4ème Chambre
ARRÊT N° 302
N° RG 18/06040
N° Portalis
DBVL-V-B7C-PEX4
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 15 SEPTEMBRE 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Hélène RAULINE, Présidente de chambre,
Assesseur : Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, Présidente de chambre,
Assesseur : Madame Nathalie MALARDEL, Conseillère,
GREFFIER :
Madame Juliette VANHERSEL, lors des débats, et Monsieur Jean-Pierre CHAZAL, lors du prononcé,
DÉBATS :
A l'audience publique du 07 Juin 2022, devant Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, magistrat rapporteur, tenant seule l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Réputé contradictoire, prononcé publiquement le 15 Septembre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
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APPELANT :
Monsieur [Z] [R]
[Adresse 8]
[Localité 6]
Représenté par Me Dominique LEYER, avocat au barreau de BREST
INTIMÉE :
SAS AXEL FERMETURES
[Adresse 9]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Assignée le 26 mars 2019 à personne habilitée
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Exposé du litige :
Courant 2014, M. [Z] [R] a fait appel à la société Axel Fermetures pour remplacer les menuiseries sur trois maisons situées sur les communes de [Localité 7] et [Localité 6].
M. [R] a constaté des désordres et malfaçons affectant des travaux réalisés dans la maison du Folgoët.
Après avoir fait réaliser une expertise privée, il s'est prévalu du principe de l'exception d'inexécution pour refuser de régler le solde des factures de la société Axel Fermetures dans l'attente des travaux de reprise.
Par acte d'huissier en date du 17 mai 2016, la société Axel Fermetures a fait assigner M. [R] devant le tribunal d'instance de Brest en paiement des travaux.
Par un jugement assorti de l'exécution provisoire du 10 avril 2018, le tribunal d'instance de Brest a :
- condamné M. [R] à verser à la société Axel Fermetures la somme totale de 8 019 euros, outre les intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement ;
- débouté la société Axel Fermetures du surplus de ses demandes ;
- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;
- condamné M. [R] à verser à la société Axel Fermetures la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
M. [R] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 14 septembre 2018.
Par un arrêt avant dire droit en date du 4 février 2021, la cour d'appel de Rennes a :
- ordonné une expertise ;
- commis pour y procéder, Mme [L] [W], avec mission de vérifier l'existence des désordres mentionnés dans les conclusions de M. [R], le procès-verbal de constat et le rapport de M. [J] ; dans l'affirmative les décrire ; en indiquer la nature, l'importance et la date d'apparition en rechercher la ou les causes ; dire s'ils compromettent la solidité de l'ouvrage ou s'ils le rendent impropre à sa destination ou s'ils l'affectent dans l'un de ses éléments constitutifs ou d'équipement, dissociable ou non ; dire s'ils proviennent d'une non conformité aux documents contractuels, aux règles de l'art ou aux prescriptions d'utilisation des matériaux ou éléments d'ouvrage mis en 'uvre, d'un défaut de conception, d'une exécution défectueuse, ou d'un vice des matériaux, ou de toute autre cause ; indiquer la nature ainsi que la durée des travaux de nature à remédier aux désordres constatés; en chiffrer le coût à partir des devis fournis par les parties ; fournir tous éléments sur les préjudices annexes et les troubles de jouissance subis ou pouvant résulter des travaux de remise en état ;
- sursis à statuer sur les demandes ;
- réservé l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.
M. [R] n'a pas réglé la provision dans le délai accordé.
Il a sollicité un relevé de forclusion pour régler la provision. Par ordonnance du 30 novembre 2021, le magistrat en charge du contrôle des expertises a rejeté sa demande faute de justificatifs des causes alléguées à l'origine de son absence de paiement de la provision.
Dans cet état, l'affaire a été clôturée le 5 mai 2022 et fixée à l'audience du 7 juin 2022.
Dans ses dernières conclusions en date du 11 décembre 2018, M. [R] au visa des articles 1147 du code civil et 144 du code de procédure civile, demande à la cour de :
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamné à verser à la société Axel Fermetures la somme totale de 8 019 euros, outre les intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement et à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les dépens.
A titre principal,
- dire et juger que la société Axel Fermetures a engagé sa responsabilité contractuelle à l'égard de M. [R] dans la mesure où elle a commis des fautes contractuelles constatées par un huissier et un expert qui ont généré un préjudice matériel certain au moins égal au montant des factures impayées;
En conséquence,
- dire et juger que le montant des factures impayées, soit la somme de 7 019 euros et le montant des dommages et intérêts réclamés par M. [R] en indemnisation de son préjudice matériel, soit la somme de 7 019 euros, se compensent ;
- condamner la société Axel Fermetures à verser à M. [R] la somme de 2 363,21 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice matériel ;
- condamner la société Axel Fermetures à verser la somme de 2 000 euros à M. [R] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la même aux entiers dépens ;
A titre subsidiaire,
- ordonner, avant dire droit, une expertise judiciaire.
M. [R], demande la réformation du jugement. Il rappelle que les travaux n'ont pas été réceptionnés et fonde ses demandes sur l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. Il soutient qu'il est fondé à invoquer l'exception d'inexécution pour refuser de payer les travaux au regard des désordres présentés par les travaux sur les deux immeubles et mis en évidence par le rapport de M. [J] et le constat d'huissier établi. Il estime qu'en tout état de cause l'indemnisation des dommages affectant les travaux représente le montant des travaux avec lequel elle se compense.
Il fait observer que s'agissant de l'immeuble situé [Adresse 5] la porte fenêtre qui fait office de porte d'entrée présente des défauts de pose qui dépassent les tolérances réglementaires de sorte que la fermeture n'est pas efficace et ne permet pas d'assurer la sécurité du logement.
Concernant l'immeuble situé [Adresse 4], il relève que le défaut de pose du joint d'étanchéité de la traverse basse sur la pièce d'appui peut entraîner à terme un défaut d'étanchéité à l'air et à l'eau.
Il ajoute que les baies Est et Ouest de l'immeuble sis au [Localité 6] présentent des rejingots fissurés qui ne sont pas étanches et qu'à l'intérieur existent des traces d'infiltration dont l'importance suggère une dégradation des bois par attaque fongique, tandis que la porte d'entrée n'est pas non plus étanche à l'eau et à l'air, de sorte que le locataire a refusé de payer son loyer, ce qui l'a contraint à poser une nouvelle porte par une autre société pour un montant de 2363,21€ TTC, montant dont il demande paiement à titre de dommages et intérêts.
Il en déduit que son refus de paiement n'est pas abusif contrairement à ce qu'a retenu le tribunal.
M. [R] a signifié sa déclaration d'appel à la société Axel Fermetures par acte du 26 mars 2019 délivré à personne habilitée. La société n'a pas constitué avocat.
Motifs :
En application de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée. Il s'en déduit qu'en appel, la cour ne fait droit aux prétentions de l'appelant qu'après avoir examiné au vu des moyens d'appel la pertinence des motifs par lesquels le premier juge s'est déterminé.
M. [R] verse aux débats deux factures de la société Axel Fermetures. L'une du 17 décembre 2014 d'un montant de 3256€ TTC se rapporte à la pose d'une porte d'entrée dans deux immeubles situés respectivement au [Adresse 3] et la seconde du 16 décembre 2014 d'un montant de 3763€ TTC à la pose de deux portes d'entrée et d'une porte de service dans des immeubles situés au Folgoët.
Aucun procès-verbal de réception de ces travaux n'est produit. Par ailleurs, M. [R] justifie s'être plaint dès février 2015 de défauts affectant les travaux réalisés au Folgoët et d'une absence d'étanchéité des portes, demandant à la société d'intervenir rapidement et évoquant à défaut la recours à un constat d'huissier pour faire valoir ses droits.
Il s'en déduit à défaut de réception démontrée ayant mis fin à la relation contractuelle entre les parties, que M. [R] est fondé à rechercher la responsabilité de la société Axel fermetures sur le fondement de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, compte tenu de la date des contrats et à invoquer l'exception d'inexécution, lui permettant de ne pas exécuter son obligation de paiement dès lors qu'il rapporte la preuve d'un manquement grave de la part de son cocontractant à ses obligations.
Pour établir la réalité des manquements de la société Axel Fermetures, M. [R] verse aux débats une expertise privée des trois immeubles effectuée par M. [J] le 12 décembre 2016 et un constat d'huissier dressé le 11 mars 2015 relatif aux travaux effectués dans la maison du Folgoët.
Il est constant que si le juge ne peut refuser d'examiner une expertise non contradictoire réalisée à la demande d'une partie régulièrement versée aux débats et soumise à la discussion , il ne peut se fonder exclusivement sur une telle pièce. Elle doit être corroborée par d'autres éléments.
En l'espèce, si l'expertise réalisée par M. [J] fait état de désordres affectant la porte d'entrée du logement sis au [Adresse 5] rendant impossible sa fermeture efficace et celle de la maison sise au 7 de cette même rue, ceux-ci ne sont corroborés par aucune autre pièce, ce d'autant que s'agissant du défaut de pose du joint d'étanchéité bas de cette dernière maison, l'expert fait uniquement état d'un risque de défaut d'étanchéité à l'eau et à l'air. Dans ces conditions, M. [R] ne démontre aucun manquement grave imputable à la société Axel Fermetures lui permettant de se prévaloir de l'exception d'inexécution pour refuser le paiement de la facture du 17 décembre 2014 de 3256€ TTC.
M. [J], concernant l'immeuble situé au [Localité 6], fait état d'un défaut de pérennité du mode de calfeutrement de la baie Est et d'infiltrations engendrées par la baie ouest du fait de la fissure du rejingot et de l'absence de calfeutrement garantissant l'étanchéité entre celui-ci et la pièce d'appui. Toutefois, la description sommaire de ces deux ouvrants ne permet pas de démontrer de façon certaine qu'il s'agit des portes d'entrée visées dans la facture litigieuse. En effet, l'expert précise en page 4 de son rapport que la baie examinée se situe à l'est de l'entrée et mentionne en page 5 ne pas disposer des factures relatives aux deux châssis examinés alors qu'il vise la facture du 16 décembre 2014 au titre des documents examinés.
Le constat d'huissier établi le 11 mars 2015 dans deux immeubles sis au Folgoët dont un chalet en location ne décrit pas non plus de façon précise les différents ouvrants. Les défauts d'exécution des rejingots qui y sont visés se rapportent à des fenêtres et non à des portes d'entrée ou des portes fenêtres faisant office de portes d'entrée. Les photographies annexées au constat qui ne disposent pas de légendes localisant les ouvrants qu'elles présentent ne permettent pas plus d'identifier les ouvertures concernées par la facture du 16 décembre 2014 que M. [R] n'a pas payée.
L'huissier ne rapporte pas que la porte d'entrée posée dans un encadrement de pierres de taille fait l'objet d'infiltrations et M. [J] n'a pas mentionné ce défaut.
En outre, la facture relative à la porte que l'appelant indique avoir dû changer pour éviter un litige avec son locataire qui se plaignait des infiltrations d'air et d'eau porte des dimensions (1850X100) qui ne correspondent à aucune de celles de portes ( 850X2050 et 950X2050) visées dans la facture relative aux travaux effectués au Folgoët.
Dès lors, M. [R] manque à rapporter la preuve de désordres graves affectant les travaux objets de la facture du 16 décembre 2014 justifiant un défaut de paiement fondé sur l'exception d'inexécution.
En conséquence, M. [R] doit être condamné au paiement des deux factures pour un montant total de 7019€ TTC avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement, qui est confirmé par substitution de motifs.
En revanche, M. [R] justifie par la production de signification de conclusions à la société Axel Fermetures le 14 décembre 2016 en vue de l'audience du 7 février 2017 qu'il était assisté d'un conseil. Par ailleurs, un courrier de son nouveau conseil suite au jugement adressé à celui de la société fait état d'une information erronée relative à une demande de renvoi qui n'a pas été accordée, ce qui a conduit le tribunal a considéré que M. [R] n'était ni présent, ni représenté. Dans ces conditions, la résistance abusive de l'appelant par la multiplication de demandes de renvoi afin de se soustraire à ses obligations n'est pas établie. Le jugement sera réformé sur ce point et la société Axel Fermetures déboutée de sa demande.
Les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens sont confirmés. En outre, M. [R] supportera les dépens d'appel.
Par ces motifs :
La cour,
Statuant publiquement, par décision réputée contradictoire, en dernier ressort,
Confirme le jugement sauf en ce qu'il a condamné M. [R] à verser à la société Axel fermetures une somme de 1000€ au titre d'une résistance abusive,
Statuant à nouveau de ce chef,
Déboute la société Axel Fermetures de sa demande d'indemnisation au titre d'une résistance abusive,
Y ajoutant,
Condamne M. [R] aux dépens d'appel.
Le Greffier, Le Président,