
Sur les frais et dépens :
La société AR VAL, qui succombe, supportera la charge des dépens de première instance et d'appel.
Les demandes formées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile sont rejetées.
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Prononce la jonction des procédures RG 22/00906 et 22/00871.
Confirme l'ordonnance déférée en ce qu'elle a débouté les sociétés SUSTY WASTE SOLUTION FRANCE et SUSTY WASTE SOLUTION TEAM de leur demande d'annulation du procès-verbal de constat établi le 15 mars 2021 par Me [T] et en ce qu'elle les a déboutées de leur demande de dommages et intérêts.
L'infirme pour le solde.
Statuant à nouveau :
Rétracte l'ordonnance sur requête rendue le 16 février 2021 par le Président du tribunal de commerce de Vannes dans ses dispositions relatives aux sociétés SUSTY WASTE SOLUTION FRANCE et SUSTY WASTE SOLUTION TEAM.
Rétracte l'ordonnance sur requête rendue le 22 mars 2021 par le Président du tribunal de commerce de Vannes dans ses dispositions relatives aux sociétés SUSTY WASTE SOLUTION FRANCE et SUSTY WASTE SOLUTION TEAM.
Dit que la société AR VAL devra restituer aux sociétés SUSTY WASTE SOLUTION FRANCE et SUSTY WASTE SOLUTION TEAM l'ensemble des pièces copiées ou saisies le 1er avril 2021 en exécution de l'ordonnance du 22 mars 2021.
Rappelle qu'en conséquence, il est fait interdiction à la société AR VAL d'utiliser à quelque titre que ce soit les pièces saisies ou copiées le 1er avril 2021.
Condamne la société AR VAL aux dépens de première instance et d'appel.
Rejette les demandes présentées au titre des frais irrépétibles.
Le Greffier, Le Président,