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14/09/2022 | FRANCE | N°19/01822

France | France, Cour d'appel de Rennes, 5ème chambre, 14 septembre 2022, 19/01822


5ème Chambre





ARRÊT N°-241



N° RG 19/01822 - N° Portalis DBVL-V-B7D-PTZS













M. [O] [L] [I] [D] [S]

Mme [B] [F] [R] [J] veuve [S]

M. [P] [A] [T] [S]

Mme [C] [V] [E] [S]



C/



Mme [H] [M] épouse [Z]

M. [G] [M]

Mme [W] [U] épouse [M]



















Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée









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Copie exécutoire délivrée



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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 14 SEPTEMBRE 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente...

5ème Chambre

ARRÊT N°-241

N° RG 19/01822 - N° Portalis DBVL-V-B7D-PTZS

M. [O] [L] [I] [D] [S]

Mme [B] [F] [R] [J] veuve [S]

M. [P] [A] [T] [S]

Mme [C] [V] [E] [S]

C/

Mme [H] [M] épouse [Z]

M. [G] [M]

Mme [W] [U] épouse [M]

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 14 SEPTEMBRE 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie PARENT, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 18 Mai 2022

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 14 Septembre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTS :

Monsieur [O] [L] [I] [D] [S], décédé le 14 septembre 2021

né le 03 Juin 1955 à [Localité 16] (Morbihan) ([Localité 16])

[Adresse 5]

[Localité 8]

Représenté par Me Jean-Maurice CHAUVIN de la SELARL CHAUVIN JEAN-MAURICE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

Madame [B] [F] [R] [J] veuve [S], ès qualités d'ayant droit de M. [O] [S], décédé le 14 09 2021, intervenant volontaire par conclusions du 18 02 22

née le 23 Juin 1959 à [Localité 15]

[Adresse 5]

[Localité 14]

Représentée par Me Jean-Maurice CHAUVIN de la SELARL CHAUVIN JEAN-MAURICE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

Monsieur [P] [A] [T] [S], ès qualités d'ayant droit de M. [O] [S], décédé le 14 09 2021, intervenant volontaire par conclusions du 18 02 22

né le 20 Juillet 1983 à BLANKENBERT (BELGIQUE)

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Jean-Maurice CHAUVIN de la SELARL CHAUVIN JEAN-MAURICE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

Madame [C] [V] [E] [S], ès qualités d'ayant droit de M. [O] [S], décédé le 14 09 2021, intervenant volontaire par conclusions du 18 02 22

née le 10 Juillet 1993 à [Localité 13]

[Adresse 10]

[Localité 11]

Représentée par Me Jean-Maurice CHAUVIN de la SELARL CHAUVIN JEAN-MAURICE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉS :

Madame [H] [M] épouse [Z]

née le 07 Juin 1974 à [Localité 8]

'Les Richardoux'

[Localité 9]

Représentée par Me Cyrille MONCOQ de la SELARL ALPHA LEGIS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-MALO

Monsieur [G] [M]

né le 06 Août 1970 à [Localité 18]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représenté par Me Cyrille MONCOQ de la SELARL ALPHA LEGIS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-MALO

Madame [W] [U] épouse [M]

née le 21 Mars 1940 à [Localité 12]

[Adresse 3]

[Localité 7]

Représentée par Me Cyrille MONCOQ de la SELARL ALPHA LEGIS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-MALO

**********

Par acte notarié du 19 septembre 2006, Mme [W] [U] veuve [M], M. [G] [M] et Mme [H] [M] épouse [Z] ont donné à bail à M. [D] [S], un local à usage de commerce et d'habitation situé à [Localité 8], pour une durée de 9 ans à compter du 29 mars 2006, moyennant un loyer annuel de 4 800 euros.

Par acte du 24 septembre 2014, les consorts [M] ont fait signifier à M. [D] [S] un congé avec refus de renouvellement du bail et offre d'indemnité d'éviction.

Par acte du 15 juin 2015, les consorts [M] ont assigné M. [D] [S] devant le juge des référés aux fins d'expertise pour évaluer les indemnités d'éviction et d'occupation.

Par ordonnance en date du 16 juillet 2015, le juge des référés a désigné M. [K] [Y] en qualité d'expert.

M. [K] [Y] a déposé son rapport en date du 24 mai 2016.

Par acte en date du 7 décembre 2016, M. [D] [S] a assigné Mme [W] [U] veuve [M], M. [G] [M] et Mme [H] [M] épouse [Z] afin de les voir condamner in solidum à lui payer une indemnité d'éviction de 112 000 euros.

Par jugement en date 20 février 2019, le tribunal de Saint Malo a :

- fixé l'indemnité principale de remplacement à la somme de 68 750 euros et les indemnités accessoires à celle de 13 375 euros,

- condamné in solidum Mme [W] [U] veuve [M], M. [G] [M] et Mme [H] [M] épouse [Z] à payer à M. [O] [S] une indemnité d'éviction d'un montant total de 82 125 euros,

- condamné M. [O] [S] à verser aux consorts [M] une indemnité d'occupation, à compter du 29 mars 2015, d'un montant de 8 586 euros par an (soit 715,50 € par mois),

- ordonné la compensation entre les créances respectives des parties,

- dit que la restitution des lieux relatifs au bail consenti par les consorts [M], se fera à l'expiration du délai de 3 mois suivant la date de versement de l'indemnité d'éviction ou à compter de la notification du versement de cette indemnité à un séquestre,

- désigné en cas de difficulté, en qualité de séquestre de ladite indemnité d'éviction, M. le bâtonnier de l'Ordre des avocats de Saint Malo-Dinan,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- débouté les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de toute autre demande plus ample ou contraire,

- dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens comprenant ceux de référé et d'expertise.

Le 18 mars 2019, Mme [B] [J] épouse [S], M. [P] [S] et Mme [C] [S] ont interjeté appel de cette décision et aux termes de leurs dernières écritures notifiées le 2 mai 2022, ils demandent à la cour de :

- les recevoir en leur appel et les y dire bien fondés,

- réformer le jugement du tribunal de Saint Malo du 20 février 2019 en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau :

- condamner in solidum les consorts [M] à payer à la succession de M. [O] [S], prise en la personne physique de Mme [B] [S], M. [P] [S] et Mme [C] [S], une indemnité d'éviction d'un montant de 89 143,52 euros, se décomposant comme suit :

* indemnité principale : 85 000 euros

* indemnités accessoires :

° indemnité de déménagement : 4 143,52 euros

- subsidiairement, condamner in solidum les consorts [M] à payer à la succession de M. [O] [S], prise en la personne physique de Mme [B] [S], M. [P] [S] et Mme [C] [S], une indemnité d'éviction d'un montant de 84 143,52 euros, se décomposant comme suit:

* indemnité principale : 80 000 euros

* indemnités accessoires :

° indemnité de déménagement : 4 143,52 euros

- fixer le montant de l'indemnité d'occupation due par la succession de M. [O] [S], prise en la personne physique de Mme [B] [S], M. [P] [S] et Mme [C] [S], aux consorts [M] à compter du 29 mars 2015 et jusqu'au 30 mars 2022 à la somme de 7 020 euros par an, soit 585 euros par mois, et à titre subsidiaire, à la somme de 7 870 euros par an, soit 655 euros par mois,

- condamner les consorts [M] à payer à la succession de M. [O] [S], prise en la personne physique de Mme [B] [S], M. [P] [S] et Mme [C] [S], la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens,

- débouter les consorts [M] de toutes leurs demandes, fins et conclusions.

Par dernières conclusions notifiées le 1er avril 2022, les consorts [M] demandent à la cour de :

- confirmer le jugement prononcé par le tribunal de grande instance de Saint Malo le 20 février 2019 en ce qu'il a fixé le montant de l'indemnité principale et l'indemnité de déménagement.

- dire irrecevable et mal fondé les consorts [S] en toutes leurs demandes plus amples ou contraires.

- en conséquence, fixer le montant de l'indemnité principale de remplacement à la somme de 68 750 euros et l'indemnité de déménagement à la somme de 1 500 euros,

- réformer le jugement compte tenu des éléments nouveaux liés au décès de

M. [O] [S] à la notification de départ pour le 1er avril 2022 délivrée par acte de Maître [N], huissier de justice à [Localité 18] en date du 3 mars 2022 par les consorts [S] en ce qu'il a accordé à M. [O] [S] :

- une indemnité de remploi de 6 875 euros et débouter les consorts [S] de toutes demandes à ce sujet,

- une indemnité pour trouble commercial de la somme de 5 000 euros et débouter les consorts [S] de toutes leurs demandes à ce sujet,

- à titre subsidiaire, confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- fixer le montant de l'indemnité d'occupation due par les consorts [S] à compter du 29 mars 2015 à la somme de 8 586 euros par an, soit 715,50 euros par mois et condamner les consorts [S] in solidum au paiement de cette indemnité d'occupation,

- confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la compensation entre les créances respectives des parties,

- condamner les consorts [S] in solidum à payer aux Consorts [M] la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les consorts [S] in solidum aux entiers dépens d'instance et d'appel dont distraction au profit de la SELARL Alpha Legis par application de l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 18 mai 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Les consorts [S] indiquent que M. [O] [S] est décédé le 14 septembre 2021, et qu'ils ont entendu quitter les lieux loués le 1er avril 2022.

Ils rappellent que le refus de renouvellement du bail entraîne la disparition du fonds de commerce et que l'indemnité d'éviction doit être égale à la valeur marchande du fonds à laquelle s'ajoutent les frais accessoires.

Ils se réfèrent au rapport d'expertise pour évaluer l'indemnité principale d'éviction et les indemnités accessoires.

Ils communiquent trois factures d'un montant total de 4 143,52 euros pour justifier l'indemnité de déménagement.

Concernant l'indemnité d'occupation, ils estiment que l'évaluation du tribunal est en totale déconnection avec les prix du marché. Ils signalent que M. [S] a procédé à des travaux de rénovation des locaux tant dans la partie principale que dans la partie commerciale et que l'appartement ne dispose pas de cuisine ni d'accès indépendant.

En réponse, les consorts [M] considèrent que le fonds de commerce était exploité à son maximum sans réelle perspective de développement et qu'il s'agissait d'une affaire modeste éloigné du centre de [Localité 14].

Ils font état des méthodes utilisées par l'expert et les critiquent.

Ils contestent la demande au titre du déménagement.

Ils expliquent que le loyer d'un logement type 3 sans fonds de commerce atteint facilement la somme de 500 euros par mois et que la valeur retenue par l'expert est dérisoire.

Le refus de renouvellement constitue un droit pour le bailleur qui n'a pas à motiver son refus dès lors qu'il offre une indemnité d'éviction telle que prévue à l'article L 145-14 du code de commerce soit une indemnité comprenant notamment la valeur marchande du fonds de commerce, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que des frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur, sauf dans le cas où le propriétaire fait la preuve que le préjudice est moindre.

L'indemnité d'éviction est égale au préjudice du preneur que lui cause le non-renouvellement du bail. Elle est constituée d'une indemnité principale et d'indemnités accessoires.

L'expert a évalué l'indemnité principale à la somme de 80 000 euros et les indemnités accessoires entre 15 et 20 000 euros.

- Sur l'indemnité principale.

Le bail précise que les locaux sont exclusivement destinés à l'exercice du commerce de bar, grill, crêperie, restauration, débit de boissons et à usage d'habitation pour le preneur.

Les locaux sont constitués d'un immeuble à usage de commerce et d'habitation comprenant :

- au rez-de-chaussée : une salle de restaurant, plonge, toilettes handicapées, cuisine avec grenier au-dessus, réserve sèche, buanderie, débarras,

- au premier étage : deux pièces et une salle de bains,

- au deuxième étage : trois pièces et une salle de bains,

- un grenier au-dessus,

- partie de cour desservie par un passage commun à l'Est de la maison.

Selon l'expert, la partie commerciale mesure 124 m² (outre le grenier de 40 m²) et la partie habitation sur deux étages mesure 91,5 m².

La Marmite de l'Abbaye, le restaurant exploité par M. [S], est situé à la porte de l'abbaye [17] au pied du château de [Localité 8], et bénéficie d'une terrasse située à 50 m de La Rance.

Il s'agit d'un commerce de restauration traditionnelle et bar qui est ouvert du mercredi au dimanche (midi et soir), de mi-février à mi-novembre et pendant les fêtes de fin d'année.

Le restaurant fonctionnait avec une clientèle à la fois locale et de passage (clientèle de résidences secondaires ou de chambres d'hôte...).

M. [S] y travaillait en cuisine assisté de son épouse au service (sans aide extérieur même en saison).

L'expert a noté que les locaux ont fait l'objet d'un entretien régulier permettant leur exploitation dans des conditions normales.

Il a précisé que les locaux sont implantés dans une commune, 'petite cité de caractère' d'environ 3 000 habitants.

Ce fonds de commerce est le seul du bourg puisque le bar-tabac et la boulangerie ont fermé. Le restaurant est situé hors zone d'achalandages à la périphérie nord-ouest de [Localité 14].

L'indemnité principale est égale à la valeur du fonds de commerce sans pouvoir être inférieure à la valeur du droit au bail des locaux.

L'expert a procédé à deux méthodes d'évaluation.

'Tout d'abord, il a procédé à une évaluation par comparaison.

Le chiffre d'affaires de M. [S] était de 78 495 euros en 2012, 84 649 euros en 2013, 82 142 euros en 2014 et 78 373 euros sur les 10 mois de 2015 soit une moyenne de 82 000 euros.

Les usages de la profession retiennent, pour la branche restauration, un ratio pour évaluer le fonds de commerce. Selon les éditions ou les centres de gestion agréés, ce ratio varie de 50 à 170 %. Pour une petite ville comme dans le cas présent, il peut être retenu un ratio de 50 à 75 % pour un restaurant courant et de 65 à 85 % pour une bonne table.

À [Localité 14], pour un fonds de commerce de restauration avec un chiffre d'affaires de 90 000 euros, un ratio de 67 % a été utilisé.

Les qualités professionnelles de M. [S], qui est maître restaurateur, n'ont pas à être critiquées, mais la localisation du fonds dans une petite ville, dont la population décroît et hors zone de chalandise, ainsi qu'une commercialité en déclin ne peuvent permettre de retenir un taux de 85 % comme le souhaitent les consorts [S].

C'est par des motifs pertinents, que la cour adopte, que le premier juge a

retenu un taux de 75 % soit, une valeur de 61 500 euros.

'Ensuite, l'expert a procédé à une évaluation suivant l'excédent brut d'exploitation (EBE).

L'EBE était de 17 669 euros en 2012, de 19 017 euros en 2013, 19 551 euros en 2014, soit une moyenne de 19 000 euros auquel il convient d'appliquer un coefficient multiplicateur qui dépend des usages de la profession.

Il est souvent retenu un coefficient de 3 à 5 pour les petits commerces, de 4 à 7 pour les commerces moyens, de 6 à 8 pour les enseignes nationales et de 8 à 10 pour les commerces présentant une capacité bénéficiaire exceptionnelle.

Un défaut de commercialité particulière, un chiffre d'affaires qui évolue peu (certes sur choix du locataire mais les perspectives de développement ne sont pas démontrées) ne permettent pas de retenir le taux de 4,5 comme l'a fait l'expert.

Il convient de retenir un taux de 4 comme l'a fait le premier juge, soit une valeur de 76 000 euros.

Sans qu'il y ait un motif approprié de privilégier une méthode d'évaluation plutôt qu'une autre, l'indemnité principale est fixée à 68750 euros (61 500 + 76 000 / 2).

Le jugement est confirmé à ce titre.

- Sur les indemnités de remploi, pour trouble commercial et de réinstallation.

M. [S] est décédé, Mme [S] a fait valoir ses droits à la retraite.

Les lieux loués ont été restitués le 1er avril 2022.

Les consorts [S] ne formulent plus de demandes au titre des indemnités de remploi, pour trouble commercial et de réinstallation.

Le jugement est infirmé au titre des deux premières demandes et confirmée sur la demande au titre de la réinstallation.

- Sur l'indemnité de déménagement.

Les consorts [S] produisent aux débats trois factures.

Les consorts [M] conteste le devis de déménagement tant dans l'évaluation du cubage des meubles que dans la distance du déménagement.

Le bail porte sur une partie commerciale et une partie habitation.

La facture de déménagement d'un montant de 1 230,42 euros porte sur un volume de 36 mètres cubes et mentionne une distance de 11 km Cette somme est prise en compte.

Il en est de même de la somme de 2 355,10 euros correspondant à la réinstallation du poêle appartenant à M. [S] ; ce montant n'a pas été contesté par les intimés.

La facture d'un montant de 558 euros correspond à la remise en état du restaurant après le déménagement. Cette somme est rejetée, le locataire devant laissés les lieux en bon état de propreté.

Une somme de 3 585,52 euros est allouée aux appelants.

Le jugement est infirmé sur le quantum.

- Sur l'indemnité d'occupation.

En application de l'article L 145-28 du code de commerce, aucun locataire pouvant prétendre à une indemnité d'éviction (comme dans le cas présent) ne peut être obligé de quitter les lieux avant de l'avoir reçue. Jusqu'au paiement de cette indemnité, il a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses du contrat de bail expiré. Toutefois l'indemnité d'occupation est déterminée conformément aux dispositions des sections VI et VII, compte tenu de tous éléments d'appréciation.

Cette indemnité d'occupation est due pour la période de cessation du bail jusqu'au jour de la libération des lieux, soit du 28 mars 2015 au 1er avril 2022, elle est fixée par référence à la valeur locative.

Au visa de l'article L 145-33 du code de commerce, la valeur locative est déterminée d'après :

1° les caractéristiques du local considéré,

2° la destination des lieux,

3° les obligations respectives des parties,

4° les facteurs locaux de commercialité,

5° les prix couramment pratiqués dans le voisinage.

Selon l'article R 145-3 du même code, les caractéristiques propres au local s'apprécient en considération :

1° de sa situation dans l'immeuble où il se trouve, de sa surface et de son volume, de la commodité de son accès pour le public,

2° de l'importance des surfaces respectivement affectées à la réception du public, à l'exploitation ou à chacune des activités diverses qui sont exercées dans les locaux,

3° de ses dimensions, de la conformation de chaque partie et de son adaptation à la forme d'activité qui y est exercée,

4° de l'état d'entretien, de vétusté ou de salubrité et de la conformité aux normes exigées par la législation du travail,

5° de la nature et de l'état des équipements et des moyens d'exploitation mis à la disposition du locataire.

En préliminaire, il convient de constater que l'appartement loué ne dispose d'aucun accès indépendant et ne possède pas de cuisine. Il ne peut être loué sans la partie commerciale. La pondération de la surface de cet appartement à 24,4 m² (après application d'un taux de 0,3) est justifiée.

L'application de coefficient de pondération pour les autres locaux n'est pas contestée par les parties.

Il convient ainsi de retenir une surface pondérée de 106 m² comme l'a fait l'expert.

Les éléments de comparaison font apparaître un prix au m² de 120 euros à 203 euros pour des fonds de commerce situés sur des bons emplacements à [Localité 14].

Il a été dit que [Localité 8] est une petite ville, qui a fusionné avec [Localité 14] en 2018, que le fonds de commerce de M. [S] n'était situé pas dans une zone dynamique.

Le montant de 90 euros le m² tel que retenu par l'expert est approprié.

Si les consorts [S] versent au dossier un certain nombre de factures, il est impossible de déterminer si les travaux engagés sont des travaux d'entretien ou d'amélioration. Ils ne sont pas pris en compte.

L'incertitude économique dans laquelle s'est trouvé M. [S] du fait du congé avec refus de renouvellement pendant la période justifie de fait un abattement de précarité de 10 %.

L'indemnité d'occupation s'élève donc à :

106 x 90 = 9 540

9 450 - (9 450 x 10 %) = 8 505 euros par an soit 708,75 euros par mois.

Le jugement est infirmé sur le montant.

- Sur les autres demandes.

Chaque partie, ayant partiellement succombé, supportera la charge de ses propres dépens, en ce compris les frais de référé et d'expertise et est déboutée de sa demande en frais irrépétibles.

Les dispositions du jugement sur les frais irrépétibles et les dépens sont confirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe :

Confirme le jugement entrepris sauf en ses dispositions sur :

- les indemnités de remploi, pour trouble commercial,

- les frais de déménagement,

- le montant total de l'indemnité d'éviction,

- le montant de l'indemnité d'occupation ;

Statuant à nouveau,

Constate qu'il n'y a plus de demande au titre de l'indemnité de remploi et de l'indemnité pour trouble commercial ;

Fixe les frais de déménagement à la somme de 3 585,52 euros,

Condamne les consorts [M] à payer à la succession de M. [S] représentée par les consorts [S] la somme de 72 335,52 euros au titre de l'indemnité d'éviction ;

Condamne les consorts [S], au titre de la succession de M. [S], à payer aux consorts [M] une indemnité d'occupation mensuelle de 708,75 euros du 28 mars 2015 au 1er avril 2022 ;

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile;

Dit que chaque partie conserve la charge de ses propres dépens, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La greffièreLa présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19/01822
Date de la décision : 14/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-14;19.01822 ?
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