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24/06/2022 | FRANCE | N°19/02937

France | France, Cour d'appel de Rennes, 8ème ch prud'homale, 24 juin 2022, 19/02937


8ème Ch Prud'homale





ARRÊT N°325



N° RG 19/02937 -

N° Portalis DBVL-V-B7D-PXVA













Mme [B] [N]



C/



SAS SPEF SAINT SEBASTIEN SUR LOIRE

















Infirmation partielle













Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

AR

RÊT DU 24 JUIN 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Président de chambre,

Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller,

Madame Gaëlle DEJOIE, Conseillère,



GREFFIER :



Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé







DÉBATS :



A l'audience pub...

8ème Ch Prud'homale

ARRÊT N°325

N° RG 19/02937 -

N° Portalis DBVL-V-B7D-PXVA

Mme [B] [N]

C/

SAS SPEF SAINT SEBASTIEN SUR LOIRE

Infirmation partielle

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 24 JUIN 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Président de chambre,

Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller,

Madame Gaëlle DEJOIE, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 24 Mars 2022

devant Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET et Madame Gaëlle DEJOIE, magistrats tenant l'audience en la formation rapporteur sans opposition des représentants des parties et qui ont rendu compte au délibéré collégial

En présence de Monsieur [D] [R], Médiateur judiciaire

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 24 Juin 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE et intimée à titre incident :

Madame [B] [N]

née le 17 Juillet 1983 à NANTES (44)

demeurant 35 Rue de la Mayenne

44800 SAINT HERBLAIN

Représentée par Me Anne-Laure BELLANGER, Avocat au Barreau de NANTES

INTIMÉE et appelante à titre incident :

La SAS SPEF SAINT SEBASTIEN SUR LOIRE prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :

Rue Marie Curie - Zone Commerciale Auchan

44230 SAINT SEBASTIEN SUR LOIRE

Représentée par Me Camille SUDRON substituant à l'audience Me Marie VERRANDO de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, Avocats postulants du Barreau de RENNES et par Me Servane JULLIE de la SELARL CAPSTAN OUEST, Avocat plaidant du Barreau de NANTES

Par contrat à durée indéterminée du 5 janvier 2007, Mme [B] [N] est entrée au service de la société FIRENZE qui gère une pizzeria de l'enseigne ' DEL ARTE' au centre commercial ATLANTIS à Nantes, en qualité d'employée polyvalente-hôtesse de table.

Par contrat de travail à durée indéterminée, conclu le 1er mai 2011, Mme [N] a été nommée directrice de restaurant, statut cadre, niveau V, échelon 1, suivant la classification définie par la convention collective des Hôtels, Cafés et Restaurants.

Par avenant du 20 juin 2014, le contrat de travail de Mme [N] a été transféré au sein de la SAS SPEF Saint Sébastien sur Loire au sein de laquelle elle a poursuivi ses fonctions de directrice de restaurant sous l'enseigne 'DEL ARTE'.

Le 1er mars 2017, Mme [N] s'est vue notifier un premier avertissement.

Le 6 avril 2017, Mme [N] s'est vue notifier une rétrogradation disciplinaire.

Le 22 avril 2017, Mme [N] s'est vue notifier un second avertissement.

Le 6 juin 2017, Mme [N] s'est vue notifier une mise à pied disciplinaire de trois jours ouvrés.

Mme [N] a fait l'objet de plusieurs arrêts de travail à compter du 23 juin 2017 jusqu'au 21 août 2017.

Le 21 août 2017, une visite de pré-reprise a eu lieu.

Lors de la visite de reprise du 4 septembre 2017, le médecin du travail a rendu un avis médical d'inaptitude définitive de la salariée à son poste de travail et d'impossibilité de reclassement dans un emploi au sein de l'entreprise.

Par lettre du 9 septembre 2017, Mme [N] a été convoquée à un entretien préalable fixé au 21 septembre 2017 auquel la salariée ne s'est pas présentée.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 25 septembre 2017, la SAS SPEF Saint Sébastien sur Loire a notifié à Mme [N] son licenciement motivé par son inaptitude médicale à son poste et de l'impossibilité de la reclasser.

Le 4 octobre 2017, Mme [N] a saisi le conseil de prud'hommes de Nantes aux fins de :

' Constater les faits de harcèlement moral,

' Constater le manquements grave à l'obligation de sécurité,

' Dire que le licenciement pour inaptitude en date du 25 septembre 2017 est nul, ou sans cause réelle et sérieuse à titre subsidiaire,

' Annuler les avertissements injustifiés en date des 1er mars 2017 et 22 avril 2017,

' Annuler la rétrogradation disciplinaire injustifiée en date du 6 avril 2017,

' Annuler la mise à pied disciplinaire injustifiée en date du 6 juin 2017,

' Fixer le salaire moyen mensuel de Mme [N] à la somme 3.442,81 € brut et le préciser dans la décision à intervenir,

' Condamner la SAS SPEF Saint Sébastien sur Loire à lui verser les sommes suivantes, avec intérêts au taux légal et capitalisation :

- 10.348,45 € brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 1.034,84 € brut au titre des congés payés afférents,

- 9.295,60 € net au titre de l'indemnité légale de licenciement,

- 68.856 € net à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul ou subsidiairement sans cause réelle et sérieuse,

- 3.442,81 € net à titre de dommages-intérêts en raison des irrégularités de la procédure de licenciement,

- 1.000 € net à titre de dommages-intérêts pour le premier avertissement injustifié,

- 3.442,81 € net à titre de dommages-intérêts en raison de la rétrogradation disciplinaire injustifiée,

- 1.000 € net à titre de dommages-intérêts en raison du second avertissement injustifié,

- 420,21 € brut à titre de rappel de salaire dû durant la période de mise à pied disciplinaire injustifiée,

- 42,02 € brut au titre des congés payés afférents,

- 3.442,81 € net à titre de dommages et intérêts en raison de la mise à pied disciplinaire injustifiée,

- 10.000 € net à titre de dommages-intérêts en raison de l'exécution déloyale du contrat de travail,

- 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens et tous frais d'exécution,

' Ordonner la remise des documents de fin de contrat et attestation Pôle Emploi rectifiés suivant jugement à intervenir, sous astreinte de 150 € par jour de retard,

' Exécution provisoire (article 515 du code de procédure civile).

La cour est saisie de l'appel formé le 2 mai 2019 par Mme [N] contre le jugement du 2 avril 2019, par lequel le conseil de prud'hommes de Nantes a :

' Dit ne pas constater l'existence de faits constitutifs de harcèlement moral, ni de manquement grave à l'obligation de sécurité,

' Dit que le licenciement n'est pas nul,

' Dit que la SAS SPEF Saint Sébastien sur Loire n'a pas manqué à son obligation de reclassement,

' Dit que le licenciement n'est pas sans cause réelle et sérieuse,

' Débouté Mme [N] de ses demandes de dommages-intérêts, d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents,

' Dit que Mme [N] a été remplie de ses droits concernant son indemnité légale de licenciement,

' Dit que les courriers du 6 avril et 22 avril ne sont pas des avertissements et qu'il n'y a pas eu rétrogradation disciplinaire et débouté Mme [N] de ses demandes d'annulation et de dommages-intérêts,

' Dit que la mise à pied disciplinaire de 3 jours est justifiée et l'a déboutée de sa demande d'annulation, ainsi que des demandes subséquentes de rappels de salaires, de conges payés afférents et de dommages- intérêts,

' Dit qu'il y a eu irrégularité de la procédure de licenciement et condamné la SAS SPEF Saint Sébastien sur Loire à verser à Mme [N] la somme de 3.034,92 € net à titre de dommages-intérêts,

' Dit qu'il y a eu exécution déloyale du contrat de travail et condamné la SAS SPEF Saint Sébastien sur Loire à verser à Mme [N] la somme de 10.000 € net à titre de dommages-intérêts,

' Dit que la moyenne mensuelle des salaires de Mme [N] est de 3.034,92 €,

' Accordé les intérêts au taux légal à compter de la notification de la présente décision,

' Accordé la capitalisation des intérêts (article 1343-2 du code civil),

' Condamné la SAS SPEF Saint Sébastien sur Loire à verser à Mme [N] la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et débouté la SAS SPEF Saint Sébastien sur Loire de sa demande formée au même titre,

' Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

' Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

' Condamner la partie défenderesse aux entiers dépens.

Vu les écritures notifiées par voie électronique le 1er août 2019, suivant lesquelles Mme [N] demande à la cour de :

' Infirmer partiellement le jugement entrepris,

Statuant à nouveau :

' Constater les faits de harcèlement moral,

' Constater le manquements grave à l'obligation de sécurité,

' Dire que le licenciement pour inaptitude en date du 25 septembre 2017 est nul, ou sans cause réelle et sérieuse à titre subsidiaire,

' Annuler les avertissements injustifiés en date des 1er mars 2017 et 22 avril 2017,

' Annuler la rétrogradation disciplinaire injustifiée en date du 6 avril 2017,

' Annuler la mise à pied disciplinaire injustifiée en date du 6 juin 2017,

' Fixer le salaire moyen mensuel de Mme [N] à la somme 3.442,81 € brut et le préciser dans la décision à intervenir,

' Condamner la SAS SPEF Saint Sébastien sur Loire à lui verser les sommes suivantes :

- 10.348,45 € brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 1.034,84 € brut au titre des congés payés afférents,

- 9.295,60 € net au titre de l'indemnité légale de licenciement,

- 68.856 € net à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul ou subsidiairement sans cause réelle et sérieuse,

- 1.000 € net à titre de dommages-intérêts pour le premier avertissement injustifié,

- 3.442,81 € net à titre de dommages-intérêts en raison de la rétrogradation disciplinaire injustifiée,

- 1.000 € net à titre de dommages-intérêts en raison du second avertissement injustifié,

- 420,21 € brut à titre de rappel de salaire dû durant la période de mise à pied disciplinaire injustifiée,

- 42,02 € brut au titre des congés payés afférents,

- 3.442,81 € net à titre de dommages et intérêts en raison de la mise à pied disciplinaire injustifiée,

' Confirmer le jugement entrepris pour le surplus et condamner la SAS SPEF Saint Sébastien sur Loire à lui verser les sommes suivantes :

- 3.442,81 € net à titre de dommages-intérêts en raison des irrégularités de la procédure de licenciement,

- 10.000 € net à titre de dommages-intérêts en raison de l'exécution déloyale du contrat de travail,

' Condamner la SAS SPEF Saint Sébastien sur Loire à verser à Mme [N] la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' Intérêts de droit pour les condamnations à caractère salarial à compter de la saisine du conseil et pour les condamnations à caractère indemnitaire, à compter du jugement, avec application de l'article 1154 du code civil,

' Ordonner la remise des documents de fin de contrat et attestation Pôle Emploi rectifiés suivant arrêt à intervenir, sous astreinte à hauteur de 150 € par jour de retard,

' Fixer les dépens éventuels à la charge la SAS SPEF Saint Sébastien sur Loire en cas d'exécution forcée.

Vu les écritures notifiées par voie électronique le 30 octobre 2019, suivant lesquelles la SAS SPEF Saint Sébastien sur Loire demande à la cour de :

' Déclarer Mme [N] non fondée en son appel, l'en débouter,

' Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- dit ne pas constater l'existence de faits constitutifs de harcèlement moral, ni de manquement grave à l'obligation de sécurité,

- dit que le licenciement n'est pas nul,

- dit que l'employeur n'a pas manqué à son obligation de reclassement,

- dit que le licenciement n'est pas sans cause réelle et sérieuse et débouté Mme [N] de sa demande de dommages-intérêts,

- débouté Mme [N] de ses demandes d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents,

- dit que Mme [N] a été remplie de ses droits concernant son indemnité légale de licenciement,

- dit que les courriers du 6 avril et 22 avril ne sont pas des avertissements et qu'il n'y a pas eu rétrogradation disciplinaire et débouté Mme [N] de ses demandes d'annulation et de dommages-intérêts,

- dit que la mise à pied disciplinaire de 3 jours est justifiée et l'a déboutée de sa demande d'annulation, ainsi que des demandes subséquentes de rappels de salaires, de congés payés afférents et de dommages- intérêts,

' Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- Dit qu'il y a eu irrégularité de la procédure de licenciement,

- Dit qu'il y a eu exécution déloyale du contrat de travail,

- Condamné la SAS SPEF Saint Sébastien sur Loire au paiement de deux sommes à titre de dommages-intérêts et d'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ' Dire que Mme [N] ne démontre pas le préjudice qu'elle aurait subi du fait de l'irrégularité de la procédure de licenciement,

' Dire que la SAS SPEF Saint Sébastien sur Loire n'a pas manqué à son obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail,

' Débouter Mme [N] de sa demande de dommages-intérêts pour irrégularité de procédure et de dommages-intérêts pour exécution déloyale,

' Débouter Mme [N] du surplus de ses demandes et de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires aux présentes,

' Condamner Mme [N] au versement à la SAS SPEF Saint Sébastien sur Loire de la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 10 mars 2022.

Par application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties à leurs dernières conclusions sus-visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'annulation des sanctions disciplinaires

Sur l'avertissement du 1er mars 2017

Pour infirmation à ce titre, Mme [N] soutient qu'aucune pièce n'a été apportée par la SAS SPEF pour justifier cette sanction ; que la charge de la preuve incombe à l'employeur et que le doute profite au salarié.

Pour confirmation, la SAS SPEF rétorque que cette sanction était justifiée au regard de l'étendue des responsabilités confiées à Mme [N] et des attentes légitimes de l'employeur à ce titre ; de l'attentisme dont a fait preuve Mme [N] face à l'état financier des comptes et du préjudice financier qui en a découlé pour la société. L'employeur ajoute que Mme [N] ne produit aucune pièce justifiant le préjudice qu'elle indique avoir subi du fait de cette sanction.

Aux termes de l'article L. 1331-1 du code du travail, constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par lui comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération.

En l'espèce, le courrier du 1er mars 2017 que la SAS SPEF adressé à Mme [N] était rédigé dans les termes suivants :

'Dans le cadre des responsabilités qui sont les vôtres au sein du Restaurant DEL ARTE de SAINT SEBASTIEN nous avons constaté que vous avez laissé, sans nous le signaler, le compte en banque CAISSE D'EPARGNE en fort découvert, alors même que, parallèlement le compte CREDIT MUTUEL était largement approvisionné.

Alors que vous réceptionnez l'intégralité du courrier du restaurant, vous n'avez même pas jugé utile de nous prévenir alors que globalement, nous étions en excédent de trésorerie.

De tels éléments relèvent de votre mission et nous sommes donc au regret de vous adresser le présent avertissement.

En espérant que de tels manquements ne se reproduisent pas, nous vous prions d'agréer, Madame, nos salutations.'

Il convient de relever qu'il résulte des pièces produites que s'agissant de ce découvert de plus de 150.000 € non signalé, Mme [N] ne le conteste pas formellement, se bornant à expliquer qu'elle en prenait acte, que le découvert avait commencé depuis septembre 2016 et qu'elle n'avait reçu aucun reproche.

Il y a donc lieu de considérer cet avertissement comme bien fondé et de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande d'annulation de la sanction du 1er mars 2017.

Sur la rétrogradation du 6 avril 2017

Pour infirmation à ce titre, Mme [N] fait valoir que la SAS SPEF a nommé M. [S], qui était son adjoint, comme coordinateur du restaurant et qu'il l'aurait remplacée dans les faits.

Pour confirmation sur ce point, la SAS SPEF réplique qu'il appartient à Mme [N] de démontrer qu'elle aurait, dans les faits, été victime d'une rétrogradation ; qu'il est est constant que la création d'un niveau hiérarchique intermédiaire ne constitue pas une rétrogradation disciplinaire ; que Mme [N] n'a subi aucune déclassification, ni diminution de sa rémunération et qu'elle ne produit aux débats aucune pièce justifiant le préjudice qu'elle prétend avoir subi.

En l'espèce, le courrier du 6 avril 2017 remis en main propre à Mme [N] est rédigé dans les termes suivants (pièce n°18 de la salariée) :

'Nouvelles fiches de fonction

Vous êtes chargée de l'hygiène et du respect des normes HACCP : vous êtes le principal interlocuteur auprès des autorités compétentes en la matière.

Vous êtes en charge de faire respecter et de tout mettre en oeuvre afin de respecter les fiches techniques fournies par le groupe en terme de présentation des plats, du coût matière et de la qualité des produits.

Dorénavant vous êtes responsable de la propreté du restaurant et des abords de ce dernier.

Vous êtes en charge de la formation du personnel de salle dans le respect des protocoles de service du groupe.

Responsable du suivi des cartes de fidélité et d'en maintenir une croissance évolutive ainsi que du suivi des activités commerciales proposées par le groupe (club spaghetto, et les différentes animations).

Au niveau des caisses nous vous demandons maintenant de vérifier la caisse journalière si vous êtes de fermeture de services le midi ou le soir.

Cette fiche de fonction annule et remplace la fiche de fonction que vous aviez jusqu'à présent annexée à votre contrat.'

Le 12 avril 2017, Mme [N] a répondu à ce courrier en indiquant qu'elle prenait 'acte de la proposition de modification' de son contrat de travail.

En réplique le 18 avril 2017, l'employeur a écrit à Mme [N] que le courrier du 6 avril 'constituait un simple rappel et des précisions sur des missions qui sont les vôtres et que vous devez mener à bien, sans autre changement de celles relevant de votre contrat de travail'.

La rétrogradation implique un changement unilatéral d'un élément essentiel du contrat de travail décidé à titre disciplinaire. Or, le courrier du 18 avril 2017 de l'employeur est rédigé dans des termes dépourvus d'ambiguïté en ce qu'il indique expressément à Mme [N] que ces missions initiales restent inchangées.

Il y a donc lieu de considérer que le courrier du 6 avril 2017 ne constitue pas une rétrogradation disciplinaire et de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande d'annulation de la salariée.

Sur l'avertissement du 22 avril 2017

Pour infirmation à ce titre, Mme [N] fait valoir en page 15 de ses conclusions que l'employeur n'a pas répondu à sa lettre en date du 28 avril 2017 suite au courrier reçu le 22 avril 2017. Elle précise que l'employeur n'apporte aucun élément.

Pour confirmation sur ce point, la SAS SPEF expose que le courrier du 22 avril 2017 ne constitue pas un avertissement ; que sa demande d'annulation est sans objet.

En l'espèce, le courrier du 22 avril 2017 adressé à Mme [N] était rédigé dans les termes suivants (pièce n°23 de la salariée) :

« Nous tenons à vous rappeler que les missions d'approvisionnement et de gestion du personnel relèvent de votre mission, comme vous avez d'ailleurs su nous le signaler récemment.

Nous avons néanmoins constaté des défauts d'approvisionnement sur les achats du frais la semaine dernière (exemple : salade, tomate).

(')

Vous voudrez bien tenir compte de ces remarques et assurer votre gestion avec davantage de rigueur à l'avenir».

La cour relève à la lecture de ce courrier établi par l'employeur que la SAS SPEF a demandé à Mme [N] de veiller, en qualité de Directrice de restaurant, au suivi de l'approvisionnement.

A aucun moment, l'employeur n'évoque la notification d'un avertissement.

Aucun autre élément ne permet d'ailleurs de dire que la SAS SPEF a notifié à Mme [N] un avertissement à cette date.

Ce courrier fait état d'une remarque professionnelle sur l'activité et il entre dans le cadre des prérogatives et du pouvoir de direction de l'employeur.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la mise à pied disciplinaire du 6 juin 2017

Pour infirmation à ce titre, Mme [N] soutient qu'elle rentrait juste de congés le 15 mai 2017 et que le protocole de contrôle des dates limites de consommation était défaillant. Elle ajoute que l'employeur ne communique aucune pièce prouvant l'imputabilité des faits et qu'il échoue donc à établir la preuve d'un fait fautif qui lui serait imputable.

Pour confirmation, la SAS SPEF fait valoir que les griefs justifiant cette sanction sont établis notamment par l'audit de contrôle établi par la société MERIEUX ; que la gravité de ses manquements n'est pas non plus contestable ; que la présence de denrées périmées dans les chambres froides ne peut que lui être imputée et qu'enfin elle ne justifie pas du préjudice allégué du fait de cette mise à pied à titre disciplinaire.

Aux termes de l'article L.1331-1 du code du travail, constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par l'employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération.

Il résulte des dispositions de l'article L. 1333-1 du code du travail, qu'en cas de litige portant sur une sanction disciplinaire, le juge apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction, et forme sa conviction au vu des éléments retenus par l'employeur pour prononcer la sanction et de ceux fournis par le salarié à l'appui de ses allégations. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Il résulte de l'article L. 1333-2 du code du travail que le juge peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.

La lettre de notification de mise à pied disciplinaire du 6 juin 2017 est ainsi motivée :

' (...) en date du 03 juin, nous vous avons reçue à un entretien préalable à une mesure éventuelle de sanction, au cours de cet entretien, nous vous avons indiqué les faits reprochés et écouté vos explications.

Lors d'un contrôle de la Société MERIEUX du 18 mai 2017, deux graves anomalies liées aux dates limites de consommation des produits ont été constatées, alors que vous étiez en charge de la gestion des procédures ce jour-là.

Pour mémoire, des poches de veau périmées ont été retrouvées dans les chambres froides, l'une en date du 8 mai et l'autre du 15 mai. Ces anomalies se retrouvent dans les étiquettes de traçabilité remplies par vous, étiquettes en date du 15 mai alors que la constatation des faits a été opérée le 17 mai. Vous ne pouviez donc ignorer l'existence de ces périmés.

Une telle situation, outre le risque potentiellement subi par des consommateurs, nous amène à une dégradation de notre notation, ce qui est évidemment très préjudiciable.

Compte tenu de la gravité des faits, nous vous sanctionnons d'une mise à pied de trois jours non rémunérés fixés aux 20/21/22 juin 2017'.

Si Mme [N], qui ne conteste pas le constat effectué par la société MERIEUX, soutient qu'elle rentrait de congés aux dates de l'audit, force est de constater que la salariée a été recrutée en qualité de directrice de restaurant et qu'il lui appartenait de veiller au strict respect, par ses équipes, des règles d'hygiène et de sécurité et notamment du protocole lié au contrôle des dates limites de consommation.

La cour relève que cette obligation est rappelée dans la fiche de fonctions, signée par Mme [N].

En outre, Mme [N] est titulaire d'une délégation de pouvoirs en exécution de laquelle, sur le plan de l'hygiène, elle doit veiller à l'application de la législation en vigueur puisque cette délégation de pouvoirs souligne que :

'Dans les domaines de la sécurité alimentaire et du respect des normes d'hygiène en restauration :

- être extrêmement vigilante quant à la qualité des matières premières utilisées pour la fabrication des produits offerts à la vente ainsi que leur bonne conservation, notamment observer strictement les dates limites de consommation tant au niveau des matières premières que des produits finis '.

L'employeur justifie ainsi du bien-fondé de la sanction disciplinaire notifiée à Mme [N].

La demande d'annulation de la mise à pied disciplinaire doit être rejetée et le jugement confirmé sur ce point.

Sur l'exécution déloyale du contrat

Pour infirmation à ce titre, la SAS SPEF soutient que Mme [N] ne développe aucunement dans ses écritures le manquement à son obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail.

L'employeur ajoute que la salariée ne démontre pas le préjudice qu'elle estime avoir subi.

En l'absence de préjudice justifié, il convient de débouter Mme [N] de sa demande de dommages et intérêts. Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

Sur la nullité du licenciement

Pour infirmation de la nullité du licenciement, Mme [N] soutient essentiellement qu'elle a subi des faits de harcèlement moral en ayant fait l'objet de sanctions disciplinaires injustifiées, d'une modification des conditions d'exécution de son contrat de travail et d'un manquement à l'obligation de sécurité de la part de l'employeur à plusieurs titres. Elle soutient que son état de santé s'est dégradé, en lien avec ce contexte professionnel.

Pour confirmation à ce titre, la SAS SPEF soutient essentiellement que les éléments constitutifs du harcèlement moral visé par Mme [N] ne sont pas réunis ; que le seul avertissement notifié le 1er mars 2007 était justifié ; que la mise à pied à titre disciplinaire de 3 jours ouvrés qui lui a été signifiée le 6 juin 2017 était proportionnée aux manquements commis par Mme [N] et totalement justifiée au regard des responsabilités de directrice qui lui étaient confiées ; que le courrier qui lui a été adressé le 6 avril 2017 ne constituait pas une rétrogradation mais n'avait que pour objet de lui préciser les attributions complémentaires qui lui étaient confiées, inhérentes à ses responsabilités de directrice de restaurant ; que l'employeur n'a fait qu'user de son pouvoir de direction en modifiant les plannings de travail et pour la prise des congés payés ; qu'elle accuse l'employeur d'insulte par la production de deux attestations qui sont démentis par d'autres attestations de salariés ; enfin, qu'elle ne démontre pas un lien entre les prétendus faits de harcèlement et son état de santé ; qu'à aucun moment le médecin du travail n'avait alerté l'employeur sur la situation particulière de Mme [N].

Selon les termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Dès lors que sont caractérisés ces agissements répétés, même sur une brève période, le harcèlement moral est constitué indépendamment de l'intention de son auteur.

Peuvent caractériser un harcèlement moral les méthodes de gestion mises en 'uvre par un supérieur hiérarchique dès lors qu'elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Il résulte de ces dispositions et de l'article L.1154-1 du même code en sa rédaction issue de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016 qu'il appartient au juge d'apprécier si les éléments de fait présentés par le salarié, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; dans l'affirmative, il appartient à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l'espèce, Mme [N] invoque des faits de harcèlement moral à l'origine d'une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité et d'altérer sa santé, constitués notamment par :

- la modification de ses plannings de travail à compter du 27 février 2017,

- le refus des dates de congés payés qu'elle désirait,

- deux avertissements ainsi qu'une mise à pied disciplinaire prétendument injustifiées,

- une rétrogradation dont elle aurait selon elle, fait l'objet,

- le retrait de ses missions de Directrice.

A l'appui de son argumentation, elle verse aux débats :

- ses plannings du 1er janvier 2017 au 19 mars 2017 (pièce n°11) ;

- un échange de mail du 4 avril 2017 entre M. [S], coordonnateur des restaurants et Mme [J] d'un cabinet RH ; un courrier du 6 avril 2017 adressée à la salariée par la société sur ses congés du mois de mai 2017 ; deux demandes de congés acceptés du mois d'avril et mai 2017 et un courrier de refus de congés du 14 au 27 août 2017 (pièces n°14 à 17 et 25) ;

- le courrier du 6 avril 2017 qu'elle analyse comme une rétrogradation (pièce n°18) ;

- l'attestation de M. [V], cuisinier de la SAS SPEF, qui indique 'un jour tout a changé (...) Je sentais ma directrice stressée à cause des reproches' puis ajoute 'vers le mois de mars 2017, lors d'une réunion d'équipe, Monsieur [S] nous a annoncé qu'il était promu au poste de Directeur, à notre plus grande stupéfaction' (pièce n°47) ;

- l'attestation de M. [Y], serveur de la SAS SPEF, qui relate : 'j'entendais Monsieur [A] [S] et Monsieur [H] [I] dire des insultes contre Madame [N] car tous les deux ne voulaient plus travailler avec [B] suite aux divers entretiens qu'il y a eu entre Madame [N] et les patrons du restaurant. Les insultes dîtes contre Madame [N] étaient « [B] est une fainéante, elle ne sert à rien comme Directrice' (Pièce n°45) ;

- l'avenant du contrat de travail de M. [S] en date du 1er mars 2017 stipulant qu'il exercera la fonction de Coordinateur des restaurants 'DEL ARTE' de Nantes et de Saint Sébastien sur Loire (pièce n°9) ;

- une photocopie d'un extrait de compte Facebook de M. [S], imprimée le 13 juillet 2017, sur laquelle il est mentionné 'Directeurs, à Del Arte' (pièce n°10) ;

- les courriers de contestations de ses sanctions disciplinaires (pièces n°13, 19, 24, 29) ;

- un courrier du docteur [O], médecin du travail, datée du 11 juillet 2017, adressant Mme [N] à un psychiatre le docteur [C] (pièce n°55) ;

- l'attestation du docteur [C] du 13 juillet 2017 faisant état d'un épisode anxiodépressif et d'un risque de décompensation dépressive majeure en cas de reprise du travail (pièce n° 56) ;

En l'espèce, les éléments produits par Mme [N], en particulier les deux attestations ne se rapportent pour aucune d'entre elles à des faits précisément identifiés dans le temps. Par ailleurs, il résulte des développements précédents, à l'exception de la mise à pied justifiée, que l'employeur n'a infligé aucune sanction disciplinaire à Mme [N]. Enfin, les pièces relatives aux modifications de plannings et aux dates de congés documentent seulement le pouvoir de direction de l'employeur sans modification des conditions de travail de la salariée.

Enfin, s'il est indéniable que Mme [N] a présenté à compter du mois de mars 2017 un état anxio dépressif, les pièces médicales qu'elle verse aux débats, qui ne font que relater ses propres dires sans que les personnes qui attestent aient été personnellement témoins d'un quelconque incident, ne permettent pas de faire un lien entre ses conditions de travail et son état de santé.

Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les éléments de fait pris dans leur ensemble, ne permettent pas de présumer l'existence d'un harcèlement moral par la SAS SPEF à l'encontre de Mme [N], de sorte que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande de nullité du licenciement.

S'agissant du manquement à l'obligation de sécurité

Pour infirmation à ce titre, Mme [N] soutient que la SAS SPEF a gravement manqué à son obligation de sécurité en lui imposant une multitude d'actes déstabilisant et vexatoires. Elle ajoute qu'elle a attiré à plusieurs reprises l'attention de son employeur, sur cette dégradation, lui demandant de mettre en place des actions d'évaluation et de correction pour mettre fin à la dégradation de son état de santé, en lien avec les difficultés rencontrées sur son lieu de travail.

Pour confirmation, la SAS SPEF réplique essentiellement que la salariée n'a jamais attiré à plusieurs reprises l'attention de la Direction quant à la dégradation de son état de santé.

En application de l'article L.4121-1 du code du travail, l'employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels ;

2° Des actions d'information et de formation ;

3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.

Si la charge de la preuve incombe à l'employeur en ce qui concerne l'obligation de sécurité, il doit au préalable être rapporté la preuve d'un élément permettant d'établir un fait susceptible de caractériser le manquement qui lui est imputé.

Mme [N] ne justifie par aucun autre argument que celui découlant de l'existence d'un harcèlement moral, non retenu, le manquement prétendu de son employeur à son obligation de sécurité et n'établit en l'espèce l'existence d'aucun fait imputable à l'employeur à l'origine de la dégradation de son état de santé. En outre, il est relevé que c'est seulement par courrier du 27 juin 2017que Mme [N], qui était déjà en arrêt de travail, a avisé pour la première fois, sa direction que son arrêt de travail, débuté le 23 juin 2017, était consécutif à une détérioration de son état de santé.

Il résulte des développements qui précèdent qu'il n'est pas établi par Mme [N] de faits susceptibles de caractériser l'existence de manquements de l'employeur à son obligation de sécurité. Il y a lieu par conséquent de la débouter de la demande formulée à ce titre et de confirmer le jugement de ce chef.

Sur l'obligation de reclassement

L'article L.1226-2 du code du travail dans sa version applicable au présent litige dispose que lorsque le salarié victime d'une maladie ou d'un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

L'article L.1226-2-1 du même code précise que lorsqu'il est impossible à l'employeur de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent à son reclassement.

L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-2, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

L'obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l'employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l'article L. 1226-2, en prenant en compte l'avis et les indications du médecin du travail.

L'article R. 4624-42 du code du travail prévoit que le médecin du travail peut mentionner dans l'avis d'inaptitude que 'tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi'.'

En l'espèce, l'avis d'inaptitude d'origine non professionnelle du 4 septembre 2017 du docteur [O] est libellé comme suit : 'Inapte à son poste de travail. L'état de santé de Madame [N] fait obstacle à tout reclassement dans un emploi dans l'entreprise'.

Le 5 septembre 2017, le docteur [O] a précisé dans un courrier adressé à l'employeur: 'l'état de santé de Madame [B] [N] fait obstacle à tout reclassement dans un emploi dans l 'entreprise. Cette mention ne dispense pas de procéder à une recherche de reclassement en dehors de l'entreprise'.

Il ressort de cet avis médical du 4 septembre 2017, dont la formulation est totalement dépourvue d'ambiguïté, que le médecin du travail a expressément dispensé la SAS SPEF de l'obligation de rechercher un reclassement en son sein.

Il s'ensuit que la SAS SPEF était dès lors fondée à engager la procédure de rupture du contrat de travail dès la constatation de l'inaptitude, sans obligation de rechercher un reclassement.

Au surplus, il sera relevé que par son courrier du 5 septembre 2017 le médecin du travail est sorti de ses prérogatives en demandant à l'entreprise de proposer un reclassement en dehors de l'entreprise, d'autant plus qu'il ressort des pièces produites, l'impossibilité de proposer un poste de reclassement à Mme [N], aucun poste disponible compatible avec son état de santé n'existant dans cette entreprise et dont l'appartenance à un groupe n'est pas démontrée ni même alléguée.

L'employeur a satisfait à son obligation de reclassement.

Mme [N] sera en conséquence déboutée de sa demande tendant à ce que son licenciement soit déclaré sans cause réelle et sérieuse et de sa demande indemnitaire subséquente.

Le jugement sera confirmé de ces chefs.

Sur la demande de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement

Pour infirmation à ce titre, la SAS SEPF fait valoir que Mme [N] ne peut solliciter à la fois des dommages et intérêts pour licenciement entachée d'une irrégularité de fond et des dommages et intérêts pour irrégularité de procédure. En outre, elle précise que la salariée n'allègue aucun préjudice et qu'elle ne s'est pas présentée à l'entretien préalable.

Pour confirmation, Mme [N] soutient qu'elle a reçu sa convocation à l'entretien préalable après son licenciement et qu'elle n'a pas pu exercer ses droits. Elle ajoute que la mention de la lettre de convocation à entretien préalable concernant l'assistance du salarié apparaît erronée en l'absence de représentant du personnel dans l'entreprise, l'employeur était tenu d'informer la salariée de la possibilité de se faire assister d'un conseiller extérieur à l'entreprise et de préciser l'adresse où elle pouvait se procurer cette liste.

Il sera rappelé que l'indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement se cumule avec l'indemnité accordée au titre de la nullité du licenciement.

En l'espèce, en privant Mme [N] de la possibilité de se faire assister par un conseiller extérieur à l'entreprise, force est de constater,que la procédure n'a pas été réalisée de manière régulière et ce nonobstant l'absence de la salariée à son entretien préalable de licenciement.

En conséquence, le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens

Les éléments de la cause et la situation économique respective des parties justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif ; la société intimée, qui succombe partiellement en appel, doit être déboutée de la demande formulée à ce titre et condamnée à indemniser l'appelante des frais irrépétibles qu'elle a pu exposer pour assurer sa défense.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,

INFIRME partiellement le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant ,

DÉBOUTE Mme [B] [N] de sa demande de dommages-intérêts en raison de l'exécution déloyale du contrat de travail ;

CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus ;

CONDAMNE la SAS SEPF SAINT SEBASTIEN SUR LOIRE à verser à Mme [B] [N] la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile de première instance et d'appel, outre la somme déjà allouée en première instance sur ce fondement ;

DÉBOUTE la SAS SEPF SAINT SEBASTIEN SUR LOIRE de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SAS SEPF SAINT SEBASTIEN SUR LOIRE aux entiers dépens.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 8ème ch prud'homale
Numéro d'arrêt : 19/02937
Date de la décision : 24/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-24;19.02937 ?
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