La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/06/2022 | FRANCE | N°19/04787

France | France, Cour d'appel de Rennes, 7ème ch prud'homale, 16 juin 2022, 19/04787


7ème Ch Prud'homale





ARRÊT N°350/2022



N° RG 19/04787 -

N° Portalis DBVL-V-B7D-P6FE













M. [H] [Z]



C/



SELARL ATHENA

Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA DE RENNES





















Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 16 JUIN 2022







COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Monsieur Benoît HOLLEAUX, Président de chambre,

Assesseur : Madame Liliane LE MERLUS, Conseillère,

Assesseur : Madame Isabelle CHARPENTIER, Conseillère,



GREFFIER :



Madame Hélène RAPITEAU, lors des débats et Madame Françoise D...

7ème Ch Prud'homale

ARRÊT N°350/2022

N° RG 19/04787 -

N° Portalis DBVL-V-B7D-P6FE

M. [H] [Z]

C/

SELARL ATHENA

Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA DE RENNES

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 16 JUIN 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Benoît HOLLEAUX, Président de chambre,

Assesseur : Madame Liliane LE MERLUS, Conseillère,

Assesseur : Madame Isabelle CHARPENTIER, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Hélène RAPITEAU, lors des débats et Madame Françoise DELAUNAY lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 09 Mai 2022 devant Madame Liliane LE MERLUS et Madame Isabelle CHARPENTIER, magistrats tenant seuls l'audience en la formation double rapporteurs, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 16 Juin 2022 par mise à disposition au greffe

****

APPELANT :

Monsieur [H] [Z]

né le 12 Février 1987 à CHENOVE (21000)

19, Route de Chavagne

35580 GOVEN

Représenté par Me Claire LE QUERE de la SELARL MARLOT, DAUGAN, LE QUERE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉES :

SELARL ATHENA, prise en la personne de Maître [U] [M], es qualités de liquidateur de la société TAZTAG

20 rue d'Isly

35000 RENNES

Représentée par Me Thomas NAUDIN de la SELARL ARVOR AVOCATS ASSOCIÉS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA DE RENNES

Immeuble Le Magister 4, cours Raphaël Binet

35069 RENNES CEDEX

Représentée par Me Marie-Noëlle COLLEU de la SELARL AVOLITIS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Rennes du 24 juin 2019 ayant':

- Fixé les créances de M. [H] [Z] au passif de la liquidation judiciaire de la Sas TAZTAG aux sommes suivantes':

- 384 € de rappel de salaire sur le mois de mars 2016,

- 636,48 € de rappel de salaire sur le mois d'avril 2016

- 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

- Dit être opposable à l'AGS CGEA de Rennes.

- Débouté M. [H] [Z] de ses autres demandes.

- Débouté les parties de leurs plus amples demandes et prétentions contraires.

- Mis les entiers dépens à la charge de la liquidation judiciaire';

Vu la déclaration d'appel de M. [H] [Z] reçue au greffe de la cour le 16 juillet 2019 ;

Vu les conclusions récapitulatives du conseil de M. [H] [Z] adressées au greffe de la cour par le RPVA le 9 avril 2020 et auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens, aux fins':

- De confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a retenu à son profit les créances salariales sur les mois de mars (384 €) et d'avril 2016 (636,48 €).

- D'infirmation pour le surplus et, statuant à nouveau, de fixation pour son compte au passif de la liquidation judiciaire de la Sarl TAZTAG des autres créances suivantes':

- 10'266,30 € d'indemnité compensatrice légale de préavis (trois mois de salaires) et 1'026,63 € d'incidence congés payés, dont à déduire le salaire déjà perçu sur la période du 8 au 28 avril 2018,

- 28 000 € de dommages-intérêts à titre principal pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et subsidiairement, pour violation des critères d'ordre des licenciements.

- De dire l'arrêt à intervenir commun et opposable à l'AGS CGEA de Rennes.

- De condamnation de la Selarl ATHENA, en sa qualité de mandataire liquidateur de la Sas TAZTAG, à lui payer la somme de 3'000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens';

Vu les conclusions du conseil de la Sarl ATHENA prise en la personne de Me [U] [M], en sa qualité de mandataire liquidateur de la Sas TAZTAG (2ème jugement du tribunal de commerce de Rennes du 24 mars 2016), adressées au greffe de la cour par le RPVA le 14 janvier 2020 et auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens, aux fins':

- De confirmation du jugement déféré sauf en ce qu'il a fixé au passif de la liquidation judiciaire au profit de M. [H] [Z] à titre de créances salariales les sommes de 384 € sur le mois de mars 2016 et de 636,48 € sur le mois d'avril 2016, ainsi qu'en ses dispositions sur l'article 700 du code de procédure civile.

- De rejet en toute hypothèse de ses autres demandes':

- En paiement d'un rappel de salaires,

- Portant sur la contestation de la cause économique du licenciement ou subsidiairement, après communication de la décision à intervenir à Pôle emploi auquel M. [H] [Z] devra rembourser les sommes qu'il a indûment perçues dans le cadre du dispositif sur le Contrat de Sécurisation Professionnelle (CSP), dire que l'indemnité compensatrice légale de préavis ne saurait excéder la somme de 7'985,16 €, outre 798,52 € de congés payés afférents, et limiter les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse au minimum légal,

- Renvoyant aux critères d'ordre des licenciements

- De condamnation de M. [H] [Z] à lui payer la somme de 2'000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'en tous les dépens';

Vu les conclusions du conseil de l'AGS CGEA de Rennes adressées au greffe de la cour par le RPVA le 9 janvier 2020 et auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens aux fins':

- De confirmation du jugement critiqué.

- En conséquence, de dire que les créances salariales sur la période du 30 novembre 2015 au 8 avril 2016 ne sauraient donner lieu à sa garantie par référence au plafond spécial déjà atteint de l'article L. 3253-8 5° a) et b) du code du travail, de dire en tout état de cause que le rappel au titre de la part salariale des tickets restaurant ne constitue pas une créance qu'elle garantit, débouter M. [H] [Z] de ses demandes ou subsidiairement de toutes celles excessives ou injustifiées.

- En toute hypothèse, de rappeler que sa garantie ne s'exerce que dans les conditions et limites de plafond légalement prévues';

Vu l'ordonnance du 29 mars 2022 clôturant la procédure de mise en état avec fixation de la présente affaire à l'audience du 9 mai 2022.

MOTIFS :

La Sas TAZTAG a embauché M. [H] [Z] dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein ayant pris effet le 12 décembre 2012 en qualité d''« Ingénieur Développement'», catégorie cadre-position 2.1-coefficient 105 de la convention collective nationale SYNTEC, moyennant en contrepartie un salaire fixe de 2'580 € bruts mensuels et une prime annuelle sur objectifs de 1'000 €, éléments de rémunération ayant été portés par un avenant n°2 applicable au 1er novembre 2015 aux sommes respectives de 3'000 € bruts mensuels et de 5'000 € annuels.

Dans ce dernier avenant précité de novembre 2015, M. [H] [Z] voyait ses fonctions modifiées sur un poste de « Team Leader », catégorie cadre-position 3.1-coefficient 170.

Le tribunal de commerce de Rennes':

- Par un premier jugement du 30 novembre 2015, a ouvert une procédure de redressement judiciaire concernant la Sas TAZTAG avec la désignation de Me [U] [M] comme mandataire, fixation d'une période d'observation jusqu'au 30 mai 2016, et renvoi à une audience intermédiaire prévue le 3 février 2016 pour qu'il soit statué sur la poursuite de la période d'observation ou la liquidation de l'entreprise à défaut de redressement possible.

- Par un deuxième jugement du 3 février 2016, a maintenu la Sas TAZTAG en période d'observation jusqu'au 30 mai 2016, avec renvoi à l'audience du 18 mai 2016.

- Par un troisième jugement du 24 mars 2016, dans le cadre d'un plan de cession totale de la Sas TAZTAG, a retenu l'offre de reprise émanant de la société SUNOON ELECTRONICS CO LIMITED, à laquelle s'associent les sociétés EATONE et RICHWAY, au moyen d'une structure juridique commune sous la forme d'une société à créer, la Sas NEWPAD MAKER'; ordonné la reprise de 12 des 21 salariés de la Sas TAZTAG dans les conditions de l'article L. 1224-1 du code du travail'; et dit que l'administrateur judiciaire procédera au sein des catégories professionnelles des 9 salariés non repris aux licenciements par application de l'article L. 642-5 du code de commerce.

- Par un quatrième jugement également du 24 mars 2016 assorti de l'exécution provisoire, constatant que la Sas TAZTAG, consécutivement à la mise en 'uvre de ce plan de cession, n'a plus d'activité, a prononcé la conversion de la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire avec la désignation de la Sarl ATHENA prise en la personne de Me [U] [M], en qualité de mandataire liquidateur.

Dans un courrier daté du 24 mars 2016, Me [D], en sa qualité d'administrateur judiciaire de la Sas TAZTAG, a rappelé à M. [H] [Z] que suite à l'offre de cession des activités de celle-ci au profit de la société SUNOON ELECTRONICS CO LIMITED de droit chinois et pour le compte d'une société à créer dénommée NEWPAD MAKER, son contrat de travail n'a pas été repris par le cessionnaire, et qu'il se trouve ainsi dans l'obligation d'envisager son licenciement par renvoi aux articles L. 631-19 et L. 642-5 du code de commerce.

Par un courrier du 25 mars 2016, l'administrateur judiciaire a convoqué M. [H] [Z] à un entretien préalable prévu le 7 avril et lui a notifié le 8 avril 2016 son licenciement pour motif économique en raison de la cession de la Sas TAZTAG à la société SUNOON ELECTRONICS CO LIMITED après autorisation du tribunal de commerce de Rennes par un jugement du 24 mars 2016, cession accompagnée d'un plan de licenciement prévoyant le départ de 9 salariés dont les contrats de travail n'ont pas été repris par le cessionnaire, du fait précisément que son propre contrat de travail figure parmi les non repris, et de ce qu'il occupe au sein de la Sas TAZTAG un poste d'ingénieur de «Team Leader» non maintenu suite à cette même cession.

Dans le dernier état de la relation contractuelle de travail, M. [H] [Z] percevait une rémunération en moyenne de 3'422,21 € bruts mensuels.

Sur les demandes liées à l'exécution du contrat de travail

1/ Le rappel de salaire au titre du mois d'avril 2016

M. [H] [Z] sollicite un rappel de salaire de 636,48 € sur le mois d'avril 2016 en considération du fait, prétend-t-il, qu'il n'aurait pas été complètement désintéressé de sa rémunération y afférente, demande à laquelle s'oppose le mandataire liquidateur qui fait observer à juste titre qu'il y a lieu de tenir compte en l'espèce des règles applicables en matière de garantie des salaires dus en cours de période d'observation ou après le prononcé de la liquidation judiciaire avec les limites prévues en terme de plafond notamment à l'article L. 3253-8 du code du travail, et que si au vu de la synthèse de l'AGS CGEA de Rennes - sa pièce 1 - les salaires jusqu'à la fin mars 2016 ont pu faire l'objet de sa garantie, celui exigible d'avril 2016 n'a pu l'être intégralement puisque le plafond avait déjà été atteint.

Infirmant le jugement entrepris sur ce point, M. [H] [Z] sera débouté de sa demande de ce chef.

2/ Le remboursement de la part salariale au titre des tickets-restaurant

M. [H] [Z] indique que sur le mois de mars 2016 il n'a pas pu bénéficier des tickets-restaurants d'entreprise qui ont cependant été déduits de sa rémunération au titre de la part salariale, ce qui représente une somme globale de 384 € (96 tickets x 4 €), demande à laquelle s'oppose tout autant le mandataire liquidateur qui considère que ce dernier n'explicite pas suffisamment le bien-fondé d'une telle somme et qu'à supposer même qu'il y soit fait droit, une telle réclamation se heurterait au principe même de la garantie de l'AGS CGEA de Rennes.

Indépendamment de la question sur les conditions de la garantie de l'AGS CGEA de Rennes, M. [H] [Z] justifie - ses pièces 6 et 16 - avoir bien été prélevé sur son bulletin de paie de mars 2016 de la part salariale au titre des tickets-restaurant d'entreprise dont il n'a cependant pas pu bénéficier en pratique, de sorte que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a fixé à son profit la somme précitée de 384 € comme créance au passif de la liquidation judiciaire de la Sas TAZTAG.

Sur les demandes indemnitaires relatives au licenciement

M. [H] [Z] a adressé le 11 mars 2016 à l'administrateur judiciaire, Me [D], un courrier en ces termes':

« Objet': Volontariat au licenciement pour motif économique dans l'éventualité d'une cession d'entreprise.

Faisant suite au prononcé du jugement de redressement judiciaire de la société TazTag intervenu le 30 novembre 2015, et au projet de cession actuellement en cours par la société Sunoon, je vous informe par la présente que je me porte volontaire pour être licencié pour raison économique. Cette décision est motivée par un projet professionnel qui consiste à changer de cadre de travail. Ce projet est principalement appuyé par le manque de confiance dans le projet de reprise de l'activité tant sur les conditions techniques que sur la gouvernance. L'évolution éventuelle de ce projet professionnel et de cette motivation ne modifie en rien ma décision de volontariat. Je renonce à l'application des critères de la grille de licenciement proposé dans le cadre de ce plan de licenciement. Je précise néanmoins que cette lettre n'est pas une démission et que, par conséquent, tous mes droits liés à la rupture de mon contrat de travail dans le cadre du licenciement pour motif économique devront m'être préservés » - pièce 7 de la partie intimée.

Postérieurement à son licenciement pour motif économique lui ayant été notifié le 8 avril 2016 par Me [D], ès qualités, avec dispense d'effectuer le préavis, M. [H] [Z] a adhéré le 25 avril suivant au dispositif sur le CSP.

1/ Le bien fondé du licenciement.

M. [H] [Z] conteste en premier lieu la cause réelle et sérieuse du licenciement que l'administrateur judiciaire lui a notifié aux motifs, d'une part, au visa de l'article R. 642-3 du code de commerce de l'absence d'une autorisation régulièrement donnée pour ce faire par le tribunal de commerce de Rennes dans son jugement du 24 mars 2016 faute de comporter les précisions rendues nécessaires concernant les catégories professionnelles des neufs salariés titulaires de contrats de travail non repris et, d'autre part, que l'administrateur judiciaire a manqué à son obligation légale de reclassement en ne procédant à aucune recherche préalable à ce titre.

En réponse, le mandataire liquidateur, sur le premier point de la contestation, considère que le jugement consulaire précité est conforme aux prescriptions de l'article R. 642-3 du code de commerce pour indiquer le nombre de salariés dont le licenciement est autorisé ainsi que les activités et catégories professionnelles concernées, cela pour le reprendre de manière explicite dans son dispositif, et sur le second point, rappelle que l'obligation de reclassement trouve nécessairement ses limites dans l'hypothèse d'une entreprise mise en liquidation judiciaire qui n'appartient pas à un groupe, sachant qu'en l'espèce il n'y avait plus aucun poste disponible en reclassement au sein de la Sas TAZTAG en cessation totale et définitive d'activité.

*

L'article R 642-3, dernier alinéa, du code de commerce dispose que':'

« Lorsque le plan de cession prévoit des licenciements pour motif économique, le liquidateur, ou l'administrateur lorsqu'il en a été désigné, produit à l'audience les documents mentionnés à l'article R. 631-36. Le jugement arrêtant le plan indique le nombre de salariés dont le licenciement est autorisé ainsi que les activités et catégories professionnelles concernées'».

Dans le dispositif du premier des deux jugements rendus le 24 mars 2016, devenu définitif, le tribunal de commerce de Rennes, au titre du volet social accompagnant l'opération de cession, prévoit que 12 salariés sur 21 sont repris par renvoi à diverses activités et catégories professionnelles bien différenciées (2 apprentis, 1 assistante commerciale, 1 chargé de communication, 1 commercial, 1 directeur général international, 1 directeur recherche et développement, 1 ingénieur développement, 1 ingénieur support technique, 1 responsable comptable, 1 team leader, 1 technicien test et validation / 12) ; confirme ainsi que 9 salariés ne voient pas leurs contrats de travail transférés au cessionnaire (2 ingénieurs développement, 1 responsable opérationnel recherche et développement, 3 team leader, 1 responsable administratif, 1 directeur opérationnel Asie, 1 directeur technique / 9) en autorisant ainsi l'administrateur à procéder à leurs licenciements en application de l'article L. 642-5 du code de commerce ; et dresse enfin un tableau récapitulatif listant tous les emplois concernés avec une distinction faite par rapport à l'équipe existante (21) entre le périmètre de la reprise (12) et les postes quantitativement non repris (9) au sein des différentes catégories professionnelles qui ont été retenues en l'espèce.

D'un point de vue général, on considère qu'appartiennent à une même catégorie professionnelle les salariés qui exercent de fait dans l'entreprise des activités de même nature ou de nature comparable supposant une formation commune, avec la faculté de se remplacer entre eux pour les besoins du service.

Nonobstant ce que soutient M. [H] [Z], dès lors que figurent bien dans le jugement consulaire précité toutes les précisions attendues sur la nature des catégories professionnelles concernées par la procédure de licenciement, il convient de considérer que l'autorisation à cette fin a été régulièrement donnée par le tribunal de commerce de Rennes à l'administrateur judiciaire qui a pu lui notifier son licenciement pour motif économique par application de l'article L. 642-5 du code de commerce.

*

L'obligation de reclassement par renvoi à l'article L. 1233-4 du code du travail qui pèse par principe sur l'employeur, même s'il a été mis en liquidation judiciaire, trouve sa limite en cas de cessation complète d'activité de l'entreprise qui n'appartient pas à un groupe permettant la permutation de tout ou partie du personnel, et que sauf dispositions conventionnelles expresses étendant le périmètre du reclassement, l'employeur n'est normalement pas tenu de procéder à des recherches extérieures à l'entreprise quand il ne relève pas d'un groupe dit de permutation.

Pour autant, il est établi que l'administrateur judiciaire a entrepris courant mars-avril 2016 certaines démarches auprès d'institutionnels (Pôle emploi, CCI de Rennes, Chambre des métiers de Rennes, AFPA) et d'entreprises du même secteur d'activité que la Sas TAZTAG mais sans résultat - pièces 14 à 21 du mandataire liquidateur -.

Au surplus, il n'y avait pas davantage une obligation spécifique pour l'administrateur judicaire de tenter un reclassement de M. [H] [Z] auprès de la société SUNOON ELECTRONICS CO LIMITED qui a racheté la Sas TAZTAG dans le cadre de la procédure collective ouverte par le tribunal de commerce de Rennes en novembre 2015 avec in fine le transfert de 12 des 21 contrats de travail, soit la reprise de seulement 12 salariés de l'entreprise cédée.

Contrairement à ce qu'affirme M. [H] [Z], la partie intimée n'a donc commis aucun manquement à l'obligation légale de reclassement.

*

Le licenciement pour motif économique de M. [H] [Z] repose ainsi sur une cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en ce qu'il l'a débouté de ses demandes d'indemnité compensatrice de préavis, et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

2/ Les critères d'ordre des licenciements.

Le plan de cession validé en mars 2016 par le tribunal de commerce de Rennes ne prévoyant pas le transfert de la totalité des 21 contrats de travail qui obligeaient jusque-là Sas TAZTAG, ce qui impliquait le licenciement des 9 salariés non repris, il y avait bien lieu à application des critères d'ordre des licenciements.

En effet sur ce dernier point, le licenciement de salariés en application d'un plan de cession nécessite la fixation et la mise en 'uvre des critères d'ordre des licenciements.

*

Au soutien de sa contestation, M. [H] [Z] indique qu''« Il semble ', que Me [D] se soit purement et simplement abstenu du respect des critères d'ordre des licenciements, se contentant de se retrancher derrière la seule décision arbitraire du cessionnaire [qui] ne pouvait, en effet, valablement imposer le nom des salariés qu'il souhaitait reprendre à son service »'; relève qu'au vu du tableau émanant de la partie adverse ne figure pas parmi les critères retenus par l'administrateur judiciaire celui tiré du « volontariat des salariés »'; estime qu'ayant lui-même pris l'initiative de se porter volontaire pour un licenciement pour motif économique cela ne valait pas dispense à son égard de la nécessité d'appliquer lesdits critères légaux avec leur mise en pratique effective (valeur des points accordés à chacun des critères et leur modalité d'attribution, prise en compte des catégories professionnelles pertinentes et pour ce qui le concerne celle des « Ingénieurs »)'; et que le non-respect à son détriment des critères d'ordre des licenciements lui permet de solliciter une indemnité spécifique.

En réponse, le mandataire liquidateur se prévaut d'une liste des salariés répartis par catégories professionnelles et classés entre eux suivant un total de points prenant en compte tous les critères légaux'; précise que dans la catégorie professionnelle de « Team Leader »» où se situait M. [H] [Z], il lui a été attribué un total de 7 points ; considère ainsi que l'appelant devait faire partie des 9 salariés à licencier sur autorisation du tribunal de commerce ce d'autant qu'il s'était porté volontaire pour cela'; rappelle d'ailleurs sur ce dernier point que le jugement du 24 mars 2016 arrêtant le plan de cession a mentionné qu'à l'application des critères légaux d'ordre des licenciements « le candidat cessionnaire ajoute un critère complémentaire et prioritaire consistant dans le volontariat et l'acceptation des salariés au transfert de leur contrat de travail »'; précise que l'ajout du critère du volontariat ne résulte pas seulement d'une demande du cessionnaire mais bien d'une disposition expresse du jugement du tribunal de commerce de Rennes du 24 mars 2016 arrêtant le plan de cession et autorisant les licenciements pour en constituer le fondement juridique'; et souligne le fait que ce critère supplémentaire d'origine judiciaire s'imposait sans exclusive à l'administrateur qui l'a nécessairement pris en compte.

*

Il est produit aux débats par la partie intimée - sa pièce 22 - le tableau de synthèse sur les critères d'ordre des licenciements retenus et mis en 'uvre par l'administrateur judiciaire à la mi-mars 2016 pour concerner les 21 salariés composant l'effectif de la Sas TAZTAG alors en redressement judiciaire.

Dans la catégorie professionnelle de « Team Leader » et à laquelle était rattaché M. [H] [Z], se trouvaient identifiés, en plus de lui-même, M. [I], Mme [W], et M. [B].

Il a été appliqué en l'espèce l'ensemble des critères légaux ressortant de l'article L. 1233 -5 du code du travail (Ancienneté de service, Charges de famille, Difficultés de réinsertion, Qualités professionnelles déclinées dans les trois sous-rubriques « Capacité d'évolution », « Motivation, implication » et « Qualités relationnelles »).

Parmi les quatre salariés titulaires relevant de la catégorie professionnelle de « Team Leader », seul le poste de M. [B], qui totalisait le plus de points (13), a été repris par le cessionnaire'; l'appelant n'en ayant obtenu pour sa part que 7.

Comme le fait d'ailleurs observer à juste titre M. [H] [Z], il ne figure pas parmi les critères expressément retenus et mis en 'uvre celui tiré d'un volontariat pour voir son contrat de travail rompu, c'est-à-dire être licencié.

La mise en application des critères légaux d'ordre des licenciements conduisait au maintien du contrat de travail de M. [B] (13 points) qui a été repris par la société cessionnaire et, en conséquence, au licenciement pour motif économique de M. [H] [Z] (7 points) qui s'était porté volontaire à son licenciement dans l'hypothèse d'une cession de la Sas TAZTAG, comme cela a bien été le cas en l'espèce.

Un tel constat se suffit à lui-même, et cela indépendamment du fait que dans le dispositif de l'un de ses jugements rendus le 24 mars 2016 (page 8), le tribunal de commerce de Rennes, à titre de simples « Observations », ait pu acter l'ajout par le candidat cessionnaire d'un « critère complémentaire et prioritaire consistant dans le volontariat et l'acceptation des salariés au transfert de leur contrat de travail ».

Pour l'ensemble de ces raisons, M. [H] [Z] ne peut sérieusement invoquer une violation à son égard des critères d'ordre des licenciements.

*

Le jugement querellé sera en conséquence confirmé en ce qu'il l'a débouté de sa demande indemnitaire subsidiaire pour violation des critères d'ordre des licenciements.

Sur la garantie de l'AGS CGEA de Rennes

Il sera rappelé que la garantie de l'AGS CGEA de Rennes au titre des seules créances nées en l'espèce de l'exécution du contrat de travail n'a lieu à s'appliquer que dans les conditions d'admission et de limites de plafond légalement prévues par renvoi notamment aux articles L. 3253-8 5° a) et b), L. 3253-17 et suivants, et D. 3253-5 du code du travail.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

La Selarl Athena prise en la personne de Me [U] [M], en sa qualité de mandataire liquidateur de la Sas TAZTAG, sera condamnée en équité à payer à M. [H] [Z] la somme complémentaire de 1'500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS ':

LA COUR, statuant publiquement et par arrêt mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement entrepris en ses dispositions sur la demande en remboursement de la part salariale au titre des tickets-restaurant, les demandes indemnitaires relatives au licenciement pour motif économique, l'article 700 du code de procédure civile et les dépens';

L'INFIRME pour le surplus et STATUANT à nouveau,

DEBOUTE M. [H] [Z] de sa demande en paiement d'un rappel de salaire sur le mois d'avril 2016';

Y AJOUTANT':

RAPPELLE que le jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire a arrêté le cours des intérêts au taux légal,

RAPPELLE que la garantie de l'AGS CGEA de Rennes, à laquelle le présent arrêt est opposable, relativement aux créances nées de l'exécution du contrat de travail n'a lieu à s'appliquer que dans les conditions d'admission et de limites de plafond légalement prévues par renvoi notamment aux articles L. 3253-8 5° a) et b), L. 3253-17 et suivants, et D. 3253-5 du code du travail,

CONDAMNE la Selarl Athena prise en la personne de Me [U] [M], en sa qualité de mandataire liquidateur de la Sas TAZTAG, à payer à M. [H] [Z] la somme de 1'500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile';

CONDAMNE la Selarl Athena prise en la personne de Me [U] [M], en sa qualité de mandataire liquidateur de la Sas TAZTAG, aux dépens d'appel.

LE GREFFIERLE CONSEILLER,

POUR LE PRESIDENT EMPECHE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 7ème ch prud'homale
Numéro d'arrêt : 19/04787
Date de la décision : 16/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-16;19.04787 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award