3ème Chambre Commerciale
ARRÊT N°353
N° RG 20/00024 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QLXN
Jonction avec le RG
N° 20-627 le 23-07-2020
SA ÉLECTRICITÉ DE FRANCE
Société ENEDIS VENANT AUX DROITS DE ÉLECTRICITÉ RÉSEAU DIS TRIBUTION ERDF
C/
SAS ENTREPRISE HERVÉ & CIE
Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me BOMMELAER
Me CHAUDET
Me SIROT
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 21 JUIN 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre, rapporteur
Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,
Assesseur : Monsieur Dominique GARET, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Frédérique HABARE, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 10 Mai 2022
ARRÊT :
Contradictoire , prononcé publiquement le 21 Juin 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
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APPELANTE ET INTIMÉE :
SA ÉLECTRICITÉ DE FRANCE, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de PARIS sous le numéro 552 081 317, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège,
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Nicolas DE LA TASTE de la SELARL CVS, Plaidant, avocat au barreau de NANTES
Représentée par Me Benoît BOMMELAER de la SELARL CVS, Postulant, avocat au barreau de RENNES
APPELANTE ET PARTIE ASSIGNÉE EN APPEL PROVOQUÉ
Société ENEDIS venant aux droits de ÉLECTRICITÉ RÉSEAU DISTRIBUTION ERDF Société Anonyme, immatriculée au RCS de NANTERRE sous le n° 444 608 442 agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège,
[Adresse 2]
[Localité 5]
Appelante dans le RG 20-627 et assignée en appel provoqué par la SAS Entreprise Hervé & Cie par acte d'huissier en date du 26 juin 2020 à la requête de la Société ENTREPRISE HERVÉ & Cie
Représentée par Me Christian NAUX de la SELARL CVS, Plaidant, avocat au barreau de NANTES
Représentée par Me Sandrine VIVIER substituant Me Jean-David CHAUDET de la SCP JEAN-DAVID CHAUDET, Postulant, avocat au barreau de RENNES
INTIMÉE :
Société ENTREPRISE HERVÉ & CIE, immatriculée au RCS de NANTES sous le n° 863 800 736, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 7]
[Localité 3]
Représentée par Me Pierre SIROT de la SELARL RACINE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES
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FAITS ET PROCÉDURE :
La société Bordier Brillet exploitait une carrière sise au [Localité 6] sur la commune de [Localité 8]. Elle avait souscrit un contrat de fourniture d'électricité auprès de la société Electricité de France (la société EDF).
Un nouveau compteur a été posé dans l'entreprise par la société EDF et mis en service le 26 novembre 2001.
Dans ce cadre, un contrat Emeraude a été mis en place pour la fourniture d'énergie sur le site du [Localité 6] prévoyant que l'entretien, le contrôle et la relève du dispositif de comptage seraient effectués par la société EDF, en contrepartie du paiement d'une redevance, étant précisé que lesdits dispositifs demeuraient la propriété d'EDF. La société EDF a informé la société Bordier Brillet des modifications de comptage électrique par la pose d'un compteur électronique de télérelevé. Ce contrat a fait l'objet d'un renouvellement le 14 octobre 2008.
En 2012, la société Bordier Brillet a été absorbée par la société Entreprise Hervé & Cie (la société Hervé).
En 2015, à la suite d'une intervention liée à une modification des installations techniques sur le transformateur, la société ERDF, devenue société ENEDIS, a constaté une anomalie au niveau des consommations. La société ERDF en a fait part à la société Hervé par lettre du 19 février 2015, en précisant qu'elle en informait la société EDF afin qu'elle émette une facture de régularisation pour la période allant du 16 février 2010 au 16 février 2015, en raison de la prescription quinquennale.
La société ERDF a par ailleurs précisé que « ce dysfonctionnement avait eu pour conséquence de minorer de moitié le volume des consommations enregistrées et ce depuis 2001, et que la consommation d'électricité à rectifier s'élevait à 1.554.933 kWh. Selon elle, les paramètres du compteur n'avaient pas pris en compte le type de transformateur associé et il en serait résulté un calcul des consommations réduit de moitié.
La société EDF a imputé la responsabilité du dysfonctionnement à la société Hervé qui aurait procédé à une modification du type de transformateur utilisé sans l'en avoir informée. Elle a proposé à la société Hervé de prendre en charge une partie du redressement, soit 50% du volume calculé sur les 5 dernières années.
La société EDF a adressé une facture d'un montant de 141 867,19 euros TTC, correspondant aux 1.554.933 kWh non facturés.
La société Hervé ayant refusé de payer cette somme, la société EDF l'a assignée en paiement. Estimant que les erreurs de comptage relevaient notamment de la responsabilité de la société ENEDIS, la société Hervé l'a assignée en intervention et a demandé la condamnation des sociétés ENEDIS et EDF à lui payer des dommages-intérêts au titre de ses pertes de chance de réduire sa consommation d'électricité ou de répercuter son coût sur ses tarifs.
Par jugement en date du 9 décembre 2019, le tribunal de commerce de Nantes a :
- Dit que les demandes de règlement de la société EDF antérieures au 14 avril 2011 sont prescrites,
- Dit que la société EDF ne produit pas une créance certaine à l'encontre de la société Hervé pour la période postérieure au 14 avril 2011 au 16 février 2015,
- Dit la société EDF mal fondée en ses demandes, fins et conclusions,
- Débouté la société EDF de l'ensemble de ses demandes,
- Débouté la société ENEDIS (anciennement ERDF) de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- Débouté la société Hervé de sa demande de dommages et intérêts,
- Condamné solidairement la société EDF et la société ENEDIS à payer à la société Hervé la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Dit qu'il n'y a pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire du jugement,
- Condamné solidairement la société EDF et la société ENEDIS en tous les dépens.
La société EDF a interjeté appel le 2 janvier 2020 (dossier 2000024). La société ENEDIS a interjeté appel le 23 janvier 2021 (dossier n°2000627).
Le dossier n°2000627 a été joint au dossier n°2000024 par ordonnance du conseiller de la mise en état du 23 juillet 2020.
Les dernières conclusions de la société EDF sont en date du 17 mars 2022. Les dernières conclusions de la société ENEDIS sont en date du 6 avril 2022. Les dernières conclusions de la société Hervé sont en date du 30 mars 2022.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 avril 2022.
PRÉTENTIONS ET MOYENS :
La société EDF demande à la cour de :
- Réformer le jugement dont appel dans toutes ses dispositions,
En conséquence,
- Condamner la société Hervé à payer à la société EDF la somme de 141.867,19 euros TTC, augmentée des intérêts au taux annuel de 3,03%, à compter du 30 avril 2016,
Subsidiairement :
- Condamner la société Hervé à payer à la société EDF la somme de 109.874,94 euros TTC, augmentée des intérêts au taux annuel de 3,03%, à compter du 30 avril 2016,
En toute hypothèse :
- Ordonner la capitalisation des intérêts,
- Condamner la même à payer à la société EDF la somme de 40 euros à titre d'indemnité pour frais de recouvrement,
- Débouter la société Hervé de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- Condamner la même à payer à la société EDF la somme de 9.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner la même aux entiers dépens de première instance et d'appel.
La société ENEDIS demande à la cour de :
- Réformer le jugement,
En conséquence :
- Déclarer et juger que la société ENEDIS n'a commis aucune faute à l'encontre de la société Hervé,
- Annuler la condamnation prononcée à l'encontre de la société ENEDIS au profit de la société Hervé,
- Rejeter toutes demandes fins et conclusions de la société Hervé,
- Condamner la société Hervé à verser à la société ENEDIS la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de la première instance et de l'appel.
La société Hervé demande à la cour de :
A titre principal :
- Confirmer le jugement en ce qu'il a Dit et jugé la société EDF irrecevable en ses demandes comme prescrites,
- Réformer néanmoins le jugement en ce qu'il a considéré que seules les demandes antérieures au 14 avril 2011 se trouvaient prescrites et
- Dire et juger que sont prescrites l'ensemble des demandes en paiement relatives aux consommations antérieures au 24 mai 2012,
- Confirmer le jugement en ce qu'il a Dit et jugé que la société EDF ne justifie pas d'une créance certaine à l'encontre de la société Hervé pour la période postérieure au 14 avril 2011,
En conséquence et en tout état de cause :
- Débouter la société EDF de ses demandes à l'encontre de la société Hervé,
A titre subsidiaire :
- Dire et juger la société EDF mal fondée en ses demandes, fins et conclusions,
En conséquence :
- Débouter la société EDF de ses demandes à l'encontre de la société Hervé,
A titre infiniment subsidiaire :
- Constater que la société EDF et la société ENEDIS ont commis des manquements contractuels préjudiciables à la société Hervé,
En conséquence :
- Condamner solidairement la société EDF et la société ENEDIS à payer à la société Hervé la somme de 150.000 euros en réparation de l'ensemble de ses préjudices,
- Ordonner la compensation des créances réciproques entre les parties,
En tout état de cause :
- Débouter la société EDF de sa demande de condamnation à une indemnité de 9.000 euros fondée au visa de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner solidairement la société EDF et la société ENEDIS à payer à la société Hervé la somme de 10.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé à leurs dernières conclusions visées supra.
DISCUSSION :
Sur la prescription :
L'article 20 du cahier des charges de concession pour le service public du développement et de l'exploitation du réseau de distribution d'électricité et de la fourniture d'énergie électrique aux tarifs réglementés, ayant valeur réglementaire, dispose que lorsqu'une erreur sera constatée dans l'enregistrement des consommations, une rectification sera effectuée par le concessionnaire dans la limite autorisée par les textes applicables en matière de prescription.
Les actions mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire du droit aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer :
Article 2224 du code civil :
Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
En l'espèce, il résulte des conditions générales du contrat de fourniture d'électricité que la société EDF était propriétaire du compteur installé dans les locaux de la société Hervé et était chargée de le contrôler :
Article V. Mesure et contrôle de l'énergie et de la puissance :
L'énergie et la puissance livrées au client sont mesurées à l'aide des appareils dont la nomenclature figure aux conditions particulières. En cas de modification des puissances souscrites, ces appareils doivent, si nécessaire, être modifiés ou remplacés par d'autres appareils de calibre et de type convenables.
Les appareils de mesure, à l'exclusion des transformateurs de mesure, sont fournis et posés aux frais d'EDF, réglés et plombés par celle-ci, contradictoirement avec les représentants du client. Ils sont installés en un lieu approprié, de caractéristiques définies par EDF, choisi d'un commun accord. Le client veille à ne pas porter atteinte à l'intégrité et au bon fonctionnement des appareils.
Le contrôle, l'entretien et le renouvellement des appareils sont assurés par EDF qui peut procéder à leur vérification aussi souvent qu'elle le juge utile. En outre, en cas de modernisation de ces appareils, EDF peut procéder à leur remplacement par des modèles de nouvelle génération. Le client acquitte une redevance forfaitaire mensuelle de location, d'entretien et de renouvellement des appareils de mesure, dont le mondant est indiqué aux conditions particulières.
(')
Le client doit prendre toutes dispositions nécessaires pour que les agents EDF puissent, en tout temps, avoir accès directement et immédiatement au poste de livraison et aux appareils de mesure. EDF fait procéder une fois par mois, aux relevés des compteurs, dont les indications sont portées à la connaissance du client. Ce dernier peut en outre avoir accès à l'ensemble des informations que ces appareils de mesure et de contrôle délivrent.
Si les appareils de mesure sont installés sur des circuits à une tension différente de la tension de raccordement, les quantités relevées sont corrigées comme il est indiqué aux conditions particulières.
(...)
Les obligations relatives au contrôle et à l'entretien du dispositif de comptage on été transférés à la société ERDF, devenue ENEDIS, en 2006 :
Article L322-8 du code de l'énergie (rédaction en vigueur du 17 avril 2013 au 19 août 2015, codification en 2011 de l'article 23 de la loi n°2006-1537 du 7 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie) :
Sans préjudice des dispositions du septième alinéa du I de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales, un gestionnaire de réseau de distribution d'électricité est, dans sa zone de desserte exclusive, notamment chargé, dans le cadre des cahiers des charges de concession et des règlements de service des régies :
1° De définir et de mettre en 'uvre les politiques d'investissement et de développement des réseaux de distribution afin de permettre le raccordement des installations des consommateurs et des producteurs ainsi que l'interconnexion avec d'autres réseaux ;
2° D'assurer la conception et la construction des ouvrages ainsi que la maîtrise d''uvre des travaux relatifs à ces réseaux, en informant annuellement l'autorité organisatrice de la distribution de leur réalisation ;
3° De conclure et de gérer les contrats de concession ;
4° D'assurer, dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires, l'accès à ces réseaux ;
5° De fournir aux utilisateurs des réseaux les informations nécessaires à un accès efficace aux réseaux, sous réserve des informations protégées par des dispositions législatives ou réglementaires ;
6° D'exploiter ces réseaux et d'en assurer l'entretien et la maintenance ; 7° D'exercer les activités de comptage pour les utilisateurs raccordés à son réseau, en particulier la fourniture, la pose, le contrôle métrologique, l'entretien et le renouvellement des dispositifs de comptage et d'assurer la gestion des données et toutes missions afférentes à l'ensemble de ces activités.
Après ce transfert, ce n'est plus la société EDF mais la société ERDF, devenue ENEDIS, qui a eu en charge le contrôle des activités de comptage. La société EDF ne pouvait donc pas, a priori, connaître l'éventuel dysfonctionnement du compteur lui même ou un défaut de paramétrage correspondant au transformateur associé.
Ce n'est qu'à compter de la lettre envoyée par la société ERDF le 19 février 2015 que la société EDF, tout comme la société Hervé, a eu connaissance de la difficulté.
Il est à noter que par lettre du 4 février 2016, la société ERDF a proposé à la société Hervé de prendre à sa charge 50% du volume calculé sur les 5 dernières années dans le cadre d'une procédure dérogatoire exceptionnelle. Cette lettre ne vaut pas engagement définitif de la part de la société ERDF. La société EDF n'est pas concernée par cette lettre.
La facture rectificative du 14 avril 2016 ne porte que sur la période allant du 16 février 2010 au 16 février 2015. A cette époque, la société EDF n'était pas en charge des opérations de comptage.
Le fait que la société EDF n'ait pas émis sa facture dès février 2015 est sans effet sur le décompte de la prescription.
La société EDF a connu l'erreur le 16 février 2015, a émis une facture rectificative le 14 avril 2016 et assigné la société Hervé en paiement le 24 mai 2017. Son action n'est donc pas prescrite.
Le jugement sera infirmé sur ce point.
Sur l'erreur de facturation :
Les sociétés ENEDIS et EDF font valoir que l'erreur de facturation ne proviendrait pas d'un défaut du compteur lui même. Elles expliquent que le compteur est paramétré en fonction du transformateur associé et qu'en cas de changement de ce transformateur, une modification des paramètres du compteur est nécessaire pour calculer la consommation. Ainsi, le compteur aurait été paramétré pour un transformateur associé 1000/5 alors que le technicien de la société ENEDIS aurait constaté en février 2015 que le transformateur associé était de type 2000/5 ce dont il aurait résulté un calcul de la consommation d'électricité divisé de moitié.
La société Hervé conteste que la preuve ait été rapportée de ce que le transformateur associé était de type 2000/5 et non pas de type 1000/5. Elle conteste avoir procédé à la modification de son transformateur postérieurement à la date du 26 novembre 2001.
Si la société Hervé n'a pas dès le départ contesté la réalité du changement de compteur de courant, elle n'a pas non plus reconnu la réalité d'un tel changement. Elle est recevable à présenter une telle contestation.
Il résulte de la fiche de mise en service établie par la société EDF le 26 novembre 2001 que le transformateur de courant mentionné était d'un rapport 1000/5 et le rapport de transformation en courant de 200. La puissance transfo était de 630 Kva.
En février 2015, des travaux ont eu lieu en vue de l'installation d'un nouveau transformateur de puissance, la société Hervé souhaitant augmenter la puissance dont elle disposait. Elle a confié les travaux à la société Eiffage.
Le 4 février 2015, la société ENEDIS a remis à la société Eiffage les nouveaux transformateurs destinés à être posés sur le site. Le 11 février 2015, la société Eiffage est intervenue sur le site afin de mettre en place un nouveau transformateur de puissance.
Le 16 février 2015, M. [H], agent de la société ENEDIS est intervenu afin de contrôler la nouvelle installation. Il a noté que l'intervention réalisée avait consisté en un remplacement des transfos de courant, du comptage et du transfo de puissance. Ce technicien a validé la chaine de mesure mais il a indiqué dans son rapport, daté du 16 février 2015 et signé par le client, qu'une interrogation devait être levée quant à la calibration des transfos des mesures déposées par l'installateur le 11 février 2015 et qu'il solderait son intervention après récupération des anciens transformateurs. Aucune mention sur le type de transformateur existant ne figure sur ce rapport établi de façon contradictoire.
Dans une attestation du 16 juillet 2019, M. [H] a précisé que lors de sa visite du 16 février 2015 il avait remarqué que les anciens transformateurs, déposés sur le sol du poste de livraison, étaient de type CR141 calibre 2000/. Il indique qu'en mettant à jour le dossier du client le soir, il a découvert que les informations intégrées dans le compteur mentionnaient un calibre 1000/5 pour le comptage alors que les transformateurs déposés étaient des 2000/5, soit un rapport de moitié pour la facturation. Il indique que le 16 février 2015 les services de la société ENEDIS ont contacté M. [G] de l'entreprise Eiffage pour la reprise des anciens transformateurs déposés sur le site le 11 février 2015, que M. [L] a été chargé de les reprendre le 17 février 2015 et que confirmation a été faite de l'anomalie de comptage.
Il résulte en effet de la demande de travaux et du compte rendu de l'intervention pour prendre en charge les transformateurs auprès de la société Eiffage, pièces internes à la société ERDF mais sont l'authenticité est suffisamment établie, que les transformateurs en question ont été récupérés auprès de la société Eiffage le 17 février 2015. Ces documents ne précisent pas de quel type étaient les transformateurs ainsi récupérés.
Aucun témoignage ni constat, et encore moins contradictoire, ni aucune photographie ou relevé de numéro de série des transformateurs récupérés auprès de la société Eiffage n'est produit sur ce point précis. Il n'est ainsi pas établi de quel type de transformateurs il s'agissait.
Il résulte de l'attestation de M. [Y], salarié de la société Eiffage, en date du 26 avril 2019, qu'il avait établi un devis au profit de la société Hervé pour opérer une augmentation de puissance suite à la mise en place d'un nouveau matériel. Il indique avoir suivi personnellement les travaux, étant en charge commercialement des travaux chez les carrières. Lors de la rédaction du devis, il a fait un premier état des lieux mais n'a pas pu avoir accès au comptage ERDF ainsi qu'au transformateur de courant de comptage car ces ensembles étaient plombés et non accessibles. La société Hervé a passé commande pour la mise en place d'un transformateur 1.250 Kva afin d'avoir la puissance nécessaire pour leur évolution. Lors des travaux de février 2015, un technicien de la société Eiffage est allé chercher chez ERDF les transformateurs de courant à poser sur le nouveau transformateur. Après la mise hors tension de l'installation, lors des travaux, les services de la société Eiffage ont déplombé le capot du transformateur existant afin de décabler le transformateur et les transformateurs de courant qui étaient en place depuis l'origine. Il indique que le transformateur était un 630kva (soit 930 ampères) et les transformateurs de courant cablés en 1000/5. Les services de la société Eiffage ont posé ensuite le nouveau transformateur de 1250 kwa et posé et cablé les transformateurs de courant fournis par ERDF en 2000/5, adaptés à la puissance du transformateur 1250 kva, soit 1.800 ampères.
Cette attestation n'est ni plus ni moins pertinente que celle de l'agent ENEDIS qui est intervenu en février 2015. Les deux attestations ont d'ailleurs été établies en 2019.
La société ENEDIS indique elle même qu'il est difficile de distinguer à l'oeil nu des transformateurs 1000/5 et 2000/5 puisqu'il s'agit en réalité d'un boitier identique.
Il apparaît ainsi qu'il y a pour le moins un doute sur le type de transformateur de courant qui était en place en février 2015 avant que les travaux ne soient réalisés par la société Eiffage sous le contrôle de la société ENEDIS. Aucun document n'établit précisément qu'il s'agissait de transformateurs de type 2000/5. En outre, aucun constat contradictoire de cette caractéristique n'a été établi.
Les sociétés ENEDIS et EDF font valoir que la consommation de la société Hervé avant le changement de compteur en 2001 et été réduite de moitié après cette modification ce qui établirait qu'il y a eu à compter de cette date une division de moitié de la consommation facturée.
La société Hervé établit cependant que son activité, et donc sa consommation d'énergie, peut fluctuer et que c'est ce qui s'est produit, à la baisse, en 2002.
Si un changement des transformateurs de courant a pu être envisagée en 2001, il n'est pas établi qu'elle ait eu lieu avant l'intervention de février 2015.
De même, l'augmentation de la consommation d'électricité relevée en 2015 après l'intervention de février 2015 est concomitante de la mise en place d'un nouvel équipement, mise en place qui avait d'ailleurs motivé l'intervention de la société Eiffage pour augmenter la puissance disponible. La société Hervé justifie en ce sens qu'elle a abandonné à cette époque un équipement alimenté par un groupe électrogène au fuel pour un équipement alimenté directement en électricité. En outre, la société Hervé justifie de l'augmentation des tonnages de matériaux traités entre 2014 et 2015 puis entre 2015 et 2016.
Il apparaît ainsi que les fluctuations des consommations facturées à la société Hervé peuvent provenir des fluctuations de sa consommation d'énergie et non pas d'erreurs de comptage de cette consommation.
L'erreur de facturation n'étant pas établie, il y a lieu de rejeter les demandes formées par la société EDF.
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Du fait du rejet de cette demande, les demandes subsidiaires de la société Hervé ne seront pas examinées.
Sur les frais et dépens :
La société ENEDIS, par sa carence a produire des éléments de preuve d'une éventuelle erreur de facturation, ou d'une éventuelle absence d'erreur de facturation, a contribué au présent litige. Sa condamnation en première instance au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile sera confirmée.
Il y a lieu de condamner les sociétés ENEDIS et EDF aux dépens d'appel et de rejeter les demandes formées en appel au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour :
- Infirme le jugement en ce qu'il a dit que les demandes de règlement de la société Electricité de France antérieures au 14 avril 2011 sont prescrites,
Statuant à nouveau et y ajoutant :
- Rejette la fin de non recevoir soulevée par la société Entreprise Hervé & Cie afférente à la prescription des demandes de la société Electricité de France,
- Rejette les demandes de paiement formées par la société Electricité de France,
- Rejette les autres demandes des parties,
- Condamne les sociétés ENEDIS et Electricité de France aux dépens d'appel
Le Greffier, Le Président,