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13/07/2022 | FRANCE | N°22/00404

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre etrangers/hsc, 13 juillet 2022, 22/00404


COUR D'APPEL DE RENNES



N° 219/2022

N° N° RG 22/00404 - N° Portalis DBVL-V-B7G-S572



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT





O R D O N N A N C E



articles L 741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile



Nous, Valérie PICOT-POSTIC, conseiller à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ass

isté de Catherine VILLENEUVE, greffière,





Statuant sur l'appel formé le 12 Juillet 2022 à 11 h48 par la CIMADE pour :



M. [X] [U]
...

COUR D'APPEL DE RENNES

N° 219/2022

N° N° RG 22/00404 - N° Portalis DBVL-V-B7G-S572

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

articles L 741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

Nous, Valérie PICOT-POSTIC, conseiller à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Catherine VILLENEUVE, greffière,

Statuant sur l'appel formé le 12 Juillet 2022 à 11 h48 par la CIMADE pour :

M. [X] [U]

né le [Date naissance 1] 1987 à [Localité 2] (ALGÉRIE)

de nationalité Algérienne

ayant pour avocat Me Marie-Aude PAULET-PRIGENT, avocat au barreau de RENNES

d'une ordonnance rendue le 11 Juillet 2022 à 18h31 par le juge des libertés et de la détention du Tribunal judiaire de RENNES qui a ordonné la prolongation du maintien de M. [X] [U] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée maximale de trente jours à compter du 11 juillet 2022 à 9H45 ;

En présence du représentant du préfet de la Préfecture d'Ille et Vilaine,

En l'absence du procureur général régulièrement avisé, (avis du 12 juillet 2022)

En présence de [X] [U], par le biais de la visio-conférence, assisté de Me Marie-aude PAULET-PRIGENT, avocat,

Après avoir entendu en audience publique le 13 Juillet 2022 à 11 H 00 l'appelant assisté de M. [E] [W], interprète en langue Arabe, et son avocat et le représentant du préfet en leurs observations,

Avons mis l'affaire en délibéré et le 13 Juillet 2022 à 15 heures, avons statué comme suit :

EXPOSE DU LITIGE

M. [X] [U], de nationalité algérienne, a fait l'objet d'un placement en rétention administrative ordonnée par monsieur le préfet d'Ille et Vilaine le 11 juin 2022 en exécution d'une décision portant obligation de quitter le territoire français sans délai du 06 février 2022.

Par ordonnance du 13 juin 2022, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes a, sur requête du préfet reçue le 8 juillet 2022, prolongé la rétention de M. [X] [U] pour une durée maximale de vingt huit jours à compter du 13 juin 2022 à 09 heures 45. Cette décision a été confirmée par ordonnance du 15 juin 2022 du conseiller à la cour d'appel de Rennes, délégué par ordonnance du premier président.

Par ordonnance en date du 11 juillet 2022, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes a ordonné la prolongation du maintien de M. [X] [U] dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 30 jours à compter du 11 juillet 09 H 45.

Par courrier électronique de la CIMADE reçu au greffe de la cour le 12 juillet 2022 à 11 heures 48, M. [X] [U] a interjeté appel de cette ordonnance notifiée à 18 h 55 le 11 juillet 2022.

Au soutien de son appel, il soutient que la prolongation de son maintien en rétention n'aurait pas dû être ordonné dès lors que la préfecture n'a pas accompli toutes les diligences nécessaires afin de rendre sa rétention aussi brève que possible. Il invoque également son état de vulnérabilité et les dispositions de l'article 741-1 du ceseda, en faisant valoir qu'il souffre de problèmes de santé (douleurs vives au niveau de la cheville et dégradation de son état de santé mentale) et conclut que son état de santé n'est pas compatible avec un enfermement prolongé en rétention.

A l'audience, M. [X] [U] a été entendu en ses explications. Il déclare qu'il n'est pas d'accord avec la mesure d'éloignement, qu'il souhaite pouvoir se rendre au Consulat d'Algérie afin de « récupérer son dossier » et qu'il pourra partir selon ses propres moyens. Il précise avoir fait appel pour avoir « une deuxième chance », que la moitié de sa famille vit ici, qu'il ne va pas bien, et qu'il se retrouve sans ses affaires.

Le Préfet d'Ille et Vilaine, représenté par Mme [B] [V], munie d'un pouvoir, a sollicité la confirmation de l'ordonnance susvisée en estimant qu'elle a rempli les diligences nécessaires pour permettre l'éloignement de M. [U] le plus rapidement possible mais qu'elle a du faire face à l'obstruction permanente de ce dernier qui a déjà refusé un test PCR alors qu'un vol était prévu le 27 juin dernier, qu'il a été condamné par le tribunal correctionnel pour cesfaits et qu'il n'avait pas déjà respecté les obligations qui lui étaient imposées dans le cadre d'une précédente assignation à résidence. Elle souligne que M. [U] a déjà manifesté son refus de retourner en Algérie, qu'elle a effectué dès le 04 juillet 2022 des diligences pour trouver un vol à destination de l'Algérie et qu'elle en justifie, rappelant qu'elle ne dispose d'aucun pouvoir de contrainte sur les compagnies aériennes. Elle en conclut que le requérant est mal fondé à se prévaloir des dispositions de l'article L 741-3 du ceseda.

Elle prétend également que M. [U] ne justifie d'aucun élément nouveau pour se prévaloir d'une dégradation de son état de santé qui rendrait incompatible son maintien en détention et précise avoir appelé le CRA qui lui a indiqué que ce dernier n'a jamais demandé à voir un médecin mais a uniquement consulté une infirmière qui n'a pas jugé nécessaire de le diriger vers un médecin.

Selon avis écrit du 12 juillet 2022, le procureur général a sollicité la confirmation de l'ordonnance.

L'avocate de M. [U] a été régulièrement entendue. Elle conclut à l'infirmation de l'ordonnance entreprise et à la remise en liberté de l'intéressé, reprenant les moyens développés par la CIMADE dans la déclaration d'appel. Elle souligne que le vol est prévu pour le 28 juillet 2022, ce qui est un délai très long, et que M. [U] souffre de douleurs à la cheville outre des problèmes d'ordre psychologique. Elle indique que ce dernier n'a pas appelé le médecin du CRA, estimant qu'il n'était pas spécialisé en psychiatrie et ne pouvait donc être utile. Elle évoque un certificat médical produit au cours de la première instance.

MOTIFS DE LA DECISION

L'appel, formé dans les délais et formes légaux, est recevable.

Sur le manque de diligences

L'article L 741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit qu'en tout état de cause « un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet ».

Selon l'article .. 742-4 du code , « le juge des libertés et de la détention peut, dans les mêmes conditions qu'à l'article L. 742-1, être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants:

1o En cas d'urgence absolue ou de menace d'une particulière gravité pour l'ordre public;

2o Lorsque l'impossibilité d'exécuter la décision d'éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l'intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l'obstruction volontaire faite à son éloignement ;

3o Lorsque la décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison :

a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l'exécution de la décision d'éloignement;

b) de l'absence de moyens de transport.

L'étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l'article L. 742-2.

Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d'une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas soixante jour ».

En l'espèce, la préfecture justifie des diligences faites pendant le temps de la première prolongation pour mettre à exécution la mesure d'éloignement.

Il ressort en effet du dossier de la procédure que la préfecture avait obtenu le 22 juin 2022 un laisser-passer pour l'éloignement de M. [U] vers l'Algérie pour une durée de validité de 15 jours mais ce dernier a refusé le 25 juin 2022 de se soumettre au test de dépistage contre la covid conditionnant son départ prévu le 27 juin 2022 vers Alger.

Force est de constater que ce n'était pas la première fois qu'il faisait obstacle à la mesure d'éloignement puisqu'il est établi que M. [U] a été déclaré coupable par le tribunal correctionnel de Rennes, par jugement en date du 06 avril 2022, des faits de refus par un étranger de se soumettre aux modalités de transport ou aux obligations sanitaires nécessaires à l'exécution d'office d'une décision d'éloignement (faits commis le 04 avril 2022 à St Jacques de la Lande) et condamné à la peine d'emprisonnement de 3 mois.

Ce comportement caractérise suffisamment son obstruction volontaire à l'exécution de la mesure d'éloignement.

Par ailleurs, l'administration justifie de la nouvelle demande de laisser-passer effectuée dès le 4 juillet 2022 alors que l'intéressé s'était opposé au test PCR de dépistage contre la covid le 25 juin 2022 pour lui permettre un départ le 27 juin suivant, dans le temps de la première prolongation. Un nouveau vol pour Alger est prévu le 28 juillet 2022 ainsi que cela ressort du routing communiqué par le pôle central d'éloignement .

Dans ce contexte, il ne saurait dès lors être reproché à l'administration de ne pas avoir fait assez de diligences pendant la première période de prolongation. La préfecture a bien effectué toutes les diligences nécessaires pour mettre en 'uvre la mesure d'éloignement et M. [U] est inopérant à reprocher à l'autorité préfectorale de ne pas avoir obtenu un vol à plus bref délai dès lors que cette dernière ne dispose d'aucune autorité sur les disponibilités des créneaux de vols des compagnies aériennes.

Le moyen tiré de l'absence de diligence de l'administration sera donc rejeté.

Sur l'état de vulnérabilité

En application de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, « la décision de placement en rétention prend en compte l'état de vulnérabilité et tout handicap de l'étranger. Le handicap moteur, cognitif ou psychique et les besoins d'accompagnement de l'étranger sont pris en compte pour déterminer les conditions de son placement en rétention ».

Par ailleurs, l'article L744-4 du même code prévoit que l'étranger en rétention a le droit de demander l'assistance d'un médecin.

Il convient de rappeler que M. [U] n'a pas contesté la régularité de l'arrêté de placement en rétention dans les délais. Il est également constant, ainsi que cela ressort de l'ordonnance du conseiller délégué par ordonnance du premier président, en date du 15 juin 2022, que « ce dernier ne justifie pas d'un état de vulnérabilité incompatible avec son placement en rétention, étant observé qu'il a été placé en rétention jusqu'au 06 avril 2022, puis qu'il a été placé en détention malgré son état de santé et sans modalités spécifiques ».

S'il est fait état de pièces médicales versées aux débats dans le cadre de l'audience s'étant tenue devant le juge des libertés et de la détention du 13 juin 2022, il convient de relever que celles-ci dataient de plus d'un an et n'attestaient pas d'un état de vulnérabilité faisant obstacle à un placement en rétention.

Devant la cour, M. [U] ne produit aucun élément nouveau dans le cadre de la présente procédure de nature à établir que son état de santé actuel est incompatible avec son maintien en rétention administrative étant précisé qu'il n'avait pas soulevé ce moyen devant le juge des libertés et de la détention lors de l'audience du 11 juillet 2022. Il n'a pas contesté avoir été vu par une infirmière au centre de rétention qui n'a pas jugé opportun de le diriger vers un médecin. Lui-même a indiqué qu'il n'avait pas voulu voir le médecin dudit centre, estimant que ce dernier n'était pas à même de l'examiner faute d'être spécialisé en psychiatrie.

Ce moyen sera donc rejeté.

L'ordonnance sera donc confirmée en ce qu'elle a fait droit à la demande du préfet en ordonnant la prolongation du maintien en rétention administrative de M. [X] [U] pour une durée de 30 jours supplémentaires à compter du 11 juillet 2022 à 09 h 45.

Les dépens de la présente instance seront laissés à la charge du Trésor Public.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement par décision contradictoire en dernier ressort, après débats au audience publique,

DECLARONS recevable l'appel formé par M. [X] [U] ;

CONFIRMONS l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes du 11 juillet 2022 ;

LAISSONS les dépens à la charge du trésor public.

Ainsi jugé le 13 juillet 2022 à 15 heures

LE GREFFIER PAR DELEGATION,

Valérie PICOT-POSTIC Conseillère

Fait à Rennes, le 13 Juillet 2022 à 15 heures

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION,

Valérie PICOT-POSTIC, conseillère

Notification de la présente ordonnance a été faite ce jour à [X] [U], à son avocat et au préfet

Le Greffier,

Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général.

Le Greffier


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre etrangers/hsc
Numéro d'arrêt : 22/00404
Date de la décision : 13/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-13;22.00404 ?
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