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14/09/2022 | FRANCE | N°19/01850

France | France, Cour d'appel de Rennes, 5ème chambre, 14 septembre 2022, 19/01850


5ème Chambre





ARRÊT N°-242



N° RG 19/01850 - N° Portalis DBVL-V-B7D-PT4D













BOBCAT FRANCE SAS



C/



EARL KERBIZIEN

CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MUTUELLE AGRICOLE BRETAGNE-PAYS DE LOIRE

SARL ETABLISSEMENTS [I]



















Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours















Copie

exécutoire délivrée



le :



à :











RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 14 SEPTEMBRE 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesse...

5ème Chambre

ARRÊT N°-242

N° RG 19/01850 - N° Portalis DBVL-V-B7D-PT4D

BOBCAT FRANCE SAS

C/

EARL KERBIZIEN

CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MUTUELLE AGRICOLE BRETAGNE-PAYS DE LOIRE

SARL ETABLISSEMENTS [I]

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 14 SEPTEMBRE 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie PARENT, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 18 Mai 2022

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 14 Septembre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

BOBCAT FRANCE SAS Prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité au dit siège

[Adresse 7]

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Florence NATIVELLE de la SELARL NATIVELLE AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de NANTES

Représentée par Me Christophe LHERMITTE de la SCP GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, Postulant, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉES :

EARL KERBIZIEN prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

Kerbizien

[Localité 2]

Représentée par Me Vincent LAHALLE de la SELARL LEXCAP, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

CAISSE RÉGIONALE D'ASSURANCE MUTUELLE AGRICOLE BRETAGNE-PAYS DE LOIRE dite GROUPAMA LOIRE BRETAGNE

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représentée par Me Vincent LAHALLE de la SELARL LEXCAP, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

SARL ETABLISSEMENTS [I] agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège,

[Adresse 8]

[Localité 1]

Représentée par Me Martine GRUBER de la SELARL ARMEN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-NAZAIRE

Le 11 mars 2014, l'EARL Kerbizien a passé commande à la SARL [I] d'un chariot élévateur de marque Bobcat pour un montant de 39 500 euros HT, financé par un crédit-bail souscrit auprès de CIC Bail.

L'EARL Kerbizien est assurée auprès de la Caisse Régionale d'Assurances Mutuelle Agricole Bretagne Pays de Loire (Groupama ou CRAMA).

Le 3 février 2015, le hangar où a été stocké le chariot, a été intégralement sinistré par un incendie qui a également détruit du matériel agricole.

L'assureur Groupama a indemnisé l'EARL Kerbizien à hauteur de 150 700 euros, laissant à la charge de l'assuré la somme de 20 440,20 euros et a mandaté un expert, le cabinet Morlaix Expertise, pour déterminer la cause du sinistre.

Une réunion s'est tenue le 23 mars 2015 en présence de la SARL [I] et de son assureur Axa France Iard et au terme de ses opérations, l'expert a conclu que le chariot télescopique était à l'origine de l'incendie.

Par courrier du 18 septembre 2015, la société Groupama a sollicité auprès de la SARL [I] et de son assureur la prise en charge du sinistre, lesquels ont considéré que l'expertise amiable n'était pas probante.

L'EARL Kerbizien et son assureur ont fait assigner en référé expertise la SARL [I], la SAS Bobcat France et la société Axa France Iard, et par ordonnance du 9 février 2016, M. [N] a été désigné.

Le rapport d'expertise a été déposé le 23 août 2016.

Faute d'accord entre les parties et sur la base de ce rapport d'expertise, l'EARL Kerbizien et son assureur ont fait assigner la SARL [I] et la SAS Bobcat France.

Par jugement en date du 7 février 2019 le tribunal a :

- rejeté les moyens de nullité du rapport d'expertise opposés par la SAS Bobcat,

- condamné in solidum la SARL [I] et la SAS Bobcat à verser à la Caisse Régionale d'Assurance Mutuelle Agricole Bretagne Pays de Loire la somme de 100 103 euros au titre de l'indemnisation versée à l'EARL Kerbizien,

- condamné in solidum la SARL [I] et la SAS Bobcat à verser à la Caisse Régionale d'Assurance Mutuelle Agricole Bretagne Pays de Loire la somme de 49 716 euros au titre de l'indemnisation versée à la société AGCCO,

- condamné in solidum la SARL [I] et la SAS Bobcat à verser à l'EARL Kerbizien la somme de 16 940,20 euros en réparation de son préjudice,

- dit que les sommes allouées aux demandeurs porteront intérêts au taux légal à compter de la signification du présent jugement,

- dit que les intérêts dus pour une année entière seront capitalisés et porteront intérêts au taux légal,

- condamné in solidum la SARL [I] et la SAS Bobcat à verser à l'EARL Kerbizien et à la CRAMA la somme 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- les a condamnés in solidum aux dépens qui comprendront les frais de référé et d'expertise,

- condamné la SAS Bobcat à garantir intégralement la Sarl [I] des condamnations prononcées,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Le 19 mars 2019, la SAS Bobcat France a interjeté appel de cette décision et aux termes de ses dernières écritures notifiées le 15 juin 2021, elle demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Saint-Nazaire le 7 février 2019 en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

- dire nul le rapport d'expertise pour défaut de respect du contradictoire,

- constater l'absence de responsabilité de la société Bobcat,

- débouter l'EARL Kerbizien, la Caisse Régionale d'Assurance Mutuelle Agricole Bretagne Pays de Loire, et tout autre partie, de l'intégralité de leurs demandes à son encontre,

A titre subsidiaire,

- réduire les indemnités sollicitées par la Caisse Régionale d'Assurance Mutuelle Agricole Bretagne Pays de Loire à la somme de 31 300 euros,

- débouter l'EARL Kerbizien de sa demande d'indemnisation au titre de la reconstruction du hangar,

- débouter la société [I] de son appel en garantie à son encontre,

En tout état de cause,

- condamner l'EARL Kerbizien et la Caisse Régionale d'Assurance Mutuelle Agricole Bretagne Pays de Loire à lui verser la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 13 juillet 2021, l'EARL Kerbizien et la Caisse Régionale d'Assurance Mutuelle Agricole Bretagne Pays de Loire demandent à la cour de :

- débouter la société Bobcat France de son appel et de l'intégralité de ses

demandes, fins et conclusions,

- débouter la société [I] de son appel incident et de l'intégralité de ses

demandes, fins et conclusions,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement prononcé par le tribunal de grande instance de Saint Nazaire le 7 février 2019,

- condamner la société Bobcat France et la SARL [I] à leur verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Bobcat France et la SARL [I] aux entiers dépens de première instance et d'appel, qui seront recouvrés par la SELARL Lexcap en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le 10 septembre 2019, la SARL [I] demande à la cour de :

- confirmer le jugement du tribunal de Saint-Nazaire du 7 février 2019 en ce qu'il a rejeté la demande de nullité du rapport de M. [N], condamner la SAS Bobcat à garantir la SARL [I] de toutes les condamnations mises à sa charge,

- réformer le jugement du 7 février 2019 en ce qu'il l'a condamnée à verser à la CRAMA la somme de 100 103 euros,

- déduire des sommes dues à la CRAMA la somme totale de 85 750 euros,

- condamner la SAS Bobcat France à lui régler la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles ainsi qu'en tous les dépens,

- débouter la CRAMA Bretagne Pays de Loire et la SAS Bobcat de leurs demandes, fins et conclusions contraires.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 7 avril 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

- Sur l'expertise.

Au soutien de son appel, la SA Bobcat France rappelle la chronologie des opérations expertales. Elle précise que dans un dire du 26 septembre 2016, elle a dénoncé le non-respect du contradictoire et fait des observations que l'expert n'a pas prises en considération.

Elle considère qu'il n'y a pas eu de débat contradictoire sur la longueur du câble, et sur le vice de conception tels que présentés par l'expert.

La SARL [I] estime que l'expert n'a pas manqué à ses obligations.

Les sociétés Groupama et Kerbizien s'opposent à la demande de nullité du rapport d'expertise.

Les opérations d'expertise se sont déroulées comme suit :

- une réunion le 14 avril 2016 en présence de toutes les parties qui étaient assistées de leur expert et leur avocat respectifs.

Lors de cette réunion a été examiné le chariot situé à proximité du hangar reconstruit. Le gérant de l'EARL Kerbizien a présenté deux câbles électriques provenant du chariot et prélevés par ses soins lors de la réunion amiable du 23 mars 2015.

Il est écrit dans le rapport : de la discussion, et compte tenu de l'endroit où est susceptible de se trouver ce câble en fonctionnement normal du chariot, il ressort que la présence de cet impact thermique n'est pas logique avec un départ de feu qui serait extérieur à cette zone difficilement accessible. D'après les représentants de la société Bobcat, le câble d'origine qui mesure 1350mm se situe dans un tunnel dans lequel se trouvent de nombreux flexibles hydrauliques. Il existe bien deux trappes (qui ont été démontées lors de l'expertise amiable) mais qui ne permettent pas d'effectuer des constatations probantes.(....)

À l'issue de la réunion, il a été discuté du mode opératoire à réaliser pour accéder à ce tunnel et faire les constatations nécessaires. La société Bobcat indique qu'un démontage est impossible et qu'il est nécessaire d'effectuer le démontage de la cabine pour procéder à des découpages de métaux pour accéder à ce tunnel.

M. [I] propose d'effectuer les travaux nécessaires et il estime à 9 h le temps nécessaire pour effectuer ces travaux.

- une réunion du 27 mai 2016 :

La matinée a été consacrée au démontage d'une partie du chariot en présence des parties et notamment de la SA Bobcat France et de son expert.

L'après-midi, toutes les parties sont présentes accompagnées de leur expert et leur avocat. L'expert indique qu'il ressort que c'est bien au niveau du chariot électrique que se situe l'origine du sinistre.

Dans son rapport, l'expert explique qu'un câble électrique avec un impact thermique important a été présenté lors de la première réunion d'expertise. Ce conducteur a été retrouvé par les experts des compagnies d'assurances lors d'une expertise amiable en déplaçant le chariot télescopique.

Cet élément a été déterminant pour la recherche de l'origine et la cause du sinistre. Ce conducteur de 1,35 m de longueur qui raccorde le coupe circuit au démarreur et qui se situait dans une zone difficilement accessible du chariot télescopique permettait a priori d'écarter une cause extérieure au chariot télescopique.

Le découpage de la cabine a mis en évidence l'absence d'impact thermique ou de perlage sur la structure même du chariot télescopique. L'impact thermique est donc lié au contact direct du conducteur électrique, après usure par frottement, avec un flexible hydraulique dans une zone confinée.

L'expert a répondu à un dire du conseil de la société Bobcat en date du 25 mai 2016 sur la modification de la scène de l'incendie. L'expert réaffirme l'importance du conducteur électrique présentant un impact thermique dans une zone difficilement accessible du chariot.

Il a répondu à un dire du conseil de la société Bobcat France en date du 13 juillet 2016 sur l'origine et la cause de l'échauffement à l'origine du sinistre et sur l'absence de clé du coupe-circuit. Dans sa réponse, l'expert fait référence à un exemple d'incendie d'un chariot d'une marque différente et indique l'opérateur n'ayant plus de flexible hydraulique à la longueur prescrite par le cahier des charges a placé un flexible plus long occasionnant une boucle qui dans le temps a provoqué le même phénomène d'échauffement de conducteur électrique. Cet exemple pour démontrer que ce ne sont pas les procédures qui sont en cause mais la mise en oeuvre de celles-ci.

Le conseil de la société Bobcat France a adressé un troisième dire le 29 juillet 2016. Il revient sur ce qu'il estime être des contradictions, sur la présence ou non de la clé du coupe-circuit, et sur le montage de l'attache-remorque.

Dans un quatrième dire du 26 septembre 2016, la SA Bobcat France demande à l'expert de consigner :

- 'qu'il n'avait pas constaté une longueur de câble trop importante sur ce chariot qui ait pu justifier qu'il soit entré en contact avec un flexible et, par voie de conséquence un défaut de montage ou de conception,

- que la modification de l'attelage après sortie d'usine du chariot a justifié une intervention sur les flexibles hydrauliques et que cette intervention, rendue possible par les trappes d'accès dont est équipé le chariot, a nécessairement modifié des flexibles qui auraient pu frotter sur les gaines annelées dans lesquelles était positionné le câble électrique monté en usine.'

Il convient de signaler que l'expert avait fixé un délai pour déposer des dires jusqu'au 15 juillet 2016 et reporté au 26 août 2016 sur demande du conseil de la société Kerbizien et de son assureur.

L'expert n'était donc pas obligé de répondre au quatrième dire de la SA Bobcat France au visa de l'article 276 du code de procédure civile.

La première remarque de la société Bobcat France est en contradiction avec le déroulement de l'expertise, avec la note n°2 de l'expert (à laquelle la SA Bobcat France a répondu sans relever le problème de la longueur du câble).

De plus il convient de rappeler à cette société la réunion d'expertise du 14 avril 2016 sur le mode opératoire à réaliser pour accéder au tunnel.

Contrairement aux écritures de la société Bobcat France, l'hypothèse de la longueur du câble a été évoquée lors de la 2ème réunion.

Sur le deuxième point, l'expert y a répondu notamment après le dire du conseil de la société Bobcat France du 13 juillet 2016.

Les remarques de la société Bobcat France sur la référence de l'expert à un exemple personnel sont toutes aussi peu convaincantes et ce d'autant plus que cette référence a été faite pour expliquer l'absence de nécessité de la visite de la société Bobcat France comme une lecture impartiale du rapport le démontre.

Ainsi il ne peut être reproché à l'expert une quelconque impartialité ni un irrespect du principe du contradictoire.

C'est par des motifs pertinents que le premier juge a débouté la société Bobtcat France de sa demande en nullité de l'expertise.

- Sur les responsabilités.

La SA Bobcat France estime que les conditions de l'article 1641 du code civil ne sont pas réunies et indique que sa responsabilité ne peut être retenue à défaut du constat d'un défaut de montage ou d'un vice de conception.

Cette société conteste l'hypothèse de l'expert sur le frottement d'un conducteur électrique sur un flexible hydraulique. Elle indique que le chariot a fait l'objet de plusieurs modifications depuis sa sortie d'usine qui auraient pu modifier le cheminement du câble électrique et des flexibles.

Elle rappelle que la clé du coupe-circuit et le corps du coupe-circuit ont totalement disparu et émet l'hypothèse que le coupe-circuit a été changé.

La société Bobcat France explique que le chariot de l'EARL Kerbizien était équipé d'une attache-remorque hydraulique qui a été modifiée.

L'EARL Kerbizien et la société Groupama Loire Bretagne soutiennent qu'elles sont bien fondées à agir sur le fondement de l'article 1641 du code civil à l'égard du vendeur et du fabricant.

Elles entendent invoquer les opérations d'expertise pour asseoir leurs demandes.

La SARL [I] constate, au regard du rapport d'expertise, que le véhicule était atteint d'un vice caché au moment de sa vente à l'EARL Kerbizien.

Elle sollicite la garantie de la société Bobcat France.

Au visa de l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie en raison des défauts de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

L'expert a exclu une origine électrique de l'incendie le bâtiment n'en disposant pas, ainsi qu'une fermentation du foin, ou un acte de malveillance. Ces exclusions n'ont pas été discutées par les parties.

Selon l'expert, après le démontage de la cabine, le découpage du tunnel où transitaient les conducteurs électriques mais également les flexibles hydraulique a mis en évidence l'absence d'impact thermique ou de perlage sur la structure même du chariot. L'impact thermique est donc lié au contact direct du conducteur électrique, après usure par frottement avec un flexible hydraulique dans une zone confinée.

La cause de l'incendie est liée à un échauffement lent et progressif consécutif au frottement d'un conducteur électrique sur un flexible hydraulique.

Il a été constaté lors des opérations d'expertise que ce conducteur électrique était situé dans une zone confinée et difficile d'accès et qu'il a été mis en place au sein de la société Bobcat France. Cette difficulté d'accès empêche l'intervention d'un tiers à cet endroit.

Il s'agit d'un défaut de conception.

Le débat sur le coupe-circuit introduit dans ses écritures par la société Bobcat France a reçu une explication claire de l'expert à savoir que la disparition du coupe-circuit et de la clé s'explique par leur fonte durant l'incendie, et aucun changement n'a pu intervenir sur le coupe-circuit, la société Bobcat rappelant elle-même que la zone est inaccessible et qu'une modification serait extrêmement coûteuse.

Le débat qu'instaure la société Bobcat France dans ses écritures sur le montage de l'attelage du chariot aurait pu l'être devant l'expert.

Si des flexibles avaient été ajoutés comme le soutient l'appelante, l'expert les aurait constatés, ce qui n'est pas le cas.

Ainsi le vice affectant le chariot existait dès son origine et constitue la cause de sa destruction par incendie.

C'est par une juste appréciation des faits, que le premier juge a retenu la responsabilité des sociétés [I] et Bobcat France.

Vendeur de la SARL [I], la société Bobcat France doit garantir intégralement la société [I] de toutes condamnations prononcées contre elle.

- Sur les préjudices.

La société Bobcat France signale qu'aucune discussion contradictoire n'a eu lieu lors de l'expertise sur l'évaluation des préjudices. Elle précise que l'expert judiciaire s'est fondé sur le rapport d'expertise amiable du cabinet Morlaix à laquelle elle n'a pas assisté.

Elle discute les sommes réclamées au titre du hangar et celle revendiquée par l'EARL Kerbizien.

La société [I] conteste les évaluations retenues par le premier juge.

Elle indique que les conclusions du cabinet Morlaix ne sont pas contradictoires et qu'elles ne portent que sur le chariot. Selon elle, le chiffrage a été réalisé par le seul expert de l'EARL Kerbizien et de son assureur et ne peut être retenu. Elle soutient que la subrogation conventionnelle revendiquée par la société Groupama ne réunit pas les conditions de l'article 1250 du code civil dans sa rédaction ancienne. Elle discute l'indemnisation des matériels Amazone, Vicon, Bobcat, Fella et Huard.

Les sociétés Kerbizien et Groupama Loire Bretagne considèrent que les photographies versées aux débats, l'expertise amiable et le débat devant l'expert judiciaire sont suffisants pour caractériser leur préjudice.

Elles indiquent que le hangar a été détruit, et qu'il n'était pas assuré. Elles signalent que la société Groupama a indemnisé ce hangar à hauteur de 47 000 euros et que l'assureur peut se prévaloir de la subrogation conventionnelle.

Dans sa note n° 2, l'expert judiciaire a fait état de l'évaluation des dommages, la société Bobcat France a précisé qu''elle ne participerait à aucun chiffrage puisque le matériel a été enlevé et qu'un chiffrage sur photographies n'est pas envisageable'.

Au dossier est produite l'expertise amiable du cabinet Morlaix. Si la cour ne peut fonder une évaluation sur ce seul document, il convient de remarquer que l'expert judiciaire a repris l'évaluation des dommages et les a donc soumis à discussion, l'attitude d'opposition de la société Bobcat relève de sa seule responsabilité puisqu'elle n'a pas profité de l'expertise judiciaire pour soutenir ses arguments. La société [I] n'a apporté aucune critique devant l'expert judiciaire. De plus, il convient de signaler que l'EARL Kerbizien et son assureur ont communiqué d'autres pièces pour l'évaluation des dommages.

Le hangar a été entièrement détruit. Il n'est pas contesté que ce bâtiment n'était pas assuré. Néanmoins la société Groupama Loire Bretagne a procédé à l'indemnisation de ce hangar pour un montant de 47 000 euros. Si elle ne peut invoquer les dispositions de la subrogation légale, elle peut invoquer celles sur la subrogation conventionnelle dans la mesure où la subrogation conventionnelle de l'assureur dans les droits de l'assuré résulte de la volonté expresse de ce dernier, manifestée concomitamment ou antérieurement au paiement reçu de l'assureur, qui n'a pas à établir que ce règlement a été fait en exécution de son obligation contractuelle de garantie.

Dans le cas présent, le gérant de l'EARL Kerbizien a entendu subroger son assureur dans un document du 12 mars 2015 alors que le paiement est intervenu le lendemain. Les conditions de la subrogation conventionnelle sont remplies.

Un procès-verbal de gendarmerie mentionne que le hangar détruit abritait 40 tonnes de foin, des aliments pour volaille, un tracteur Massey Ferguson, un chargeur télescopique Bobcat, 2 quad Hitrack, 2 épandeurs d'engrais, une charrue et une faneuse à 6 toupies. Il précise qu'une cuve de 500 litres de fuel est mitoyenne du hangar.

La présence de ces matériels est corroborée par les photographies versées au dossier et celles contenues dans l'expertise judiciaire.

La société Groupama a versé une somme de 53 103 euros au titre des matériels.

En conséquence, il convient de condamner in solidum la société Bobcat et la SARL [I] à payer à la société Groupama la somme de 100 103 euros.

Selon une quittance subrogatoire du 30 mai 2016, la société Groupama Loire Bretagne a versé à la société AGCCO la somme de 49 716 euros pour le tracteur Massey Ferguson.

En conséquence, il convient de condamner in solidum la société Bobcat et la SARL [I] à payer à la société Groupama la somme de 49 716 euros.

La société Kerbizien justifie des franchises qu'elle a dû supporter ainsi que d'un préjudice financier consécutif à la différence entre le prix du matériel ou du bâtiment et le montant de la prise en charge par l'assureur.

C'est par une juste appréciation que le premier juge a évalué le préjudice de l'EARL Kerbizien à la somme de 16 940,20 euros.

En conséquence, il convient de condamner in solidum la société Bobcat et la SARL [I] à payer à l'EARL Kerbizien la somme de 16 940,20 euros.

Le jugement est confirmé en toutes ses dispositions.

- Sur les autres demandes.

Au visa de l'article 700 du code de procédure civile, il convient de condamner in solidum la société Bobcat et la SARL [I] à payer à la société Groupama et l'EARL Kerbizien la somme de 4 500 euros, ainsi qu'aux dépens, étant par ailleurs précisé que les dispositions du jugement sur les frais irrépétibles et les dépens sont confirmées.

La SARL [I] et la société Bobcat France sont déboutées de leur demande en frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe :

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne in solidum la société Bobcat France et la SARL [I] à payer à la société Groupama Loire Bretagne et l'EARL Kerbizien la somme de 4 500 euros au titre des frais irrépétibles ;

Déboute la société Bobcat France et la SARL [I] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum la société Bobcat et la SARL [I] aux dépens, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La greffièreLa présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19/01850
Date de la décision : 14/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-14;19.01850 ?
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