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14/06/2022 | FRANCE | N°21/03248

France | France, Cour d'appel de Rennes, 6ème chambre b, 14 juin 2022, 21/03248


6ème Chambre B





ARRÊT N° 263



N° RG 21/03248

N° Portalis DBVL-V-B7F-RVM4













M. [A] [R]



C/



Mme [T] [O]

































Copie exécutoire délivrée

le :



à :























REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D

'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 14 JUIN 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Véronique CADORET, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Sylvie ALAVOINE, Conseillère,

Assesseur : Madame Emmanuelle GOSSELIN, Conseillère,



GREFFIER :



Madame Catherine DEAN, lors des débats et lors du prononcé,





DÉBATS :



A l'a...

6ème Chambre B

ARRÊT N° 263

N° RG 21/03248

N° Portalis DBVL-V-B7F-RVM4

M. [A] [R]

C/

Mme [T] [O]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 14 JUIN 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Véronique CADORET, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Sylvie ALAVOINE, Conseillère,

Assesseur : Madame Emmanuelle GOSSELIN, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Catherine DEAN, lors des débats et lors du prononcé,

DÉBATS :

A l'audience publique du 21 Mars 2022

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 14 Juin 2022, après prorogation, par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANT :

Monsieur [A] [R]

né le 08 Juillet 1957 à [Localité 11]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Rep/assistant : la SCP PHILIPPE COLLEU, DOMINIQUE LE COULS-BOUVET, Postulant, avocats au barreau de RENNES

Rep/assistant : Me Christophe LOMBARD (SCP A.KALIFA-C.LOMBARD-E.LECARPENTIER), Plaidant, avocat au barreau de LORIENT

INTIMÉE :

Madame [T] [O]

née le 19 Mars 1964 à [Localité 10]

[Adresse 4]

[Localité 9]

Rep/assistant : la SCP GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, Postulant, avocats au barreau de RENNES

Rep/assistant : Me Béatrice LE CALVEZ DAUSSET, Plaidant, avocat au barreau de QUIMPER

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Monsieur [A] [R] et Madame [T] [O] se sont mariés le 28 juillet 1990 devant l'officier de l'état-civil de [Localité 7] (29) après contrat de mariage de séparation de biens reçu le 19 juillet 1990 en l'étude de Maître [W], notaire à [Localité 12].

Par ordonnance de non-conciliation en date du 25 novembre 2011, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de QUIMPER a notamment :

- attribué la jouissance du domicile conjugal à Madame [O] à titre gratuit,

- fixé la pension alimentaire due par Monsieur [R] à Madame [O] au titre du devoir de secours entre époux à la somme de 1 000 euros par mois,

- dit que Monsieur [R] assumerait la charge provisoire des échéances de prêt immobilier afférent au domicile conjugal (1 273 euros par mois) à titre d'avance sur la liquidation du régime matrimonial,

- désigné Maître [X], notaire à [Localité 13] et Maître [W], notaire à [Localité 6], pour procéder à l'élaboration du projet de liquidation du régime matrimonial et à la formation des lots à partager.

Un appel a été interjeté à l'encontre de cette décision.

Par arrêt en date du 22 janvier 2013, la cour d'appel de RENNES a:

- infirmé l'ordonnance de non-conciliation sur la pension alimentaire au titre du devoir de secours entre époux et fixé celle-ci à la somme de 850 euros par mois,

- ordonné avant dire droit une enquête sociale,

- maintenu, dans l'attente du dépôt du rapport, les mesures relatives aux enfants telles que fixées dans l'ordonnance de non-conciliation,

- con'rmé le surplus de ses dispositions.

Par un nouvel arrêt en date du 17 décembre 2013, la cour d'appel de RENNES a :

- infirmé les dispositions de l'ordonnance de non-conciliation sur les mesures relatives aux enfants,

- constaté que l'arrêt mixte du 22 janvier 2013 avait déjà statué sur la demande réitérée par Madame [O] aux fins de voir fixer la pension alimentaire au titre du devoir de secours entre époux à la somme de 1 200 euros par mois.

Par jugement en date du 20 août 2014, le juge aux affaires familiales de [Localité 14] a prononcé le divorce des époux et ordonné la liquidation de leur régime matrimonial.

Par acte d'huissier en date du 18 novembre 2016, Monsieur [R] a fait assigner Madame [O] devant le juge aux affaires familiales sur le fondement des articles 1359 et suivants du code de procédure civile et 840 du code civil.

Par jugement en date du 23 février 2018, le juge aux affaires familiales au tribunal de grande instance de QUIMPER a notamment :

- ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision [R]/[O],

- désigné Maître [J] [H], notaire à [Localité 14], pour y procéder,

- débouté Monsieur [R] de ses demandes tendant à faire fixer sa créance au titre du financement des travaux d'amélioration du bien indivis aux sommes de 35 000 euros et 16 000 euros,

- dit n'y avoir lieu, en l'état, à ordonner la licitation de l'immeuble indivis sis [Adresse 5], cadastré [Cadastre 8] pour une contenance de 14 ares et 67 centiares,

- réservé les demandes de licitation et d'attribution préférentielle ainsi que la demande visant à voir fixer la créance de Monsieur [R] au titre de l'apport financier réalisé par ses soins dans le cadre de l'acquisition de ce bien immobilier,

- renvoyé les parties devant le notaire commis,

- débouté Madame [O] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les dépens seraient employés en frais privilégiés de partage.

Par acte en date du 10 octobre 2019, Maître [J] [H], notaire à [Localité 14], a dressé un procès-verbal de difficultés.

Par jugement en date du 2 avril 2021, le juge aux affaires familiales au tribunal judiciaire de QUIMPER a :

- ordonné la poursuite des opérations de comptes, liquidation et partage des intérêts patrimoniaux de Monsieur [R] et Madame [O],

- fixé la créance de Monsieur [R] à l'encontre de Madame [O] à la somme de 8.672,73 euros,

- débouté Monsieur [R] de ses demandes visant à voir dire qu'il était titulaire de créances à hauteur de 60 277 euros et 20 000 euros à l'encontre de Madame [O],

- dit que Madame [O] était redevable envers l'indivision d'une indemnité d'occupation d'un montant de 32 760 euros,

- déclaré irrecevable la demande de Madame [O] visant à voir dire qu'elle était titulaire d'une créance de 200 000 euros à l'encontre de Monsieur [R],

- renvoyé les parties devant Maître [J] [H], notaire à [Localité 14], pour établir l'acte de partage sur la base du projet d'état liquidatif et des dispositions du présent jugement en ce qui concernait les désaccords subsistants,

- dit qu'en cas d'empêchement, le notaire et le juge commis pourraient être remplacés par simple ordonnance rendue sur requête,

- dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les dépens seraient employés en frais privilégiés de compte, liquidation et partage et supportés par les parties à proportion de leur part dans l'indivision.

Par déclaration en date du 27 mai 2021, Monsieur [R] a interjeté appel dudit jugement en ce qu'il a :

- débouté Monsieur [R] de ses demandes visant à voir dire qu'il était titulaire de créances à hauteur de 60 277 euros et 20 000 euros à l'encontre de Madame [O],

- dit Madame [O] redevable envers l'indivision d'une indemnité d'occupation d'un montant de 32 760 euros.

Aux termes de ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 22 février 2022, Monsieur [R] demande à la cour de :

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il l'a débouté de sa demande de créance à l'encontre de Madame [O] de 60 267 euros,

et, statuant à nouveau,

- dire que Madame [O] lui doit la somme de 60 277 euros pour l'acquisition de la maison de la [Localité 9] et, en tant que de besoin, condamner celle-ci au paiement de la somme,

- réformer le jugement en ce qu'il l'a débouté de ses demandes de créance de 20 000 euros,

- le dire recevable et bien fondé à solliciter la restitution de la part de Madame [O] des meubles suivants :

. un bureau commode cylindre à 3 niveaux,

. une salle à manger comportant une table bois dessus marbre, 2 fauteuils cuir beige, un buffet bas à 4 portes,

. suite de 8 chaises en chêne cérusé et cuir vert,

. un coffre camphrier avec garniture d'angle,

. table Louis XV rustique rectangulaire faisant dos de canapé,

. table de salon marquetée ouvrant par le plateau supérieur,

. globe terrestre ancien avec piétement en acajou,

. important coffre ancien sculpté en façade ouvrant par le plateau,

. service de verres anciens,

. rafraichissoir de style Louis XV,

. table à cartes à jouer ancienne,

. jardinière en faïence,

. statue de christ polychrome XVII siècle,

. meuble à tiroirs mutliples (meuble à collection d'affiches et estampes),

. 2 bureaux américains,

ce, sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard pendant une durée de 30 jours et après la signification de l'arrêt à intervenir,

subsidiairement,

- condamner Madame [O] à verser à Monsieur [R] la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi par l'absence de restitution de ses meubles personnels et du partage des meubles indivis,

- réformer le jugement entrepris concernant le calcul de l'indemnité d'occupation,

et, statuant à nouveau,

- fixer le montant de l'indemnité d'occupation due par Madame [O] à la somme de 900 euros par mois pendant 52 mois soit 48 800 euros,

- confirmer les autres dispositions du jugement,

- débouter Madame [O] de ses demandes,

- confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a déclaré irrecevable Madame [O] 'en ses demandes de créance de 200 000 euros et de 177 766,43 francs' et fixé la créance en remboursement de trop-perçu de pension alimentaire de Monsieur [R] à l'encontre de Madame [O] à la somme de 8 672,73 euros,

- condamner Madame [O] à verser à Monsieur [R] la somme de 3 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières écritures, notifiées par voie électronique le 28 février 2022, Madame [O] demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a ordonné la poursuite des opérations de comptes, liquidation et partage des intérêts patrimoniaux de Monsieur [R] et de Madame [O], débouté Monsieur [R] de ses demandes visant à voir dire qu'il est titulaire de créances à hauteur de 60 277 euros et 20 000 euros à l'encontre de Madame [O], renvoyé les parties devant Maître Valérie [H] pour établir l'acte de partage en ce qui concerne les désaccords subsistants,

- dire que la valeur de l'immeuble indivis devra être partagée par moitié entre les ex-époux [R]-[O],

- réformer le jugement en ce qu'il a fixé la créance de Monsieur [R] à l'encontre de Madame [O] à la somme de 8 672,73 euros au titre d'un trop-perçu de pension alimentaire, dit que Madame [O] était redevable envers l'indivision d'une indemnité d'occupation d'un montant de 32 760 euros, déclaré irrecevable la demande de Madame [O] visant à voir dire qu'elle était titulaire d'une créance de 200 000 euros à l'encontre de Monsieur [R],

- dire que l'indemnité d'occupation due par Madame [O] envers l'indivision s'élève à la somme de 27 930 euros,

- dire que la créance de Madame [O] à l'encontre de Monsieur [R], pour le financement de l'agrandissement de l'immeuble indivis situé [Adresse 5], s'élève à la somme de 200000 euros,

- débouter Monsieur [R] de toutes ses demandes,

- condamner Monsieur [R] à payer à Madame [O] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire que les dépens seront réglés en frais privilégiés de partage.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est expressément référé à leurs dernières conclusions en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 1er mars 2022.

A l'audience, la cour a provoqué les observations des parties et les a autorisées, par des notes en délibéré, à s'expliquer sur la recevabilité des demandes de Monsieur [R] portant sur la revendication de meubles et, subsidiairement, sur des dommages et intérêts, au regard des dispositions de l'article 1373 du code de procédure civile et des dires des parties contenues au procès-verbal du juge commis.

Aussi, deux notes ont été successivement déposées par les parties, respectivement à la date du 15 avril 2022 pour Monsieur [R], celui-ci estimant recevable la demande précitée, et à la date du 20 avril 2022 pour Madame [O] soutenant à l'inverse l'irrecevabilité de ladite demande.

MOTIFS DE L'ARRET

A titre liminaire, il sera rappelé qu'en vertu des dispositions de l'article 1542 du code civil, le partage des biens indivis entre époux séparés de biens, pour tout ce qui concerne ses formes, le maintien de l'indivision et l'attribution préférentielle, la licitation des biens, les effets du partage, la garantie et les soultes, est soumis aux règles des successions pour les partages entre cohéritiers.

En vertu des dispositions de l'article 1136-2 du code de procédure civile, les articles 1358 à 1378 régissant le partage des successions sont applicables au partage des intérêts patrimoniaux des époux.

I - Sur la revabilité de certaines prétentions

a - Sur la recevabilité des demandes portant sur la revendication de meubles et, subsidiairement, sur les dommages et intérêts

Il résulte de l'article 1373 du code de procédure civile qu'en cas de désaccord des copartageants sur le projet d'état liquidatif dressé par le notaire, ce dernier transmet au juge commis un procès-verbal reprenant les dires respectifs des parties ainsi que le projet d'état liquidatif. Le juge commis peut entendre les parties ou leurs représentants et le notaire et tenter une conciliation. Il fait rapport au tribunal des points de désaccord subsistants.

Aussi en matière de partage judiciaire, en application des articles 1373 et 1374 du code de procédure civile et dans le cas d'un partage complexe, toute demande distincte de celle portant sur les points de désaccord susbsistants dont le juge commis a fait rapport au juge aux affaires familiales ou au tribunal, selon le cas, est irrecevable, à moins que le fondement des prétentions ne soit né ou ne soit révélé que postérieurement à ce rapport.

Toutefois, en l'absence de rapport au juge aux affaires familiales établi par le juge commis, relatant les points de désaccord entre les parties, toutes les demandes relatives au partage judiciaire sont recevables.

En l'espèce, le 28 novembre 2019 le juge commis a dressé un 'procès-verbal de non-conciliation', aux termes duquel il est mentionné que 'les parties présentes ne sont pas accordées sur les points suivants :

- la question de l'apport personnel de Monsieur [R] (PEL et CEL) au moment de l'acquisition familiale en 1997 : il revendique sur ce point une créance que conteste Madame [O]. Celle-ci souhaite un partage du prix de la maison par moitié.

- la question de l'indemnité d'occupation due par Madame [O] qu'elle souhaite voir fixer à 420 euros par mois alors que Me [H] l'a évaluée à 900 euros. Madame [O] indique que le négociateur de l'étude n'aurait pas visité toutes les pièces'.

Il a été ajouté que l'affaire était renvoyée à la mise en état du juge aux affaires familiales pour les conclusions de l'avocat de Monsieur [R] et ledit procès-verbal a été signé par les parties, le juge et le greffier.

A hauteur d'appel, Monsieur [R] explique que la demande relative aux meubles a été soumise au juge commis, avant son audience du 28 novembre 2019, ce qu'il établit par un courrier adressé à ce dernier le 25 novembre précédent.

Cette demande, sur laquelle aucun accord des parties n'est établi s'être dégagé et qui trouvait son fondement à une date antérieure à l'audience sus-visée s'étant tenue devant le juge commis, n'est pas portée dans le document dressé par ce dernier.

Or, Monsieur [R] expose, sans être en cela contesté par la partie adverse, que cette question des meubles et ses demandes soutenues à ce titre n'ont pas été évoquées devant le juge commis, qui ensuite dans son procès-verbal n'a fait que reprendre les seules questions sur lesquelles une tentative de conciliation avait été tentée. Le juge aux affaires familiales dans le jugement déféré à la cour a ainsi exactement rappelé, dans son exposé du litige et sa motivation, les termes de 'procès-verbal de conciliation' établi sur les seuls deux points précités par le juge commis.

Aussi, en ce qu'il se limitait aux deux questions précitées, ce procès-verbal n'épuisait pas les points de désaccord que les parties avaient alors entre elles concernant la liquidation de leurs intérêts patrimoniaux, faute d'évoquer la revendication de l'époux sur des meubles et à défaut sur une créance de dommages et intérêts pourtant auparavant exprimée et soumise au juge commis. Il ne peut dès lors être opposé à Monsieur [R] une irrecevabilité de sa demande portant sur un autre point, relatif aux meubles et à défaut à une créance de dommages et intérêts.

Indépendamment même de la possibilité pour le juge, que conteste Monsieur [R], de soulever d'office une irrecevabilité de ce chef qui a été mise dans le débat, en l'absence de rapport au juge aux affaires familiales établi par le juge commis, mentionnant ce point de désaccord subsistant entre les parties pourtant déjà exprimé et persistant au jour de ce rapport, la cour dira recevable la demande de Monsieur [R] en revendication de meubles et, subsidiairement, en reconnaissance d'une créance de dommages et intérêts.

b - Sur la recevabilité de la demande de Madame [O] portant sur une créance de 200 000 euros à l'encontre de Monsieur [R] pour le financement de travaux d'agrandissement de l'immeuble indivis

A cette demande de Madame [O], celle-ci exposant avoir financé des travaux d'agrandissement de l'immeule indivis en utilisant les fonds qu'elle détenait sur un CEL et un PEL, soit la somme de 177 766,43 francs, Monsieur [R], déjà devant le premier juge, avait opposé une irrecevabilité, retenue par la décision déférée.

En effet, au visa des articles 1373 et 1374 du code de procédure civile, le premier juge a estimé que l'ex-épouse n'avait exposé cette demande ni avant le prononcé du jugement du 23 février 2018, ni dans le projet d'état liquidatif ni dans les dires au notaire et joints au procès-verbal de difficultés ni enfin lors de l'audience de conciliation devant le juge commis.

Monsieur [R], à hauteur d'appel, reprend les mêmes moyens et solicite la confirmation de ce chef de la décision déférée.

Madame [O] demande son infirmation, sans toutefois répondre spécifiquement sur l'irrecevabilité qui lui est opposée par Monsieur [R].

A la différence de la demande précédemment évoquée, soutenue par Monsieur [R] portant sur les meubles et à défaut sur une somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts, pour laquelle ce dernier justifie de ce qu'elle avait été soumise au juge commis avant son audience du 28 novembre 2019, Madame [O] n'établit rien de tel pour sa créance revendiquée à l'encontre de Monsieur [R] à hauteur de 200.000 euros.

Cette revendication ne pouvait en conséquence être reproduite par le juge commis dans son rapport au tribunal.

Aussi, la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle déclare irrecevable ce chef de demande.

II - Sur le bien-fondé des prétentions, déclarées recevables et portant sur les créances entre époux

Les créances entre époux portent sur des mouvements de valeurs intervenus entre leurs patrimoines personnels. Elles sont réglementées par les articles 1469, alinéa 3, 1479 et 1543 du code civil.

Quant à leurs causes, elles ressortissent au droit commun des obligations et notamment aux dispositions de l'article 1353 du code civil dont il résulte qu'il appartient à l'ex-époux qui revendique une créance de prouver l'obligation de restitution de l'ex-conjoint et, le cas échéant, à celui-ci de justifier s'en être libéré. Aussi, il ne suffit pas à un ex-époux d'invoquer une remise de fonds pour en réclamer le remboursement.

Quant à l'évaluation, la créance de l'époux ne peut être moindre que le profit subsistant, lequel représente l'avantage réellement procuré au fonds emprunteur quand la valeur empruntée a servi à acquérir, à conserver ou à améliorer un bien de son conjoint. En l'absence de profit subsistant ou en présence d'une dépense ne relevant pas de l'alinéa 3 de l'article 1469, la créance est égale au montant nominal de la dépense faite.

La règle posée par l'article 1543 du code civil relative à l'évaluation des créances entre époux n'est applicable qu'à défaut de convention contraire.

En l'espèce, le contrat de mariage des époux prévoit la contribution par chacun, à proportion de ses facultés, aux charges du mariage de sorte que chacun est réputé avoir fourni au jour le jour sa part contributive, de sorte qu'ils ne sont assujettis à aucun compte entre eux.

En cas de clause ayant un caractère irréfragable, il n'y a pas de compte entre les époux, même séparés de biens, et la valeur des fonds indivis doit être partagée par moitié entre les époux.

En l'espèce, Madame [O] oppose cette jurisprudence pour soutenir, en réplique à une demande de Monsieur [R] portant sur la somme de 60 277 euros, que la présomption posée par le contrat de mariage est irréfragable en sorte que les époux ne sont assujettis à aucun compte entre eux.

La cour observe que, pour autant et non sans contradiction, l'ex-épouse revendique pour elle-même une créance de 200.000 euros oncernant un apport prétendu de fonds personnels, qui étaient détenus sur son PEL et son CEL, afin de financer des travaux d'agrandissement du bien indivis.

En toute hypothèse, sauf convention matrimoniale contraire, l'apport en capital provenant de biens personnels, effectué par un époux séparé de biens pour financer la part de son conjoint lors de l'acquisition d'un bien indivis affecté à l'usage familial, ne participe pas de l'exécution de son obligation de contribution aux charges du mariage (Civ 1ère, 3 octobre 2019, pourvoi n°18-20.828 et Civ, 17 mars 2021, n°19-21.463).

Aussi, s'agissant notamment de la créance de 60 277 euros, que Monsieur [R] prétend provenir de fonds qui lui sont personnels comme étant issus notamment d'un PEL et ayant servi à l'acquistion du bien indivis, cet apport en capital ainsi invoqué par l'époux, dont la réalité contestée par Madame [O] reste certes à vérifier, ne peut en toute hypothèse participer de l'exécution de son obligation de contribution aux charges du mariage.

Sa demande ne saurait dès lors être écartée pour ce moyen. Elle doit être examinée plus avant avec les autres créances invoquées par l'appelant principal.

a - Sur la créance de 60 277 euros

Monsieur [R] fait valoir une acquisition du bien immobilier au moyen, pour partie, de fonds lui provenant d'un Plan Epargne Logement, ouvert au Crédit Mutuel de Bretagne le 05 mars 1980 sous un numéro n° [XXXXXXXXXX01] et clôturé le 19 décembre 1997, et de virements de 326 647,73 francs au total (326 647,73 francs et 10 000 francs, soit 49 797 euros) depuis ce PEL sur le compte des époux. Aussi, il se prévaut du financement partiel de l'acquisition du bien, par ces virements et à hauteur de la somme de 316 700,57 francs qui restait à réunir au-delà d'un prêt de 508 100 francs, et calcule sa créance au regard du profit subsistant pour l'arrêter à la somme de 60 277 euros.

A hauteur d'appel, comme devant le premier juge, Madame [O] conteste cette demande, estimant que la réalité de l'apport revendiqué n'est pas établie, celle-ci précisant que l'acquisition puis l'agrandissement du bien ont été financés au moyen de deux prêts complétés, pour l'agrandissement, par un apport personnel qu'elle expose avoir réalisé pour 24 519 euros.

Il est constant que l'acte de vente du bien aux parties, datant du 23 décembre 1997, fait état d'un prix de 750 000 francs, hors frais, versé comptant par l'acquéreur le jour même de l'acte, sous réserve de l'encaissement du chèque. La fiche de compte de l'étude notariale atteste effectivement de la remise en crédit d'une somme de 785 360,57 francs le 23 décembre 1997, ladite somme s'ajoutant à deux autres lignes créditrices de 37 500 et 2 000 francs du 03 novembre 1997, soit un solde créditeur de 824 860,57 francs au total au 23 novembre 1997.

Il est certain que le seul prêt de prêt de 508 100 francs était insuffisant à couvrir le prix d'acquisition.

Il reste que les deux sommes de 37 500 et 2 000 francs versées le 03 novembre 1997, l'étaient antérieurement à la clôture de ses CEL et PEL, pourtant invoquée par Monsieur [R] pour soutenir avoir financé l'acquisition immobilière sur ses fonds personnels.

De plus, en dépit d'une clôture de son compte d'épargne logement à la date du 19 décembre 1997, Madame [O] fait observer que les relevés de ce CEL faisaient encore apparaître un solde de 22.409,31 francs le 31 décembre 1997 et de 91.809,31 francs au 24 février 1998, sans trace par ailleurs de transfert de fonds au profit du compte des époux. Il est encore justifié de la notification à Monsieur [R] d'un redressement fiscal le 17 novembre 1997, soit dans un temps très proche de l'achat du bien immobilier, et d'un règlement à l'administration fiscale par celui-ci d'une somme de 55 673 francs qu'il lui aura bien fallu financer.

Il était par ailleurs relevé, déjà par le premier juge, ce que reprend à son compte Madame [O] dans la présente instance, que si Monsieur [R] justifie d'un solde créditeur de 304 957,69 francs au 31 décembre 1996, par un relevé de son Plan Epargne Logement n°[XXXXXXXXXX01], et d'un crédit au compte des époux de deux sommes de 316 647,73 francs et 10 000 francs le 19 décembre 1997, avec la mention 'clôtures 071806258591640100" portée en objet de chacun de ces mouvements en crédit du compte joint, ces numéros sont différents de celui résultant du relevé précité du PEL. Aussi, il a été jugé que Monsieur [R] ne justifiait pas de l'origine des fonds ayant participé au financement de l'acquisition du bien indivis.

A hauteur d'appel, sur la différence de numéros, l'appelant verse aux débats une attestation en date du 11 mai 2021 du représentant de la caisse de Crédit Mutuel de Bretagne de FOUESNANT, lequel confirme que Monsieur [R] détient le plan épargne logement n°[XXXXXXXXXX01], clos le 19 décembre 1997 sous l'intitulé n°071806258591640100, l'attestant ajoutant que ces données 'correspondent au même support d'épargne'. Aucune autre explication n'est donnée à cet égard par la banque ni aucun justificatif des virements invoqués au profit du compte des époux depuis les comptes personnels, CEL et PEL, de l'appelant.

Surtout, il sera observé que l'acte d'acquisition de l'immeuble ne contient aucune mention d'emploi par Monsieur [R] ce qui a fortiori affaiblit très sensiblement la démonstration de ce dernier sur un apport de sa part de fonds personnels pour l'acquisition du bien indivis.

Aussi, les transferts de fonds et leur affectation à l'acquisition immobilière, invoqués par Monsieur [R] auquel incombe la charge de la preuve à cet égard, ne sont pas vérifiés en l'état des débats et des pièces produites dans la présente instance.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté sa demande de ce chef.

b - Sur la revendication relative aux biens et à défaut sur la créance de 20 000 euros

L'article 1538 du code civil prévoit que, tant à l'égard de son conjoint que des tiers, un époux peut prouver par tous les moyens qu'il a la propriété exclusive d'un bien. Les biens sur lesquels aucun des époux ne peut justifier d'une propriété exclusive sont réputés leur appartenir indivisément, à chacun pour moitié.

Les règles de preuve de la propriété entre époux séparés de biens, édictées à l'article précitées, excluent l'application de l'article 2276 du même code.

En l'espèce, aux termes du contrat de mariage des parties, 'les meubles meublants, linge, argenterie et autres mobiliers quelconques qui garniront l'habitation commune pendant le mariage comme à la date de la dissolution seront réputés la propriété exclusive de la future épouse ; il n'y aura exception que pour ceux de ces objets qui porteraient la marque ou le chiffre du futur époux ou sur lesquels celui-ci ou ses héritiers et représentants établiraient leur droit de propriété, par titre, factures de marchands ou tout autre moyen de preuve légale'

Aux termes du projet d'état liquidatif dressé par un premier notaire, Maître [Y] en 2015, après le rappel des termes précités de l'acte de mariage, il était mentionné en page 6 du projet :

'Aussi, l'intégralité des meubles meublants se trouve en la possession de Madame [T] [O] à l'exception des biens et objets mobiliers suivants, sur lesquels Monsieur [R] peut établir son droit de propriété :

- un bureau familial,

- un séjour comprenant une table, deux fauteuils et un buffet,

- huit sièges,

- une table basse de salon,

- de la verrerie.

Par suite, les biens de cette nature se trouvant aux mains des époux à la date de ce jour, constituent pour chacun d'eux leur propriété personnelle, ce qu'ils reconnaissent expressément, et n'ont pas à être compris dans la présente liquidation partage'.

Dans son projet d'acte, Maître [H] ensuite désigné relevait en page 5 dudit projet que Monsieur [R] précisait devoir récupérer divers biens mobiliers lui appartenant personnellement et que, à défaut de les lui avoir présentés, Madame [O] était tenue de lui verser une compensation financière d'un montant de 4 500 euros outre le remboursement des frais dûs à Maître [M] pour 505,28 euros 'pour la procédure engagée suite à son inertie'.

Dans un courrier en date du 07 octobre 2019, Monsieur [R] s'adressait au notaire pour exposer notamment que, malgré les courriers et sommations d'huissier, il n'avait pas récupéré ses meubles détaillés au projet et qu'il tenait pour constituer des biens personnels. Il ajoutait que l'évaluation de ces biens par le notaire, en page 5 de son projet, soit la somme de 4 500 euros outre celle de 505,28 euros, était un montant qui 'ne convient pas à Monsieur [R] qui souhaite que la somme soit fixée, à défaut de récupérer ses meubles lui appartenant, à 20 000 euros'.

Auparavant, dans un courrier en date du 12 mars 2019, Monsieur [R] avait dressé une liste de meubles qu'il souhaitait récupérer, liste plus longue que celle précitée, portée au projet d'état liquidatif, et correspondant à celle reprise dans ses dernières conclusions d'appelant par Monsieur [R].

Pour autant, pour justifier de la propriété personnelle de ces biens, outre cette liste de meubles dressée de manière non contradictoire, sans précision sur la valeur ni sur l'état du mobilier en question, ni sur l'origine de ces biens, Monsieur [R] ne verse aux débats que deux 'factures',

- l'une en date du 05 juin 2019 portant sur une salle à manger 1940, un buffet, une enfilade, deux fauteuils (refaits), mentionnant un prix de 9160 euros suivi des indications suivantes : 'Acompte versé 1 000 euros (vendu à Monsieur [R] en septembre 2003",

- l'autre en date du 3 mars 2022, mentionnant '1 bureau américain en chêne 1.200 euros' et '1 coffre style renaissance en chêne 500 euros'.

Est en outre versée une attestation de Monsieur [S] [E] en date du 17 février 2019, aux termes de laquelle celui-ci aura réalisé 'une restauration en 2005 d'un grand meuble d'antiquaire table à cartes en sapin teinté à multiples tiroirs de très grandes dimensions - meuble entièrement restauré pour un montant tout compris de 1 420 euros'.

Outre que ces factures ne sont pas démontrées être contemporaines de l'achat, il ne résulte en outre ni de celles-ci ni de l'attestation portant sur la restauration en 2005 de l'un des meubles que précisément le mobilier à ce jour revendiqué par l'époux serait resté en la possession de Madame [O]. Or Monsieur [R] ne peut, sans inverser la charge de la preuve, soutenir que son ex-épouse n'apporte aucun élément permettant de considérer qu'elle n'est pas restée en possession de l'intégralité des meubles.

Quant enfin à sa demande subsidiaire tendant, à défaut de restitution de ces meubles, à lui reconnaître une créance de dommages et intérêts de 20 000 euros, elle se heurte, comme la demande principale, au défaut de preuve rapportée par Monsieur [R] de la propriété personnelle de ces biens et de leur possession ou libre disposition par Madame [O]. En effet, ni une liste de meubles dressée par l'ex-époux lui-même sans contradiction, ni deux seules factures peu précises et non contemporaines des achats, ni enfin une attestation de restauration d'un meuble sans indication sur sa propriété ni sur sa possession ultérieure, ne suffisent à établir le bien-fondé de la demande.

Aussi, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [R] de la prétention soutenue de ce chef.

c - Sur la créance de trop-perçu de pension alimentaire

Madame [O] conteste la créance de trop-perçu par le premier juge au profit de Monsieur [R].

Il est constant que, par arrêt de cette cour en date du 22 janvier 2013, la cour d'appel de RENNES a infirmé l'ordonnance de non-conciliation sur la pension alimentaire au titre du devoir de secours entre époux et fixé celle-ci à la somme de 850 euros par mois, au lieu de 1 000 euros par mois, tandis que, par un nouvel arrêt en date du 17 décembre 2013, cette cour a infirmé les dispositions de l'ordonnance de non- conciliation sur les mesures relatives aux enfants, laquelle avait fixé à 500 euros par mois et par enfant soit 1.000 euros au total la pension alimentaire due par Monsieur [R] à Madame [O] au titre de sa contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants [Z] et [B], dont la résidence habituelle a ensuite été transférée au domicile paternel avec une suppression de la pension alimentaire avec effet à compter du 11 avril 2013.

Le premier juge, dans la décision présentement soumise à la cour, a rappelé que Monsieur [R] avait, dans un courrier de son conseil valant dire, interpellé le notaire sur l'omission d'une créance de trop-perçu de pension alimentaire de 8.672,73 euros dans le projet d'état liquidatif, sans qu'en première instance Madame [O] n'ait conclu sur ce point.

A hauteur d'appel, celle-ci soutient que Monsieur [R] ne justifie pas de cette créance, que d'une part il n'a pas poursuivi le paiement de la pension alimentaire au titre du devoir de secours après le prononcé du divorce, que d'autre part il a cessé de verser la pension alimentaire pour trois enfants, [V], [N] et [Z], alors que ceux-ci étaient à charge, leur mère ayant seule continué à les prendre en charge en payant la pension alimentaire mise à sa charge pour [B].

Monsieur [R] se prévaut de trop-versés de pension alimentaire sur la période du 11 avril 2013 au 17 décembre 2013, date de l'arrêt précité ayant infirmé les dispositions de l'ordonnance de non- conciliation sur les mesures relatives aux enfants. Cette décision a en effet généré une suppression rétroactive de la pension alimentaire mise antérieurement à la charge de Monsieur [R] pour deux enfants communs.

Outre que Madame [O] ne justifie pas avoir, avant la présente instance d'appel, contesté cette créance, il sera observé qu'elle ne s'explique pas sur la période sus-visée de suppression rétroactive de la pension alimentaire pour deux enfants ni ne chiffre aucune forme de compensation avec une créance de pension alimentaire qu'elle-même pourrait avoir à l'égard de Monsieur [R] pour d'autres périodes et/ou d'autres pensions alimentaires.

Eu égard aux décisions précitées et à la période sus-visée de suppression rétroactive de la pension alimentaire qui était à la charge de Monsieur [R], le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a retenu une créance de ce chef pour l'ex-époux.

III - Sur l'indemnité d'occupation

Il résulte de l'article 815-9 du code civil que l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité.

Si l'indemnité d'occupation est destinée à compenser la perte des fruits et revenus dont l'indivision est privée pendant la durée de la jouissance privative, elle se justifie également par l'atteinte au droit de jouissance des co-indivisaires de l'occupant. Elle s'analyse comme la contrepartie du droit de jouir privativement d'un bien indivis.

Dès lors, le fait que le bien ne puisse générer des revenus locatifs ne suffit pas à exclure toute indemnité d'occupation.

En l'espèce il est constant que, dans le projet de Maître [H] désigné par le juge aux affaires familiales par un précédent jugement en date du 23 février 2018, il était rappelé que l'épouse avait occupé le bien indivis depuis la séparation, que l'attribution en jouissance à titre gratuit lui avait été octroyée par l'ordonnance de non-conciliation du 15 novembre 2011, gratuité qui avait pris fin au 20 août 2014, date à compter de laquelle et jusqu'au 31 juillet 2019, date de vente du bien indivis, elle devait une indemnité d'occupation que toutefois Monsieur [R] consentait à ne pas exiger pour six mois, conformément à un accord du 26 octobre 2018. Enfin, compte tenu des caractéristiques du bien, l'indemnité a été estimée par le notaire à 900 euros par mois soit pour 53 mois d'occupation privative une indemnité de 47.700 euros.

a) Sur le montant de l'indemnité d'occupation

Si l'indemnité d'occupation doit être fixée de façon à compenser la perte, par l'indivision, des fruits et revenus dont elle est privée pendant la durée de la jouissance privative, pour autant la valeur locative n'est pas le seul élément à prendre en considération.

Aussi, il est d'usage d'appliquer un abattement de 10 à 30 % compte tenu de la précarité de la situation de l'occupant qui ne jouit pas des mêmes droits que le locataire.

Déjà dans un premier projet établi en 2015, Maître [Y] avait établi un calcul d'indemnité d'occupation sur la base d'une somme mensuelle de 900 euros, montant repris dans le projet sus-visé et postérieur de Maître [H].

Madame [O] conteste ce montant en faisant valoir d'une part l'état très dégradé du bien, qu'elle qualifie de non entretenu et ne pouvant être loué au montant sollicité par Monsieur [R], d'autre part le fait que celui-ci ne produit aucune attestation de valeur locative du bien, qu'enfin doit être appliquée, sur la valeur qu'elle propose de fixer à 600 euros par mois, une décote de 30% soit un solde d'indemnité d'occupation de 420 euros par mois.

Le premier juge a exactement relevé que Madame [O] ne versait aux débats que des photographies du bien peu probantes (d'origine inconnue et non datées, sans certitude sur le fait qu'elles concernent le bien indivis dont s'agit) et a rappelé que, dans un premier jugement du 23 février 2018, il avait été observé que les parties déjà ne justifiaient pas de la valeur locative du bien,Maître [H] étant alors désigné pour procéder aux opérations de compte, liquidation et partage.

Il est en outre rappelé par Monsieur [R] que le bien, situé dans un lotissement près du Golfe de Cornouaille, a été vendu au prix de 365 000 euros.

Aucune des parties ne verse aux débats des avis de valeur locative ni aucune autre pièce probante permettant de retenir, pour cette valeur locative, soit une somme inférieure notamment de 600 euros par mois, soit une somme supérieure notamment de 1 200 euros par mois, à celle de 900 euros par mois proposée par les deux notaires successivement désignés.

Aussi, en l'état des pièces produites, le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a retenu une valeur locative de 900 euros. Doit de même être approuvée l'application sur ce montant d'une décote de 30% eu égard au fait que l'occupante ne jouissait pas des mêmes droits qu'un locataire.

b) Sur la période sur laquelle court l'indemnité d'occupation

Madame [O] demande de fixer l'indemnité d'occupation sur la période du 16 octobre 2014 au 09 mai 2019, date à laquelle elle expose avoir quitté le bien, et demande en outre de tenir compte de la période de suspension de six mois conformément à l'accord des parties en date du 26 octobre 2018 soit un montant total de 27.930 euros.

Sur la durée de l'occupation, Monsieur [R] demande de confirmer le calcul opéré par le premier juge, ayant retenu une durée de 52 mois courant à compter du 20 septembre 2014, soit à l'expiration du délai d'appel du jugement de divorce, jusqu'au 31 juillet 2019, date de vente du bien, dont à déduire une période de 6 mois de suspension de l'indemnité convenue entre les époux le 26 octobre 2018.

Si Madame [O] affirme avoir prévenu Monsieur [R] de ce qu'elle et les enfants avaient quitté la maison le 09 mai 2019, cette affirmation n'est confirmée par aucune pièce justificative. Du reste il résulte d'un courrier du conseil de Madame [O] adressé le 16 juillet 2019 en réponse à une lettre du conseil de Monsieur [R], cette affirmation : 'Madame [O] n'a pas attendu votre courrier pour commencer à vider la maison. La maison sera vidée intégralement pour le 31 juillet 2019". Aussi, il n'en résulte aucunement la preuve de ce que la maison était vidée ni disponible pour le coindivisaire avant le 31 juillet 2019 ni a fortiori le 09 mai 2019.

Dès lors le calcul retenu par le premier juge sera confirmé quant au montant de l'indemnité mensuelle et quant à la période retenue pour cette indemnité. Les contestations soutenues de ce chef par les parties seront rejetées.

IV - Sur les frais et dépens

Eu égard à la solution du litige, les dépens de la présente instance d'appel seront partagés par moitié.

L'équité commande de ne pas prononcer de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant dans les limites de l'appel,

Dit recevable la demande de Monsieur [R] en revendication de meubles et, subsidiairement, en reconnaissance d'une créance de dommages et intérêts,

Confirme en toutes ses dispositions contestées le jugement déféré,

Y ajoutant,

Dit que les dépens de la présente instance d'appel seront partagés par moitié,

Dit n'y avoir lieu à condamnation à une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERELA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 6ème chambre b
Numéro d'arrêt : 21/03248
Date de la décision : 14/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-14;21.03248 ?
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