7ème Ch Prud'homale
ARRÊT N°342/2022
N° RG 19/03689 - N° Portalis DBVL-V-B7D-P2LE
M. [Y] [D]
C/
Association MAISON FAMILIALE RURALE DE JANZE
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 02 JUIN 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Benoît HOLLEAUX, Président de chambre,
Assesseur : Madame Isabelle CHARPENTIER, Conseillère,
Assesseur : Madame Liliane LE MERLUS, Conseillère,
GREFFIER :
Madame Françoise DELAUNAY, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 29 Mars 2022 devant Madame Isabelle CHARPENTIER, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial
En présence de Monsieur [N], médiateur judiciaire
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 02 Juin 2022 par mise à disposition au greffe, date à laquelle a été prorogé le délibéré initialement fixé au 19 Mai 2022
****
APPELANT :
Monsieur [Y] [D]
né le 05 Juillet 1973 à NANTES (44000)
4 rue André Malraux
44130 BLAIN
Représenté par Me Grégory NAUD de la SELARL AVOXA NANTES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES substitué par Me Elise TRUCHELUT, avocat au barreau de NANTES
INTIMÉE :
Association MAISON FAMILIALE RURALE DE JANZE
La Jaroussaye, 41 rue du Bois Rougé
35150 JANZE
Représentée par Me Lara BAKHOS de la SELEURL PAGES - BAKHOS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES substituée par Me LE ROY, avocat au barreau de RENNES
EXPOSÉ DU LITIGE
Monsieur [Y] [D] a été embauché par l'association MAISON FAMILIALE ET RURALE de JANZE en qualité de directeur suivant contrat à effet du 16 août 2002 ; par une lettre recommandée du 27 mars 2014, il a fait l'objet d'une mise à pied à titre conservatoire, puis a été licencié pour faute grave le 17 avril 2014.
Contestant son licenciement et estimant ne pas avoir été rempli de ses droits, Monsieur [D] a saisi le Conseil de prud'hommes de Rennes le 29 juillet 2014 afin de le voir, selon le dernier état de sa demande, fixer la moyenne mensuelle brute de ses salaires à la somme de 4.336.76 € brut et condamner son employeur, sous le bénéfice de l'exécution provisoire et avec la capitalisation des intérêts, au paiement des sommes suivantes :
- à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse : 104.082,24 € Net,
- au titre du rappel de salaire et congés payés sur mise à pied conservatoire : 2.605,33 € Brut et 260,53 € Brut,
- au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et congés payés sur préavis: 8.673,52 € Brut et 867,35 € Brut,
- au titre de l'indemnité de licenciement : 13.040,13 € Net
- au titre de l'article 700 du code de procédure civile : 2'000 €, outre les dépens.
La défenderesse s'opposait aux prétentions du demandeur dont elle sollicitait la condamnation à'lui payer la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement rendu le 7 mai 2019, le Conseil des prud'hommes de Rennes statuait ainsi qu'il suit':
« Dit et juge que le licenciement pour faute grave de M. [D] par l'association MAISON FAMILIALE ET RURALE DE JANZE est fondé ;
Déboute M. [D] de toutes ses demandes';
Condamne M. [D] à payer à l'association MAISON FAMILIALE ET RURALE DE JANZE une somme de 500 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Le condamne aux entiers dépens, y compris les frais éventuels d'exécution.'»
Suivant déclaration de son avocat en date du 6 juin 2019 au greffe de la Cour d'appel, Monsieur [D] faisait appel de la décision.
Aux termes des écritures de son avocat présentées en cause d'appel, l'appelant demande à la Cour de':
REFORMER le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de RENNES le 6 mai 2019 en toutes ses dispositions, notamment en ce qu'il le condamne à verser la somme de 500 € à la MFR de JANZE au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Jugeant à nouveau :
DIRE le licenciement dénué de toute faute grave et de toute cause réelle et sérieuse ;
En conséquence,
CONDAMNER la MAISON FAMIALE RURALE DE JANZE à lui payer les sommes suivantes :
'Rappel de salaire sur mise à pied conservatoire': 2.605,33 € bruts,
'Indemnité de congés payés sur rappel de salaire': 260,53 € bruts,
'Indemnité compensatrice légale de préavis (2 mois)': 8.673, 52 € bruts,
'Indemnité de congés payés sur préavis': 867,35 € bruts,
'Indemnité conventionnelle de licenciement':13.040,13 € nets,
'Dommages-intérêts (article L.1235-3 du code du travail)':104.082,24 € nets,
'Article 700 du code de procédure civile': 2.000,00 €';
DIRE que les sommes réclamées porteront intérêts au taux légal à compter de la saisine du Conseil de prud'hommes en ce qui concerne les sommes ayant le caractère de salaire, congés payés, préavis, et à compter de la décision à intervenir en ce qui concerne les sommes ayant le caractère de dommages et intérêts, avec capitalisation des intérêts dans les conditions de l'Article 1343-2 du Code Civil ;
DIRE que la moyenne mensuelle brute des salaires à prendre comme référence et base de calcul s'élève à la somme de 4.336,76 C bruts correspondant au salaire mensuel de base.
CONDAMNER l'intimée aux entiers dépens de l'instance et aux frais éventuels d'exécution.
Au soutien de ses prétentions, il expose qu'après 11 ans d'exécution sans difficulté du contrat de travail, il a été chargé par le conseil d'administration de l'association de réduire la masse salariale et que c'est dans ce contexte que 12 salariés ont, le 5 septembre 2013, adressé une lettre au conseil d'administration le mettant en cause, suivi d'une intervention du médecin du travail ; il soutient que le président qui le soutenait a alors démissionné, suivi de la démission du vice-président et que lui-même a été mis en arrêt de travail au mois de novembre 2013 pour un syndrome d'épuisement professionnel ; il expose, alors même qu'une enquête de l'inspection du travail était en cours, avoir été convoqué à un entretien préalable fixé au 7 avril 2014 par le nouveau président au cours duquel lui a été notifié une mise à pied conservatoire, avant de se voir notifier son licenciement pour faute grave ; il conteste les motifs du licenciement qui relèveraient, s'ils étaient avérés de l'insuffisance professionnelle , observant en outre que si un procès-verbal a été transmis au parquet par l'inspection du travail, la procédure a été classée sans suite au motif que l'infraction n'était pas suffisamment caractérisée ; il conteste en outre la procédure qui a méconnu les dispositions du règlement intérieur et il estime avoir été victime de la réaction des salariés suite à la mise en 'uvre d'un plan de réduction de la masse salariale décidé par l'employeur, son licenciement étant dépourvu de cause réelle et sérieuse et justifiant ses demandes indemnitaires.
* * *
Par conclusions de son avocat présentées en cause d'appel, l'intimée demande à la Cour de :
CONFIRMER intégralement le jugement du conseil de Prud'hommes de RENNES du 6 mai 2019.
En Conséquence,
DIRE que le licenciement est fondé sur une faute grave.
Subsidiairement,
DIRE que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse.
En tout état de cause,
DEBOUTER Monsieur [Y] [D] de toutes ses demandes';
CONDAMNER Monsieur [D] à lui payer une somme de 3.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en instance d'appel';
CONDAMNER Monsieur [D] aux entiers dépens.
A l'appui de ses prétentions, l'intimée fait valoir que le 5 septembre 2013, le conseil d'administration a été destinataire d'une lettre signée par 12 formateurs sur 16 salariés, mettant en cause l'implication et les compétences du directeur et son management inapproprié, source de souffrance au travail ; elle expose qu'il a alors été organisé une réunion avec le conseil d'administration et l'appelant au cours de laquelle il a été invité à mettre en 'uvre des mesures d'apaisement, mais qu'il a nié en bloc les griefs invoqués, se considérant comme un bouc émissaire, alors même que le médecin du travail confirmait l'état de souffrance au travail des formateurs'; au cours de l'enquête menée par l'inspection du travail, le nouveau président a été alerté sur l'urgence de mesures à prendre aux fins de protéger la santé des salariés et c'est dans ces conditions qu'il a été procédé à son licenciement pour faute grave ; elle expose qu'indépendamment des poursuites pénales, les services de gendarmerie chargés de l'enquête ont relevé le comportement agressif de l'appelant et les pressions exercées sur certain salariés, confirmant ainsi les motifs du licenciement'; elle estime que c'est à juste titre que les premiers juges ont dit la faute grave établie au regard du management inacceptable de Monsieur [D] et de ses répercussions sur les conditions de travail et la santé des salariés.
La clôture de l'instruction été prononcée par ordonnance du magistrat de la mise en état le 29 juillet 2022 avec fixation de l'affaire à l'audience du 29 mars 2022.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour renvoie, pour un plus ample exposé des moyens des parties, aux conclusions adressées au greffe de la Cour, le 17 février 2022 pour Monsieur [Y] [D] et le 21 février 2022 pour l'association MAISON FAMILIALE ET RURALE de JANZE.
SUR CE, LA COUR
1. Sur le bien-fondé du licenciement
La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et impose son départ immédiat. L'employeur qui invoque la faute grave doit en rapporter la preuve et les faits invoqués doivent être matériellement vérifiables. Par application de l'article L.1234-1 et de l'article L.1234-9 du code du travail en sa rédaction alors applicable, lorsque le licenciement est motivé par une faute grave, le salarié n'a droit ni à un préavis ni à une indemnité de licenciement.
A défaut de faute grave, conformément aux dispositions de l'article L.1232-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux du motif invoqué par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié. Ainsi l'administration de la preuve, en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.'
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 27 mars 2014, Monsieur [D] était convoqué à un entretien préalable à licenciement et par lettre recommandée avec accusé de réception du 17 avril 2014, il était licencié pour faute grave ainsi caractérisée':
«'Je suis au regret de vous notifier par la présente lettre votre licenciement pour faute grave.
A la suite de la pétition adressée par les salariés, le conseil d'administration a recueilli vos observations lors de sa réunion du 23 septembre 2013 et vous a invité à réfléchir à votre management et à recréer rapidement du lien avec l'équipe.
Le conseil d'administration a décidé d'entendre les salariés et, lors de la réunion du conseil d'administration du 21 octobre, vous avez donné lecture de votre réponse au courrier des salariés vous considérant victime d'une « cabale ».
Constatant que nous recevions une alerte de la médecine du travail et face à la divergence d'analyse de la situation entre les salariés et vous-même, j'ai demandé, à la suite de ma désignation comme Président lors du conseil d'administration du 25 novembre 2013, au Directeur départemental des MFR de m'assister pour mener à bien l'enquête indispensable face aux accusations de souffrance au travail.
D'autre part, l'Inspection du travail a été alertée par téléphone et par courrier par des salariés pour faire part de la souffrance au travail et des difficultés de relations avec vous-même.
Aussi, l'Inspecteur du travail, Madame [W], a rencontré le Directeur départemental des MFR le 28 novembre puis vous-même le 14 janvier avant de rencontrer les salariés.
Il résulte des premiers résultats de l'enquête que nous a transmis l'Inspection du Travail par lettre du 21 mars 2014 que votre responsabilité est clairement mise en cause dans la situation de souffrance au travail dont se sont plaints les salariés.
J'ai informé le Conseil d'Administration de cette situation lors de sa réunion du lundi 31 mars 2014. Pour que vous puissiez faire valoir votre position et vos observations éventuelles, je vous ai invité à être entendu par le Conseil d'Administration lors de cette réunion.
A cette occasion, vous êtes resté dans une attitude de déni de la situation.
Vos explications fournies lors de l'entretien préalable du 7 avril ne modifient pas notre appréciation de la situation.
En tant qu'employeur, nous sommes tenus à une obligation de sécurité de résultat pour tout ce qui touche à la santé des salariés.
Les conclusions de l'Inspecteur du travail sont malheureusement accablantes:
« Il apparaît clairement que la fonction de Directeur n'est assumée que dans des crises d'autorité se traduisant par des propos violents, de l'ironie blessante, des humiliations publiques à l'encontre des salariés.
Elle n'est pas assumée quand il s'agit de soutenir les initiatives des salariés en faveur des élèves ou du développement économique de la Maison Familiale.
Elle n'est pas assumée non plus en cas de conflits rencontrés par un enseignant dans les relations avec les élèves et les parents.
Il en résulte que les salariés ont le sentiment que le fonctionnement de la Maison Familiale repose uniquement sur leur implication totale qui se concrétise par la nécessité pour eux de se substituer au Directeur dans un certain nombre de situations : planning hebdomadaires régulièrement erronés obligeant les salariés à s'arranger entre eux, absence de gestion du volume horaire annuel, charge quasi intégrale des cours, des surveillances de repas et des veillées, absence du Directeur lors des rencontres avec les parents, absence d'implication de sa part dans les relations publiques ( salons, portes ouvertes...).
Ce manque de repères que devrait donner un Directeur de Maison Familiale est devenu une source de stress permanent. L'épisode de l'annonce du licenciement de Mme [K] a suscité un élan de solidarité qui a abouti à la lettre qui vous a été adressée le 16 septembre 2013 et dont le contenu semble entièrement corroboré par les premiers entretiens. ».
Les faits ci-dessus relatés caractérisent en premier lieu une cause réelle et sérieuse de licenciement du fait de vos insuffisances et vos carences dans vos fonctions de direction, notamment en terme de management.
Mais vos comportements stigmatisés par l'Inspecteur du travail (propos violents, ironie blessante, humiliations publiques), en ce qu'ils sont générateurs d'une souffrance au travail des salariés, rendent impossible la poursuite du contrat de travail pendant le préavis et nous contraignent à vous licencier pour faute grave.
Ce licenciement met fin à votre contrat de travail à compter de l'envoi de la présente lettre et est privatif des indemnités de préavis et de licenciement ainsi que de votre salaire pendant la période de mise à pied conservatoire...'»
Il ressort de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige en l'état du droit applicable aux faits de l'espèce, que l'énonciation des griefs repose sur une faute grave caractérisée par un management inapproprié de l'appelant et sur une cause réelle et sérieuse du fait des insuffisances et carences dans ses fonctions de direction.
Aux fins de rapporter la preuve de la faute grave, l'employeur produit notamment':
'la lettre de mission de Monsieur [D] incluant notamment, au-delà de la gestion, du développement et de la communication, le management de l'équipe de formateurs en termes d'animation et de cohérence pédagogique, outre l'organisation et l'établissement des plannings et le bilan annuel par salarié avec le suivi de la formation pédagogique et de la formation permanente'; il est rappelé qu'il a à charge d'élaborer un règlement intérieur, d'assurer la responsabilité globale de la formation et de l'éducation des jeunes et de collaborer à la mise en place du plan formation';
'la lettre du 16 septembre 2013 signée par 12 salariés envoyée au conseil d'administration faisant état des griefs qu'ils adressent à Monsieur [D], leur directeur, mettant en cause notamment son engagement dans sa fonction, le temps qu'il y consacre (dernier arrivé, premier parti) difficultés du quotidien, absence de ligne directrice claire, manque d'intérêt pour les finalités pédagogiques, absence d'implication dans le milieu local, absence d'autorité (passe du copinage à l'autoritarisme déplacé), perte de confiance de l'équipe, propos qui relèvent plus du cynisme que de l'humour, entretien de la division, chantage à l'emploi, critères d'appréciation des réussites des collègues, absence de gestion prévisionnelle du temps travail, obligation faite au salarié de faire l'avance des frais de déplacement alors que lui-même se déplace aux frais de la MFR ;
'le compte rendu du conseil d'administration du 23 septembre 2013, duquel il ressort que les élus ont entendu chaque signataire et ont été surpris par l'agressivité de certains salariés mais que les questionnements demeurent ; le directeur a été entendu en précisant les conditions dans lesquelles il a pris certaines décisions contestées, les administrateurs lui ayant demandé de réfléchir à son management et de recréer rapidement du lien avec l'équipe';
'la lettre adressée par l'appelant au président du conseil d'administration le 1er octobre 2013 par laquelle il fait valoir qu'il considère que la lettre des salariés est injuste et sur certains points calomnieuses ;il expose qu'il a toujours associé les membres de l'équipe aux finalités pédagogiques et aux décisions stratégiques mais qu'il sait ses collègues salariés inquiets pour leur avenir dans un contexte de réduction de la masse salariale qu'il avait à charge d'appliquer conformément à la décision du conseil d'administration du 26 août 2013 et qui fait de lui un bouc émissaire ;
'la lettre du médecin du travail adressée au président du conseil d'administration le 17 octobre 2013 lui rappelant ses responsabilités en matière d'évaluation et de prévention des risques psychosociaux dans la mesure où elle a constaté, après avoir reçu, sur leur demande les salariés de l'institut, des troubles de la santé consécutifs, selon leurs dires, à des problèmes au travail';
'deux lettres de l'inspecteur du travail, la première du 29 janvier 2014 par laquelle elle informe le président de l'ouverture d'une enquête sur les conditions de travail dans l'entreprise dans la mesure il résulte des informations dont elle dispose une suspicion de harcèlement moral'; la seconde du 21 mars 2014 indiquant que l'enquête est en cours mais que devant l'état d'anxiété et de peur des personnes d'ores et déjà rencontrées, elle se doit de l'alerter sur l'urgence de prendre des mesures pour protéger la santé des salariés ; elle indique que les salariés ont exprimé que leur souffrance professionnelle est en lien avec le comportement du directeur qui n'assume sa fonction que dans des crises d'autorité se traduisant par des propos violents, de l'ironie blessante et des humiliations publiques, outre son absence de soutien des initiatives des formateurs et qu'ils ont déclaré se substituer à lui dans nombre de situations, comme la modification de plannings erronés, l'absence de gestion du volume horaire, outre l'absence de directeur lors des rencontres avec les parents ou son défaut d'implication dans les relations publiques ; il est précisé que le directeur est devenu une source de stress permanent et que l'annonce du licenciement de Madame [K] a suscité un élan de solidarité ayant abouti à la lettre du 16 septembre 2013';
'le procès-verbal dressé par l'inspecteur du travail transmis au Procureur de la république relevant que le directeur de l'établissement a, pendant des années, imposé aux salariés une méthode habituelle de management les mettant en difficulté et eu un comportement personnel inapproprié, soumettant les salariés à des pressions, des vexations et humiliations répétées'; il est rappelé le contexte de l'enquête, l'inspection du travail ayant été alertée le 20 novembre 2013 d'une crise au sein de l'établissement ensuite de la menace de licenciement économique de Madame [K], brutalement annoncé le 28 août 2013, veille de la rentrée scolaire,' ensuite de la décision du conseil d'administration du 26 août ; le directeur a alors réparti ses heures de cours sur ses autres collègues et lui a proposé un licenciement pour cause économique ou une rupture conventionnelle et lui a proposé en outre de rentrer immédiatement chez elle si elle le souhaitait, ce qu'elle a refusé ; entendue, Madame [K] a indiqué qu'après l'envoi de la lettre du 16 septembre et les entretiens avec le conseil d'administration, le directeur a provoqué une réunion pour tenter de rétablir le dialogue tout en maintenant le projet de licenciement avec une proposition d'un temps partiel à 70 %, ensuite de quoi elle a été en arrêt de travail et sont intervenues les démissions du président et du vice-président ;entendu Monsieur [D] a admis qu'il n'avait plus la confiance de l'équipe depuis la rentrée mais a rejeté les accusations de harcèlement ; il indique que la possibilité d'un licenciement d'un équivalent temps plein avait déjà été évoquée au mois de mai 2013 et que cette décision était subordonnée au nombre de jeunes en contrat de professionnalisation à la rentrée ;
compte tenu de l'insuffisance de jeunes, il a indiqué que le conseil d'administration avait donné son accord au licenciement de Madame [K] et il admet pour seul grief, une trop faible implication locale et rejette les autres reproches ; il convient qu'il peut être trop direct et ne pas mettre toujours les formes et qu'à une seule reprise, il lui est arrivé d'élever la voix contre une surveillante de nuit, Madame [R], qui l'avait insulté ; l'inspection du travail évoque ensuite les entretiens avec 13 salariés sur les 16 employés de l'établissement, suivi de la lettre du 21 mars 2014 déjà évoquée, après le constat de l'état physique et mental de certains salariés rencontrés'; ont été notamment entendus, Monsieur [F], salarié, qui relate une grande colère du directeur à propos de l'organisation d'un projet au Portugal, ou encore alors qu'il est passionné de football et échange fréquemment avec lui sur leur passion commune, il l'a mis de permanence précisément le soir d'un match alors qu'il lui avait dit quelques jours auparavant avoir pu obtenir un billet ; il précise que Madame [K] était présente lorsqu'il a demandé au directeur de modifier cette permanence et qu'elle s'est même proposée d'assurer la permanence en question'; il met en cause l'organisation des congés et l'implication du directeur'; il fait état de ce qu'il a été chargé de notifier une exclusion à une jeune et a demandé au directeur de l'accompagner ce qu'il a refusé, l'entretien avec la famille ayant dégénéré en insultes comme il s'y attendait'; d'autres salariés déclarent ne pas avoir subi d'agressions de la part du directeur, mais soulignent le peu d'engagement du directeur, les formateurs devant s'arranger entre eux ; chacun fait état de difficultés qu'il a pu rencontrer dans l'exécution de ses missions du fait de l'insuffisance du directeur et tous soulignent une insuffisance de reconnaissance du travail accompli, le directeur ne s'intéressant pas aux salariés et les tenant pour responsable des difficultés financières de l'association, outre l'instabilité du conseil d'administration et les démissions répétées de présidents au cours des deux dernières années dans un climat conflictuel'imputé au directeur ; certains salariés indiquent avoir été témoins d'humiliations ou de pressions à l'égard de collègues'; il est fait état d'un incident au cours d'un repas à propos d'une sanction envers un élève, les formateurs ayant quitté la table après que le directeur, en s'adressant au formateur concerné a dit « ça se connecte bien dans ta tête », le directeur ayant indiqué par la suite que ses propos avaient été mal compris'; il est fait état en outre de manipulations et de colères du directeur provoquant le mutisme des salariés lors des réunions d'équipe'ou encore de l'altercation du directeur avec la surveillante de nuit, Madame [R] au mois d'août 2012 déjà évoquée au cours de laquelle il a retenu la portière de sa voiture et a frappé du point sur le toit en hurlant « je n'en ai pas fini avec toi ; sort de là, il y en a marre de travailler avec des cons comme ça », une salariée s'étant interposée pour mettre fin à l'incident ; des salariés évoquent pour l'un des difficultés d'adaptation de poste ou pour un autre une régularisation salariale après une promotion, difficultés réglées avec des administrateurs devant l'inertie du directeur ; pour qualifier le harcèlement moral, l'inspecteur du travail retient les divers témoignages précédemment évoqués portant sur l'établissement tardif des congés et la perte de congés de certains formateurs, sur les volumes horaires, une salariée, Madame [Z], faisant état d'un dépassement du contingent (150 heures supplémentaires), une autre déclarant ne pas avoir pu récupérer les heures supplémentaires, sur le mépris des droits des salariés (changement d'échelon et défaut d'augmentation de salaire correspondante, réduction de prime), sur la dévalorisation de certains salariés (suppression de formations dans lesquelles ils s'étaient investis, absence de reconnaissance du travail, absence de soutien et d'implication personnelle) et sur un comportement personnel inapproprié (colères, mots blessants), ces agissements ayant occasionné une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits, à la dignité et à la santé des salariés ;
il est fait état de la passivité de l'institution, les présidents s'étant trouvés eux-mêmes en butte aux agissements du directeur, leur mise en cause n'étant de ce fait pas justifiée'; d'anciens membres du conseil d'administration ont été entendus et notamment l'ancien trésorier, devenu le nouveau président, qui indique que les relations entre directeur et son équipe étaient tendues, les moniteurs lui reprochant de rester isolé dans son bureau et de ne pas aller vers eux et qu'il a été décidé de rédiger une lettre de mission définissant plus clairement ses fonctions au mois de juillet 2010 et il estime que Monsieur [D] n'est pas fait pour le travail d'équipe'; d'autres administrateurs ont été entendus faisant état de divergences au sein même du conseil d'administration';
'l'enquête réalisée par les services de la gendarmerie sur instruction du Procureur de la république de Rennes au cours de laquelle ils ont entendu Monsieur [F], qui a repris les griefs déjà évoqués, Madame [Z] qui a mis en cause le directeur pour lui avoir refusé un mi-temps thérapeutique en 2012 ou pour avoir supprimé une formation dans laquelle elle s'était investie ou encore au motif qu'elle accumulée 150 heures supplémentaires ; elle fait état de ce que Monsieur [D] a une double personnalité, agréable et souriant, lui ayant laissé du temps lorsque son enfant était malade ou agressif et violent dans ses propos mêmes si cela n'a pas été le cas pour elle ; elle le décrit toutefois comme malsain et manipulateur' relevant son défaut d'investissement (peu de cours, pas de surveillance à la cantine ou lors des veillées, manque d'exemplarité, défaut de remplacement de collègues absents)'; elle indique avoir été témoin de l'altercation avec Madame [R], au cours de laquelle elle est intervenue pour qu'il se calme ; elle estime qu'il souhaitait licencier Madame [K] et que le motif économique invoqué était un stratagème'qui a provoqué la révolte des formateurs'; à la question sur le point de savoir qui a le plus subi le harcèlement du directeur, elle répond qu'elle croit que personne n'était épargné et qu'indirectement tout le monde a subi le comportement harcelant de Monsieur [D]'; le procès-verbal de synthèse fait état en outre de l'absence de règlement intérieur et de délégués du personnel, de l'état lamentable de l'internat, de plus de 150 heures de travail à récupérer pour une salariée et du stress au travail des salariés ; il est fait état de ce que Monsieur [D] arrivait le dernier et repartait le premier, qu'il ne soutenait pas les salariés et ne prenait pas part à l'équipe pédagogique ; il est noté qu'il est décrit comme calculateur, manipulateur et ne donnant pas la même version selon qu'il avait un salarié ou un membre du conseil d'administration devant lui, outre qu'il faisait pleurer des salariés et leur mettait la pression pour justifier des soucis financiers de l'établissement en faisant des emplois du temps très chargés pour certains salariés'; est encore relevé son caractère autoritaire et agressif, ne reconnaissant pas le travail de ses salariés; il est indiqué in fine du procès-verbal de synthèse que Monsieur [D] demeurant dans le département 44 devra être entendu par la gendarmerie de BLAIN';
'9 attestations de salariés et d'anciens membres du conseil d'administration reprenant leurs déclarations devant l'inspecteur du travail et les services de gendarmerie.
Pour sa part, l'appelant produit, outre des pièces déjà produites par l'employeur:
'ses bulletins de salaire laissant apparaître une rémunération nette mensuelle de l'ordre de 3.300 €';
'le règlement intérieur de l'établissement reprenant le règlement intérieur type pour les Maisons Familiales Rurales (MFR), approuvé par le conseil d'administration de l'Union Nationale'et validé par l'assemblée générale ordinaire de l'association du 19 mars 2009 ;
'la lettre de démission à effet du 21 octobre du président faisant état d'un harcèlement téléphonique, (5 appels en moins de ¿ heure d'un membre du conseil d'administration ou 10 appel dans la même journée par une salariée)'; il précise qu'il considère le directeur, qu'il apprécie beaucoup, très respectable et qu'ils ont conduit ensemble une bataille pour redresser financièrement l'association'; il indique qu'ils ont pris la décision d'arrêter la filière commerce déficitaire depuis plusieurs années et de prévoir un licenciement et il estime que pour la survie de l'établissement, il doit être pris des décisions dures à accepter';
'la lettre de démission du vice-président à effet du 4 novembre 2013 pour motif personnel, indiquant, lui-aussi, qu'il conserve sa confiance au directeur';
'le compte rendu du conseil d'administration du 21 octobre 2013 au cours duquel il est demandé un retour à l'équilibre financier, le renforcement des classes de quatrième et troisième, ainsi que de la filière agricole et des recherches de solutions pour rentabiliser la filière commerce notamment';
'un certificat de son médecin traitant attestant d'un arrêt travail pour surmenage et épuisement physique du 7 au 24 novembre 2014';
'le compte rendu du conseil d'administration du 16 décembre 2013 par lequel il est pris acte des élections des délégués du personnel prévues le 21 janvier 2014';
'le compte rendu de la réunion du conseil d'administration du 20 janvier 2014 au cours de laquelle il a été décidé la vente d'un terrain pour une somme de l'ordre de 300.000 €, ainsi qu'un emprunt de 150.000 € et il est programmé la réfection de l'internat pour un montant de 880.000 € ; il est en outre décidé de régulariser la situation de Madame [Z] qui a réalisé 140 heures supplémentaires ;
'le compte rendu de l'entretien préalable au licenciement établi par le conseiller assistant Monsieur [D] duquel il résulte que le président a fait lecture de la lettre de l'inspection du travail, l'appelant ayant observé que l'enquête était en cours et que les faits reprochés restaient inexacts ; la trésorière présente lors de cet entretien a indiqué qu'ils s'en remettaient à la position de l'inspection du travail ; il est mentionné par le délégué qu'à aucun moment il a été précisé à Monsieur [D] les motifs exacts de son licenciement ; il indique qu'il a accompagné Monsieur [D] à la fin de cet entretien à son bureau pour qu'il récupère des effets personnels et qu'ils ont constaté que la serrure de sa porte avait été changée';
'une attestation de l'ancien président indiquant qu'il a participé avec le directeur à de multiples manifestations publiques, journées portes ouvertes, comices agricoles, salons divers ; il précise qu'il a connaissance de ce que les plannings étaient souvent remis en cause au dernier moment par des salariés à raison d'impératifs personnels et qu'il était alors nécessaire de les réajuster'; il relate qu'il a présidé des commissions de discipline et que Monsieur [D] défendait l'intérêt des enseignants devant les plaintes illégitimes de parents et il considère que ceux qui lui font reproche de ses crises d'autorité tiennent des propos inexacts et malhonnêtes ; il souligne que Monsieur [D] assurait toute la gestion prévisionnelle, ainsi que les déclarations auprès du ministère de l'agriculture pour obtenir les subventions et qu'au cours du mois d'août 2013, ils ont été amenés à prendre une décision difficile mais nécessaire pour l'avenir de la structure en réduisant la masse salariale ;il estime que c'est suite à cette décision que le directeur a été victime de fausses accusations et il expose qu'il a subi des pressions d'autres élus et de salariés pour qu'il procède au licenciement du directeur, tenu responsable de la situation, ce qu'il a refusé, déclaration confirmée par un ancien membre du conseil d'administration pendant 20 ans, qui observe qu'avant la lettre de septembre 2013, il n'avait jamais été remonté de griefs contre le directeur, propos encore confirmés par 3 autres anciens administrateurs qui soulignent la fausseté avérée de certains griefs et la volonté de salariés d'obtenir, avec un groupe d'élus, le départ du directeur ;
'2 attestations de salariés déclarant n'avoir jamais vu Monsieur [D] manquer de respect ou avoir tenu des propos violents avec des collègues,'dont notamment une attestation Monsieur [G] qui déclare avoir accepté un entretien avec l'inspection du travail pour témoigner sur les conditions et les relations de travail, mais qu'il n'a jamais été convoqué suite au coupon-réponse qu'il a retourné, propos confirmés par Monsieur [E] qui déclare avoir toujours trouvé l'aide nécessaire auprès du directeur qu'il estime être accablé de toutes parts et victime d'une cabale montée par l'équipe des moniteurs ; il indique qu'il a participé au mois d'août 2013 à une réunion avec les formateurs de laquelle il ressortait que le directeur était responsable de tous les maux de l'association';
'3 attestations de directeurs de MFR du réseau, et notamment Monsieur [A] qui déclare que Monsieur [D] était un collègue de confiance qu'il rencontrait chaque mois lors de la réunion départementale des directeurs de MFR et qu'il a conduit avec persévérance des changements profonds au sein de l'établissement (fusion réussie de structures et gros chantiers immobiliers)'; il indique qu'ils ont participé ensemble de nombreuses manifestations départementales et régionales et que faisant partie de la même structure, ils ont souvent travaillé ensemble à la préparation et à la tenue de salons professionnels ; il précise qu'il appréciait sa détermination à défendre les intérêts de son établissement, mais aussi sa capacité à respecter les décisions prises par le groupe des directeurs à la majorité'; il estime enfin qu'il avait le recul nécessaire lui permettant un regard critique et distancié de ses propres pratiques et de la situation de son établissement, propos confirmés par deux autres directeurs';
'son procès-verbal d'audition par les services de la gendarmerie de BLAIN'; répondant aux questions posées, il explique la procédure d'établissement des plannings qui devaient être réalisés très en amont et transmis au ministère de tutelle pour obtention des subventions correspondantes ; il explique qu'il déterminait les horaires de travail à partir d'emplois du temps hebdomadaire établis pour toute l'année afin de lisser la charge de travail et qu'il mettait à disposition des salariés un cahier sur lequel ils pouvaient mettre leurs impératifs dont il tenait compte pour modifier les emplois du temps ; il indique qu'il n'y a pas eu une seule semaine au cours de laquelle les salariés n'ont pas eu connaissance du planning, les congés étant calqués sur ceux de l'éducation nationale ; il précise qu'il y avait des semaines à zéro heure pour lisser les 1499 heures annuelles et que chaque mois, les salariés remplissaient une feuille déclarative ; s'agissant des congés'; il indique encore qu'il ne pouvait pas libérer un enseignant s'il avait des cours et qu'à partir du mois de mai, il faisait le point avec les enseignants, vérifiait leurs compteurs et les libérerait le mardi ou le jeudi pour qu'ils puissent prendre leurs congés restants; il précise que les 12 directeurs de MFR avaient demandé une modification des bulletins de paie pour qu'y soit mentionné le compteur de congés, mais qu'ils n'ont pas été entendus';' s'agissant des heures supplémentaires effectuées par Madame [Z], il indique que ce nombre d'heures était lié à une opération importante et que la salariée avait donné son accord ; il confirme que les enseignants s'arrangeaient fréquemment s'agissant des modifications des emplois du temps qui étaient affichés le mercredi ou le jeudi précédent, les enseignants faisant des échanges entre eux ; il indique, s'agissant de l'augmentation de salaire de Madame [X] après un changement d'échelon, que celle-ci est intervenue après repositionnement dans la grille de la nouvelle convention collective ;
il précise qu'il était parfois confronté à des demandes qu'il ne pouvait satisfaire comme des demandes de comptabilisation de 24 heures par jour lors de déplacements'; il précise encore qu'il dispensait personnellement 4 à 6 heures de cours par semaine et avait 4 heures de correction de plans d'études, plan de charge validé par le président; il précise, toujours sur question de l'enquêteur, qu'il a été amené à refuser une surveillance nocturne des élèves en décembre 2013 en l'absence du surveillant d'internat parce qu'il l'avait déjà remplacé trois nuits consécutives tout en assurant ses missions le jour ; s'agissant de l'astreinte dénoncée par Monsieur [F], il indique que les plannings sont faits par trimestre et que pour ce faire, il tient compte des contraintes dont il a connaissance ; s'agissant de l'incident avec Madame [R], il explique qu'il avait été décidé avec le conseil d'administration qu'elle devrait prendre son poste une demi-heure plus tôt le soir et qu'il l'a alors reçue pour lui notifier cette décision qu'elle n'a pas acceptée'; elle a alors quitté le bureau en claquant la porte et il l'a suivie jusqu'au parking ; il estime que beaucoup de choses ne dépendaient pas de lui mais que les salariés l'en tiennent pour responsable alors qu'il manquait des élèves dans les différents groupes, générant des difficultés financières'; il manifeste sa surprise devant le fait que pendant 11 ans on ne lui a rien reproché jusqu'au mois d'août 2013 et il estime qu'à la suite de la décision prise à la fin août 2013 de licencier Madame [K], un rapport de force s'est engagé'; il conteste tout management harcelant.
Il ressort de ces éléments que l'essentiel des griefs listés par les salariés dans la lettre du 16 septembre 2013 visent un défaut d'engagement, un temps de présence trop limité, une insuffisance de décisions qui empoisonne le quotidien, une absence de ligne directrice claire, un manque d'intérêt pour les finalités pédagogiques, une insuffisance d'implication dans le milieu local, une absence d'autorité, une perte de confiance, des propos qui relèvent plus du cynisme que de l'humour, des propos pour diviser, des interrogations sur son rôle dans l'éviction du président, son désintérêt pour l'avenir de la MFR à certaines périodes, notamment au début de l'année 2011, des décisions non comprises comme le gel de la seconde commerce, le sentiment qu'il fait passer ses impératifs personnels avant ceux de la MSA, des interrogations sur la manière dont il apprécie les réussites, le fait qu'il se laisse enfermer dans des querelles sur des broutilles, une absence de gestion prévisionnelle du temps de travail, autant de reproches qui relèvent plus d'abstentions, que de l'accomplissement d'actes objectivement humiliants, vexatoires, avilissants ou déstabilisants'susceptibles de caractériser un management harcelant ; par ailleurs aucun salarié n'indique avoir personnellement fait l'objet d'actes répétés de harcèlement moral'; Madame [R] ne fait état que de l'altercation avec Monsieur [D] le 11 septembre 2012'; Madame [B] ne fait état que d'un propos décalé en 2010 (ça se connecte bien dans ta tête) et de l'altercation avec Madame [R], indiquant même qu'avant la rentrée de septembre 2013, les choses se passaient plutôt bien'; Madame [K] ne fait état que de son licenciement pour cause économique envisagé en septembre 2013 et elle précise lors de son audition par l'officier de police judiciaire que le directeur lui a annoncé cette décision sans gaité de c'ur et qu'il avait des pistes pour elle dans un autre lycée à Nantes.
Il résulte de ce qui précède que les faits dénoncés après l'annonce de mesures visant à réduire la masse salariale, aucune plainte n'ayant été objectivée antérieurement au mois d'août 2013, tels qu'ils ressortent de la lettre du 16 septembre 2013, de l'audition des salariés par l'inspection du travail, puis par les services de la gendarmerie, sont insuffisants par leur imprécision, au-delà d'épisodes isolés et pour certains très anciens, à caractériser des actes répétés de harcèlement moral.
Par contre au-delà d'une insuffisance d'implication au plan local que l'appelant reconnaît à demi-mot, il ressort suffisamment des pièces produites la réalité d'insuffisances manifestes, s'agissant notamment des élections tardives des délégués du personnel, l'absence de soutien des formateurs notamment et pour exemple, le refus de venir en soutien d'un formateur pour notifier à une famille le renvoi d'un élève ayant frappé un enseignant qui a dégénéré en injures, ou encore un défaut de communication sur des décisions contestées de suppression de filières de formation et de projets pédagogiques, ou encore une insuffisance de soutien pédagogique et de formations pour les enseignants, un défaut de reconnaissance du travail accompli pointé par l'ensemble des salariés, autant d'éléments établissant des manquements de l'appelant à sa lettre de mission et qui caractérisent une insuffisance professionnelle justifiant le licenciement de l'appelant pour cause réelle et sérieuse.
Il y a lieu en conséquence d'infirmer le jugement entrepris qui a dit justifié le licenciement de Monsieur [D] par faute grave en le déboutant de toutes ses demandes, et de dire son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse.
2. Sur les conséquences de l'absence de faute grave
Au moment du licenciement, l'appelant avait une ancienneté de plus de 11 ans dans l'entreprise et bénéficiait d'un salaire mensuel moyen de 4.336,76 € bruts.
a) L'indemnité compensatrice légale de préavis
Puisque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, l'appelant qui comptait plus de deux ans d'ancienneté a droit à un préavis de 2 mois conformément aux dispositions de l'article 20 de la convention collective des maisons familiales rurales ; aux termes de l'article L 1234-5 du code du travail, lorsque le salarié n'exécute pas le préavis, il a droit à une indemnité compensatrice.
Monsieur [D] est en conséquence bien fondé à prétendre à une indemnité compensatrice de préavis d'un montant de 8.673,52 € bruts, outre la somme de 867,35 € bruts au titre des congés payés afférents.
b) L'indemnité conventionnelle de licenciement
Par application des dispositions de l'article 22 de la convention collective, lorsque le salarié a une ancienneté supérieure à 10 ans, il bénéficie d'une indemnité de licenciement égal à 2/10 de mois par année d'ancienneté dans la dernière association et de 2/15 de mois au-delà de 10 ans, outre 1/10 de mois par année d'ancienneté dans d'autres associations de l'institution.
L'appelant établi qu'il a été employé par la MFR Bellevue de Pouzauges à compter du 1er septembre 1998 jusqu'au 15 août 2002, puis par la MFR de Janzé du 16 août 2002 au 17 avril 2014'; il est en conséquence bien fondé à prétendre à une indemnité de 13.040,13 € nets à ce titre.
3. Sur la mise à pied conservatoire
En application des dispositions de l'article L.1332-3 du code du travail, une mise à pied peut être prononcée à titre conservatoire lorsque les agissements du salarié nécessitent son éloignement provisoire de l'entreprise, cette mesure étant prise dans l'attente d'une sanction définitive et ne constituant pas une sanction disciplinaire.
Dans la mesure où la faute grave n'a pas été retenue, il y a lieu de faire droit à la demande de rappel de salaire formée par l'appelant au titre de la mise à pied conservatoire notifié le 27 mars 2014 pour la somme de 2.605,33 € bruts et celle de 260,53 € bruts au titre des congés payés afférents.
4. Sur les intérêts
Conformément à la demande de Monsieur [D], il y a lieu de dire que les sommes ainsi allouées porteront intérêts au taux légal qui se capitaliseront par année entière, conformément aux articles 1231-7 et 1343-2 du code civil.
5. Sur les dépens et l'application de l'article 700 du Code de procédure civile
Il apparaîtrait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur [D] les frais irrépétibles non compris dans les dépens et l'association MAISON FAMILIALE ET RURALE de JANZE sera condamnée à lui payer la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, le jugement devant être infirmé en ce qu'il l'a condamné à payer à l'association intimée la somme de 500 € à ce titre en première instance.
L'association MAISON FAMILIALE ET RURALE de JANZE qui succombe pour partie sera condamnée aux dépens.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
INFIRME le jugement du Conseil des prud'hommes de Rennes en toutes ses dispositions';
STATUANT à nouveau et Y AJOUTANT':
-Dit que le licenciement pour motif disciplinaire de Monsieur [Y] [D] est fondé sur une cause réelle et sérieuse.
-Condamne en conséquence l'association MAISON FAMILIALE ET RURALE de JANZE à lui payer les sommes suivantes :
8.673,52 € bruts d'indemnité compensatrice légale de préavis, et 867,35 € de congés payés afférents,
13.040,13 € nets d'indemnité conventionnelle de licenciement,
2.605,33 € bruts de rappel de salaire sur la période de mise à pied conservatoire, et 260,53 € de congés payés afférents,
2.000 € au titre de l'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
-Dit que les sommes allouées à Monsieur [Y] [D] porteront intérêts au taux légal qui se capitaliseront par année entière conformément aux dispositions des articles 1231-7 et 1343-2 du code civil.
-Déboute Monsieur [Y] [D] de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
-Condamne l'association MAISON FAMILIALE ET RURALE de JANZE à payer à Monsieur [Y] [D] la somme de 2.000 € en application des dispositions issues de l'article 700 du code de procédure civile.
-Déboute l'association MAISON FAMILIALE ET RURALE de JANZE de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile en instance d'appel';
CONDAMNE l'association MAISON FAMILIALE ET RURALE de JANZE aux entiers dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT