La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/07/2022 | FRANCE | N°19/03425

France | France, Cour d'appel de Rennes, 2ème chambre, 01 juillet 2022, 19/03425


2ème Chambre





ARRÊT N°403



N° RG 19/03425

N° Portalis DBVL-V-B7D-PZLM





(2)







SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE



C/



M. [V] [Z]

SELURL [H] MJ



















Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée















Copie exécutoire délivrée



le :



à :

- Me LECLERCQ<

br>
- Me LE BERRE BOIVIN







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 01 JUILLET 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur David JOBARD, Président de Chambr...

2ème Chambre

ARRÊT N°403

N° RG 19/03425

N° Portalis DBVL-V-B7D-PZLM

(2)

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

C/

M. [V] [Z]

SELURL [H] MJ

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me LECLERCQ

- Me LE BERRE BOIVIN

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 01 JUILLET 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,

Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Ludivine MARTIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 03 Mai 2022

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 01 Juillet 2022, après prorogation, par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de BANQUE SOLFEA,

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Erwan LECLERCQ de la SCP LECLERCQ & CASTRES, postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Laure REINHARD, plaidant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉS :

Monsieur [V] [Z]

né le 17 Février 1969 à [Localité 7] (44)

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN, postulant, avocat au barreau de RENNES

Représenté par Me Samuel HABIB, plaidant, avocat au barreau de PARIS

SELARLU [H] MJ prise en la personne de Maître [W] [H] es qualité de mandataire liquidateur de la société NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES DE FRANCE exerçant sous l'enseigne GROUPE SOLAIRE DE FRANCE

[Adresse 4]

[Localité 6]

Assigné par acte d'huissier en date du 26/07/2019, délivré à personne, n'ayant pas constitué

EXPOSE DU LITIGE :

Suivant acte sous-seing-privé en date du 12 septembre 2012, M. [V] [Z] a commandé auprès de la société Nouvelle régie des jonctions des énergies de France exerçant sous l'enseigne Groupe solaire de France la fourniture et l'installation de panneaux photovoltaïques. Les travaux ont été financés par la souscription d'un prêt auprès de la société Solfea d'un montant de 19 900 € remboursable en 180 mensualités incluant les intérêts au taux annuel de 5,60 %.

Suivant acte d'huissier en date des 8 et 11 septembre 2017, M. [V] [Z] a assigné la société [H] MJ en qualité de liquidateur judiciaire de la société Groupe solaire de France et la société BNP Paribas personal finance venue aux droits de la société Solfea devant le tribunal d'instance de Nantes.

Suivant jugement en date du 5 février 2019, le tribunal a :

Prononcé l'annulation du contrat conclu le 12 septembre 2012 entre M. [V] [Z] et la société Groupe solaire de France.

Prononcé l'annulation du contrat de crédit conclu le même jour entre M. [V] [Z] et la société Solfea aux droits de laquelle se trouve la société Paribas personal finance.

Dit que la société [H] MJ en qualité de liquidateur judiciaire de la société Groupe solaire de France devrait reprendre l'ensemble des matériels posés au domicile de M. [V] [Z] dans les deux mois suivant la signification du jugement après en avoir prévenu ce dernier quinze jours à l'avance et remettre la toiture en l'état à ses frais.

Dit que faute pour le liquidateur de ce faire, M. [V] [Z] pourrait disposer des matériels comme bon lui semblerait.

Débouté la société Paribas personal finance de sa demande en restitution du capital emprunté.

Condamné la société BNP Paribas personal finance à payer à M. [V] [Z] la somme de 9 690,72 € en deniers ou quittance au titre des échéances échues payées.

Condamné la société BNP Paribas personal finance aux dépens.

Condamné la société BNP Paribas personal finance à payer à M. [V] [Z] la somme de 1 200 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Débouté les parties de toutes autres demandes.

Suivant déclaration en date du 23 mai 2019, la société BNP Paribas personal finance a interjeté appel.

Suivant conclusions en date du 22 octobre 2019, M. [V] [Z] a interjeté appel incident.

En ses dernières conclusions en date du 21 janvier 2020, la société BNP Paribas personal finance demande à la cour de :

Dire recevable et bien fondé son appel.

Infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau,

Vu l'article L. 621-22 du code de commerce,

Dire irrecevables les demandes formulées par M. [V] [Z].

Par conséquent,

Le débouter de ses demandes.

Au fond,

Vu les articles L. 110-1 et suivants du code de commerce,

Dire que les contrats par leur objet ne sont pas soumis aux dispositions du code de la consommation.

Par conséquent,

Débouter M. [V] [Z] de ses demandes.

À tout le moins,

Dire n'y avoir lieu à prononcer l'annulation du contrat de vente.

Dire n'y avoir lieu à prononcer l'annulation du contrat de crédit.

Par conséquent,

Débouter M. [V] [Z] de ses demandes.

Subsidiairement, en cas d'annulation des contrats,

Dire que la société Solfea n'a commis aucune faute.

Dire que M. [V] [Z] ne justifie pas de l'existence d'un préjudice et d'un lien de causalité.

Par conséquent,

Condamner M. [V] [Z] à lui payer la somme de 19 900 € correspondant au montant du capital prêté outre les intérêts au taux légal à compter de la mise à disposition des fonds.

Dire qu'elle devra restituer à M. [V] [Z] les échéances versées après justification de la résiliation du contrat de revente d'énergie conclu avec EDF, de la restitution à EDF des sommes perçues au titre de la revente d'énergie et au Trésor public des éventuels crédits d'impôt perçus.

Débouter M. [V] [Z] de toute autre demande.

En tout état de cause,

Le condamner à lui payer la somme de 2 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens de première instance et d'appel.

En ses dernières conclusions en date du 21 février 2022, M. [V] [Z] demande à la cour de :

Vu les articles L. 111-1, L. 311-1, L. 311-6, L. 311-8, L. 311-13, L. 311-32, L. 311-35, L. 312-2, L. 312-7, L. 312-11, L. 312-33, L. 313-1, L. 313-3 à L. 313-5 et D. 311-4-3 du code de la consommation,

Vu les articles L. 121-21, L. 121-23 à L. 121-26, et R. 121-5 du code de la consommation dans leur rédaction applicable au cas d'espèce,

Vu les articles L. 421-1 à L. 421-5 et L. 480-4 du code de l'urbanisme,

Vu les articles L. 313-5-1, L. 519-1 et L. 546-1 du code monétaire et financier,

Vu l'article L. 512-1 du code des assurances,

Vu les articles 1109, 1116, 1710 et 1792 du code civil,

Vu les articles 11, 515 et 700 du code de procédure civile,

Rejetant l'appel de la société BNP Paribas personal finance le disant mal fondé,

Recevant son appel incident le disant bien-fondé et y faisant droit,

Débouter la société BNP Paribas personal finance de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.

Confirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il a rejeté ses demandes au titre de ses préjudices.

Prononcer l'annulation du contrat de vente le liant à la société Groupe solaire de France.

Prononcer l'annulation du contrat de crédit le liant à la société BNP Paribas personal finance.

Dire que la société Solféa aux droits de laquelle se trouve la société BNP Paribas personal finance a commis des fautes personnelles engageant sa responsabilité.

Dire que la société BNP Paribas personal finance ne peut se prévaloir des effets de l'annulation à  son égard.

Ordonner le remboursement par la société BNP Paribas personal finance de l'intégralité des sommes qui lui ont été versées outre les intérêts au taux légal.

À titre subsidiaire,

Condamner la société BNP Paribas personal finance à lui payer la somme de 14 930 € à titre de dommages et intérêts du fait de sa négligence fautive.

Réformer le jugement en ce qu'il a rejeté ses demandes au titre des préjudices subis.

Statuant à nouveau,

Condamner la société BNP Paribas personal finance à lui payer la somme de 4 554 € au titre du préjudice financier, 3 000 € au titre du préjudice économique et du trouble de jouissance et 3 000 € au titre du préjudice moral.

En tout état de cause,

Condamner la société BNP Paribas personal finance à lui payer la somme de 3 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

La condamner aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La société [H] MJ n'a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions des parties.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 mars 2022.

MOTIFS DE LA DECISION :

Pour voir déclarer irrecevables les demandes de M. [V] [Z], la société BNP Paribas personal finance fait valoir que l'annulation du contrat principal conduirait à la remise en état des parties alors qu'aucune dépense ne peut être imposée au liquidateur judiciaire. Elle fait valoir la rupture d'égalité entre les créanciers ce d'autant que M. [V] [Z] ne justifie pas avoir déclaré sa créance au passif de la liquidation.

La règle de l'interdiction des poursuites individuelles énoncée par l'article L. 622-21 du code de commerce n'interdit pas d'agir en nullité ou résolution d'un contrat pour une cause autre que le défaut de paiement d'une somme d'argent. Et celui qui agit en résolution d'un contrat pour une cause autre que le non-paiement d'une somme d'argent n'a pas à déclarer sa demande de dommages et intérêts comme une créance de somme d'argent, ce d'autant qu'aucune déclaration ne peut être faite à titre provisionnel ou pour un montant à parfaire sous réserve de la décision du juge. L'action de M. [V] [Z] est donc recevable.

Sur le fond, la société BNP Paribas personal finance fait valoir que les dispositions du code de la consommation, du moins concernant le contrat principal, n'avaient pas vocation à s'appliquer dès lors que l'installation avait pour objet la revente totale de l'électricité à EDF, que la production d'énergie est un acte de commerce et que la preuve d'une soumission volontaire aux dispositions du code de la consommation dans le contrat principal n'est pas rapportée.

M. [V] [Z], a été démarché à son domicile personnel en vue de faire réaliser une installation photovoltaïque sur la toiture de celui-ci. Il sera observé qu'il n'a pas la qualité de commerçant et que ni le bon de commande, ni l'offre de crédit affecté, ni aucun autre document contractuel ne font mention que cette installation avait une destination professionnelle. Il s'en évince que, même si l'électricité produite devait être revendue à EDF, cette circonstance n'a pas fait perdre à l'acheteur sa qualité de consommateur et qu'il devait donc bénéficier des règles protectrices du code de la consommation relatives au démarchage à domicile, règles auxquelles les parties, par une manifestation de leur volonté dépourvue d'équivoque, la remise d'un bon de commande pourvu d'un bordereau de rétractation notamment, ont entendu se soumettre volontairement.

Pour conclure à la nullité du contrat de vente, M. [V] [Z] fait valoir que le bon de commande ne respectait pas les dispositions de l'article L. 121'23 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à cause puisque la nature et les caractéristiques des marchandises ou objets offerts ou services proposés n'étaient pas indiquées de manière précise et que les conditions d'exécution du contrat ou les délais de livraison n'étaient pas précisés. Il fait valoir également la non-conformité du bordereau de rétractation voire l'absence de faculté de renonciation.

Aux termes de l'article L. 121-23 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable à la cause, les ventes et fournitures de services conclues à l'occasion d'un démarchage au domicile d'une personne physique devaient faire l'objet d'un contrat, dont un exemplaire était remis au client, comportant à peine de nullité la désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés et les conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d'exécution de la prestation de services. L'article L. 121-24 du code de la consommation précisait que le contrat devait comprendre un formulaire détachable destiné à faciliter l'exercice de la faculté de renonciation contenant les mentions décrites aux articles R. 121-3 à

R. 121-6.

S'agissant d'une installation à haut niveau de développement technologique destinée à produire de l'énergie, la marque, dont la fonction est de garantir l'origine d'un produit commercialisé, est une caractéristique essentielle pour le consommateur démarché qui doit pouvoir identifier le fabricant garant de la qualité, de la pérennité et de la sécurité de ses produits, et qui doit aussi pouvoir procéder utilement à des comparaisons de prix tenant compte de la technologie mise en 'uvre durant le délai de rétractation qui lui est ouvert par la loi. En l'espèce, la marque des panneaux photovoltaïques fait défaut.

Par ailleurs, le bon de commande ne précise pas les conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d'exécution de la prestation de services, alors que la société Groupe solaire de France s'était engagée, outre à réaliser l'installation, à accomplir certaines démarches dont le raccordement de l'onduleur au compteur de production, l'obtention du contrat de rachat de l'électricité produite et l'obtention de l'attestation de conformité. La mention d'un délai théorique d'exécution de la prestation au dos du bon de commande ne suffit pas à réparer le manquement constaté.

Enfin, le bordereau de rétractation figurant au verso du document ne peut être détaché sans amputer une partie du contrat de ses éléments essentiels dont l'identité de l'acheteur.

La société BNP Paribas personal soutient que ces irrégularités ne seraient sanctionnées que par une nullité relative que l'acheteur aurait renoncé à invoquer en revendant l'électricité produite sans jamais avoir résilié le contrat le liant à EDF, en signant la fiche de réception des travaux caractérisant sa volonté de les recevoir et en remboursant tous les mois les mensualités du crédit.

La confirmation d'une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d'un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l'obligation et l'intention de le réparer, sauf exécution volontaire après l'époque à laquelle celle-ci pouvait être valablement confirmée.

Si les dispositions de l'article L. 121-23 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la cause étaient reproduites au verso du bon de commande et qu'il était ainsi porté à la connaissance de M. [V] [Z], que le document devait comporter, à peine de nullité, la désignation précise de la nature et des caractéristiques des panneaux photovoltaïques et de la prestation accessoire d'installation du matériel commandé, de même que l'indication du délai de livraison et d'installation, les dispositions de l'article R. 121-3, exigeant que le formulaire détachable destiné à faciliter l'exercice de la faculté de rétractation fasse partie de l'exemplaire du contrat laissé au client et puisse en être aisément séparé, n'étaient pas reproduites.

Dès lors, rien ne démontre que M. [V] [Z] avait connaissance de ce vice du bon de commande lorsqu'il a laissé la société Groupe solaire de France intervenir à son domicile pour y réaliser les travaux et lorsqu'il a signé la fiche de réception des travaux en attestant que la livraison des biens commandés et la prestation de service avaient été réalisées puis régularisé un contrat de rachat de l'électricité produite. Il n'est pas établi que M. [V] [Z] a, en pleine connaissance de l'irrégularité du contrat de vente, entendu renoncer à la nullité en résultant.

Il convient donc d'écarter le moyen tiré de la confirmation du contrat irrégulier et, sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dol allégué, de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat conclu entre M. [V] [Z] et la société Groupe solaire de France.

Aux termes des dispositions de l'article L. 311-32 devenu L. 312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé. Il n'est pas contesté que le crédit consenti par la société Solfea est un crédit accessoire à une vente ou à une prestation de services. En raison de l'interdépendance des deux contrats, l'annulation du contrat principal conclu avec la société Groupe solaire de France emporte donc annulation de plein droit du contrat accessoire de crédit conclu avec la société Solfea aux droits de laquelle se trouve la société BNP Paribas personal finance. La nullité du prêt a pour conséquence de remettre les parties dans leur situation antérieure, de sorte qu'elle doit, sauf faute du prêteur, entraîner la restitution des prestations reçues de part et d'autre.

M. [V] [Z] fait valoir que la banque a commis une faute en finançant une opération nulle puisqu'elle avait l'obligation de vérifier la régularité du bon de commande. Elle ajoute qu'elle a commis une faute en libérant les fonds sans s'assurer que le vendeur avait exécuté son obligation, faute qui la prive de sa créance de restitution. Il indique qu'à la date de libération des fonds, l'installation n'était pas raccordée.

La banque soutient qu'elle n'a commis aucune faute dans le déblocage des fonds. Elle ajoute que M. [V] [Z] ne justifie d'aucun préjudice puisque les travaux ont été réalisés et que l'installation fonctionne.

Le prêteur, qui n'a pas à assister l'emprunteur lors de l'exécution du contrat principal, ni à vérifier le bon fonctionnement d'une installation exempte de vice ou la conformité du matériel livré aux stipulations contractuelles, ne commet pas de faute lorsqu'il libère les fonds au vu d'une attestation de livraison qui lui permet de s'assurer de l'exécution complète du contrat principal.

En l'occurrence, la fiche de réception des travaux signée par M. [V] [Z] le 29 septembre 2012 faisait ressortir sans ambiguïté que l'installation, livraison et pose, était terminée et conforme au devis, et demandait à la société Solfea d'adresser à l'entreprise un règlement de 19 900 € correspondant au financement de cette opération.

Il est aussi de principe que le prêteur commet une faute excluant le remboursement du capital emprunté lorsqu'il libère la totalité des fonds, alors qu'à la simple lecture du contrat de vente il aurait dû constater que sa validité était douteuse au regard des dispositions protectrices du code de la consommation relatives au démarchage à domicile.

Or, il a été précédemment relevé que le bon de commande conclu avec la société Groupe solaire de France, par l'intermédiaire de laquelle la société Solfea faisait présenter ses offres de crédit, comportait des irrégularités formelles apparentes qui auraient dû conduire le prêteur, professionnel des opérations de crédit affecté, à ne pas libérer les fonds entre les mains du vendeur avant d'avoir à tout le moins vérifié auprès de M. [V] [Z] qu'il entendait confirmer l'acte irrégulier.

Le prêteur n'avait pas à assister l'emprunteur lors de la conclusion du contrat principal, mais il lui appartenait néanmoins de relever les anomalies apparentes du bon de commande, ce dont il résulte qu'en versant les fonds entre les mains du vendeur, sans procéder à des vérifications complémentaires sur la régularité du contrat principal, la société Solfea aux droits de laquelle se trouve la société BNP Paribas personal finance, qui ne pouvait ignorer les énonciations du bon de commande au vu duquel elle a apporté son concours, a commis une faute susceptible de la priver du droit d'obtenir le remboursement du capital emprunté.

La société BNP Paribas personal finance fait valoir à juste titre que cette dispense de remboursement du capital emprunté est subordonnée à la démonstration par l'emprunteur de l'existence d'un préjudice en lien causal avec la faute du prêteur.

L'installation, réalisée le 29 septembre 2012, a été raccordée au réseau le 26 juin 2013 et produit de l'électricité rachetée par EDF en vertu d'un contrat régularisé le 7 août 2013. Si M. [V] [Z] évoque une insuffisance de rendement de l'installation, il ne fournit cependant aucun élément de nature à démontrer que le vendeur s'était engagé à un niveau de production permettant l'autofinancement.

Dès lors, rien ne démontrant que la cause de nullité non ratifiée du bon de commande affectant le bordereau de rétractation ait pu causer un préjudice à l'emprunteur qui a en définitive bénéficié d'une installation mise en service, raccordée au réseau et produisant de l'électricité revendue à EDF depuis huit ans, il n'y a pas lieu de le dispenser de rembourser le capital emprunté, ni de réparer une prétendue perte de chance de ne pas contracter.

Après infirmation partielle du jugement, il convient donc de condamner M. [V] [Z] à restituer le capital prêté sauf à déduire les sommes versées au prêteur au cours de l'exécution du contrat de prêt annulé. Cette somme produira intérêts à compter de la demande de restitution formulée devant le premier juge à l'audience du 18 décembre 2018.

Il n'y a pas lieu de subordonner le remboursement par le prêteur des échéances versées par M. [V] [Z] à la justification de la résiliation du contrat EDF et des sommes perçues au titre du contrat de revente ou du crédit d'impôt, ce remboursement étant la conséquence de l'annulation du contrat de crédit et des restitutions réciproques qui en découlent.

Les demandes de dommages et intérêts formées contre la société BNP Paribas personal finance pour préjudices moral, financier et de jouissance seront rejetées, faute de preuve de l'existence de tels préjudices et de leur lien causal avec la faute du prêteur.

De même, la demande de condamnation de la société BNP Paribas personal finance au paiement du coût de dépose de l'installation et de remise en état de la toiture sera rejetée, dès lors que, tiers au contrat principal, le prêteur ne saurait se voir imputer les conséquences dommageables de l'exécution de sa prestation par le vendeur puis de l'anéantissement du contrat principal.

Il serait enfin inéquitable de laisser à la charge de la société BNP Paribas personal finance l'intégralité des frais exposés par elle à l'occasion de l'instance d'appel et non compris dans les dépens, en sorte qu'il lui sera alloué une somme de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [V] [Z] sera condamné aux dépens de l'instance d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Infirme le jugement rendu le 5 février 2019 par le tribunal d'instance de Nantes en ce qu'il a débouté la société BNP Paribas personal finance de sa demande de restitution du capital prêté.

Statuant à nouveau,

Condamne M. [V] [Z] à payer à la société BNP Paribas personal finance la somme de 19 900 € avec intérêts au taux légal à compter du 18 décembre 2018, sauf à déduire l'ensemble des règlements effectués par l'emprunteur au prêteur au cours de la période d'exécution du contrat de prêt.

Confirme le jugement déféré en ses autres dispositions.

Y ajoutant,

Condamne M. [V] [Z] à payer à la société BNP Paribas personal finance la somme de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne M. [V] [Z] aux dépens de l'instance d'appel.

Accorde le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Rejette toute demande contraire ou plus ample.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19/03425
Date de la décision : 01/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-01;19.03425 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award