5ème Chambre
ARRÊT N°-232
N° RG 19/01552 - N° Portalis DBVL-V-B7D-PS4B
M. [M] [H]
C/
SA AXA FRANCE IARD
Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 07 SEPTEMBRE 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,
Assesseur : Madame Virginie PARENT, Présidente,
Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 04 Mai 2022
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 07 Septembre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANT :
Monsieur [M] [H]
né le 26 Août 1941 à [Localité 5] ([Localité 5])
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Me Patrick EVENO de la SELARL P & A, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VANNES
INTIMÉE :
SA AXA FRANCE IARD Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Caroline RIEFFEL de la SCP BG ASSOCIÉS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
INTERVENANTE VOLONTAIRE aux lieux et place de la société AXA FRANCE IARD :
La société AXA FRANCE VIE SA
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Caroline RIEFFEL de la SCP BG ASSOCIÉS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
M. [M] [H] a souscrit auprès de la compagnie UAP Vie deux séries de 100 contrats de capitalisation à effet du l er février 1980.
Par acte d'huissier du 4 octobre 2016, M. [M] [H] a fait assigner la société AXA France Iard venant aux droits de UAP Vie en réparation de manquements contractuels par sa condamnation à lui verser la somme de 67 185,22 euros suite à deux prélèvements effectués en juillet 1990 qu'il estimait litigieux d'un montant de 116 898 francs et 180 303 francs.
Par jugement en date du 3 décembre 2018, le tribunal a :
- déclaré prescrite l'action introduite par M. [M] [H] à l'encontre de la société AXA au titre de manquements contractuels,
- débouté par conséquent ce dernier de toutes ses demandes,
- condamné M. [M] [H] à payer à la SA AXA France Iard une indemnité de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [M] [H] aux dépens, dont distraction au profit de la SCP BG Associés.
Le 6 mars 2019, M. [M] [H] a interjeté appel de cette décision et aux termes de ses dernières écritures notifiées le 4 avril 2022, il demande à la cour de :
- dire et juger M. [M] [H] recevable et bien fondé en son appel, ainsi qu'en toutes ses demandes, fins et prétentions,
- réformer intégralement le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Vannes le 3 décembre 2018,
- dire et juger la SA AXA France Vie, et à titre subsidiaire, la SA AXA France Iard, responsable d'inexécutions contractuelles sur le fondement de l'article 1147 du Code civil,
- condamner la SA AXA France VIE, et à titre subsidiaire, la SA AXA France Iard, à indemniser M. [M] [H] à hauteur de 67 185,22 euros, sauf à parfaire ou compléter, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,
- condamner la SA AXA France Vie, et à titre subsidiaire, la SA AXA France Iard, à verser à M. [M] [H] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SA AXA France VIE, et à titre subsidiaire, la SA AXA France Iard, aux entiers dépens.
Par dernières conclusions notifiées le 2 septembre 2019, la Société AXA France Iard et la société AXA France Vie demandent à la cour de :
- décerner acte à la société AXA France Vie, venant aux droits de la société UAP Vie, de son intervention volontaire, en lieu et place de la société AXA France Iard ;
A titre principal,
- confirmer le jugement rendu le 3 décembre 2018 par le tribunal de grande instance de Vannes en ce qu'il a déclaré irrecevables comme prescrites les demandes présentées par M. [M] [H] à l'encontre de la société AXA et l'a condamné à régler une indemnité de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Y additant,
- condamner M. [M] [H] à régler une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel et aux dépens d'appel,
A titre subsidiaire,
- dire et juger mal fondée l'action exercée par M. [M] [H] à l'encontre de la société AXA France Vie venant aux droits de UAP Vie, à l'exclusion de la société AXA France Iard qui devra, en toute hypothèse, être mise hors de cause,
- débouter par conséquent M. [M] [H] de toutes ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de la société AXA France Vie intervenant en lieu et place de la société AXA France Iard,
- condamner en tout état de cause M. [M] [H] au paiement d'une indemnité de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel;
- condamner M. [M] [H] aux entiers dépens, de première instance et
d'appel, dont distraction au profit de la SCP BG Associés.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 4 mai 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
- Sur la prescription
M. [H] soutient que la société AXA France Iard ne peut opposer valablement la prescription biennale de l'article L. 114-1 du code des assurances au motif d'une part que le contrat souscrit ne mentionne ni le délai de prescription, ni les causes d'interruption ni les différents points de départ du délai de prescription et d'autre part que le contrat de capitalisation n'est pas un contrat d'assurance.
Subsidiairement, M. [H] fait valoir que la société AXA France Iard ne peut pas non plus opposer la prescription de l'article 2224 du code civil. Il conteste avoir eu connaissance de l'existence des prélèvements litigieux et de leur incidence dès le mois d'août 1990 et considère que les pièces produites, à savoir les trois quittances datées de 1996, 1997 et 2001, ne démontrent pas qu'il avait connaissance des prélèvements effectués en 1990. Il ajoute qu'il en est de même des modifications des conditions particulières dénommées 'primata' versées aux débats dont aucun élément ne permet d'établir qu'il les a reçues. Il critique également le jugement qui a retenu l'aveu judiciaire au motif qu'il aurait reconnu être l'auteur des prélèvements litigieux, ce qu'il conteste.
M. [H] affirme que le point de départ du délai de prescription ne peut être 1990 et qu'à tout le moins il peut être fixé à la date des quittances de règlement des intérêts de 1996, 1997 et 2001 pour trois quittances mais que pour le reste, il doit être fixé à compter d'avril 2013 lorsqu'il a découvert l'existence des prélèvements litigieux. Il ajoute que le point de départ du délai est l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 qui a créé l'article 2232 du code civil, de sorte que son action n'est pas prescrite.
La Société AXA France Vie, venant aux droits de la société UAP Vie, demande de lui décerner acte de son intervention volontaire en lieu et place de la société AXA France Iard et sollicite la confirmation du jugement qui a considéré que l'action de M. [H] était prescrite sur le fondement des dispositions de l'article 2224 du code civil. Elle précise que les dispositions dudit article sont applicables depuis l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 relative à la réforme de la prescription en matière civile.
Elle soutient que M. [H] avait connaissance des deux prélèvements litigieux dès 1990 puisque que ceux-ci étaient rappelés sur les quittances établies et adressées à M. [H], que celui-ci a régularisé en les signant. Elle ajoute que les prélèvements contestés lui ont également été rappelés à l'occasion de la modification des conditions particulières dénommées 'primata' qui lui ont été adressées à compter d'août 1990 et qu'il ne conteste pas avoir reçu. Elle en déduit que M. [H] était informé de l'existence de ces prélèvements et de leur incidence sur la valeur de rachat des coupures restantes plus de cinq ans avant qu'il n'assigne la société AXA France Iard le 4 octobre 2016 et que son action est prescrite.
A titre préliminaire, il convient de relever que le jugement a relevé à bon droit qu'un contrat de capitalisation n'est pas un contrat d'assurance en tant que tel soumis aux dispositions spéciales de l'article L. 114-1 du code des assurances relatives à la prescription biennale, ce qui n'est pas remis en cause par la société AXA France Vie aux termes de ses conclusions en cause d'appel.
Aux termes de l'article 2224 du code civil issu de la loi du n°2008-561 du 17 juin 2008 entrée en vigueur le 19 juin 2008 'les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait du connaître les faits lui permettant de l'exercer'.
Il résulte de l'article 26 de la loi du 17 juin 2008, que 'les dispositions de la présente loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure'.
En l'espèce, M. [H] soutient qu'il n'a pas été informé de deux prélèvements opérés par anticipation en juillet 1990 mais mis au courant seulement en avril 2013 suite à une interrogation formulée pour obtenir la situation de ses contrats.
Il est constant que la société AXA France Iard n'a pas retrouvé la demande de prélèvement du client mais il résulte de l'audition de M. [R] et [Z], représentant de la société AXA, entendu sur commission rogatoire suite à la plainte avec constitution de partie civile de M. [H] et produite par ce dernier, que M. [R] et [Z] a déclaré que le prélèvement anticipé a eu lieu le 1er juillet 1990 pour 1 169 francs par coupure soit la somme de 116 898 francs et pour le second contrat pour 1 803 francs par coupure soit 180 303 francs. Il a précisé avoir retrouvé la trace informatique de la demande de prélèvement effectuée par M. [H] le 6 juin 1990 qu'il a présenté aux enquêteurs tel que cela résulte des mentions de ces derniers dans le cadre de son audition. Dans cette même audition, M. [R] et [Z] a précisé que pour obtenir le paiement de ce type d'opération, le client devait remettre nécessairement son contrat puisque que seule la présentation du contrat permettait le paiement et qu'en l'espèce les règlements étaient intervenus en espèces contre quittance. Il a ajouté qu'à l'issue de cette opération, un nouveau contrat était ré-émis pour le reste du solde disponible. Il a remis une copie de ces contrats aux enquêteurs ainsi que les copies des conditions particulières mentionnant les prélèvements anticipés. Il est regrettable que M. [H] n'ait pas produit ces contrats et pièces.
Les déclarations de M. [R] et [Z] sur l'existence de prélèvement anticipé le 1er juillet 1990 sont corroborées par la production des quittances adressées par la société AXA France Iard à la suite des règlements intervenus à l'occasion de l'amortissement de coupure par tirages au sort le 25 juillet 1996, le 6 mars 1997 et le 3 décembre 2001. En effet, ces quittances mentionnent le montant à régler à M. [H] après déduction des prélèvements anticipés pour un montant de 1 169 francs par coupure pour le premier contrat (25 juillet 1996) et de 1 803 francs pour le second (le 6 mars 1997 et le 3 décembre 2001). Ces quittances ayant été retournées signées par M. [H], il ne peut utilement soutenir ne pas avoir été informé des prélèvements anticipés à ces dates.
De même, ces prélèvements anticipés avaient été rappelés à M. [H] à l'occasion de la modification des conditions particulières adressées dès le 7 août 1990, celles-ci précisant 'prélèvement anticipé de 1 169 francs par coupure le 1er juillet 1990 au taux de 8%'. M. [H] indique désormais qu'aucun élément n'établit qu'il aurait reçu ces conditions particulières mais il résulte des pièces produites que les conditions particulières relatives au premier contrat dont les références sont rappelées en en-tête ont été émises s'agissant du 1er contrat le 7 août 1990, le 11 août 1994, le 14 octobre 1996 et s'agissant du 2nd contrat le 9 avril 1996. Il ne peut, dès lors, soutenir ne pas en avoir connaissance.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. [H] avait connaissance des prélèvements qu'il dénonce comme litigieux dès 1990. Si la prescription n'était pas acquise lors de l'entrée en vigueur le 19 juin 2008 de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008 relative à la réforme de la prescription en matière civile, l'action de M. [H] était néanmoins prescrite lors de la délivrance de l'assignation le 4 octobre 2016, le délai de cinq ans étant dépassé depuis le 19 juin 2013. Le jugement sera ainsi confirmé par substitution de motifs en ne retenant pas l'aveu judiciaire.
- Sur les frais irrépétibles
Succombant en son appel, M. [H] sera condamné à verser au titre des frais irrépétibles la somme de 1 500 euros à la Société AXA France Vie ainsi qu'aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, étant précisé que les dispositions du jugement seront confirmées sur les dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,
Donne acte à la société AXA France Vie, venant aux droits de la société UAP Vie, de son intervention volontaire en lieu et place de la société AXA France Iard ;
Confirme le jugement en toutes ses dispositions par substitution de motifs ;
Y ajoutant,
Condamne M. [M] [H] à verser au titre des frais irrépétibles la somme de 1 500 euros à la société AXA France Vie ;
Condamne M. [M] [H] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le greffier, La présidente,