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18/07/2022 | FRANCE | N°22/02786

France | France, Cour d'appel de Rennes, Contestations honoraires, 18 juillet 2022, 22/02786


Contestations Honoraires





ORDONNANCE N°80



N° RG 22/02786 -

N° Portalis DBVL-V-B7G-SWQQ













Mme [Z] [U]



C/



Société CABINET AVO-FISC































Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES



ORDONNANCE DE TA

XE

DU 18 JUILLET 2022







Monsieur Fabrice ADAM, Premier Président de chambre, délégué par ordonnance de Monsieur le Premier Président,



GREFFIER :



Madame Françoise BERNARD, lors des débats, et Madame Juliette VANHERSEL, lors du prononcé,



DÉBATS :



A l'audience publique du 04 Juillet 2022



ORDONNANCE :


...

Contestations Honoraires

ORDONNANCE N°80

N° RG 22/02786 -

N° Portalis DBVL-V-B7G-SWQQ

Mme [Z] [U]

C/

Société CABINET AVO-FISC

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ORDONNANCE DE TAXE

DU 18 JUILLET 2022

Monsieur Fabrice ADAM, Premier Président de chambre, délégué par ordonnance de Monsieur le Premier Président,

GREFFIER :

Madame Françoise BERNARD, lors des débats, et Madame Juliette VANHERSEL, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l'audience publique du 04 Juillet 2022

ORDONNANCE :

Contradictoire, prononcée à l'audience publique du 18 Juillet 2022, date indiquée à l'issue des débats

****

ENTRE :

Madame [Z] [U]

[Adresse 2]

[Localité 4]

comparante en personne

ET :

CABINET AVO-FISC

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Guillaume DE MONTGOLFIER, avocat au barreau de NANTES substitué à l'audience par Me Rabah LARABA, avocate au barreau de BREST

****

EXPOSE DU LITIGE :

En janvier 2020, Mme [Z] [U] a consulté Me Guillaume de Montgolfier, membre de la Selarl Avo-Fisc, avocat au barreau de Nantes, dans un premier temps, pour des conseils fiscaux relatifs à une société civile immobilière et à son patrimoine immobilier puis, dans un second temps, pour réorganiser ce patrimoine et l'assister dans le cadre de la succession de son père.

Une lettre de mission a été conclue le 26 février 2020. Celle-ci a été complétée par un acte signé les 15 mai et 8 juin 2020.

La facture afférente à la première phase de la mission (6 518,84 euros TTC) a été réglée alors que celle relative à la seconde, qui n'a concerné que la réorganisation du patrimoine (8 625,53 euros TTC) ne l'a pas été.

L'avocat a mis un terme à son mandat le 12 juillet 2021.

Ne parvenant pas à obtenir le règlement de sa seconde facture, la Selarl Avo-Fisc a, par requête du 17 novembre 2021, saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Nantes d'une demande aux fins de fixation de sa rémunération.

Par décision du 17 mars 2022, le bâtonnier du barreau de Nantes a fixé à la somme de 8 625,53 euros TTC les frais et honoraires dus à la Selarl Avo-Fisc, et a condamné Mme [U] au paiement de cette somme.

Par lettre recommandée avec accusé de réception envoyée le 13 avril 2022, Mme [U] a formé un recours contre cette ordonnance.

Aux termes de ses écritures (9 juin 2022) développées oralement lors de l'audience, Mme [U] sollicite la restitution des honoraires perçus et réclame une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Elle fait valoir que le travail confié à Me de Montgolfier n'a été achevé ni même produit. Elle ajoute que l'avenant lui a été soumis sans lui en expliquer la finalité. Elle soutient que l'avocat a agi de façon peu honnête et qu'elle a l'impression de s'être fait voler.

Elle estime avoir perdu une somme de 7 178,84 euros et conteste devoir la somme réclamée, estimant que la prestation lui a été facturée deux fois.

La Selarl Avo-Fisc sollicite, aux termes de ses écritures développées à l'audience, la confirmation de l'ordonnance du bâtonnier et réclame une somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle rappelle que Mme [U] a accepté la seconde mission et fait valoir que si la première mission a été totalement réglée, aucun honoraire n'a été payé pour la seconde.

Elle rappelle que face à la défiance de Mme [U], elle a été contrainte de se dessaisir du dossier et réclame, en conséquence, les honoraires forfaitaires convenus et les débours exposés suivant justificatifs joints, soit la somme de 8 625,53 euros TTC.

Elle demande 300 euros HT supplémentaires, soit l'équivalent d'une heure de travail, en compensation du temps consacré pour les démarches de recouvrement.

À l'audience, les parties ont été invitées à s'expliquer sur la caducité de la convention d'honoraires du fait que la mission de l'avocat n'ait pas été conduite à son terme.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Le recours de Mme [U] est recevable pour avoir été effectué dans les forme et délai de l'article 176 du décret du 27 novembre 1991.

Il sera tout d'abord rappelé que dans le cadre limité de leur intervention en matière de fixation d'honoraires d'avocats, le bâtonnier et, sur recours, le premier président ou son délégué n'ont pas le pouvoir de connaître, y compris par voie incidente, de la responsabilité éventuelle de l'avocat vis à vis de son client, un tel litige relevant de la juridiction de droit commun. Il s'ensuit que Mme [Z] [U] n'est pas fondée à invoquer les manquements, fautes ou erreurs qu'elle reproche à son conseil pour prétendre à une minoration des honoraires ou solliciter, en réparation de son préjudice, des dommages et intérêts.

La demande indemnitaire de Mme [U] portée devant une juridiction n'ayant pas le pouvoir d'en connaître sera déclarée irrecevable.

La convention conclue le 26 février 2020 porte sur la mission suivante : « la mission confiée à l'avocat par le client vise à l'accompagner, l'assister et le cas échéant le représenter dans le cadre du choix de l'option IS d'une société civile, et proposer une réorganisation patrimoniale afin de répondre à des objectifs de transmission et de réfinancement d'opérations, des conséquences en matière de succession (enfants de deux unions et nouveau projet de vie), d'organisation des pouvoirs, de gestion des flux, des conséquences en matière fiscale. Préparer la simulation sur la base des informations du client, la valider la lettre d'option, et accompagner le client et son expert comptable si nécessaire. Modifier les statuts de la société civile pour les adapter aux situations de démembrement de la propriété des parts sociales, rédiger les actes, procéder aux formalités légales. Le service est limité au domaine fiscal et à la société civile pour la mise à jour des statuts ».

Les parties ont convenu d'un honoraire au temps passé sur la base d'un tarif horaire de 300 euros HT pour un avocat associé et de 200 euros HT pour un avocat collaborateur et de frais de dossier couverts par l'application d'un taux forfaitaire de 5 % HT des honoraires HT.

La convention stipule qu'en cas de dessaisissement, « le client s'engage à régler sans délai les honoraires ainsi que les frais, débours et dépens dus à l'avocat pour les diligences effectuées antérieurement à la date du dessaisissement ».

Cette mission a fait l'objet de trois factures en date des 3 février 2020, 27 mars 2020 et 30 avril 2020 respectivement de 360 euros TTC, 1 800 euros TTC et 4 718,84 euros TTC, toutes réglées.

Elle aurait donné lieu à une « consultation concernant la réorganisation patrimoniale » qu'aucune des deux parties n'a jugé utile de verser aux débats. Quoiqu'il en soit, cette consultation, facturée 6 878,84 euros TTC, a été réglée en totalité le 30 avril 2020 après qu'elle eût été présentée de sorte que le règlement de cette prestation, intervenu librement et en connaissance de cause, ne peut être contesté.

À la suite d'un rendez-vous fixé le 14 mai 2020, la Selarl Avo-Fisc a adressé, le 15 mai 2020, à Mme [U] une lettre de mission complémentaire portant sur :

- la préparation des documents et actes nécessaires à la mise en place du schéma indiqué dans la consultation concernant la réorganisation patrimoniale (SCI du Four, SCI [U] Investissements, Société SR Investissement),

- l'assistance dans le cadre de la succession du père de Mme [U].

L'avocat proposait :

- pour le volet réorganisation juridique, un forfait de 6 800 euros HT, cette somme ne comprenant pas les débours légaux des formalités, facturés en sus,

- et le volet assistance en matière successorale un honoraire au temps passé facturé dans les conditions de la lettre de mission du 26 février 2020.

Cette lettre de mission complémentaire a été approuvée par Mme [U] qui l'a signée le 8 juin 2020.

Le 30 juin 2020, la Selarl Avo-Fisc a adressé à sa cliente une facture provisionnelle de 5 000 euros HT (qui n'a pas été réglée) puis le 30 septembre 2020, une facture de 7 140 euros HT, soit, débours légaux compris, la somme de 8 625,53 euros TTC.

Il est constant que la mission prévue dans l'acte des 15 mai et 8 juin 2020 n'a pas été conduite à son terme puisque l'assistance au règlement de la succession de M. [U] n'a même pas été entreprise.

Le bâtonnier a noté dans son ordonnance que Me de Montgolfier avait apporté les justificatifs de son travail et notamment, pour la SCI du Four, l'AGE du 26 juin 2020 modifiant la date de clôture de l'exercice social, l'AGO du 8 septembre 2020 d'approbation des comptes, la convention du 6 octobre 2020 d'apport des titres [U] Investissements et SR Investissements, l'AGE du 7 octobre 2020 d'augmentation du capital et la refonte consécutive des statuts. Dans le cadre du présent recours aucune de ces pièces n'a été produite aux débats (cf. bordereau de communication de pièces joint aux conclusions de la selarl Avo Fisc).

Si les actes décrits par le bâtonnier seront supposés avoir été effectués (Mme [U] ne les contestant pas), l'examen attentif de la lettre de mission du 15 mai 2020 approuvée le 8 juin permet de relever que d'autres points n'ont pas été effectués (ou du moins qu'il n'en a jamais été justifié, y compris devant le bâtonnier) :

- pour la SCI du Four, ' préparer une option IS dans les trois mois du nouvel exercice, adresser aux services fiscaux l'option IS, le bilan d'ouverture au 1er juin 2020 et les statuts ',

- pour la SCI [U] Investissements 'adapter les statuts à votre nouvelle organisation... approuver les comptes de l'exercice 2019, constater la nouvelle valeur des actifs immobilisé ainsi que l'augmentation de valeur de vos comptes courants, clôturer l'exercice au 30 mai 2020 et préparer une option IS dans les 3 mois du nouvel exercice, adresser aux services fiscaux l'option IS, le bilan d'ouverture au 1er juin 2020 et les statuts ' (la consultation d'Infogreffe, site public et accessible, ne fait état pour cette société d'aucune modification des statuts en 2020 / 2021).

Il apparaît ainsi et pour ce qui est du seul volet réorganisation juridique que la seconde mission qui recouvre d'ailleurs en partie la première qui comprenait notamment le point suivant : 'Modifier les statuts de la société civile pour les adapter aux situations de démembrement de la propriété des parts sociales, rédiger les actes, procéder aux formalités légales', n'a pas été achevée et que l'avocat ne peut donc prétendre au forfait qui avait été convenu, la lettre de mission étant devenue caduque.

En ce cas, la rémunération de l'avocat doit être fixée au temps passé. En l'espèce ce temps peut être raisonnablement estimé à douze heures facturées au taux convenu de 300 euros HT/heure, soit 3600 euros HT, somme à laquelle il convient d'ajouter les frais (5 % HT), soit la somme de 180 euros HT et les débours justifiés (57,53 euros), soit au total la somme de [(3600 + 180)*1,2 + 57,53] 4 593,53 euros TTC que Mme [U] sera condamnée à payer.

L'ordonnance du bâtonnier de Nantes (17 mars 2022) sera donc infirmée.

La Selarl Avo-Fisc sera déboutée du surplus de ses demandes et notamment de celle consacré à la préparation de son dossier (qui ne comporte aucune pièce de fond).

Chaque partie échouant partiellement en ses prétentions conservera à sa charge les frais qu'elle a exposés.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, contradictoirement,

DÉCLARONS recevable le recours de Mme [U] contre l'ordonnance du bâtonnier de Nantes rendue le 17 mars 2022.

DÉCLARONS irrecevable la demande indemnitaire de Mme [U].

INFIRMONS l'ordonnance du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Nantes du 17 mars 2022.

FIXONS les honoraires dus par Mme [Z] [U] à la Selarl Avo-Fisc à la somme de 4 593,53 euros TTC et CONDAMNONS Mme [U] au payement de cette somme à la dite Selarl.

DÉBOUTONS la Selarl Avo-Fisc du surplus de ses demandes.

DISONS que chaque partie supportera la charge des frais, compris ou non dans les dépens, par elle exposés.

REJETONS la demande de la Selarl Avo-Fisc fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Contestations honoraires
Numéro d'arrêt : 22/02786
Date de la décision : 18/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-18;22.02786 ?
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