4ème Chambre
ARRÊT N°225
N° RG 20/05060 -
N° Portalis
DBVL-V-B7E-RAFI
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 16 JUIN 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, Présidente de chambre,
Assesseur : Madame Hélène RAULINE, Présidente de chambre,
Assesseur : Madame Nathalie MALARDEL, Conseillère,
GREFFIER :
Madame Juliette VANHERSEL, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 26 Avril 2022, devant Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, magistrat rapporteur, tenant seule l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 16 juin 2022 par mise à disposition au greffe, après prorogation du 09 juin 2022, date indiquée à l'issue des débats
****
APPELANT :
Monsieur [B] [N]
né le 16 Avril 1970 à [Localité 5] ([Localité 5])
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me Lucie ALLAIN, avocat au barreau de RENNES
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 352380022020011127 du 30/10/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de [Localité 6])
INTIMÉE :
Syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] représenté par le syndic SARL B.S.R. IMMOBILIER
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentée par Me Guillaume CIZERON, avocat au barreau de NANTES
****
EXPOSÉ DU LITIGE
M. [B] [N] est propriétaire des lots n°27, 31 et 51 dans un immeuble en copropriété situé [Adresse 1].
Par acte d'huissier en date du 9 juin 2020, le syndicat des copropriétaires, représenté par son syndic la société BSR Immobilier, l'a fait assigner en paiement de :
- 3 475,47 euros au titre de l'arriéré de charges suivant compte arrêté au 24 avril 2020, outre la somme de 661,73 euros au titre des frais nécessaires de recouvrement engagés ;
- 1 000 euros à titre de dommages-intérêts ;
- 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par un jugement en date du 4 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Nantes a :
- condamné M. [N] à payer au syndicat des copropriétaires les sommes de :
- 3 481,07 euros au titre des charges de copropriété et des frais de recouvrement selon compte arrêté au 24 avril 2020 ;
- 350 euros à titre de dommages-intérêts ;
- 850 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné M. [N] aux dépens ;
- rappelé que le jugement est exécutoire de droit à titre provisoire ;
- rejeté toutes demandes autres ou plus amples formées par les parties.
M. [N] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 20 octobre 2020.
Dans ses dernières conclusions en date du 4 avril 2022, M. [N] au visa des articles 722-6 et suivants du code la consommation, 25 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 et 1343-5 du code civil, demande à la cour de :
- réformer le jugement dont appel en ce qu'il l'a condamné à payer au syndicat des copropriétaires les sommes de 3 481,07 euros au titre des charges de copropriété et des frais de recouvrement selon compte arrêté au 24 avril 2020 ; 350 euros à titre de dommages-intérêts ; 850 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile , ainsi qu'aux dépens.
Statuant à nouveau,
A titre principal,
- débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande tendant au paiement d'une somme de :
- 4 137,20 euros au titre de l'arriéré de charges de copropriété au 24 avril 2020 y compris
- 661,71 euros au titre des frais engagées dans le cadre de la procédure de recouvrement
- 1 000 euros au titre de dommages-intérêts ;
- 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- lui octroyer un délai de paiement de dix mois selon un échéancier établi sur la base d'une capacité de remboursement de 200 euros par mois ;
En tout état de cause,
- débouter le syndicat des copropriétaires de ses autres demandes fins et prétentions ;
- condamner le syndicat des copropriétaires à verser à Me Lucie Allani la somme de 1 500 euros, au titre des frais irrépétibles dans les circonstances prévues par l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
- condamner le syndicat des copropriétaires aux entiers dépens.
M. [N] estime que la demande de dommages et intérêts du syndicat est injustifiée dès lors qu'il n'est pas de mauvaise foi. Il explique avoir quitté l'appartement en avril 2016 suite à la séparation d'avec son épouse, qui a continué à y demeurer avec son fils ; que les courriers envoyés à cette adresse ne lui étaient pas transmis. Il précise que l'ancien syndic connaissait sa situation et disposait de ses coordonnées, qu'il n'a pas été avisé du changement de syndic ; qu'après avoir été hébergé à [Localité 5], il dispose d'une adresse à [Localité 4].
L'appelant fait observer qu'il n'avait pas de retard de paiement des charges avant le changement de syndic et que depuis que les documents sont envoyés à la bonne adresse, il règle les charges, aidé par sa mère. Il ajoute que le syndicat de copropriétaire ne démontre pas un préjudice distinct du retard de paiement.
Disposant uniquement du RSA qui continue à lui être versé puisqu'il a repris l'exploitation d'un salon de coiffure qui pour l'instant ne dégage pas de revenu fixe, il demande des délais de paiement à hauteur de 200 euros par mois. Il précise ne pas être en mesure de vendre l'appartement qui a été attribué à son épouse dans le cadre de la procédure de divorce.
Dans ses dernières conclusions transmises le 5 avril 2022, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 1], représenté par son syndic la société BSR Immobilier, demande à la cour de :
- rejeter l'ensemble des demandes et prétentions de M. [N] ;
- confirmer le jugement, en toutes ses dispositions ;
- condamner M. [N] à payer au syndicat des copropriétaires une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Le syndicat intimé fait observer que M. [N] ne discute pas la dette de charges mais uniquement les dommages et intérêts auxquels il a été condamné, en mettant en avant l'absence de réception des informations relatives aux charges. Il estime que son argumentation sur ce point ne peut être accueillie dès lors qu'en application de l'article 65 du décret du 17 mars 1967, il appartient au copropriétaire d'informer le syndic de son domicile réel et de son adresse électronique, ce dont il ne rapporte pas la preuve.
Il précise avoir fait de multiples démarches pour retrouver l'adresse de M. [N], tant par l'intermédiaire de l'ancien que du nouveau syndic. Il ajoute que les relances faites à sa nouvelle adresse n'ont pas plus abouti et que les courriers recommandés n'ont pas été retirés par l'appelant qui n'est pas allé prendre à l'étude de l'huissier l'assignation suite à l'avis de passage laissé en son absence. Il estime que ce comportement démontre une absence de bonne foi de l'appelant qui justifie les dommages et intérêts accordés.
Le syndicat des copropriété s'oppose à la demande de délais et fait remarquer que les charges étaient impayées depuis 2018, tandis que M. [N] ne justifie percevoir le RSA qu'à compter de juillet 2020. Il ajoute que la bailleresse qui perçoit directement l'allocation logement qui lui est versée est en fait sa mère et s'interroge sur la régularité de ce montage.
L'intimé demande la confirmation du jugement quant à l'arriéré de charges de 3 475,47 euros au 22 avril 2020 et faisant observer que l'ensemble des pièces justificatives sont produites et que les procés-verbaux d'assemblée générale sont définitifs. Il relève que si des règlements sont intervenus l'arriéré de charges au 5 avril 2022 s'élève à 2 500,19 euros.
L'instruction a été clôturée le 5 avril 2022.
MOTIFS
Sur l'arriéré de paiement des charges
Nonobstant le dispositif de ses conclusions dans lequel il sollicite la réformation du jugement qui l'a condamné au paiement de l'arriéré de charges et de frais de recouvrement arrêté au 24 avril 2020 d'un montant 3 481,07 euros, M. [N] ne développe aucune argumentation pour contester les sommes qui lui sont réclamées, qui sont justifiées par les procès-verbaux des assemblées générales des exercices 2017, 2018, 2019 et 2020, les décomptes de charges et les appels de fond.
Le compte de M. [N] révèle que le paiement des charges courantes a repris à compter de l'appel de fonds du 4ème trimestre 2020 et que des règlements réguliers complémentaires de 400 euros ont été effectués pour apurer la dette émanant de sa mère. Il n'est pas discuté par M. [N] que les règlements arrêtés au 1er avril 2022 ont tous été pris en compte. En conséquence, le jugement sera confirmé, sauf à préciser que la condamnation est prononcée en deniers ou quittances.
Sur la demande de dommages et intérêts
Selon l'article 1153 devenu1231-6 du code civil, le créancier auquel le débiteur en retard a causé par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant du retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l'intérêt moratoire.
Comme le rappelle le syndicat selon l'article 65 du décret du 17 mars 1967, le copropriétaire doit notifier au syndic son domicile réel ou son domicile élu. Cette démarche s'impose d'autant plus quand le copropriétaire ne réside pas ou plus dans les lots dont il est propriétaire au sein de la copropriété et il n'appartient pas au syndic de s'inquiéter des motifs qui justifient le retour de courriers recommandés adressés à un copropriétaire portant la mention 'non réclamé'.
Si M. [N] prétend qu'il avait fourni à l'ancien syndic, la société Foncia Brunner, ses coordonnées afin d'être averti des charges dues lors de son départ de l'appartement resté occupé par son épouse et dont la jouissance lui a été attribuée par le juge aux affaires familiales en mars 2022, cette affirmation n'est corroborée par aucune pièce et, au contraire, est démentie par les appels de provision que lui a envoyés l'ancien syndic en septembre 2018 à l'adresse des lots de copropriété. Son départ des lieux en 2016 n'est pas plus démontré.
De la même façon, le décompte des charges de M. [N] établit qu'il n'a pas cessé de les payer comme il l'indique à l'occasion du changement de syndic dont il n'aurait pas été averti, mais à compter de juin 2018 alors que la société BSR Immobilier a été désignée en février 2019.
Son départ de l'appartement sans fournir une adresse au syndic, l'absence de toute tentative justifiée de sa part pour s'informer de l'état de sa dette ou expliquer la précarité de sa situation dont il ne rapporte la preuve qu'à compter de juillet 2020, le défaut de retrait des courriers recommandés adressés par le syndic à sa nouvelle adresse alors qu'il n'ignorait pas ses obligations en tant que copropriétaire excluent que soit retenue sa bonne foi. Son attitude a obligé le syndicat à engager de nombreuses démarches pour le retrouver dont ce dernier justifie et a affecté la trésorerie de la copropriété en l'absence de tout paiement pendant deux ans puisque seul le jugement a conduit à la reprise de règlements, ce qui constitue un préjudice distinct du seul retard de paiement.
Au regard de cette situation, l'indemnisation accordée au syndicat des copropriétaires par le premier juge sera confirmée.
Sur la demande de délais de paiement
L'absence de bonne foi de M. [N] caractérisée plus haut a pour conséquence de le priver du bénéfice des délais de paiement qu'il sollicite, étant observé qu'au regard des ressources dont il justifie, le RSA d'un montant de 497 euros, l'allocation logement étant versée à sa mère qui l'héberge, un apurement fiable du solde de la dette d'un montant supérieur à 2 000 euros sur la base du versement de 200 euros par mois qu'il offre n'est pas envisageable.
Sur les demandes annexes
Les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens sont confirmées.
M. [N] sera condamné à verser au syndicat des copropriétaires une indemnité de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel et aux dépens de l'instance d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort,
CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions, sauf à préciser que la condamnation au paiement des charges est prononcée en deniers ou quittances,
Y ajoutant
REJETTE la demande de délais de paiement,
CONDAMNE M. [N] à verser au syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1], représenté par son syndic, une indemnité de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel et à supporter les dépens de l'instance d'appel.
Le Greffier, Le Président,