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01/07/2022 | FRANCE | N°19/02867

France | France, Cour d'appel de Rennes, 8ème ch prud'homale, 01 juillet 2022, 19/02867


8ème Ch Prud'homale





ARRÊT N°332



N° RG 19/02867 -

N° Portalis DBVL-V-B7D-PXN2













SASU KEOLIS BREST



C/



M. [X] [H]

















Infirmation partielle













Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 1er JUILLE

T 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Président de chambre,

Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller,

Madame Gaëlle DEJOIE, Conseillère,



GREFFIER :



Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé







DÉBATS :



A l'audience pub...

8ème Ch Prud'homale

ARRÊT N°332

N° RG 19/02867 -

N° Portalis DBVL-V-B7D-PXN2

SASU KEOLIS BREST

C/

M. [X] [H]

Infirmation partielle

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 1er JUILLET 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Président de chambre,

Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller,

Madame Gaëlle DEJOIE, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 07 Avril 2022

En présence de Madame [I] [N], Médiatrice judiciaire

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 1er Juillet 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

La SASU KEOLIS BREST prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :

7, rue Ferdinand de Lesseps

12920 BREST

Ayant Me Christophe LHERMITTE de la SCP GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, Avocat au Barreau de RENNES, pour postulant et représentée à l'audience par Me Pascal GEOFFRION, Avocat plaidant du Barreau de PARIS

INTIMÉ :

Monsieur [X] [H]

né le 02 Mai 1981 à NANTES (44)

demeurant 34 Rue de la Perche

44700 ORVAULT

Comparant, ayant Me Roger POTIN, Avocat au Barreau de BREST, pour postulant et représenté à l'audience par Me Anaïs MEVEL, Avocat plaidant du Barreau de BREST

M. [X] [H] a été engagé en contrat à durée indéterminée par la SASU KEOLIS BREST à compter du 8 août 2011, en qualité de Responsable Installations fixes, statut agent de maîtrise, coefficient 340, la relation de travail était régie par la convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs (IDCC 1424).

Par lettre du 4 mai 2017, la SASU KEOLIS BREST a convoqué M. [H] à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement pour faute grave fixé au 16 mai 2017.

Par lettre du 17 mai 2017, la SASU KEOLIS BREST a avisé M. [H] de sa comparution devant le conseil de discipline et lui a transmis l'ordre de convocation.

La SASU KEOLIS BREST a réuni le conseil de discipline le 7 juin 2017 avec procès-verbal de la réunion dressé le jour même.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 juin 2017, la SASU KEOLIS BREST a notifié à M. [H] son licenciement pour faute grave.

Le 27 juillet 2017, M. [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Brest pour contester son licenciement et solliciter la condamnation de la SASU KEOLIS BREST à lui payer diverses sommes.

La cour est saisie d'un appel régulièrement formé le 30 avril 2019 par la SASU KEOLIS BREST à l'encontre du jugement prononcé le 5 avril 2019 par lequel le conseil de prud'hommes de Brest a :

' Dit le licenciement de M. [H] dépourvu de cause réelle et sérieuse,

' Condamné la SASU KEOLIS BREST à payer à M. [H] les sommes suivantes avec intérêts de droit :

- 50.000 € brut à titre de dommages-intérêts,

- 11.662 € brut au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 12.745,35 € brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 1.274,53 € brut au titre des congés payés afférents,

- 2.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

' Rappelé l'exécution provisoire de droit à laquelle sera assorti le jugement,

' Condamné la SASU KEOLIS BREST à remettre à M. [H] les documents sociaux rectifiés, sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter du délai de 15 jours suivant la notification du jugement et pour une période limitée à 30 jours, le conseil s'en réservant la liquidation éventuelle,

' Ordonné le remboursement par l'employeur aux organismes sociaux de tout ou partie des indemnités chômage versées au salarié licencié du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé dans la limite de six mois d'indemnités,

' Condamné la SASU KEOLIS BREST aux dépens et y compris en cas d'exécution forcée, les éventuels honoraires et frais d'huissier.

Par ordonnance du 26 juin 2020, le conseiller de la mise en état a :

' Dit n'y avoir lieu à caducité de la déclaration d'appel,

' Débouté M. [H] de ses demandes sur incident,

' Débouté la SASU KEOLIS BREST de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' Condamné M. [H] aux dépens de l'incident,

' Renvoyé l'affaire à la mise en état.

Vu les écritures notifiées par voie électronique le 18 juillet 2019, suivant lesquelles la SASU KEOLIS BREST demande à la cour de :

' Infirmer le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

' Dire que le licenciement repose sur une faute grave,

' Débouter M. [H] de l'ensemble de ses demandes,

' Condamner M. [H] à verser à la SASU KEOLIS BREST une indemnité de 2.000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

A titre subsidiaire, sur le quantum de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' Réformer le jugement entrepris,

' Fixer le montant de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse à une somme de 30.177 € correspondant aux salaires des six derniers mois.

Vu les écritures notifiées par voie électronique le 17 octobre 2019, suivant lesquelles M. [H] demande à la cour de :

' Rejeter l'ensemble des moyens, fins et prétentions de la SASU KEOLIS BREST,

' Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

En tout état de cause,

' Condamner la SASU KEOLIS BREST à lui payer la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens d'instance et d'appel.

L'ordonnance de clôture est datée du 6 janvier 2022.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions notifiées par voie électronique.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la rupture du contrat

Pour infirmation à ce titre, la SASU KEOLIS BREST soutient le bien-fondé du licenciement pour faute grave de M. [H] en ce que l'absence de maintenance mensuelle de la Ligne Aérienne de Contact de la première ligne de tramway de l'agglomération brestoise par le salarié a mis en péril la sécurité d'exploitation ; qu'il a gravement contrevenu à ses obligations contractuelles, au règlement intérieur et aux règles de sécurité de l'exploitation et a porté atteinte à l'image de la société dont la préoccupation première est la sécurité du service rendu aux clients.

Pour confirmation, M. [H] conteste essentiellement les griefs reprochés par l'employeur dans la lettre de licenciement en ce que :

- la maintenance mensuelle de la Ligne Aérienne de Contact était effectivement réalisée plusieurs fois par mois ;

- si cette maintenance mensuelle n'apparaît pas dans le logiciel interne c'est en raison de difficultés d'utilisation de ce dernier, connues de la direction ;

- un véritable contrôle hiérarchique aurait permis de découvrir cette difficulté bien avant la restitution de l'audit du STRMTG ;

- cette maintenance mensuelle n'est pas sécuritaire de sorte qu'il n'a aucun cas mis en danger les usagers du tramway.

M. [H] ajoute qu'il n'a pas été mis à pied à titre conservatoire et le fait que la société n'ait pas jugé utile de prononcer une telle mesure de précaution est contradictoire avec la nature même des faits reprochés.

En matière de licenciement disciplinaire, si la lettre de licenciement fixe les limites du litige en ce qui concerne les griefs articulés à l'encontre du salarié et les conséquences que l'employeur entend en tirer quant aux modalités de rupture, il appartient au juge de qualifier les faits invoqués.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de l'appelant dans l'entreprise même pendant la durée du préavis.

L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

La lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, doit être suffisamment motivée et viser des faits et griefs matériellement vérifiables, sous peine de rendre le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse.

Par ailleurs, les juges qui constatent que l'employeur s'est placé sur le terrain disciplinaire, doivent examiner l'ensemble des motifs mentionnés dans la lettre de licenciement et doivent dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse s'ils retiennent qu'aucun d'entre eux ne présente de caractère fautif.

En l'espèce, les faits reprochés au salarié selon la lettre de licenciement datée du 13 juin 2017 (pièce n°7 de l'employeur) sont les suivants :

'Nous avons à déplorer de votre part des agissements constitutifs d'une faute grave, dont je vous ai fait part lors de notre entretien préalable qui s'est déroulé le mardi 16 mai 2017 en ma présence ainsi qu'en présence de M. [R] [V], Directeur Maintenance et de M. [Y] [G] qui vous assistait.

Lors de la restitution de l'audit réalisé par le STRMTG, le 30 mars 2017, il est apparu que la maintenance mensuelle de la Ligne Aérienne de Contact (LAC) n'a pas été effectuée depuis le mois de mai 2016 sans que la moindre information ait été transmise et partagée avec votre ligne managériale.

Conformément aux dispositions conventionnelles en vigueur, je vous ai convoqué devant le Conseil de Discipline qui s'est tenu le 07 juin 2017, après instruction de votre dossier le 23 mai 2017.

Nous avons bien entendu vos arguments : vous considérez que, bien que la maintenance mensuelle de la LAC ne soit pas tracée, elle est, selon vous, réalisée de façon hebdomadaire par les agents de la voie qui sont qualifiés LAC. Cette maintenance se ferait lors du nettoyage de la voie avec la balayeuse et, pour les points spécifiques sur les débranchements lors du nettoyage de la voie au Karcher des appareils de voie. Cette pratique serait en 'uvre depuis 2012 et ferait l'objet de bons de travaux correctifs.

Ce comportement est doublement inacceptable pour l'entreprise. En effet, vous n'avez pas, d'une part, respecté le schéma de maintenance de la LAC, qui est de votre ressort et dans votre périmètre de responsabilités et vous ne vous êtes pas assuré que toutes les activités déclinées dans les plans de maintenance soient planifiées et réalisées suivant les standards de qualité et en appliquant les bonnes pratiques. D'autre part, vous n'avez à aucun moment averti votre hiérarchie pour engager une dérogation et/ou une recherche d'une solution alternative.

Pour rappel, il n'est en aucun cas possible de déroger au schéma de maintenance et de substituer d'autres contrôles sans l'instruction et la validation d'un dossier auprès des organismes de l'état, en particulier du STRMTG.

Cette absence de maintenance constitue une faute contraire à la Sécurité d'Exploitation mettant la sécurité du système en défaut. En effet, ce manque de traçabilité des opérations mensuelles de maintenance ne permet d'apporter aucune preuve aux organismes et services de l'Etat. Si un grave accident devait se produire, la responsabilité de Keolis Brest serait engagée.

Par votre attitude, vous avez contrevenu à votre contrat de travail, au règlement intérieur et aux Règles de Sécurité de l'Exploitation, à l'image de notre entreprise, dont la préoccupation première est la sécurité du service rendu aux clients.

Compte tenu de la gravité de ces faits, je vous notifie par la présente votre licenciement pour faute grave. Votre licenciement prend donc effet immédiatement et votre solde de tout compte sera arrêté à la date de première présentation de cette lettre, sans indemnité de préavis'.

En l'espèce, en qualité de Responsable Installations Fixes, M. [H] avait pour principales missions :

* Concernant la politique de la maintenance :

- de décliner la politique de maintenance en assurant la mise en place et le fonctionnement des différents volets de la maintenance préventive et corrective,

* Concernant la gestion quotidienne de l'activité :

- de s'assurer de la disponibilité des installations nécessaires aux interventions de maintenance (vérification de l'état du matériel, relation avec les services achats/approvisionnement, relation avec les sous-traitants),

- d'organiser l'intervention des entreprises sous-traitantes et de veiller à ce qu'elles respectent les règles de fonctionnement de KEOLIS (notamment en termes de sécurité),

- de définir les objectifs quotidiens de chacun et de faire réaliser les opérations de maintenance sur le matériel,

- de veiller au respect des consignes et règles de fonctionnement social pour l'ensemble du personnel et en particulier celles touchant à la sécurité.

Il est reproché à M. [H] de ne pas avoir respecté le schéma de maintenance de la LAC et de ne pas en avoir averti sa hiérarchie.

Sur le contexte, la SASU KEOLIS BREST indique que c'est lors de la restitution de l'audit réalisé par le Service Technique des Remontées Mécaniques et des Transports Guidées (STRMTG) qu'elle a découvert ces faits, soit le 30 mars 2017.

En l'espèce, l'audit réalisé par le STRMTG a révélé deux points de non-conformité relativement à la maintenance de la LAC :

- 'Concernant la maintenance de la LAC, plusieurs écarts existent entre les gammes de maintenance de Keolis Brest et le plan de maintenance Colas Rail. Les différences peuvent être au niveau des modes opératoires ou au niveau des fréquences de contrôles. Une clarification des contrôles à effectuer doit être réalisée en lien avec Colas Rail, tant sur les modes opératoires que sur les fréquences' ;

- 'Les opérations de maintenance définies dans le plan de maintenance de Colas Rail doivent être réalisées dans les fréquences définies. La maintenance mensuelle de la LAC définie dans le plan de maintenance Colas Rail n'est plus effectuée depuis mai 2016".

La cour observe que ces deux points de non-conformité n'ont pas été considérés par le STRMTG comme dangereux et/ou représentant des risques pour la sécurité du réseau de tramway puisque le STRMTG a précisé que 'ces non-conformités devront être régularisées rapidement'.

Sur le grief de la maintenance de la ligne aérienne de contacts (LAC), il importe de relever qu'il faut un dispositif permanent de contrôle et d'évaluation du niveau de sécurité par inspection. Il n'est pas possible de déroger au schéma de maintenance et de substituer d'autres contrôles. Cette façon de procéder permet de vérifier visuellement l'ensemble des composants de LAC et ainsi de répondre aux exigences du constructeur. Toutefois, la réalisation de ces opérations de maintenance mensuelle aurait dû être matérialisée dans un logiciel interne. M. [H] n'a pas réalisé les maintenances en utilisant des bons de travaux en raison des difficultés d'utilisation du logiciel interne. D'ailleurs, compte-tenu des difficultés d'utilisation du logiciel interne au mois de mai 2016 Messieurs [Z], [U] et [J] avaient décidé de ne pas générer de bons de travaux préventifs mais de faire des bons de travaux correctifs qui étaient suffisants à démontrer que la maintenance mensuelle de LAC était bien réalisée. La SASU KEOLIS BREST ne peut ignorer l'existence de ces bons de travaux correctifs, M. [H] ayait réalisé la maintenance plusieurs fois par mois. L'établissement de ces bons de travaux correctifs démontre bien que les équipements de la LAC étaient effectivement contrôlés avec les moyens alloués au salarié dont il sera rappelé, nonobstant ses missions énoncées ci-dessus, qu'il n'avait qu'un statut d'agent de maîtrise peu compatible avec la responsabilité que la SASU KEOLIS BREST souhaitait lui faire supporter. Ce grief ne saurait être retenu.

Sur le défaut de contrôle hiérarchique, il ressort des pièces versées que M. [H], travaillait sous l'autorité de M. [V], Directeur maintenance. Et suivant le règlement de sécurité de l'exploitation du Tramway de Brest (pièce n°19), M. [V] devait contrôler les activités en ce qu'il précise : 'Les agents de maîtrise maintenance sont contrôlés par le Directeur maintenance. (...) 'Un deuxième niveau de contrôle est assuré par le responsable sécurité tramway'. Il appartenait à M. [V] de contrôler les actions notamment de M. [H] lequel rapporte l'avoir informé des différentes opérations de maintenance. Ce grief ne saurait non plus être retenu.

Dans le contexte rapporté, l'absence de mise à pied conservatoire de M. [H] démontre que le manquement retenu ne faisait pas obstacle à la poursuite de son contrat de travail et de fait lui ôte le caractère de gravité allégué. Le licenciement prononcé dans ces circonstances ne repose donc ni sur une faute, ni même sur une cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris sera confirmé à ce titre.

Sur les conséquences financières

Au vu des pièces produites, notamment des bulletins de paie et de l'attestation destinée à Pôle Emploi (pièce n°11 de l'employeur), M. [H] a perçu un salaire moyen de 3.631,46 € brut par mois sur les 12 derniers mois précédant son licenciement, 3.937,96 € brut sur les trois derniers mois.

Par suite de l'absence de faute grave, le salarié a droit à l'indemnité conventionnelle de licenciement, par application de l'article 6 de l'Annexe II de la Convention collective des réseaux de transports publics urbains de voyageurs, s'élevant à la somme de 11.662 € retenu par les premiers juges, non autrement discuté par l'employeur dans ses écritures.

Il a également droit à l'indemnité compensatrice de préavis correspondant à trois mois de préavis par application de la convention collective, soit 11.813,88 € brut, compte tenu d'un salaire de référence de 3.937,96 € brut par mois (la moyenne des trois derniers mois étant plus favorable que celle des douze derniers mois), outre 1.181,38 € brut au titre des congés payés afférents ; le jugement entrepris sera réformé quant à ces montants.

D'autre part, en application de l'article L.1235-3 du code du travail selon sa rédaction applicable au présent litige, si un licenciement intervient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse et qu'il n'y a pas réintégration du salarié dans l'entreprise, il est octroyé à celui-ci, à la charge de l'employeur, une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Ces dispositions sont applicables en raison de l'ancienneté de M. [H] et de l'effectif de l'employeur ayant plus de dix salariés.

Agé de 36 ans à la date de rupture du contrat de travail, M. [H] avait une ancienneté de 5 ans et 10 mois dans l'entreprise. Au cours des six derniers mois précédant son arrêt de travail, il a perçu un salaire brut cumulé de 23.362,08 € au vu de l'attestation destinée à Pôle Emploi. Il justifie de l'annulation d'un compromis de vente pour l'achat d'une maison, de la perte du mode de garde de son enfant constitué par la crèche de l'entreprise et de l'obligation de quitter Brest pour retrouver son nouveau emploi.

Compte tenu de la perte d'une ancienneté de 5 ans et 10 mois pour ce salarié âgé de 36 ans et des conséquences morales et financières de la rupture du contrat intervenue dans les circonstances rapportées, il conviendra de réformer le jugement entrepris et d'indemniser M. [H] à hauteur de 35.000 € net pour l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement.

Sur le remboursement de indemnités Pôle Emploi

En outre, par application combinée des articles L.1235-3 et L.1235-4 du code du travail, lorsque le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé. Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.

Sur ce fondement, il y a lieu de condamner la SASU KEOLIS BREST à rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage payées, le cas échéant, à M. [H] à compter du jour de la rupture du contrat de travail, dans la limite de six mois d'indemnités. Le jugement sera confirmé à ce titre.

Sur la remise des documents sociaux

La demande de remise de documents sociaux rectifiés conformes à la présente décision est fondée en son principe, sans qu'il y ait lieu à astreinte.

Sur les frais irrépétibles

Les éléments de la cause et la situation économique respective des parties justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif ; la société, qui succombe en appel, doit être déboutée de la demande formulée à ce titre et condamnée à indemniser le salarié des frais irrépétibles qu'il a pu exposer pour assurer sa défense.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,

INFIRME partiellement le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau des seuls chefs infirmés,

CONDAMNE la SASU KEOLIS BREST à payer à M. [X] [H] :

- 11.813,88 € brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 1.181,38 € brut au titre des congés payés afférents ;

- 35.000 € net à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article L.1235-3 du code du travail,

RAPPELLE que les sommes de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et que les autres sommes à caractère indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter de la décision qui les prononce ;

CONFIRME le jugement entrepris en ses autres dispositions ;

Et y ajoutant,

CONDAMNE la SASU KEOLIS BREST à verser à M. [X] [H] la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, outre la somme déjà allouée en première instance sur ce fondement ;

DÉBOUTE la SASU KEOLIS BREST de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SASU KEOLIS BREST aux dépens d'appel.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 8ème ch prud'homale
Numéro d'arrêt : 19/02867
Date de la décision : 01/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-01;19.02867 ?
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