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13/06/2022 | FRANCE | N°21/07978

France | France, Cour d'appel de Rennes, Contestations honoraires, 13 juin 2022, 21/07978


Contestations Honoraires





ORDONNANCE N°62



N° RG 21/07978 -

N° Portalis DBVL-V-B7F-SKI2













S.E.L.A.R.L. ARTLEX II



C/



S.A.R.L. LE LIBENTER

M. [N] [W]































Copie exécutoire délivrée

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à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

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ORDONNANCE DE TAXE

DU 13 JUIN 2022







Monsieur Fabrice ADAM, Premier Président de chambre, délégué par ordonnance de Monsieur le Premier Président,



GREFFIER :



Madame Juliette VANHERSEL, lors des débats et lors du prononcé



DÉBATS :



A l'audience publique du 02 Mai 2022



ORDONNANCE :



Contradictoire,...

Contestations Honoraires

ORDONNANCE N°62

N° RG 21/07978 -

N° Portalis DBVL-V-B7F-SKI2

S.E.L.A.R.L. ARTLEX II

C/

S.A.R.L. LE LIBENTER

M. [N] [W]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ORDONNANCE DE TAXE

DU 13 JUIN 2022

Monsieur Fabrice ADAM, Premier Président de chambre, délégué par ordonnance de Monsieur le Premier Président,

GREFFIER :

Madame Juliette VANHERSEL, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 02 Mai 2022

ORDONNANCE :

Contradictoire, prononcée à l'audience publique du 13 Juin 2022, par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, date indiquée à l'issue des débats

****

ENTRE :

La S.E.L.A.R.L. ARTLEX II, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Stéphanie PRENEUX de la SELARL BAZILLE, TESSIER, PRENEUX, avocat au barreau de RENNES substituée à l'audience par Me Annaïg COMBE, avocat au barreau de RENNES

ET :

La S.A.R.L. LE LIBENTER, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Pierre-Hector RUSTIQUE, avocat au barreau de BREST

Monsieur [N] [W]

[Adresse 4]

[Localité 2]

comparant en personne assisté de Me Pierre-Hector RUSTIQUE, avocat au barreau de BREST

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

En 2008, la société Le Libenter a fait édifier sur un terrain sis à [Localité 5] (Finistère) appartenant à son associé unique et gérant, M. [N] [W], un hôtel de vingt chambres.

Les travaux ont fait l'objet, en juin 2009, d'une réception avec réserves.

Celles-ci n'ayant pas été reprises, M. [W] et la société Le Libenter ont confié, en 2009, la défense de leurs intérêts à Me Dano, avocat au barreau de Brest, qui a lancé une procédure de référé expertise (ordonnance du 31 août 2009).

Après le décès de Me Dano, M. [W] et la société Le Libenter ont, en septembre 2011, confié leur dossier à Me Muriel Le Fustec, avocate au barreau de Nantes exerçant son activité au sein de la Selarl Artlex II.

L'avocate a assisté ses clients au cours de l'expertise (rapport déposé en juin 2012) puis devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Brest (demandes de provision rejetées) et la cour d'appel de Rennes (arrêt confirmatif du 4 septembre 2014) puis le tribunal de grande instance de Brest, saisi au fond (jugement du 21 mars 2017 faisant partiellement droit à la demande) et la cour d'appel de Rennes (arrêt du 8 octobre 2020, réduisant les indemnisations allouées).

Après négociations, les parties se sont accordées, le 11 octobre 2011, sur les honoraires en ces termes :

«'Nous vous proposons de fixer un honoraire d'un montant forfaitaire de 70'000 euros HT, hors frais et débours, lequel couvrira l'ensemble des diligences que nous serons amenées à réaliser dans le cadre du litige susvisé.

Le payement de cet honoraire interviendra au moment du versement des sommes ou condamnations par le ou les défendeurs, le cabinet étant autorisé à prélever ses honoraires sur les premières sommes versées par les défendeurs dans la limite de 10 % du montant versé.

Pour respecter nos obligations déontologiques interdisant la perception d'un seul honoraire de résultat, dans l'hypothèse sans doute théorique, où aucune indemnisation ne serait versée, nous vous facturerons un honoraire forfaitaire limité à 5'000 euros hors frais et débours'».

Les 7 et 15 décembre 2015, les parties ont convenu de déplafonner l'honoraire et de le porter à la somme de 90'000 euros «'pour tenir compte notamment des deux procédures de référé'». Un second déplafonnement portant le total à la somme de 110'000 euros HT a été accepté le 4 avril 2018 par la cliente pour la procédure d'appel.

Les 15 et 19 janvier 2021, la Selarl Artlex II a adressé à la société Le Libenter deux factures de 90'000 et 20'000 euros HT.

Contestant les honoraires qui leur étaient réclamés, M. [W] et la société Le Libenter ont saisi, par courrier reçu le 9 avril 2021, le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Nantes.

Le bâtonnier a prorogé par décision du 27 juillet 2021 de quatre mois le délai pour statuer.

Par ordonnance du 25 novembre 2021, il a :

- constaté que la convention d'honoraires acceptée en date du 10 octobre 2011 est une convention d'honoraires forfaitaire dans laquelle les parties sont convenues d'un honoraire forfaitaire d'un montant de 70 000 euros HT couvrant l'ensemble des diligences accomplies par la Selarl Artlex II et Me Le Fustec,

- fixé à la somme de 70 000 euros HT le montant des honoraires dus par la société Le Libenter représentée par M. [W] à la Selarl Artlex II représentée par Me Le Fustec,

- constaté que la société Le Libenter représentée par M. [W] n'avait procédé au règlement d'aucune somme,

- condamné la société Le Libenter représentée par M. [W] à payer à la Selarl Artlex II la somme de 70 000 euros au titre de ses honoraires,

- condamné la société Le Libenter représentée par M. [W] à payer à la Selarl Artlex II la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Le Libenter aux dépens incluant les éventuels frais de signification et d'exécution,

- débouté les parties de leurs plus amples demandes.

Par lettre recommandée adressée le 21 décembre 2021, la Selarl Artlex II a formé un recours contre cette décision.

Aux termes de ses dernières écritures (28 avril 2022) développées lors de l'audience, la Selarl Artlex II demande à la cour d'appel de Rennes (sic) de :

- confirmer partiellement la décision du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Nantes du 25 novembre 2021 en ce qu'elle a (condamné la) société Le Libenter représentée par M. [W] à lui payer la somme de 70 000 euros au titre de ses honoraires,

- infirmer la décision du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Nantes du 25 novembre 2021 en ce qu'elle a :

1. constaté que la convention d'honoraires acceptée en date du 10 octobre 2011 est une convention d'honoraires forfaitaire dans laquelle les parties sont convenues d'un honoraire forfaitaire d'un montant de 70 000 euros HT couvrant l'ensemble des diligences qu'elle et Me [D] ont accomplies,

2. fixé à la somme de 70 000 euros HT le montant des honoraires qui lui sont dus par la société Le Libenter représentée par M. [W],

3. débouté les parties de leurs plus amples demandes,

et statuant à nouveau, il est demandé à la cour d'appel de Rennes de :

- condamner solidairement M. [W] et la société Le Libenter à lui verser, sous exécution provisoire, la somme de 132 000 euros TTC en règlement des factures n°2021-051 et 2021-064 restées impayées, le cas échéant, par prélèvement directement sur le compte Carpa du cabinet Artlex II,

- condamner solidairement M. [W] et la société Le Libenter à payer d'une part, des pénalités de retard au taux de la dernière opération de refinancement de la BCE majorées de 10% et d'autre part, l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement de 40 euros par facture impayée soit 80 euros,

- condamner solidairement M. [W] et la société Le Libenter aux entiers dépens ainsi qu'à 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

À l'appui de sa demandes, elle fait valoir que deux avenants ont été acceptés portant le montant de l'honoraire forfaitaire à la somme de 110'000 euros HT sans qu'il n'ait jamais été question de le limiter à 10 % HT des sommes versées, ce pourcentage correspondant à une modalité de payement.

Elle précise qu'elle a accepté la modalité de facturation au forfait pour satisfaire sa cliente, sa pratique étant la facturation au temps passé. Elle précise, en l'occurrence, que si tel avait été le cas, elle aurait facturé sa prestation à la somme de 226'250 euros (905 heures à 250 euros HT/heure).

La société Le Libenter et M. [W] forment un appel incident et nous demandent, aux termes de leurs écritures (19 avril 2022) soutenues lors de l'audience, de :

- dire que la convention du 11/10/2011 est une convention d'honoraires de résultat plafonnée,

- fixer le montant des honoraires dus par l'intimé au cabinet Artlex II à 10% des sommes versées (hors dépens et article 700), dans la limite maximum de 110'000 euros HT,

- leur donner acte du fait qu'ils autorisent expressément le cabinet Artlex II à prélever à son profit la somme de 37'900 euros HT sur les sommes détenues à la Carpa et devant revenir aux intimés,

- condamner le cabinet Artlex II à leur payer 3'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Le Libenter et M. [W] rappellent que si la cour a fixé l'indemnisation revenant au maître de l'ouvrage à la somme de 1'000'000 euros environ, seule une somme de 379'000 (outre 20'000 euros de frais irrépétibles et 80'000 euros de dépens) a été effectivement payée et se trouve bloquée sur le compte Carpa.

Ils font valoir que la première convention qui leur avait été soumise ne prévoyait qu'un honoraire forfaitaire de 70'000 euros HT sans considération du résultat, ce qu'ils ont refusé, raison pour laquelle une clause subordonnant le montant des honoraires au résultat obtenu, dans la limite de 10'% du montant versé, a été ajoutée.

Ils contestent l'interprétation faite par le bâtonnier et soutiennent que leur souhait était que, compte tenu de leurs charges, les honoraires soient réglés en fin de procédure et à proportion du résultat obtenu. Ils précisent que d'ailleurs, les sommes de 70'000, puis de 90'000 et de 110'000 euros ont été considérées comme des plafonds, les honoraires dus étant de 10 % des sommes allouées dans la limite de ces plafonds.

Ils relèvent que l'honoraire forfaitaire fixé est un honoraire de résultat, l'honoraire de diligence étant fixé à la somme de 5'000 euros HT afin d'éviter que la convention soit analysée comme un pacte quota litis et annulée.

Ils considèrent donc que l'honoraire auquel la Selarl Artlex II peut prétendre est égal à 10'% HT des sommes encaissées dans la limite de la somme de 110'000 euros HT.

SUR CE :

Le recours de la Selarl Artlex II, effectué dans les forme et délai de l'article 176 du décret du 27 novembre 1991, est recevable.

Les parties n'ont pas formellement conclu de convention d'honoraires mais il résulte d'un échange de courriels que :

- le 28 septembre 2011, l'avocate a proposé à sa cliente «'un honoraire d'un montant forfaitaire de 70'000 euros HT, hors frais et débours, lequel couvrira l'ensemble des diligences que nous serons amenées à réaliser dans le cadre du litige susvisé.

Le payement de cet honoraire interviendra au moment du versement des sommes ou des condamnations par le ou les défendeurs, le cabinet étant autorisé à prélever ses honoraires sur les premières sommes versées par le ou les défendeurs.

Pour respecter nos obligations déontologiques interdisant la perception d'un seul honoraire de résultat, dans l'hypothèse sans doute théorique, où aucune indemnisation ne serait versée, nous vous facturerons un honoraire forfaitaire limité à 5'000 euros hors frais et débours'»,

- cette proposition a été refusée par la société Le Libenter laquelle prétend, sans être contredite, qu'elle s'est opposée au payement d'un montant forfaitaire sans considération des sommes allouées,

- par courriel du 11 octobre 2011, l'avocate, suite à un entretien téléphonique, a modifié sa proposition initiale en ajoutant les mots «'dans la limite de 10 % du montant versé'» à la fin du deuxième paragraphe rappelé ci-dessus, modification que la cliente a acceptée en contre signant ce message,

- bien qu'il avait été convenu que l'honoraire de résultat stipulé couvrirait l'ensemble des diligences effectuées dans le cadre du dossier, l'avocate a réclamé par courriel du 19'novembre 2014 une facturation complémentaire de 18'750 euros HT à laquelle la société Le Libenter s'est opposée en ces termes suivant courrier non daté (sa pièce n° 3 et pièce n°'Cor 7 de l'appelante) : «'Je fais suite à votre email du 19 novembre et vous avoue ma surprise puisque vous me demandez, même d'une manière échelonnée, de vous régler des honoraires de 18 750 euros pour couvrir, selon vous, des honoraires non inclus dans notre convention d'honoraires de résultat... M. [T] (expert judiciaire) a rendu son rapport le 27 juin 2012 après trois ans d'investigations soit neuf mois après avoir signé avec votre cabinet la convention d'honoraires de résultat. C'est à partir du 27 juin 2012, un peu dans l'euphorie due à la teneur du rapport, que vous m'avez proposé d'assigner le groupement de maîtrise d''uvre en référé provision... Je réfute donc le fait que ce soit moi qui vous ait demandé formellement d'assigner en référé provision. Nous avons d'ailleurs déjà évoqué ce point au téléphone et vous l'aviez reconnu en me disant textuellement "'on vous a proposé d'assigner en référé provision et vous avez accepté'". Le même mécanisme s'est répété pour l'appel de ce référé puisque nous n'avions obtenu aucune provision. En revanche, la seule chose que je vous ai expressément demandé était d'assigner mes adversaires sur le fond le plus vite possible... C'est dans ce contexte que vous me demandez 18'750 euros HT d'honoraires pour couvrir des honoraires hors procédure au fond visiblement. Or, la convention d'honoraires de résultat ne limite pas notre accord à la seule procédure au fond mais couvre "'l'ensemble des diligences que nous serons amenés à réaliser dans le cadre du litige vous opposant à Messieurs [I] et autres'".. Si cette procédure comme les autres démarches que vous listez avaient été hors convention d'honoraires de résultat, il aurait fallu que vous m'en informiez dans ce cas en amont... Aujourd'hui, je suis dans la situation que je pensais précisément éviter en signant votre CHR (convention d'honoraires de résultat) à savoir que je suis soumis a posteriori à une comptabilité aléatoire d'honoraires. C'est pour tous les motifs évoqués précédemment que je ne peux accepter votre proposition... Néanmoins, et même si je pense que les démarches que vous listez font partie de la CHR, je souhaiterais trouver avec vous un accord qui nous satisferait tous les deux. Je vous propose de déplafonner la CHR à hauteur d'une somme supplémentaire de 20'000 euros soit un total de 90'000 euros HT...'»,

- en réponse à ce courrier, la société Artlex II a adressé le 7 décembre 2015 à la société Le Libenter et à M. [W] un avenant à la convention d'honoraires reprenant les termes de sa convention du 28 septembre 2011 sauf à porter le montant de l'honoraire de résultat à la somme de 90 000 euros HT,

- la société Le Libenter a refusé par lettre du 15 décembre 2015 de signer cet avenant au motif que «'ce projet consiste à revoir entièrement l'accord de vos honoraires que nous avons conclu non pas d'ailleurs le 28 septembre 2011 mais le 11 octobre 2011... Aussi, et pour respecter chacun notre accord, je vous propose uniquement de réactualiser notre convention d'honoraires du 11 octobre 2011 en déplafonnant votre honoraire de résultat pour le fixer à 90 000 euros (70 000 + 20 000) sans modifier le reste...'», proposition qu'il a réitérée par courriel du 21 juin 2016,

- le 3 avril 2018, afin de tenir compte de son intervention devant la cour d'appel, la société Artlex II a, à la suite d'échange téléphonique, «'proposé de maintenir les termes de notre proposition d'honoraires et de majorer de 20'000 euros HT le montant des honoraires qui nous reviendrait en cas de succès de la procédure, qui s'élèverait alors à 110 000 euros HT'»,

- proposition à laquelle la société Le Libenter a, le 4 avril 2018, donné suite en ces termes : «'j'accepte votre proportion, à savoir 10 % des indemnités perçues dans la limite de 110'000 euros HT'» (cf pièce n° cor 2 de l'appelante),

cet échange caractérisant un accord des parties valant convention d'honoraires (dont il convient de rappeler que cette convention n'est soumise à aucune forme particulière).

Après le prononcé de l'arrêt de la cour, la société Artlex II a, les 15 et 19 janvier 2021, adressé à la société Le Libenter deux factures d'honoraires libellées ainsi :

- notre assistance en matière de contentieux commercial dans le cadre de la procédure de référé et devant le tribunal de grande instance de Brest : 90'000 euros HT soit 108'000 euros TTC,

- notre assistance en matière de contentieux commercial dans le cadre de la procédure devant la cour d'appel de Rennes : 20'000 euros HT soit 24'000 euros TTC.

La mission de l'avocat ayant été conduite à son terme, il convient de faire application de l'accord des parties tenant lieu de convention d'honoraires tel que modifié par les deux avenants qui ont suivi. Le calcul de ce que l'avocat aurait facturé en l'absence de convention est dès lors sans intérêt.

En premier lieu et contrairement à ce qu'a retenu le bâtonnier, la convention conclue par les parties est bien une convention d'honoraires de résultat, prévoyant qu'en cas d'échec de la procédure ne serait dû qu'un honoraire de diligences de 5'000 euros HT et, en cas de succès, en l'occurrence subordonné à l'obtention et au versement d'indemnités, un honoraire de résultat, dont seule l'assiette est discutée, incluant ' ce que les parties ont admis à l'audience ' l'honoraire de diligences de 5'000 euros HT.

Si cet ensemble contractuel (convention et avenants) prévoit un honoraire de 110'000 euros HT (et non deux honoraires de 90'000 et de 20'000 euros HT comme facturé), les parties divergent sur le point de savoir si cette somme est due globalement et forfaitairement, ce que prétend l'avocate ou si, au contraire et comme le soutient la cliente, elle constitue un plafond, l'honoraire de résultat versé étant fonction des sommes effectivement encaissées dans la limite du plafond stipulé.

Il convient, à cet égard, de rechercher qu'elle a été la commune intention des parties. Préalablement, il semble utile de rappeler que les prétentions de la société Le Libenter et de M.'[W] étaient très importantes puisque l'expert judiciaire préconisait la démolition et la reconstruction de l'hôtel et évaluait le préjudice global des intéressés à plus de 2'500'000 euros, que le tribunal de Brest a alloué aux demandeurs une somme de l'ordre de 2'000'000 euros, somme que la cour a réduite de moitié et sur laquelle seul un tiers environ (379'000 euros) a été, à ce jour, effectivement recouvrée, ce en raison des aléas de la vie économique et plus particulièrement des procédures collectives qui ont été ouvertes.

La position de la Selarl Artlex II, qui revendique d'ores et déjà la totalité de l'honoraire de résultat stipulé, revient à appliquer les projets de conventions d'honoraires des 28 septembre 2011 et 7 décembre 2015 que la société Le Libenter et son gérant ont expressément refusés à deux reprises au profit d'un honoraire calculé en fonction des sommes versées, raison pour laquelle la convention initiale a été complétée, l'avocate acceptant d'ajouter le 11 octobre 2011, en réponse au souhait de son client, la phrase «'dans la limite de 10 % du montant versé'» à la fin du paragraphe concernant le payement de l'honoraire.

Dans ses différents échanges ultérieurs avec l'avocate, M.'[W] a d'ailleurs toujours clairement indiqué que le montant forfaitaire constituait, pour lui, un plafond et systématiquement proposé à son conseil un déplafonnement (contrairement à ce que l'avocate expose, non sans une certaine mauvaise foi, en page 15 de ses écritures : «'il ne fait lui même allusion à aucun plafond, mais bien à un montant forfaitaire exprimé en valeur absolue'»).

Il sera relevé que cette dernière n'a jamais contesté dans ses courriels en réponse l'emploi de ce terme.

Si la société Artlex II prétend qu'il ne s'agit là que d'une simple modalité de payement, force est de constater qu'en réclamant d'ores et déjà la somme de 110'000 euros HT alors que la totalité de la créance n'est pas recouvrée, elle méconnaît cette modalité.

En effet, il n'est pas contesté qu'à ce jour, seule une somme de 379'000 euros à laquelle il convient d'ajouter les sommes de 20'000 euros (allouée au titre des frais irrépétibles) et de 80'000 euros (correspondant aux dépens dont frais d'expertise), soit en tout la somme de 479'000 euros a été versée, étant à cet égard observé que la convention liant les parties ne distingue pas entre ces sommes qu'il convient donc de les prendre toutes en compte.

S'agissant du premier versement effectué, la société Artlex II est fondée, conformément à l'accord des parties, à percevoir sur cette somme, un acompte sur l'honoraire de résultat de 47'900 euros HT soit 57'480 euros TTC, puis sur chaque nouveau versement un acompte de 10 % HT jusqu'à atteindre, mais dans la seule mesure des payements effectués par les débiteurs, la somme de 110'000 euros HT.

Les sommes réclamées par la société Artlex II dans ses factures étant pour l'essentiel injustifiées, les demandes annexes (pénalités de retard et indemnités forfaitaires de recouvrement) de cette sociétés seront rejetées.

L'ordonnance du bâtonnier qui a alloué à la société Artlex II un honoraire de 70 000 euros HT sera infirmée.

Echouant en ses prétentions, la société Artlex II sera condamnée aux dépens.

Les circonstances de l'espèce ne justifient pas l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Statuant par ordonnance rendue publiquement et contradictoirement :

INFIRMONS l'ordonnance du bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Nantes rendue le 25 novembre 2021 dans le dossier Société Le Libenter / Selarl Artlex II.

Statuant à nouveau :

Au regard des sommes à ce jour versées, DISONS que la Selarl Artlex II est fondée à percevoir un acompte sur l'honoraire de résultat auquel elle peut prétendre de 47'900 euros HT soit 57'480 euros TTC.

CONDAMNONS la société Le Libenter à payer cette somme à la Selarl Artlex II (par prélèvement sur les sommes bloquées en compte CARPA).

DISONS que la Selarl Artlex II sera fondée à percevoir sur chaque versement effectué en exécution de l'arrêt rendu le 8 octobre 2020 par la cour d'appel de Rennes un acompte complémentaire de 10 % HT, jusqu'à atteindre la somme de 110'000 euros HT.

DÉBOUTONS la Selarl Artlex II du surplus de sa demande et de ses autres prétentions.

CONDAMNONS la Selarl Artlex II aux dépens.

REJETONS les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Contestations honoraires
Numéro d'arrêt : 21/07978
Date de la décision : 13/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-13;21.07978 ?
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