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09/06/2022 | FRANCE | N°20/03216

France | France, Cour d'appel de Rennes, 4ème chambre, 09 juin 2022, 20/03216


4ème Chambre





ARRÊT N°219



N° RG 20/03216

N°Portalis DBVL-V-B7E-QYL5





















Copie exécutoire délivrée



le :



à :







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 09 JUIN 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, Présidente de chambre,

Assesse

ur : Madame Hélène RAULINE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Nathalie MALARDEL, Conseillère,



GREFFIER :



Madame Françoise BERNARD, lors des débats et Madame Juliette VANHERSEL lors du prononcé





DÉBATS :



A l'audience publique du 08 Mars 2022, devant Madam...

4ème Chambre

ARRÊT N°219

N° RG 20/03216

N°Portalis DBVL-V-B7E-QYL5

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 09 JUIN 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Hélène RAULINE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Nathalie MALARDEL, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Françoise BERNARD, lors des débats et Madame Juliette VANHERSEL lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 08 Mars 2022, devant Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, magistrat rapporteur, tenant seule l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Rendu par défaut, prononcé publiquement le 09 juin 2022 par mise à disposition au greffe, après prorogations du 12 mai 2022, date indiquée à l'issue des débats, et du 24 mai 2022

****

APPELANT :

Monsieur [U], [M], [B] [D]

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représenté par Me Sylvia DUBOIS-STERLING, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

Représenté par Me Denise LAURENT-CALLAME de la SELARL SEL LAURENT-CALLAME & ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de SAINT-MALO

INTIMÉS :

Monsieur [S] [V]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Assigné le 15 septembre 2020 à domicile

S.A.R.L. ELECTRICITE PLOMBERIE REHEL EPR

[Adresse 5]

[Localité 3]

Assignée le 15 septembre 2020 : PV de recherches infructueuses (art 659 du CPC)

****

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [D] a chargé la société Reve Emeraude le 23 avril 2012 de la maîtrise d'oeuvre de la rénovation d'une maison lui appartenant à [Adresse 7].

Le lot plâtrerie-isolation a été confié à l'Entreprise Collong [S] et les lots démolition, électricité, chauffage et plomberie à la société EPR.

Le 5 mai 2015, M. [D] a signé un 'constat de réception' émis par le maître d'oeuvre, relatif aux lots exécutés par la société EPR, en mentionnant des réserves.

Par acte du 29 avril 2015, M. [V] agissant comme ancien gérant de l'entreprise Collong [S] a fait assigner M. [D] devant le tribunal de grande instance de St Malo en paiement d'un solde de travaux de 10 393,98 euros outre des dommages et intérêts et une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 4 septembre 2015, la société EPR a fait délivrer une assignation à M. [D] en paiement de la somme de 14 548 euros au titre solde des travaux.

Par acte du 12 février 2016, M. [D] a appelé à l'instance la société Reve Emeraude.

Par ordonnance du 12 janvier 2017, le juge de la mise en état a ordonné une expertise confiée à M. [L] qui a déposé son rapport le 9 novembre 2017.

Par un jugement assorti de l'exécution provisoire en date du 4 mai 2020, le tribunal judiciaire de Saint-Malo a :

- déclaré M. [V] recevable et partiellement fondé en son action,

-condamné M. [D] à lui verser la somme de 8 384,79 euros TTC correspondant au solde de la prestation exécutée par l'entreprise Collong [S] Plâtrier, facturée le 30 avril 2013, avec intérêts au taux légal à compter du 29 avril 2015,

-débouté M. [V] du surplus de sa demande de dommages et intérêts et de frais irrépétibles contre M. [D],

- débouté M. [V] de l'ensemble de ses demandes contre la société Reve Emeraude,

- déclaré la société EPR partiellement recevable en son action en paiement,

- déclaré prescrite la facture du 8 août 2013,

- condamné M. [D] à lui verser la somme de 1 451,31 euros solde de la facture du 7 septembre 2013, avec intérêts au taux légal à compter du 4 septembre 2015,

- débouté la société EPR du surplus de ses demandes, contre M. [D] et contre la société Reve Emeraude,

- reçu M. [D] en ses demandes reconventionnelles ,

- débouté M. [D] de ses demandes contre M. [V] et la société EPR,

- condamné la société Rêve Emeraude à lui verser la somme de 8 000 euros en application de l'article 1231-1 du code civil, outre la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté M. [D] du surplus de ses demandes ;

- reçu la société Rêve Emeraude en ses appels en garantie ;

- déclaré ses appels en garantie non fondés ;

En conséquence,

- débouté la société Rêve Emeraude des demandes formées à l'encontre de M. [V] et de la société EPR ;

- dit que la société Rêve Emeraude supportera les dépens de l'instance.

M. [D] a interjeté appel de ce jugement, en intimant la société EPR et M. [V].

Dans ses dernières conclusions en date du 14 septembre 2020, au visa des articles 122 du code de procédure civile, 1217, 1231-1 du code civil, L218-2 du code de la consommation, M. [D] demande à la cour de :

- le recevoir en son appel ;

Y faisant droit,

- infirmer le jugement;

Statuant à nouveau,

A titre liminaire,

- juger que la demande en paiement de M. [V] intervenant pour le compte d'une entreprise non représentée, à savoir la société Cyrile Collong Plâtrerie est irrecevable faute de qualité à agir

En conséquence,

- débouter M. [V] de toutes ses demandes, fins et prétentions ;

En tout état de cause,

- juger que la demande en paiement de la société EPR au titre de la facture du 8 août 2013 est prescrite ;

- juger que la demande en paiement de l'entreprise [S] Collong Plâtrerie au titre de la facture du 20 octobre 2012 et de celle du 12 mars 2013 est prescrite ;

A titre subsidiaire,

- juger que les demandes en paiement de la société EPR et de l'entreprise Cyrile Collong Plâtrerie ne sont pas justifiées, et étant infondées sont irrecevables à paiement ;

- constater que l'entreprise Cyrile Collong Plâtrerie a commis des erreurs de facturation rendant irrécouvrable et infondées les factures émises et dont le règlement est sollicité ;

- dire que les montants sollicités par l'entreprise Cyrile Collong Plâtrerie pour l'intégralité du chantier ne peuvent être alloués, tandis que le chantier n'a pas été achevé ;

- réduire le montant des factures sollicités par l'entreprise Cyrile Collong Plâtrerie et, au besoin, ordonner répétition de l'indu à M. [D] ;

- juger que la facture de la société EPR du 7 septembre 2013 est indue ;

En tout état de cause,

- condamner solidairement M. [V] et la société EPR à verser à M. [D] la somme de 5 000 euros au titre de la réparation de son préjudice de jouissance ;

- condamner la société EPR à lui verser la somme de 5 671,88 euros au titre des travaux chiffrés par l'expert demeurant à être exécutés par un concurrent, du fait de l'abandon de chantier de la société EPR ;

- condamner solidairement M. [V] et la société EPR au paiement de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-exécution des travaux prévus et facturés ;

- condamner solidairement les mêmes au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de la réparation du retard d'exécution du chantier de 1 an et 4 mois ;

- condamner solidairement les mêmes au paiement de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

M. [D] a signifié sa déclaration d'appel et ses conclusions par actes d'huissier du 15 septembre 2020, acte délivré à personne en ce qui concerne M. [V] et selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile s'agissant de la société EPR. Ces parties n'ont pas constitué avocat.

L'instruction a été clôturée le 1er février 2022.

MOTIFS

En application de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée. Il s'en déduit qu'en appel, la cour ne fait droit aux prétentions de l'appelant qu'après avoir examiné au vu des moyens d'appel la pertinence des motifs par lesquels le premier juge s'est déterminé.

Sur la qualité à agir de M. [V]

M. [D] fait observer que M. [V] n'a jamais justifié de sa qualité ni de son intérêt à agir au nom ou pour le compte de l'entreprise Collong [S] Plâtrier alors que cette société est gérée par M. [C] [K], que M. [V] a indiqué en être l'ancien gérant.

Or, les pièces produites aux débats émanant de cette entreprise démontrent qu'il ne s'agit pas d'une société mais d'un fonds artisanal, ce dont témoigne la mention de son inscription au registre des métiers des Côtes d'Armor (RM 22). Elle n'est donc pas représentée par un gérant et la dénomination Entreprise Collong [S] est uniquement une désignation commerciale.

M. [D] ne produit pas de pièces corroborant que cette entreprise à la date des travaux était exploitée par M. [K]. De plus, la mention manuscrite de l'appelant sur la facture du 15 mars 2013 (pièce 18) selon laquelle M. [V] n'avait pas réalisé des travaux de finition ainsi que les échanges du maître d'oeuvre, de la société Reve Emeraude et de M .[D] (pièces 1 à 10), qui se réfèrent à M. [V] comme responsable de cette entreprise, établissent que celui-ci était en charge des travaux de plâtrerie. Il s'en déduit que sa qualité à solliciter le paiement du solde des travaux est établie. Cette fin de non recevoir ne peut être accueillie.

Sur la prescription des demandes en paiement

Se fondant sur l'article L 218-2 du code de la consommation qui fixe à deux ans le délai de prescription des actions des professionnels à l'encontre des consommateurs pour obtenir paiement de leurs travaux, l'appelant rappelle que les assignations en paiement lui ont été délivrées le 29 avril 2015 par M. [V] et le 4 septembre suivant par la société EPR, que les factures antérieures respectivement au 28 avril 2013 et 3 septembre suivant sont en conséquence prescrites. Il estime que si le tribunal a justement estimé que la facture de la société EPR du 8 août 2013 d'un montant de 12 947 euros était prescrite, il en est de même de la facture de M. [V] du 20 octobre 2012 et de celle du 12 mars 2013.

Le jugement qui a déclaré prescrite la demande en paiement par la société EPR de sa facture du 8 août 2013 est définitif. M. [D] ne le remet pas en cause en ce qu'il a déclaré que la facture de cette société du 7 septembre 2013 ne l'était pas.

S'agissant de la prescription de la demande de M. [V], il est constant que le délai de deux ans applicable court à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'agir. Son point de départ se situe à la date d'achèvement des travaux. A cet égard, le tribunal a rappelé qu'il n'était pas discuté par les parties que les travaux de plâtrerie étaient achevés en avril 2013. Les échanges de M. [D] et du maître d'oeuvre à cette époque ne font pas état de travaux restant à exécuter. Il en a justement déduit que le point de départ du délai de prescription de deux ans du solde des travaux devait être fixé au 30 avril 2013, aucune intervention ultérieure de M. [V] sur le site ne résultant des pièces produites. Le délai de deux ans pour agir a été régulièrement interrompu par l'assignation en paiement délivrée à l'appelant le 29 avril 2015. En conséquence la prescription de l'action de M. [V] n'est pas acquise. Le jugement est confirmé.

Sur le montant des soldes des travaux

Sur le solde dû à M. [V]

M. [D] relève que M. [V] a commis des erreurs puisque, dans sa facture du 10 octobre 2012, il a appliqué la TVA sur une somme qui était déjà calculée TTC, puis majoré sans explication le montant de sorte que le coût de 22 237,87 euros TTC est devenu 30 316,37 euros TTC. Il observe que la facture du 30 avril 2013 est également erronée à hauteur de 128,40 euros. Il en déduit que ces documents sont dépourvues de fiabilité. Il ajoute que les travaux n'ont jamais été réceptionnés et que les prestations facturées ne sont pas dues en l'absence de leur exécution complète suite à l'abandon du chantier par M. [V] alors qu'il avait déjà été réglé de la somme de 25 242,43 euros. Il fait observer que l'expert a clairement indiqué que le montant des prestations facturées était excessif et lui fait grief de ne pas avoir tiré les conséquences sur le montant des travaux des désordres sous forme de fissures qu'il a constatés et qui se sont aggravés.

Il résulte des pièces produites que M. [V] était chargé des travaux de plâtrerie (22 237,87 euros) et d'isolation (8 014,30 euros), de retrait de plâtre au sous-sol (654,84 euros), de travaux de destruction de carrelage et de chape (2 364,70 euros), ce qui représente un montant total de 33 271,71 euros TTC. Le montant des travaux facturés retenu par le tribunal est de 31 262,52 euros montant qui doit être seul pris en compte en l'absence d'appel incident sur ce point.

Il est manifeste que la facture relative au devis principal du 20 octobre 2012 comporte une erreur de calcul puisque la TVA a été appliquée deux fois sur le montant hors taxe et que le total TTC de 30 316,37 euros ne correspond pas à l'addition des sommes mentionnées sur ce document. Toutefois, cette erreur est corrigée dans la facture émise le 10 mars 2013.

Si M. [D] indique dans ses écritures que le montant facturé retenu par l'expert est de 30 316,37 euros, cette somme n'est pas mentionnée dans le rapport d'expertise et ne résulte d'aucune réponse à un dire. L'expert, dans le cadre de l'apurement des comptes, a seulement indiqué sur la base d'un dire du conseil de M. [V] que restaient impayés deux acomptes de 4 393,98 euros et 6 000 euros.

Les travaux confiés à M. [V] n'ont pas été réceptionnés, comme l'indique M. [D] en page 2 de ses écritures. En effet, l'appelant verse aux débats un document intitulé 'constat de réception des travaux' daté du 12 avril 2014 au recto et qui porte mention d'une réception différée de 15 jours avec indication à titre de réserves d'un briquetage non terminé au niveau du tableau EDF et de fissures apparentes, cette page n'est pas signée. Ce document est daté du 5 mai 2015 au verso avec les mêmes réserves émises par le maître de l'ouvrage sans qu'il soit établi que l'entreprise concernée avait été convoquée à une réception contradictoire qui seule répond aux exigences de l'article 1792-6 du code civil.

Si l'expert fait mention d'un abandon de chantier, il n'est fourni aucune explication sur les circonstances de cet abandon. Il impute majoritairement la responsabilité de cette situation au maître d'oeuvre qui n'a pas établi de marchés de travaux sur la base de devis clairs, ni rédigé de comptes rendus de chantier et aux entreprises qui ont accepté cette situation, ce qui a généré des incompréhensions entre les parties.

Toutefois, il ne caractérise pas d'inachèvements de la part de M. [V], ni de désordres affectant ses travaux de plâtrerie lors de sa visite des lieux en juillet 2017. Sur ce point, l'appelant ne justifie d'aucun dire à l'expert critiquant cette position alors qu'un pré-rapport a été soumis aux parties. Le rapport d'expertise en page 16 mentionne en effet uniquement des dires émanant des deux constructeurs.

Dans ces conditions, l'inachèvement et les désordres invoqués par l'appelant ne peuvent justifier le rejet de la demande en paiement.

De la même façon, si l'expert a estimé que les prestations facturées étaient d'un coût excessif, cette affirmation n'est corroborée par aucun devis relatif à des travaux identiques ou même par une évaluation à dire d'expert du montant qu'il estimait injustifié. M. [D] ne fournit pas plus d'élément comparatif et, en outre, le coût de ces prestations a été contractualisé entre les parties. L'appelant ne justifie d'aucune remarque sur ce point, ni de la part du maître d'oeuvre qui était destinataire de l'ensemble des éléments financiers, comme le rappelle son mail du 11 juillet 2013.

Contrairement à ce que prétend l'appelant, les règlements par chèque dont il justifie représentent non pas un montant de 25 242,43 euros mais seulement la somme de 22 877,73 euros. En conséquence le jugement qui a mis à sa charge un solde de 8 384,79 euros avec intérêts au taux légal à compter du 29 avril 2015 sera confirmé.

Sur le solde dû à la société EPR

M. [D] estime que le tribunal ne pouvait mettre à sa charge le solde de la facture du 7 septembre 2013 à hauteur de 1 451,31 euros après déduction du coût de reprise des volets roulants de 150 euros alors que l'expert a constaté que des travaux restaient à effectuer, notamment l'installation du receveur de douches avec étanchéité au premier étage dont le coût a été estimé à 5 671,88 euros.

Il ajoute que l'exigibilité de cette facture n'est pas démontrée puisque le maître d'oeuvre avait indiqué que la société EPR devait modifier son devis, ce qu'elle n'a jamais fait et qu'en tout état de cause, il avait précisé que la facture ne concordait pas les travaux réalisés puisque les éléments de salle de bains n'étaient pas adaptés, puis avait précisé le 26 août 2014 que toutes les sommes dues avaient été réglées.

M. [D] ne produit pas aux débats la facture du 7 septembre 2013 d'un montant de 1 601,31 euros TTC qui a été cependant examinée par le tribunal et l'expert, lequel a précisé avoir obtenu l'ensemble des pièces.

S'agissant de la prestation accomplie par la société EPR, l'expert a constaté qu'elle avait quitté le chantier en raison d'un différend avec le maître d'oeuvre, dont les mails de la société Reve Emeraude en réponse aux interrogations de M. [D] relatives à l'avancement de la maison (pièces 105, 107,110) apportent la preuve. Toutefois, nonobstant cette situation de conflit, la société demeurait tenue à l'égard du maître d'ouvrage d'exécuter les travaux commandés exempts de défauts.

Le mail du maître d'oeuvre du 18 mars 2013 démontre qu'un nouveau chiffrage des travaux avait été demandé à la société EPR, qui n'a pas été réalisé. Celui qu'il a adressé à l'entreprise le 16 août 2013 met en évidence que la cabine de douches livrée n'était pas adaptée à la salle d'eau et a dû être reprise par la société, ce que corroborent les indications de l'expert. Si ce dernier fait état de ce que l'entreprise a estimé que le sol constitué d'un plancher en bois ne pouvait recevoir un receveur de douches sans étanchéité, il lui appartenait d'en faire l'observation au maître d'ouvrage ou à tout le moins au maître d'oeuvre et de soumette une solution alternative à valider, ne pouvant se contenter de laisser cette prestation inachevée.

L'expert a, en outre, confirmé que les travaux d'électricité étaient également inachevés puisque cinq volets roulants électriques n'étaient pas raccordés à l'alimentation électrique.

Au regard de l'ensemble de ces éléments qui témoignent de ce que le montant des prestations devait être revu et que des travaux à la charge de la société n'avaient pas été exécutés, le solde d'un montant de 1 451,31 euros après déduction du coût de branchement des volets roulants (150 euros ) n'est pas justifié. Le jugement qui a accordé cette somme à la société EPR est réformé et celle-ci est déboutée de sa demande.

Sur les demandes de M. [D] au titre des inexécutions contractuelles

M. [D], se fondant sur les articles 1217 et 1231-1 du code civil, demande la condamnation de la société EPR à lui verser la somme de 5 671,88 euros, montant évalué par l'expert des travaux d'achèvement de la douche.

Il sollicite la condamnation de M. [V] et de la société EPR à lui verser 5 000 euros en réparation de son préjudice de jouissance, 2 000 euros au titre de la non exécution des travaux prévus et facturés et 5 000 euros à l'encontre de la société EPR seule en réparation du retard d'exécution.

Les conventions liant les parties datant de 2012, les demandes de M. [D] seront examinées au regard des dispositions des articles 1147 et 1184 du code civil dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.

Sur le préjudice lié à l'inachèvement des travaux

Il a été jugé que la preuve de l'inachèvement des travaux confiés par M. [V] n'est pas rapportée. Les demandes indemnitaires de M. [D] à son encontre à ce titre ne peuvent être accueillies.

La société EPR, comme l'a rappelé l'expert, a abandonné le chantier sans avoir posé la douche prévue dans la salle de bains au premier étage, ce qui constitue un manquement de sa part aux obligations souscrites envers le maître de l'ouvrage. Du fait de cette inexécution, M. [D] se trouve contraint de faire exécuter ces travaux par une autre entreprise pour un montant évalué par l'expert à 5 671,88 euros TTC. L'appelant sollicite la condamnation de la société à lui régler cette somme, demande qui n'a pas été examinée par le premier juge. Toutefois, cette prétention est sans lien de causalité avec le manquement du constructeur dès lors qu'il n'a pas facturé les travaux non exécutés.

M. [D] demande également une indemnisation complémentaire de 2 000 euros sans expliciter la nature et l'étendue du préjudice concerné par cette prétention, qui sera également rejetée.

Sur le préjudice lié au retard des travaux

L'appelant présente sa demande d'indemnisation contre la société EPR en précisant que l'opération de rénovation devait être achevée le 23 avril 2013 et que le chantier a pris plus de 16 mois de retard du fait de la résistance du constructeur.

Il ne résulte d'aucune pièce qu'un planning général des travaux avait été contractualisé avec les constructeurs fixant la fin des travaux au 23 avril 2013, ni qu'avait été déterminé un phasage des interventions des différentes entreprises pour exécuter leurs lots respectifs. La durée théorique des travaux de la société EPR n'est justifiée par aucune pièce.

Les échanges entre le maître d'oeuvre et M. [D] révèlent que les travaux à exécuter sur l'extérieur de l'immeuble (couverture, ouvertures, menuiseries extérieures) ne pouvaient être effectués sans avoir obtenu le permis de construire qui n'a pas été délivré avant début juin 2012.Au surplus, il résulte de ces mêmes mails que le chantier a été bloqué trois semaines à la demande de la mairie et que des difficultés ont été rencontrées avec d'autres entreprises (fourniture des menuiseries extérieures, renégociations de certains devis, commande de l'électroménager, exécution des parquets) et le maître d'oeuvre désorganisant le bon déroulement du chantier. Le retard invoqué de plus d'un an ne peut donc être imputé à la société EPR. Cette demande est rejetée.

Sur le préjudice de jouissance

M. [D] relève que l'expert a estimé que les deux entreprises avaient commis une faute en ne régularisant aucun document contractuel ni procédé à aucun compte rendu de chantier.

Il considère que le tribunal ne pouvait rejeter sa demande alors que le défaut de fonctionnement des volets roulants comme l'absence d'installation de la douche ont généré un inconfort dans l'utilisation des lieux pour les occupants et donc un préjudice de jouissance.

La circonstance que les entreprises aient exécuté les travaux sans qu'un marché ait été signé avec le maître d'ouvrage a majoré le risque de discussion ultérieure sur l'étendue des travaux commandés, exécutés et sur leur coût, faute d'un document fixant les prestations négociées. Cependant, elle ne permet pas de caractériser une faute de la part des constructeurs puisque le contrat de louage d'ouvrage n'est soumis à aucune forme particulière. En tout état de cause, la mise au point des marchés incombait au maître d'oeuvre comme la rédaction de comptes rendus de chantier dans le cadre de la phase d'exécution des travaux. Cet argument ne peut être suivi, ce d'autant qu'il n'a aucun lien de causalité avec le préjudice invoqué par le maître d'ouvrage.

Les éléments techniques invoqués par M. [D] au soutien d'un préjudice de jouissance sont uniquement liés au défaut d'exécution de prestations confiées à la société EPR. La demande contre M. [V] est donc rejetée.

L'appelant ne discute pas qu'il a pris possession de la maison en août 2013, laquelle ne constitue pas sa résidence principale puisqu'il vit en région parisienne. A compter de son entrée dans les lieux, cinq des volets roulants électriques ne pouvaient être utilisés, ni une des douches qui n'était pas achevée. Cette situation a certes perturbé la jouissance des lieux mais de façon limitée puisque le tribunal a constaté sans être contredit que l'immeuble disposait de deux autres salles de bains. Dans ces conditions, il sera accordé à M. [D] une somme de 1 000 euros en réparation de ce préjudice, mise à la charge de la société EPR. Le jugement est réformé sur ce point.

Sur les demandes annexes

La société EPR sera condamnée à verser à M. [D] une indemnité de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel. Elle supportera les dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par défaut, dans les limites de l'appel,

CONFIRME le jugement sauf en ce qu'il a condamné M. [D] à verser à la société EPR la somme de 1 451,31 euros TTC au titre du solde des travaux et rejeté sa demande contre cette société au titre de son préjudice de jouissance,

Statuant à nouveau,

DÉBOUTE la société EPR de sa demande en paiement du solde des travaux facturés le 7 septembre 2013,

CONDAMNE la société EPR à verser à M. [D] la somme de 1 000 euros en indemnisation de son préjudice de jouissance,

Y ajoutant,

CONDAMNE la société EPR à verser à M. [D] une indemnité de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel et à supporter les dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20/03216
Date de la décision : 09/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-09;20.03216 ?
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