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15/09/2022 | FRANCE | N°19/04967

France | France, Cour d'appel de Rennes, 7ème ch prud'homale, 15 septembre 2022, 19/04967


7ème Ch Prud'homale





ARRÊT N°398



N° RG 19/04967 - N° Portalis DBVL-V-B7D-P7AT













Association OGEC ECOLE [5]



C/



Mme [B] [F]

























Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 15 SEPTEMBRE 2022





COMPOSITION

DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Liliane LE MERLUS, Conseillère, Faisant fonction de Présidente,

Assesseur : Madame Isabelle CHARPENTIER, Conseillère,

Assesseur : Monsieur Hervé KORSEC, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles,



GREFFIER :



Madame Françoise DELAUNAY...

7ème Ch Prud'homale

ARRÊT N°398

N° RG 19/04967 - N° Portalis DBVL-V-B7D-P7AT

Association OGEC ECOLE [5]

C/

Mme [B] [F]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 15 SEPTEMBRE 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Liliane LE MERLUS, Conseillère, Faisant fonction de Présidente,

Assesseur : Madame Isabelle CHARPENTIER, Conseillère,

Assesseur : Monsieur Hervé KORSEC, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles,

GREFFIER :

Madame Françoise DELAUNAY, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 14 Juin 2022, devant Madame Isabelle CHARPENTIER, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

En présence de Monsieur [H], médiateur judiciaire

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 15 Septembre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

Association OGEC ECOLE [5] prise en la personne de son Président

[Adresse 4]

[Adresse 4] / FRANCE

Représentée par Me Bruno LOUVEL de la SELARL PHENIX, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES substitué par Me LEMOINE, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉE :

Madame [B] [F]

née le 02 Avril 1960 à [Localité 2]

[Adresse 1]

[Adresse 1] /FRANCE

Représentée par Me Gaëlle PENEAU-MELLET de la SELARL PENEAU & DOUARD AVOCATS ASSOCIÉS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES substituée par Me MAZROUI, avocat au barreau de RENNES

EXPOSÉ DU LITIGE

L'association OGEC de l'Ecole [5] est une association à but non lucratif en charge de la gestion de l'école primaire et maternelle [5] située à [Localité 3] (35). Elle employait moins de 10 salariés au 31 décembre 2016 et applique la convention collective nationale de l'enseignement privé.

Mme [B] [F] a été engagée le 1er octobre 1993 en qualité d'agent de service dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel par l'association OGEC ECOLE [5].

Au cours de la relation de travail, les parties ont conclu des avenants prévoyant une annualisation et une modulation de son temps de travail durant l'année scolaire :

- le 22 mars 2000, 1 080 heures par an réparties sur 40 semaines, jours fériés inclus, soit 27 heures par semaine,

- le 1er septembre 2005, 1 440 heures par an réparties sur 40 semaines, jours fériés inclus, soit 36 heures par semaine,

- le 1er septembre 2010, 1 406 heures par an réparties sur 37 semaines, jours fériés inclus, soit 38 heures par semaine,

la salariée percevait en dernier lieu un salaire brut de 1 512,44 euros par mois, pour 140,06 heures en moyenne par mois.

Le 13 mars 2017, la fédération départementale des OGEC ( UDOGEC 35) a alerté l'association OGEC de l'Ecole [5] sur sa situation financière et a préconisé une restructuration de la masse salariale pour améliorer la situation de l'association.

Par courrier recommandé du 28 juin 2017, l'employeur a proposé à Mme [F] une modification de son contrat de travail pour un motif économique, portant sur la durée du travail réduite à 1 184 heures par an, soit 32 heures hebdomadaires pendant les périodes de travail scolaire, moyennant un salaire de 1 275,74 euros par mois.

La salariée a refusé cette modification dans un courrier du 27 juillet 2017, en raison de la perte de salaire.

Par courrier recommandé du 1er septembre 2017, l'Association OGEC de l'Ecole [5] a informé la salariée qu'il envisageait une mesure de licenciement pour motif économique à son égard compte tenu du contexte économique traversé par l'école [5]. Il l'a convoquée à un entretien préalable à licenciement pour motif économique pour le 15 septembre 2017.

Le 4 septembre 2017, l'employeur remettait à la salarié la nouvelle répartition de ses horaires de travail 'suite à la non reconduction des temps d'activités périscolaires'sur la base de 38 heures hebdomadaires.

Lors de l'entretien préalable du 15 septembre 2017, l'employeur a résumé les informations communiquées à Mme [F] sur les motifs économiques du licenciement envisagé et sur la proposition du contrat de sécurisation professionnelle ( CSP).

Le 5 octobre 2017, l'employeur lui a notifié son licenciement pour motif économique dans un courrier ainsi libellé :

' Par courrier du 1er septembre 2017, nous vous avons convoqué à un entretien préalable sur le projet de licenciement économique vous concernant. Vous vous êtes présentée assistée de M.[M] pour motif économique au cours duquel nous vous avons indiqué les motifs économiques de la procédure engagée .

Par la présente, nous avons le regret de vous notifier votre licenciement pour motif économique. Les motifs économiques de cette décision, nous vous le rappelons, sont les suivants

l'association connaît depuis la rentrée scolaire de septembre 2015 une baisse de ses effectifs notamment en maternelle. Les ressources financières de notre association sont proportionnelles au nombre d'élèves inscrits puisque les produits sont constitués des contributions des familles et du forfait communal notamment. Cette baisse significative de nos recettes sur l'exercice comptable 2015/2016 s'est également poursuivie sur l'exercice 2016/2017. Elle entraîne des difficultés économiques, l'exercice comptable 2015/2016 étant déficitaire, celui de 2016/2017 également. Dans ce contexte, il a été nécessaire de réorganiser, pour assurer la pérennité de notre association, en adaptant notre structure au niveau de l'effectif élèves atteint. Il vous a donc été proposé une modification de contrat de travail pour motif économique par lettre en date du 28 juin 2017 liée à la réduction du temps de travail. Vous avez expressément refusé cette proposition, en conséquence, en raison des motifs ci-dessus précisés, dans le cadre de la réorganisation engagée en vue d'assurer la pérennité de notre association, nous avons été dans l'obligation d'engager une procédure de licenciement économique liée au refus de la modification de votre contrat de travail. Cela entraîne la fin de votre contrat de travail avec notre association.

Nous avons recherché toutes possibilités de reclassement. Eu égard au contexte économique traversé par notre établissement scolaire, nous n'avons pas eu d'autre proposition à vous présenter que celle indiquée dans la lettre de convocation à l'entretien préalable et que vous avez refusée.

Dans le cadre de cette procédure engagée, nous vous rappelons qu'au cours de votre entretien préalable du 15 septembre 2017, nous vous avons proposé d'adhérer à un contrat de sécurisation professionnelle conformément à l'article L 1233-65 du code du travail.

Vous disposez d'un délai de 21 jours (..) jusqu'au 6 octobre 2017, pour nous faire part de votre volonté de bénéficier de ce dispositif.Si vous manifestez votre accord pendant ce délai, votre contrat de travail se trouvera rompu d'un commun accord des parties à l'expiration du délai de réflexion, soit le 6 octobre 2017 (..)

Nous vous précisions que nous vous dispensons de l'exécution de ce préavis ( de trois mois) (...)'.

La salariée ayant adhéré au contrat de sécurisation professionnelle, le contrat de travail a pris fin d'un commun accord le 6 octobre 2017.

Le 13 octobre 2017, l'Association OGEC a transmis à Mme [F] une proposition d'un poste à temps partiel d'agent spécialisé des écoles maternelles (ASEM) sur la base d'un horaire annuel de 1 184 heures de travail effectif, soit 32 heures par semaine, que la salariée a refusé par courrier du 21 octobre 2017.

Le 21 octobre 2017, Mme [F] a informé l'association de son souhait d'user de son droit à une priorité de réembauchage.

Le 26 octobre 2017, l'Association lui a proposé un poste d'ASEM sur la base de 629,18 heures par an, soit de 17,50 heures par semaine.

Dans un courrier daté du 31 octobre 2017, Mme [F], par la voix de son avocat, a interrogé l'association sur les motifs économiques à l'origine de la rupture de son contrat de travail et sur l'absence de mise en place d'une réduction moins importante de son temps de travail et de son salaire. Elle a sollicité une issue négociée de son dossier avant la saisine de la juridiction prud'homale.

***

Mme [F] a saisi le conseil de prud'hommes de Rennes par requête du 11 janvier 2018 afin de voir :

- Dire que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse

- obtenir le paiement :

- de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 36 298,56 Euros

- d'un rappel de préavis : 1512,44 € et congés payés afférents : 151 €

- d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile : 1 500 Euros

- condamner l'employeur aux entiers dépens.

L'association OGEC ECOLE [5] a demandé au conseil de :

- Dire que le licenciement de Mme [F] repose sur un motif économique réel et sérieux

- Dire que l'employeur a respecté l'obligation de reclassement,.

- Dire que le licenciement pour motif économique repose sur une cause réelle et sérieuse

- Débouter Mme [F] de l'ensemble de ses demandes

- lui allouer une indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile : 2 500 €

- Dépens.

Par jugement en date du 11 juillet 2019, le conseil de prud'hommes de Rennes a :

- Dit que le licenciement notifié le 6 octobre 2017 n'est pas fondé sur une cause réelle et sérieuse.

- Condamné l'OGEC ECOLE [5] à régler à Madame [F] [B] les sommes suivantes

- 26 468 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 1 512.44 € au titre du rappel de préavis et celle de 151 € au titre des congés payés afférents au préavis

- 1 500 € à titre d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- Fixé la moyenne brute mensuelle des salaires à la somme de 1512.44 euros.

- Dit que les sommes à caractère salarial porteront intérêts au taux légal à compter de la citation, celles à caractère indemnitaire à compter du prononcé du jugement ;

- Débouté l'OGEC ECOLE [5] de ses demandes,

- Condamné l'OGEC ECOLE [5] aux dépens d'instance y compris ceux éventuels d'exécution du jugement.

L'Association OGEC ECOLE [5] a interjeté appel de la décision par déclaration au greffe du 24 juillet 2019.

En l'état de ses dernières conclusions transmises par RPVA le 18 octobre 2019, l'OGEC Ecole [5] demande à la cour de :

- Infirmant dans toutes ses dispositions et statuant à nouveau :

- Dire que les difficultés économiques et la nécessité de réorganisation pour la pérennité de l'OGEC ECOLE [5] sont avérées ;

- Dire que l'OGEC ECOLE [5], et l'UDOGEC d'Ille et Vilaine ne constituent pas un groupe de reclassement au sens de l'article L. 1233-4 du code du travail en l'absence de permutabilité de personnel ;

- Dire que l'OGEC ECOLE [5] démontre l'absence de poste disponible autre que celui proposé et refusé par Mme [F],

- Dire et juger en conséquence que l'OGEC ECOLE [5] a respecté son obligation de reclassement ;

- dire que le licenciement pour motif économique de Mme [F] repose sur une cause réelle et sérieuse et partant débouter Mme [F] de ses demandes

' de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à défaut les réduire à de plus justes proportions ;

' d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents ;

' d'indemnisation au titre de l'article 700 du Code de procédure civile;

- Condamner Mme [F] au paiement de la somme de 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance dont distraction selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

En l'état de ses dernières conclusions transmises par RPVA le 7 janvier 2020, Mme [F] demande à la cour de :

- Confirmer la décision en ce qu'elle a dit que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

- Infirmer la décision sur le quantum alloué au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- Condamner l'OGEC Ecole [5] à lui verser :

- à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse: 36 298.56 €

- à titre de rappel de préavis : 1512.44 €. € outre 151 € de congés payés.

- au titre de l'article 700 du code de procédure civile : 1500 euros.

- Condamner le même aux entiers dépens.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 31 mai 2022 avec fixation de l'affaire à l'audience du 14 juin 2022.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour l'exposé des prétentions et moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont déposées et soutenues à l'audience.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le licenciement pour motif économique

Aux termes de l'article L 1233-3 du code du travail dans sa rédaction alors applicable, constitue un licenciement pour motif économique, le licenciement effectué pour un ou plusieurs motifs, non inhérents à la personne du salarié, qui repose sur une cause économique (notamment des difficultés économiques ou des mutations technologiques mais aussi la réorganisation de l'entreprise, la cessation non fautive d'activité de l'entreprise), laquelle cause économique doit avoir une incidence sur l'emploi du salarié concerné ou sur son contrat de travail, en l'occurrence, emporter une modification refusée par le salarié, d'un élément essentiel de son contrat de travail.

Sur le motif économique

Mme [F] remet en cause le motif économique du projet de licenciement au motif que son employeur ne produit aucun élément, au-delà des comptes, permettant de vérifier que la compétitivité de l'OGEC voire sa pérennité était menacée ; que l'endettement était en cours de diminution au 31 août 2017, que la participation des familles restait constante, que la diminution de la durée de travail de la salariée et son licenciement n'impliquaient aucune véritable économie pour la structure associative dont la pérennité n'était pas en jeu.

L'OGEC de l'école [5] demande la confirmation du jugement qui a retenu l'existence d'un motif économique au regard des difficultés économiques rencontrées et de la menace sur sa pérennité.

Il résulte des documents comptables de l'OGEC de l'école [5] ( pièce 3) que :

- à la date de la notification du licenciement le 5 octobre 2017, le résultat financier de l'association affichait un déficit de 4 474,17 euros au 31 août 2017, s'était creusé par rapport à l'année précédente

( - 772,65 euros), l'exercice comptable de l'association courant du 1er septembre de l'année N au 31 août de l'année N+1,

- le nombre des enfants scolarisés dans une classe maternelle et de 3 classes élémentaires était en baisse continue depuis l'année 2013, entraînant une réduction forte des participations et des subventions allouées par les collectivités territoriales et l'Etat, réduction insuffisamment compensée par la hausse de la participation des parents,

- la situation financière de l'association également fragilisée par une hausse de la masse salariale, la diminution des contrats aidés, des perspectives à la baisse des effectifs prévisionnels, un endettement accru, nécessitait une restructuration passant par une adaptation des heures de travail du personnel

(' point sur le prévisionnel ' du 13 mars 2017" pièce 8 ).

- l'employeur justifie de la recherche des solutions se traduisant par des propositions de réduction du temps de travail, rejetée par Mme [F] et acceptée par ses deux autres collègues.

De ces éléments, il découle que la réorganisation de l'association confrontée à des difficultés économiques réelles à l'époque du licenciement était nécessaire et qu'elle était indispensable à la pérennité de la structure. La preuve des difficultés économiques invoquées à l'appui du licenciement de Mme [F] pour motif économique est rapportée comme l'a retenu à juste titre le conseil.

Sur l'obligation de reclassement

L'obligation de reclassement dont la preuve doit être rapportée par l'employeur est une obligation de moyen renforcée. Les possibilités de reclassement doivent être recherchées au sein de l'entreprise et le cas échéant en cas d'appartenance à un groupe de sociétés, aux entreprises du groupe dont les activités ; l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, et même à l'étranger.

Si la preuve de l'exécution de l'obligation de reclassement incombe à l'employeur, il appartient au juge en cas de contestation sur l'existence ou le périmètre du groupe de reclassement, de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments qui lui sont soumis par les parties.

Il résulte des pièces produites que l'OGEC de l'école [5] est indépendante sur le plan juridique et financier par rapport aux autres OGEC des autres établissements d'enseignement privé et des unions départementale

( UDOGEC 35) et régionale auxquelles elle est adhérente. La fédération nationale FNOGEC regroupant les unions départementales et régionales des OGEC exerçant une mission de conseil et d'assistance ne bénéficie d'aucune prérogative sur le plan de la gestion du personnel réservé à chacun des établissements. Contrairement à ce que soutient Mme [F], l'affiliation de l'OGEC de l'école de [5] à l'union départementale des OGEC 35, adhérente à l'union régionale des OGEC, elle-même membre de la fédération nationale des OGEC, n'entraîne pas la constitution d'un groupe de reclassement au sens de l'article L 1233-4 du code du travail. Le fait que l'UDOGEC 35 assiste l'OGEC Ecole [5] dans l'élaboration des documents techniques sur le plan comptable, qui sont soumis à la seule signature des dirigeants de l'association, ne permet pas de remettre en cause l'indépendance juridique et financière de l'OGEC de l'école de [5] et ne suffit pas à établir la permutation de tout ou partie du personnel de l'association avec les autres associations locales, les unions départementale, régionale et nationale des OGEC.

Il en résulte que le périmètre de l'obligation de reclassement était limité à l'association OGEC de l'école [5].

Mme [F] qui a refusé la proposition de réduction du temps de travail, reproche à son employeur de ne pas avoir procédé à des recherches loyales de reclassement au travers d'une réduction moins forte de son temps de travail et de répartition du temps de travail différente avec des heures de ménage. Elle ajoute que la proposition qui lui a été faite sur la base d'un temps partiel de 17h50 par semaine est intervenue après la notification du licenciement.

L'OGEC considère qu'elle a respecté son obligation de reclassement, au regard de la faiblesse de son effectif (5 salariés) et du refus de Mme [F] du poste offert avec la réduction de son temps de travail à 32 heures par semaine dans le cadre de la modification de son contrat de travail.

Dans le cadre de son obligation de reclassement, l'employeur est tenu de proposer au salarié dont le licenciement était envisagé, tous les emplois disponibles de même catégorie ou à défaut de catégorie inférieure, sans pouvoir limiter ses offres en fonction de la volonté présumée de l'intéressée de les refuser. Les possibilités de reclassement s'apprécient au plus tard à la date du licenciement. Le refus du salarié d'une proposition de modification de son contrat de travail, qui ne constitue pas une offre de reclassement, ne libère pas l'employeur de son obligation de reclassement qui doit être mise en oeuvre préalablement à la notification du licenciement.

En l'espèce, l'OGEC ne peut pas se prévaloir du refus opposé le 27 juillet 2017 de la salariée de la proposition de modification de son contrat de travail qui ne constituait pas une offre de reclassement dans le cadre du licenciement pour motif économique notifié le 5 octobre 2017. L'employeur ne peut pas davantage invoquer ses diligences ultérieures au titre de son obligation de reclassement, à savoir :

- le 13 octobre 2017, l'association OGEC a transmis à Mme [F] une proposition d'un poste à temps partiel d'agent spécialisé des écoles maternelles (ASEM) sur la base d'un horaire annuel de 1 184 heures de travail effectif, soit 32 heures par semaine, que la salariée a refusé par courrier du 21 octobre 2017.

- le 26 octobre 2017, l'Association lui a proposé un poste d'ASEM sur la base de 629,18 heures par an, soit de 17,50 heures par semaine.

Il s'ensuit qu'à partir de l'engagement de la procédure de licenciement pour motif économique le 1er septembre 2017, l'OGEC a omis de formaliser dans le cadre de son obligation de reclassement, la proposition d'un poste disponible correspondant au poste vacant que Mme [F] avait refusé sur la base d'un horaire annuel de 1 184 heures de travail effectif le 27 juillet 2017.

Dans ces conditions, le licenciement de Mme [F] sera déclaré sans cause réelle et sérieuse, par voie d'infirmation du jugement.

Sur les conséquences

Mme [N]- [F], ayant adhéré à la convention de sécurisation professionnelle en octobre 2017, ne conteste pas avoir bénéficié de 80 % de sa rémunération brute pendant 12 mois. Elle fournit des éléments partiels sur sa situation financière depuis la rupture de son contrat de travail sans évoquer son éventuel départ à la retraite en 2020, en produisant un relevé des indemnités chômage à partir du mois de janvier 2019 (relevé du 8 janvier 2020), quelques bulletins de salaire en 2019 au titre d'un emploi à temps partiel comme garde d'enfant à domicile ( chez Mme [Y] [N]) et d'un contrat de travail à temps partiel d'employé de restauration au sein de l'OGEC Sainte Jeanne.

Les premiers juges ont alloué à la salariée une somme de 26 468 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse au regard de sa grande ancienneté et du fait qu'elle n'avait pas retrouvé d'emploi. Toutefois, les éléments fournis en appel font apparaître que Mme [F] a retrouvé une activité salariée au cours de l'année 2019. La salariée ne fournit aucun justificatif sur la perte des droits à la retraite alléguée.

Compte tenu de l'effectif de l'entreprise inférieur à 10 salariés, du montant de la rémunération moyenne (1 523.01 euros), de son âge (57 ans), de son ancienneté (24 ans ), la cour dispose des éléments d'appréciation suffisants pour évaluer le montant de l'indemnité propre à réparer le préjudice subi par Mme [F] à la somme de 6 000 euros net pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de l'article L 1235-3-1 du code du travail dans sa rédaction alors applicable et issue de la loi du 8 août 2016.

Le jugement sera donc infirmé uniquement sur le quantum de l'indemnisation.

Dès lors que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement, elle a droit au paiement de l'indemnité compensatrice de préavis équivalente à trois mois de salaire, dont elle indique avoir perçu la majeure partie. Dans ses conditions, il sera fait droit à sa demande à titre de rappel de l'indemnité compensatrice de préavis, équivalente à un mois de salaire de 1 512.44 euros, outre 151 euros pour les congés payés afférents.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les autres demandes

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de Mme [F] les frais non compris dans les dépens en appel. L'employeur sera condamné à lui payer la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, le jugement déféré étant confirmé en ses dispositions relatives de l'article 700 du code de procédure civile

L'employeur qui sera débouté de sa demande d'indemnité de procédure sera condamné aux entiers dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

- INFIRME le jugement entrepris uniquement en ce qui concerne le montant des dommages-intérêts alloués à Mme [F] au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- CONFIRME les autres dispositions du jugement.

STATUANT de nouveau du chef infirmé et y AJOUTANT :

- CONDAMNE l'association OGEC de l'Ecole [5] à payer à Mme [F] les sommes suivantes :

- 6 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1 000 euros en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- REJETTE la demande de l'association OGEC fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

- CONDAMNE l'association OGEC de l'Ecole [5] aux dépens de l'appel.

Le Greffier Le Conseiller

faisant fonction de Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 7ème ch prud'homale
Numéro d'arrêt : 19/04967
Date de la décision : 15/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-15;19.04967 ?
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