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11/07/2022 | FRANCE | N°22/00401

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre etrangers/hsc, 11 juillet 2022, 22/00401


COUR D'APPEL DE RENNES



N° 22/176

N° N° RG 22/00401 - N° Portalis DBVL-V-B7G-S5XO



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



O R D O N N A N C E



article L 3222-5-1 et suivants du code de la santé publique



Ordonnance statuant sur les recours en matière d'isolement et de contention mis en oeuvre dans le cadre de soins psychiatriques sans consentement



Nous, Valérie PICOT-POSTIC, Conseiller à la cour d'appel de RENNES, délégué(é) par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fon

dés sur les articles L 3222-5-1 du code de la santé publique, assisté de Sandrine KERVAREC, greffière,



Vu l'ordonnance du Juge des liber...

COUR D'APPEL DE RENNES

N° 22/176

N° N° RG 22/00401 - N° Portalis DBVL-V-B7G-S5XO

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

article L 3222-5-1 et suivants du code de la santé publique

Ordonnance statuant sur les recours en matière d'isolement et de contention mis en oeuvre dans le cadre de soins psychiatriques sans consentement

Nous, Valérie PICOT-POSTIC, Conseiller à la cour d'appel de RENNES, délégué(é) par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L 3222-5-1 du code de la santé publique, assisté de Sandrine KERVAREC, greffière,

Vu l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de RENNES rendue le 10 Juillet 2022, autorisant le maintien de la mesure d'isolement de :

Monsieur [G] [B]

né le 21 Mai 2000

Actuellement hospitalisé au Centre hospitalier [1]

Ayant pour conseil Maître Marine GUENIN, avocat au barreau de RENNES

Vu la déclaration d'appel formée par Maître Marine GUENIN, avocat au barreau de RENNES au nom de M. [G] [B] contre cette ordonnance, envoyée le 10 juillet 2022 à 14 h 26 et reçue au greffe de la cour d'appel 11 Juillet 2022 à 7 h 01

Vu les articles L 3222-5-1 et suivants du code de la santé publique,

Vu les observations sollicitées et recueillies sur le recours formé ;

Vu le dossier de la procédure ;

Par requête du 09 juillet 2022 , le directeur du Centre Hospitalier [1] a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes afin qu'il soit statué sur la mesure d'isolement.

Après avoir recueilli les observations des parties, par ordonnance en date du 10 juillet 2022, le juge des libertés et de la détention a autorisé le maintien de la mesure d'isolement.

Par déclaration de son avocat du 10 juillet 2022 à 14 H 26, reçue au greffe de la cour d'appel de Rennes le 11 juillet 2022 à 7 H 01, monsieur [G] [B] a formé appel de cette ordonnance.

Il invoque à l'appui de sa demande de mainlevée de la mesure d'isolement, la violation de l'article 3222-5-1 du code de la santé publique en faisant valoir que la mesure d'isolement ayant été prise le 6/07/2022 à 11 H 58, la transmission de la requête au JLD devait avoir lieu dans les 72 H soit avant le 9/7/2022 à 11 H 58, que la transmission de la requête est datée par une mention manuscrite du 9/07/2022 à « 4 H49 », sans qu'aucun accusé réception de fax ou mail ne vienne confirmer cette heure. Il en conclut que sans preuve formelle de la transmission de cette requête avant le 9/07/2022 à 11 H 58, la procédure doit être considérée comme irrégulière.

Il soutient également que le certificat d'incompatibilité annexé à la requête a été rédigé par le docteur [R] qui a participé à sa prise en charge, en violation de l'article 3211-12 du code de la santé publique.

L'appelant, le centre hospitalier [1] et monsieur le Procureur Général ont été avisés de l'heure limite pour présenter leurs observations fixées à 14 H.

Avant cette heure, monsieur le Procureur Général a sollicité la confirmation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention.

Monsieur [B] n'a pas formulé d'observations en sus de sa déclaration d'appel.

Le centre hospitalier [1] n'a formulé aucune observation.

MOTIFS,

L'appel, formé dans les formes et délais légaux, est recevable.

Sur le fond,

L'article L 3222-5-1 du code de la santé publique dispose :

« I. -L'isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours et ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète sans consentement. Il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision motivée d'un psychiatre et uniquement de manière adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient. Leur mise en 'uvre doit faire l'objet d'une surveillance stricte, somatique et psychiatrique, confiée par l'établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin et tracée dans le dossier médical.

La mesure d'isolement est prise pour une durée maximale de douze heures. Si l'état de santé du patient le nécessite, elle peut être renouvelée, dans les conditions et selon les modalités prévues au premier alinéa du présent I, dans la limite d'une durée .totale de quarante-huit heures, et fait l'objet de deux évaluations par vingt-quatre heures.

La mesure de contention est prise dans le cadre d'une mesure d'isolement pour une durée maximale de six heures. Si l'état de santé du patient le nécessite, elle peut être renouvelée, dans les conditions et selon les modalités prévues au même premier alinéa, dans la limite d'une durée totale de vingt- heures, et fait l'objet de deux évaluations par douze heures.

II - A titre exceptionnel, le médecin peut renouveler, au-delà des durées totales prévues au I, les mesures d'isolement et de contention, dans le respect des conditions prévues au même I. Le directeur de l'établissement informe sans délai le juge des libertés et de la détention du renouvellement de ces mesures. Le juge des libertés et de la détention peut se saisir d'office pour y mettre fin. Le médecin informe du renouvellement de ces mesures au moins un membre de la famille du patient, en priorité son conjoint, le partenaire lié à lui par un pacte civil de solidarité ou son concubin, ou une personne susceptible d'agir dans son intérêt dès lors qu'une telle personne est identifiée, dans le respect de la volonté du patient et du secret médical.

Le directeur de l'établissement saisit le juge des libertés et de la détention avant l'expiration de la soixante-douzième heure d'isolement ou de la quarante-huitième heure de contention, si l'état de santé du patient rend nécessaire le renouvellement de la mesure au-delà de ces durées.

Le juge des libertés et de la détention statue dans un délai de vingt-quatre heures à compter du terme des durées prévues au deuxième alinéa du présent II.

Si les conditions prévues au I ne sont plus réunies, il ordonne la mainlevée de la mesure. Dans ce cas, aucune nouvelle mesure ne peut être prise avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures à compter de la mainlevée de la mesure, sauf survenance d'éléments nouveaux dans la situation du patient qui rendent impossibles d'autres modalités de prise en charge permettant d'assurer sa sécurité ou celle d'autrui. Le directeur de l'établissement informe sans délai le juge des libertés et de la détention, qui peut se saisir d'office pour mettre fin à la nouvelle mesure.

Si les conditions prévues au même I sont toujours réunies, le juge des libertés et de la détention autorise le maintien de la mesure d'isolement ou de contention. Dans ce cas, le médecin peut la renouveler dans les conditions prévues audit I et aux deux premiers alinéas du présent II. Toutefois, si le renouvellement d'une mesure d'isolement est encore nécessaire après deux décisions de maintien prises par le juge des libertés et de la détention, celui-ci est saisi au moins vingt-quatre heures avant l'expiration d'un délai de sept jours à compter de sa précédente décision et le médecin informe du renouvellement de ces mesures au moins un membre de la famille du patient, en priorité son conjoint, le partenaire lié à lui par un pacte civil de solidarité ou son concubin, ou une personne susceptible d'agir dans son intérêt dès lors qu'une telle personne est identifiée, dans le respect de la volonté du patient et du secret médical. Le juge des libertés et de la détention statue avant l'expiration de ce délai de sept jours. Le cas échéant, il est à nouveau saisi au moins vingt-quatre heures avant l'expiration de chaque nouveau délai de sept jours et statue dans les mêmes conditions. Le médecin réitère l'information susmentionnée lors de chaque saisine du juge des libertés et

de la détention.

Pour l'application des deux premiers alinéas du présent II, lorsqu'une mesure d'isolement ou de contention est prise moins de quarante-huit heures après qu'une précédente mesure d'isolement ou de contention a pris fin, sa durée s'ajoute à celle des mesures d'isolement ou de contention qui la précèdent.

Les mêmes deux premiers alinéas s'appliquent lorsque le médecin prend plusieurs mesures dont la durée cumulée sur une période de quinze jours atteint les durées prévues auxdits deux premiers alinéas.

Les mesures d'isolement et de contention peuvent également faire l'objet d'un contrôle par le juge des libertés et de la détention en application du IV de l'article L. 3211-12-1.

Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application du présent II.

III. -Un registre est tenu dans chaque établissement de santé autorisé en psychiatrie et désigné par le directeur général de l'agence régionale de santé pour assurer des soins psychiatriques sans consentement en application du I de l'article L. 3222- 1. Pour chaque mesure d'isolement ou de contention, ce registre mentionne le nom du psychiatre ayant décidé cette mesure, un identifiant du patient concerné ainsi que son âge, son mode d'hospitalisation, la date et l'heure de début de la mesure, sa durée et le nom des professionnels de santé l'ayant surveillée. Le registre, établi sous forme numérique, doit être présenté, sur leur demande, à la commission départementale des soins psychiatriques, au Contrôleur général des lieux de privation de liberté ou à ses délégués et aux parlementaires.

L'établissement établit annuellement un rapport rendant compte des pratiques d'admission en chambre d'isolement et de contention, la politique définie pour limiter le recours à ces pratiques et l'évaluation de sa mise en 'uvre. Ce rapport est transmis pour avis à la commission des usagers prévue à l'article L. 1112-3 et au conseil de surveillance prévu à 1'article L 6143-1 ».

Par ailleurs, l'article L3211-12 du même code prévoit que le juge des libertés et de la détention dans le ressort duquel se situe l'établissement d'accueil peut être saisi aux fins de mainlevée d'une mesure d'isolement ou de contention prise en application de l'article L. 3222-5-1.

- Sur le moyen tiré de la violation de l'article L 3222-5-1 du code de la santé publique

En application de l'article L 3222-5-1 II du code de la santé publique, « ' le directeur de l'établissement saisit le juge des libertés et de la détention avant l'expiration de la soixante-douzième heure d'isolement ou de la quarante-huitième heure de contention, si l'état de santé rend nécessaire le renouvellement de la mesure au-delà de ces durées... ».

Selon l'article R. 3211-33-1 I du même code, « lorsque le directeur de l'établissement saisit le juge des libertés et de la détention, la requête est présentée dans les conditions prévues à l'article R. 3211-10 ».

En vertu de l'article R. 3211-10 du code susvisé, « le juge des libertés et de la détention dans le ressort duquel se situe l'établissement d'accueil est saisi par requête transmise par tout moyen permettant de dater sa réception au greffe du tribunal judiciaire ».

En l'espèce, il ressort des pièces de la procédure et en particulier de la requête adressée par le directeur du centre hospitaliser [1] que celle-ci a été reçue au greffe du tribunal judiciaire de Rennes le 9 juillet 2022 à 4 H 49. Cette mention manuscrite portant sur l'heure a été signée par le greffier ainsi que cela résulte de la comparaison de la signature figurant sous cette mention et celle figurant sur divers documents tels que la communication d'une requête en maintien d'une mesure d'isolement adressée au Ministère Public et au conseil du requérant le 9 juillet 2022, ledit greffier ayant par ailleurs mentionné expressément que « le greffe a reçu le 09 juillet 2022, à 04 H 49 une demande de maintien de la mesure d'isolement ... « . La même signature figure sur la notification de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention le 10 juillet 2022.

Ces éléments suffisent à démontrer que la requête a bien été transmise au greffe du juge des libertés et de la détention avant le 9 juillet 2022 avant 11 H 58. Ce moyen sera donc rejeté.

- Sur le moyen tiré de la violation de l'article R. 3211-12 du code de la santé publique

L'article R. 3211-12 5° du code de la santé publique dispose : « sont communiqués au juge des libertés et de la détention afin qu'il statue : (')

5° le cas échéant :

(')

b) l'avis d'un psychiatre ne participant pas à la prise en charge de la personne qui fait l'objet de soins, indiquant les motifs médicaux qui feraient obstacle à son audition ».

Néanmoins, il convient de se référer à la procédure judiciaire de mainlevée ou de contrôle des mesures d'isolement et de contention (sous-section II) qui prévoit en son article R. 3211-33-1 que « I - lorsque le directeur de l'établissement saisit le juge des libertés et de la détention, en application du II de l'article L. 3222-5-1, la requête est présentée dans les conditions prévues à l'article R. 3211-10.

Sont jointes à la requête les pièces mentionnées à l'article R. 3211-12 ainsi que les précédentes décisions d'isolement ou de contention prises à l'égard du patient et tout autre élément de nature à éclairer le juge.

II. ' Le directeur informe le patient de la saisine du juge des libertés et de la détention. Il lui indique qu'il peut, dans le cadre de cette instance, être assisté ou représenté par un avocat choisi, désigné au titre de l'aide juridictionnelle ou commis d'office.

Il lui indique également qu'il peut demander à être entendu par le juge des libertés et de la détention et qu'il sera représenté par un avocat si le juge décide de ne pas procéder à son audition au vu de l'avis médical prévu au deuxième alinéa du III de l'article L. 3211-12-2. Le directeur recueille le cas échéant son acceptation ou son refus d'une audition par des moyens de télécommunication.

Le directeur informe le patient qu'il peut avoir accès aux pièces jointes à la requête dans le respect, s'agissant des documents faisant partie du dossier médical, des prescriptions de l'article L. 1111-7. Le délai de réflexion prévu au deuxième alinéa de l'article L. 1111-7 n'est pas applicable.

III. - Le directeur communique au greffe par tout moyen permettant de donner date certaine à leur réception, dans un délai de dix heures à compter de l'enregistrement de sa requête, les informations et pièces suivantes:

1o Le cas échéant, le nom de l'avocat choisi par le patient ou l'indication selon laquelle il demande qu'un avocat soit commis d'office pour l'assister ou le représenter;

2o Le cas échéant, le souhait du patient d'être entendu par le juge des libertés et de la détention ainsi que son acceptation ou son refus d'une audition par des moyens de télécommunication;

3o Si le patient demande à être entendu par le juge des libertés et de la détention, un avis d'un médecin relatif à l'existence éventuelle de motifs médicaux faisant obstacle, dans son intérêt, à son audition et à la compatibilité de l'utilisation de moyens de télécommunication avec son état mental;

4o Toute pièce que le patient entend produire ».

En l'espèce, le certificat médical établi le 9 juillet 2022 par le docteur [R] mentionne que « l'état de santé de ne permet son audition ni par présentation physique ni par moyen de télécommunication par le juge de la liberté et de la détention » et motive cette incompatibilité par des motifs médicaux.

Si au vu de la synthèse du suivi de la mesure, le docteur [R] participe manifestement à la prise en charge médicale du patient, il n'en demeure pas moins que c'est à bon droit que le premier juge a pu considérer qu'en application du principe suivant lequel les règles spéciales dérogent aux règles générales, les dispositions de l'article R. 3211-33-1 susvisé s'appliquent à la procédure judiciaire en matière d'isolement et de contention et qu'il n'y a donc pas lieu d'exiger « l'avis d'un psychiatre ne participant pas à la prise en charge de la personne qui fait l'objet de soins, indiquant les motifs médicaux qui feraient obstacle à son audition ». En effet, le texte susvisé n'impose pas que l'avis motivé émane d'un médecin ne participant pas à la prise en charge de la personne faisant l'objet de soins.

En conséquence, les dispositions de l'article R 3211-12 5 ° ne sont pas applicables en l'espèce, et M. [B] ne peut soutenir que l'avis du psychiatre, le docteur [R], indiquant qu'il ne peut être entendu, a pour conséquence de rendre irrégulière la mesure.

M. [B] sera donc débouté de sa demande de mainlevée de la mesure et l'ordonnance du juge des libertés et de la détention susvisée sera confirmée.

PAR CES MOTIFS,

Statuant sans audience selon une procédure écrite, par décision contradictoire mise à disposition au greffe,

DÉCLARONS l'appel recevable ;

CONFIRMONS l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes du 10 juillet 2022 ;

LAISSONS les dépens à la charge du Trésor Public.

Fait à Rennes, le 11 juillet 2022 à 15 heures 30.

LE GREFFIER,PAR DÉLÉGATION, Valérie PICOT-POSTIC,

Conseillère


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre etrangers/hsc
Numéro d'arrêt : 22/00401
Date de la décision : 11/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-11;22.00401 ?
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