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15/09/2022 | FRANCE | N°19/01177

France | France, Cour d'appel de Rennes, 4ème chambre, 15 septembre 2022, 19/01177


4ème Chambre





ARRÊT N° 289



N° RG 19/01177

N° Portalis

DBVL-V-B7D-PRSR















































Copie exécutoire délivrée



le :



à :







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 15 SEPTEMBRE 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS

DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Hélène RAULINE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Nathalie MALARDEL, Conseillère,



GREFFIER :



Madame Françoise BERNARD, lors des débats et lors du prononcé







DÉBATS :



A l'audience publique du 14 Juin 2022

de...

4ème Chambre

ARRÊT N° 289

N° RG 19/01177

N° Portalis

DBVL-V-B7D-PRSR

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 15 SEPTEMBRE 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Hélène RAULINE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Nathalie MALARDEL, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Françoise BERNARD, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 14 Juin 2022

devant Madame Hélène RAULINE, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 15 Septembre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

SARL NEGOLO & PIECES AUTO prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Anne-Gaëlle POILVET de la SELARL GUILLOTIN, LE BASTARD ET ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC

Représentée par Me Charlotte GARNIER de la SELARL GUILLOTIN, LE BASTARD ET ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉE :

SARL ÔDEGAM

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Armelle OMNES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

****

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant devis en date du 12 juillet 2017, la société Negolo & Pièces Auto a confié à la société Ôdegam la fourniture et la pose d'une résine d'étanchéité sur la couverture de ses locaux professionnels, [Adresse 2], moyennant le prix de 6 504 euros TTC. Elle a versé un acompte de 2 000 euros.

Les travaux ont démarré le 28 juillet suivant. Contestant le produit utilisé, la société Negolo & Pièces Auto n'a pas permis à la société Ôdegam de les terminer et les a achevés elle-même.

Le 18 octobre 2017, la société Ôdegam a adressé à la société Negolo & Pièces Auto une facture de 2 964 euros et l'a mise en demeure de payer le solde de 964 €.

Le 24 novembre 2017, la société Negolo & Pièces Auto a fait constater par un huissier de justice une infiltration sous un chéneau de l'aile Est.

Par acte d'huissier en date du 6 août 2018, cette dernière a fait assigner la société Ôdegam devant le tribunal de commerce de Rennes sur le fondement de l'article 1604 du code civil pour demander l'annulation de la facture, la restitution de l'acompte et le versement de dommages-intérêts.

La société Ôdegam a sollicité à titre reconventionnel le paiement de la somme de 964 € outre celle de 2 950 € au titre de l'exécution du marché.

Par un jugement en date du 17 janvier 2019 assorti de l'exécution provisoire, le tribunal, considérant que la société Ôdegam avait réalisé une prestation conforme au devis et été empêchée de terminer sa prestation a condamné la société Negolo & Pièces Auto à lui payer la somme de 3 420 euros et celle de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

La société Negolo & Pièces Auto a interjeté appel de cette décision le 19 février 2019.

Par un arrêt avant dire droit en date du 12 mai 2021, la cour d'appel a :

- déclaré recevables les demandes de la société Negolo & Pièces Auto ;

- avant-dire droit, ordonné une expertise, désigné M. [B] [C] avec pour mission de dire si le produit utilisé par la société Ôdegam pour réaliser les travaux est conforme au devis du 12 juillet 2017, si les travaux sont affectés des désordres et non conformités aux règles de l'art et aux préconisations du fabricant mentionnés dans le rapport du cabinet Avis d'Expert d'avril 2019, fournir tous éléments techniques et de fait de nature à permettre à la cour de statuer sur les responsabilités encourues, décrire les travaux de reprise nécessaires pour remédier aux désordres et préciser leur durée ;

- sursis à statuer sur les demandes ;

- réservé les dépens et les frais irrépétibles.

L'expert a déposé son rapport le 14 décembre 2021.

Les parties ont conclu à nouveau.

L'instruction a été clôturée le 5 mai 2022.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions en date du 29 avril 2022, au visa des articles 1103 et suivants, 1217 et suivants et 1231-1 et suivants du code civil, la société Negolo & Pièces Auto demande à la cour de :

- réformer le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;

- débouter la société Ôdegam de toutes ses demandes ;

- condamner la société Ôdegam à lui payer :

- la somme de 6 000 euros HT au titre du coût des travaux devant remédier aux désordres, augmentée de la TVA en vigueur au jour de l'arrêt, et majorée selon l'indice du BT01 de la date du dépôt du rapport d'expertise jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir puis des intérêts au taux légal jusqu'à parfait paiement ;

- la somme de 9 000 euros HT au titre de la reprise des embellissements, augmentée de la TVA en vigueur au jour de l'arrêt, et majorée selon l'indice du BT01 de la date du dépôt du rapport d'expertise jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir puis des intérêts au taux légal jusqu'à parfait paiement ;

- la somme de 4 000 euros HT au titre du coût de la mission de maitrise d''uvre, augmentée de la TVA en vigueur au jour de l'arrêt, et majorée selon l'indice du BT01 de la date du dépôt du rapport d'expertise jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir puis des intérêts au taux légal jusqu'à parfait paiement ;

- la somme de 7 650 euros arrêtée au mois de janvier 2022 et à parfaire de la somme de 150 euros par mois jusqu'à l'achèvement des travaux au titre du préjudice de jouissance;

- condamner la société Ôdegam à lui payer la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens incluant notamment les dépens de première instance, les dépens d'appel ainsi que les frais d'expertise judiciaire.

Dans ses dernières conclusions en date du 9 mars 2022, la société Ôdegam demande à la cour de :

- dire la société Negolo & Pièces Auto irrecevable en ses prétentions au visa des dispositions des articles 4 et 564 du code de procédure civile ; la débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Rennes le 17 janvier 2019 ;

- subsidiairement, réduire l'indemnité mise à sa charge à due concurrence de son intervention ;

- condamner la société Negolo & Pièces Auto à lui payer la somme de 6 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur les demandes de la société Negolo & Pièces Auto

Sur la recevabilité des demandes

L'intimée soulève l'irrecevabilité des demandes au motif que le litige ne se présente plus dans les mêmes termes que devant les premiers juges, que l'appelante réclamait alors l'indemnisation du préjudice résultant de l'exécution du contrat, que pour obtenir l'expertise avant-dire droit, elle a invoqué la résiliation du marché alors que, selon une jurisprudence constante, une demande en nullité ou résolution du contrat qui a pour effet d'anéantir le contrat est nouvelle par rapport à une action en responsabilité qui le laisse subsister.

La cour a déjà statué sur la recevabilité de la demande d'expertise qui avait pour objet de recueillir des éléments pour statuer sur la responsabilité contractuelle de la société Ôdegam qui était déjà invoquée en première instance. Cette mesure était indispensable à la solution du litige en raison de son caractère technique quel qu'en soit le fondement.

Dans ses dernières conclusions, l'appelante a abandonné la demande tendant à voir dire qu'elle était bien fondée à résilier le contrat et à obtenir la restitution de l'acompte, outre des dommages-intérêts, réclamant uniquement l'indemnisation de ses préjudices du fait de l'intervention défectueuse de l'intimée en application de l'article 1231-1 du code civil.

Conformément à à l'article 565 du code de procédure civile, ces demandes ne sont pas nouvelles en ce qu'elles tendent aux mêmes fins que celles présentées en première instance.

La fin de non recevoir n'est pas fondée.

Sur le fond

Sur la responsabilité de la société Ôdegam

Il ressort du rapport d'expertise que :

- la société Ôdegam n'a traité que le chéneau de l'aile Est (couverture en bacs acier) ; elle a appliqué une étanchéité liquide à froid en bitume polyuréthane (Supracoating RLV de Siplast); le gérant de la société Negolo & Pièces Auto a achevé les travaux sur le reste du bâtiment en utilisant le même produit ;

- le produit employé est conforme au libellé du devis du 12 juillet 2017 qui faisait mention de d'une résine d'étanchéité et il était adapté à la rénovation de chéneaux métalliques ;

- une infiltration a été constatée en novembre 2017 sous le chéneau de l'aile Est ; après dépose du faux-plafond, il est apparu que la fonçure du bois qui supporte le chéneau métallique était humide et que l'eau s'écoulait sur les bois de charpente, support de la couverture ; il existe des traces de coulures dans la salle de jeux de la partie habitation ; l'expert a fait les mêmes constatations côté ouest (bois humides avec infestation parasitaire, traces d'infiltrations dans une chambre) ;

- il existe des déchirures et décollement de l'étanchéité liquide ; elle a été appliquée sur un ruban adhésif encollé sur les trous en fond de chéneau ; les jonctions entre les éléments métalliques couvertes par un capotage zinc ne sont pas étanchées ; les chéneaux métalliques de l'aile Est sont fuyards ;

- les désordres résultent de ce que la société Ôdegam n'a pas respecté le cahier des charges du produit quant à la préparation du support (absence de rebouchage des trous, d'élimination des traces de corrosion et de dégraissage) et à l'exécution des travaux (absence de renforcement des soudures de jonction et au droit des évacuations pluviales ; application d'une seule couche) ; elle n'a pas démonté les ouvrages annexes indispensables au traitement des relevés d'étanchéité ; elle aurait dû alerter le maître de l'ouvrage sur la nécessité de créer des trop pleins pour améliorer l'évacuation des eaux pluviales afin de satisfaire au DTU 60-11.

L'appelante, se fondant sur ces conclusions, demande à la cour de dire que l'intimée a manqué à son obligation de livrer un ouvrage exempt de désordres.

En réponse, l'intimée fait valoir que :

- la société Negolo & Pièces Auto n'est pas fondée à invoquer l'article 1217 du code civil puisque c'est elle qui a refusé l'exécution de l'obligation en stoppant le chantier puis en le réalisant elle-même ; elle ne cite pas l'article 1231-1 du code civil qui serait le seul fondement applicable ;

- l'expertise a établi que le produit était conforme ;

- elle n'était pas chargée de rénover ou mettre en conformité les chéneaux ou de remplacer des éléments de toiture ; l'appelante cherche en réalité à lui faire supporter les conséquences de sa vétusté ;

- elle a respecté le mode opératoire de la société Siplast qui préconise un séchage de 3 à 6 heures entre les deux couches de sorte que sa prestation était nécessairement inachevée ; en une demi journée, elle n'a eu le temps que de nettoyer et dégraisser et d'appliquer partiellement la résine sur la partie Est; plusieurs années se sont écoulées depuis la réalisation des travaux;

- l'obstruction de la société Negolo & Pièces Auto est la seule cause de la non conformité de la prestation ; elle s'est comportée comme une professionnelle en refusant sa prestation et en l'effectuant à sa place ; les désordres sont les conséquences de son intervention intempestive ; elle n'a pris aucune mesure pour mettre fin à l'infiltration découverte en novembre 2017 ou en limiter les conséquences.

L'appelante réplique que :

- elle avait déjà appliqué plusieurs fois un produit bitumineux sans efficacité sur le long terme; elle pensait légitimement qu'une résine d'étanchéité était un produit différent ; la société Ôdegam aurait dû l'en avertir, elle n'a pas exécuté le contrat de bonne foi ;

- les désordres d'infiltration sont dûs aux travaux de l'intimée sur l'aile Est qui n'ont pas respecté les préconisations du fabricant ;

- elle réfute toute obstruction ; la société Ôdegam avait achevé les travaux sur la totalité de l'entrepôt et une partie de l'habitation.

S'agissant des fondements, l'article 1231-1 du code civil est bien visé dans les conclusions de l'appelante. L'article 1217 était mentionné dans les premières conclusions à l'appui de la demande de restitution de l'acompte, il l'est dans ses dernières conclusions au titre de la demande reconventionnelle de l'intimée qui sera examinée ci-après.

La société Ôdegam est tenue d'une obligation de résultat dont elle ne peut s'exonérer que par la preuve d'une cause étrangère.

Le devis accepté prévoyait la réparation des chéneaux bacs acier et amiante (nettoyage, séchage et dégraissage du support, fourniture et pose d'une résine d'étanchéité). L'expert indique que ces travaux étaient conformes aux règles de l'art.

Il résulte du courrier du maître de l'ouvrage du 9 novembre 2017 (sa pièce 2) qu'il avait fait appel à l'intimée en raison de fuites d'eau en provenance des chéneaux de l'aile Est. Il est établi par le constat d'huissier et l'expertise que les infiltrations d'eau ont persisté sur l'aile Est malgré les travaux.

Ces éléments caractérisent un manquement à l'obligation de résultat de l'intimée.

La société Ôdegam n'avait pas répondu au courrier précité dans lequel l'appelante déclarait que le salarié avait directement appliqué le produit sur les chéneaux et indiqué qu'il s'agissait d'un produit monocouche. Elle a facturé l'intégralité des travaux de l'aile Est. Elle ne peut raisonnablement soutenir désormais ne pas avoir pu mener à bien cette partie des travaux.

L'expert a constaté que les travaux étaient mal exécutés, ce qui est à l'origine de la persistance des désordres, et l'appelante ne réclame que l'indemnisation des dommages causés par ce manquement.

Le moyen pris de la faute du maître de l'ouvrage n'est donc pas fondé.

Le constat des infiltrations remontant à novembre 2017, elle ne peut non plus se retrancher derrière le délai entre la date de réalisation des travaux et l'expertise.

Par ailleurs, le professionnel est tenu d'un devoir de conseil dans les domaines de sa compétence. La société Ôdegam, spécialisée dans les travaux de couverture et d'étanchéité, aurait dû alerter le maître de l'ouvrage sur la nécessité de créer des trop-pleins supplémentaires et les prévoir dans le devis.

Sa responsabilité contractuelle sera retenue par voie d'infirmation.

Sur l'indemnisation des préjudices

L'intimée estime que l'expert a chiffré une rénovation complète de la couverture.

Cette allégation n'est pas fondée. Il a estimé à 6 000 € HT les travaux de reprise de l'étanchéité de l'aile Est comprenant le décapage, la préparation du support, la vérification des couvertines, le traitement des relevés d'étanchéité et des jonctions, la création de six trop-pleins supplémentaires et l'application de deux couches du produit Supracoating, c'est à dire les travaux qu'elle aurait dû réaliser pour mettre fin définitivement aux infiltrations.

La demande au titre des frais de maîtrise d'oeuvre n'est pas justifiée, les travaux étant définis et aucune coordination de travaux n'étant à envisager.

S'agissant de la reprise des dégradations du fait des infiltrations, l'expert en a évalué le coût à 9 000 € HT comprenant le traitement parasitaire curatif, la réfection des doublages, embellissements et faux plafond de la chambre, de la buanderie, de la salle de jeux et du faux plafond de l'entrepôt, ces pièces étant situées sous la couverture de l'aile Est. Ce chef de demande est fondé.

Ces deux sommes seront majorées de la TVA et actualisées en fonction de l'évolution de l'indice BT 01 entre le 14 décembre 2021 et l'indice le plus proche de la date du présent arrêt puis les intérêts au taux légal à compter de celui-ci.

En réparation du préjudice de jouissance, l'appelante sollicite l'homologation du rapport, c'est à dire 150 € par mois sur la base de 30 % de la surface du logement et 50 % de la valeur locative et ce depuis septembre 2017, date d'apparition des infiltrations.

Le préjudice de jouissance n'a pas de lien avec la valeur locative du logement. Il résulte du rapport d'expertise que les dégradations ne sont pas visibles pour les occupants sauf la dégradation de la partie haute du mur de la salle de jeux. Aucune doléance n'existait en première instance et dans les premières conclusions d'appel. En revanche, le préjudice de jouissance est indiscutable pendant la durée des travaux de reprise. Il convient de fixer à 1 000 € l'indemnité destinée à réparer ce préjudice.

L'appelante est déboutée du surplus de ses demandes indemnitaires.

Sur les demandes de la société Ôdegam

L'article 1217 du code civil dispose que :

'La partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté ou l'a été imparfaitement peut :

- refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ;

- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ;

- obtenir une réduction du prix ;

- provoquer la résolution du contrat ;

- demander réparation des conséquences de l'inexécution.

Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages-intérêts peuvent toujours s'y ajouter'.

Sur le fondement de ce texte, le tribunal a jugé que la société Negolo avait commis une faute en sommant la société Ôdegam de cesser ses travaux, en l'empêchant de terminer le chantier et en refusant de payer le coût des travaux alors que le produit était conforme au devis et que la preuve des infiltrations n'était pas rapportée. Il l'a condamnée à payer le coût hors taxe des travaux prévu au devis.

La société Negolo & Pièces Auto en demande l'infirmation en faisant valoir que l'intimée n'a accompli qu'une partie de ses prestations et qu'elle-même a refusé de payer le solde en raison des infiltrations.

La société Ôdegam en sollicite la confirmation. Elle soutient que le gérant de la société Negolo avait tout simplement changé d'avis, comme cela résulte de la première phrase de son courrier du 9 novembre 2017 : '3 heures 30 sur mon toit à étendre 6 pots de bitume, c'est très exagéré'. Elle indique que l'apparence bitumineuse du produit était évidente de sorte qu'il n'aurait pas attendu quatre heures pour interrompre les travaux. Selon elle, l'impossibilité d'exécution est imputable à l'appelante qui doit en indemniser les conséquences.

Il résulte du courrier que la phrase pré-citée est une réponse à la facture du 18 octobre 2017.

Pour le reste, l'appelante y retraçait l'historique des relations contractuelles en précisant qu'elle avait refusé l'application d'un produit bitumineux qui avait démontré son absence d'efficacité, que le salarié lui avait indiqué qu'il s'agissait d'un produit monocouche, ce qui l'avait interpellée, qu'après son départ à 13 heures 30, elle avait vu sur le pot que ce n'était pas une résine, que le produit n'étant pas conforme au devis, elle avait demandé à l'entreprise de ne pas réaliser les travaux de l'aile Ouest.

Il résulte de ce qui précède que si le produit était bien une résine, les travaux n'ont pas été exécutés conformément aux règles de l'art. L'engagement a ainsi été imparfaitement exécuté du fait de l'entrepreneur. Il ne peut être retenu de faute à l'encontre du maître de l'ouvrage au motif qu'il avait interrompu les travaux pour un motif inadéquat alors que sa décision s'est avérée justifiée pour un autre motif.

En revanche, l'appelante étant indemnisée des conséquences dommageables, elle ne peut refuser de payer le coût des travaux, sauf à indemniser deux fois le même préjudice. Dès lors, la somme de 964 € est due.

Les travaux de la partie Ouest n'ayant pas été exécutés, l'intimée n'est pas fondée à en réclamer le prix.

Le jugement est infirmé.

Il convient d'ordonner la compensation.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

L'intimée succombe en l'essentiel de ses prétentions. Elle sera donc condamnée aux dépens de première instance et aux dépens d'appel comprenant les frais d'expertise et à payer à l'appelante la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement :

Vu l'arrêt en date du 12 mai 2021,

INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

DECLARE recevables les demandes de la société Negolo & Pièces Auto,

CONDAMNE la société Ôdegam à payer à la société Negolo & Pièces Auto les sommes suivantes :

- la somme de 6 000 € HT au titre des travaux de reprise,

- la somme de 9 000 € HT au titre des travaux de reprise des conséquences dommagables des désordres,

- la somme de 1 000 € au titre du préjudice de jouissance,

DIT que les condamnations au titre des travaux de reprise seront majorées de la TVA et actualisées en fonction de l'évolution de l'indice BT 01 entre le 14 décembre 2021 et l'indice le plus proche de la date du présent arrêt puis porteront intérêts au taux légal à compter de l'arrêt,

DEBOUTE la société Negolo & Pièces Auto du surplus de ses demandes,

CONDAMNE la société Negolo & Pièces Auto à payer à la société Ôdegam la somme de 964 € TTC au titre de la facture du 18 octobre 2017,

ORDONNE la compensation entre les dettes réciproques,

DEBOUTE la société Ôdegam du surplus de ses demandes,

CONDAMNE la société Ôdegam à payer à la société Negolo & Pièces Auto la somme de 5000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société Ôdegam aux dépens de première instance et aux dépens d'appel comprenant les frais d'expertise.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19/01177
Date de la décision : 15/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-15;19.01177 ?
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