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31/05/2022 | FRANCE | N°20/03039

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 31 mai 2022, 20/03039


1ère Chambre





ARRÊT N°214/2022



N° RG 20/03039 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QXQU













M. [Y] [D] [B] [T]

Mme [V] [I] [G] [T]



C/



Mme [O] [X]

M. [D] [L]

M. [E] [Y] [T]





















Copie exécutoire délivrée



le :



à :











RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE REN

NES

ARRÊT DU 31 MAI 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Aline DELIÈRE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique VEILLARD, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Caroline BRISSIAUD, Conseillère,



GREFFIER :



Madame Isabelle GESLIN OMNES, lors des débats et Ma...

1ère Chambre

ARRÊT N°214/2022

N° RG 20/03039 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QXQU

M. [Y] [D] [B] [T]

Mme [V] [I] [G] [T]

C/

Mme [O] [X]

M. [D] [L]

M. [E] [Y] [T]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 31 MAI 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Aline DELIÈRE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique VEILLARD, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Caroline BRISSIAUD, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Isabelle GESLIN OMNES, lors des débats et Madame Marie-Claude COURQUIN, lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 15 Mars 2022, tenue en double rapporteur avec l'accord des parties, par Mme Aline DELIÈRE, présidente de chambre entendue en son rapport, et Mme Véronique VEILLARD, présidente de chambre,

ARRÊT :

rendu par défaut, prononcé publiquement le 31 Mai 2022 par mise à disposition au greffe, après prorogation du délibéré annoncé au 17 mai 2022 à l'issue des débats

****

APPELANTS :

Monsieur [Y] [D] [B] [T]

né le 28 Juin 1983 à [Localité 18]

[Adresse 19]

[Adresse 19]

[Localité 2]

Représenté par Me Dominique LE COULS-BOUVET de la SCP PHILIPPE COLLEU, DOMINIQUE LE COULS-BOUVET, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représenté par Me Nadège de RIBALSKY, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE

Madame [V] [I] [G] [T]

née le 04 Octobre 1973 à [Localité 15]

[Adresse 20]

[Adresse 20]

[Localité 1]

Représentée par Me Dominique LE COULS-BOUVET de la SCP PHILIPPE COLLEU, DOMINIQUE LE COULS-BOUVET, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Nadège de RIBALSKY, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMÉS :

Monsieur [E] [Y] [T]

né le 28 Février 2001 à [Localité 13]

[Adresse 12]

[Localité 8]

Représenté par Me Laurence MALLET, avocat au barreau de LORIENT

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/008915 du 08/01/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RENNES)

Madame [O] [X]

[Adresse 14]

[Adresse 14]

[Localité 9]

Régulièrement assignée par acte d'huissier délivré le 29 septembre 2020 selon les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile, n'a pas constitué

Monsieur [D] [L]

[Adresse 10]

[Localité 9]

Régulièrement assigné par acte d'huissier délivré le 29 septembre 2020 selon les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile, n'a pas constitué

FAITS ET PROCÉDURE

Les époux [F] [T] et [K] [N], mariés sans contrat de mariage, ont eu deux enfants :

-Mme [V] [T], née le 4 octobre 1973,

-M. [Y] [T], né le 28 juin 1983.

Ils ont divorcé le 28 avril 1995.

Le 11 août 2007, [F] [T] s'est remarié avec [M] [W], sans contrat de mariage.

Ils ont eu un enfant : M. [E] [T], né'le 28 février 2001.

Par acte du 7 novembre 2007, les époux [T]-[W] s'étaient consenti une donation entre époux portant sur l'usufruit de l'universalité des biens composant la succession au moment du décès du donateur et interdisant au donataire d'invoquer le droit légal en en pleine propriété, même en cas de renonciation à la donation.

[F] [T] est décédé le 18 janvier 2009.

Les 3 octobre et 26 novembre 2014, [M] [W], agissant en son nom et au nom de son fils mineur [E], a assigné M. [Y] [T] et Mme [V] [T] en partage devant le tribunal de grande instance de Lorient.

Elle est décédée le 7 février 2013, laissant comme héritiers :

-Mme [O] [X], née le 7 octobre 1983, sa fille issue de son premier mariage avec M. [R] [X],

-M. [D] [L], son fils issu de son second mariage avec M. [J] [L],

-M. [E] [T].

Par jugement du 6 juillet 2016, le tribunal de grande instance de Lorient a, notamment, ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage des successions des époux [T]-[W] et désigné un expert pour estimer les biens immobiliers dépendant des successions.

Les 17 janvier et 1er février 2019 M. [Y] [T] et Mme [V] [T] ont assigné devant le tribunal de grande instance de Lorient M. [E] [T], Mme [O] [X] et M. [D] [L].

Par jugement du 6 mai 2020, le tribunal a :

-accordé l'aide juridictionnelle provisoire à M. [E] [T],

-jugé que l'acte notarié en date du 7 novembre 2007 ne pouvait permettre à Mme [M] [W] d'opter pour 1e quart des biens en pleine propriété, ses droits portant uniquement sur l'usufruit de l'universalité des biens composant la succession de son époux,

-débouté M. [Y] [T] et Mme [V] [T] de leur demande d'attribution préférentielle de la parcelle située à [Localité 23],

-débouté M. [Y] [T] et Mme [V] [T] de leurs demandes de récompenses envers la succession de Mme [W],

-ordonné, à défaut de vente amiable, la vente sur licitation, en l'étude du notaire désigné, des biens suivants :

*un appartement situé à [Adresse 17]), dans1'ensemble immobilier en copropriété dénommé «'Les jardins des Caraïbes'», cadastré section AC [Cadastre 11], AC [Cadastre 3], AC [Cadastre 4], A [Cadastre 5], AC [Cadastre 6], comportant les lots 88 et 181, sur la mise à prix de 250 000 euros,

*une parcelle située à [Adresse 22], cadastrée BK [Cadastre 7], pour une contenance de 20 a 19 ca, sur la mise à prix de 230 000 euros,

-dit qu'à défaut d'enchères atteignant ces montants, la vente se fera sur une mise à prix inférieure d'un quart, puis de la moitié,

-dit que les sommes suivantes doivent intégrer l'actif de la succession de M. [F] [T] :

*la moitié de la somme de 102 519,89 euros (compte chèque BNP),

*la somme de 20 694,30 euros (compte BNP Paribas),

*la somme de 15 300 euros (livret A),

-dit que les meubles du défunt doivent intégrer l'actif successoral, après nouvel inventaire des biens entreposés dans le container au nom de M. [F] [T],

-dit que les fonds provenant de la vente des biens de la succession du père de M. [F] [T] seront intégrés à l'actif de la succession,

-débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

-ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés du partage.

Le 6 juillet 2020, M. [Y] [T] et Mme [V] [T] ont fait appel du jugement en ce qu'il :

-les a déboutés de leur demande de récompense relativement au bien du [Localité 16] et fondé sur l'emploi de fonds propres,

-les a déboutés de leur demande fondée sur l'emploi de fonds propres sur la parcelle de [Localité 21].

Ils exposent leurs moyens et leurs demandes dans leurs dernières conclusions déposées au greffe et notifiées le 28 décembre 2021, auxquelles il est renvoyé.

Ils demandent à la cour de :

-réformer le jugement en ce qu'il a estimé que la preuve que les fonds propres de [F] [T] pour acquérir l'appartement de [Localité 16] et [Localité 21] n'était pas rapportée,

-dire qu'il y a lieu à récompense de ce chef à hauteur de 139 481,34 euros pour [Localité 16] et 116 500 euros pour [Localité 21],

-confirmer le jugement pour le surplus,

-condamner les intimés aux entiers dépens et à leur payer la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [E] [T] expose ses moyens et ses demandes dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées le 11 février 2021, auxquelles il est renvoyé.

Il demande à la cour de :

-le recevoir au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire,

-juger que M. [Y] [T] et Mme [V] [T] ne rapportent pas la preuve de la nature de biens propres des fonds provenant du compte personnel de [F] [T] et ayant servi à l'achat du bien communautaire situé à [Adresse 17],

-juger qu'ils ne justifient pas de leur décompte de récompense,

-confirmer le jugement qui les a déboutés de leur demande de récompense au détriment de la communauté [T]-[W] de la somme de 115 000 euros,

-juger que M. [Y] [T] et Mme [V] [T] ne rapportent pas la preuve que des biens propres à [F] [T] ont participé à l'achat du terrain situé à [Localité 21],

-juger qu'ils ne justifient pas de leur décompte de récompense,

-confirmer le jugement qui les a déboutés de leur demande de récompense au détriment de la communauté [T]-[W] de la somme de 109 950 euros,

-les condamner aux entiers dépens d'instance devant la cour.

Mme [O] [X] et M. [D] [L], auxquels la déclaration d'appel et les conclusions des appelants ont été signifiées les 18 août et 29 septembre 2020, et 24 février 2022, selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile, n'ont pas constitué avocat.

MOTIFS DE L'ARRET

1) Sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire

Cette demande, formée par M. [E] [T], est irrecevable, pour défaut d'intérêt à agir, car il a bénéficié de l'aide juridictionnelle devant le tribunal de grande instance et en conserve de plein droit le bénéfice devant la cour d'appel, ce que rappelle la décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Rennes dans sa décision du 8 janvier 2021.

2) Sur la demande de récompense des consorts [T]-[N] au titre du terrain de [Localité 21]

L'article 1433 alinéa 1 du code civil dispose :'«'La communauté doit récompense à l'époux propriétaire toutes les fois qu'elle a tiré profit de biens propres.

Il en est ainsi, notamment, quand elle a encaissé des deniers propres ou provenant de la vente d'un propre, sans qu'il en ait été fait emploi ou réemploi.

Si une contestation est élevée, la preuve que la communauté a tiré profit de biens propres peut être administrée par tous les moyens, même par témoignages et présomption.'»

Celui qui demande récompense à la communauté doit rapporter cette preuve.

La preuve du caractère propre des fonds peut être rapportée par tous moyens. L'encaissement sur un compte joint de fonds propres à l'un des époux et/ou l'emploi de ces fonds pour acquérir un bien commun fait présumer que la communauté a tiré profit de ces fonds et doit récompense.

Le terrain de [Localité 21] a été acquis des époux [Z] par les époux [T]-[W] le 18 février 2008 au prix de 201 900 euros.

Le décompte de la SELARL Aubrée (pièce 53 des appelants), notaire chargé de la vente, indique les versements suivants pour payer le prix de vente et les frais, soit un montant total de 233 000 euros :

-26 décembre 2007 : 10 500 euros, dépôt de garantie de M. [T] [F],

-14 février 2008 : 191 400 euros, reçu solde prix de vente de M. Mme [T] [F],

-14 février 2008 : 20 600 euros, provision sur frais acte de M. Mme [T] [F],

Le montant du dépôt de garantie avait été payé par chèque n°9869395 (compte personnel n°012521 de [F] [T] à la banque BNP Paribas) le 17 décembre 2007.

Les sommes de 191 400 euros et 20 600 euros ont été payées par un virement.

M. [Y] [T] et Mme [V] [T] soutiennent que le prix a été payé avec des fonds propres de [F] [T] provenant de la vente de ses parts sociales dans la SARL FORVAL en janvier 2008.

Il n'est pas contesté que [F] [T] était gérant de société et qu'il a vendu sa société en 2008.

La copie de 3 chèques émis par la SARL FORVAL à l'ordre de [F] [T] est produite :

-210 000 euros le 22 janvier 2008,

-50 000 euros le 31 janvier 2008,

-62 000 euros le 3 avril 2008.

Dans un courrier du 1er février 2021 la BNP Paribas expose que les chèques de 210 000 euros et 50 000 euros ont été encaissés sur un compte BNP Paribas métropole et qu'en raison du dépassement du délai d'archivage de 10 ans elle ne peut préciser le nom du titulaire du compte. Le compte BNP Paribas en question est le compte joint du couple, le compte personnel de [F] [T] étant domicilié en Guadeloupe.

Il est justifié de l'encaissement du chèque de 62 000 euros sur le compte personnel de [F] [T] à la BNP Paribas le 7 avril 2008.

Ainsi il est établi que la somme de 233 000 euros a été payée le 26 décembre 2007 et le 14 février 2008 au moyen des fonds propres de [F] [T], provenant du prix de vente de ses parts sociales de la SARL FORVAL payés les 22 et 31 janvier 2008 et versés sur le compte joint du couple.

La cour souligne ici qu'il n'est pas contesté que [M] [W], avec laquelle il n'était marié que depuis le 11 août 2007, était sans profession. L'intimé n'explique pas comment la communauté [T]-[W], sur une période de 6 mois, aurait pu épargner sur les fonds communs la somme de 233 000 euros pour payer le prix du terrain de [Localité 21] et ne prétend pas non plus que [M] [W] a investi des fonds propres.

Par ailleurs, [F] [T] est décédé le 18 janvier 2009, soit une année après la vente de ses parts sociales et manifestement le prix de vente, d'un montant de 322 000 euros, ne faisait pas partie de l'actif de sa succession. L'actif était, d'après le jugement (pages 3 et 4), composé de la moitié indivise des biens situés à [Localité 23], [Localité 16], [Localité 21], de la moitié des parts de la SCI du phare Domaine de Bresson, de liquidités à la BNP Paribas pour un montant total de 138 514,20 euros, dont une partie appartenant à la communauté (fonds déposés sur le compte joint). La cour relève également qu'en 2008 [F] [T] n'avait pas d'autres comptes que ceux de la BNP Paribas (un compte courant personnel, un compte CEL et deux comptes joints avec son épouse) et que son compte personnel avait été clôturé avant son décès. Les relevés de son compte personnel entre le 15 décembre 2007 et le 15 mars 2008 ne mentionnent pas l'encaissement des sommes de 210 000 et 50 000 euros, ce dont il se déduit qu'elles ont été encaissées sur le compte joint du couple. Pour autant, il ne s'agit pas de fonds de la communauté mais elle en a tiré profit par l'acquisition du terrain de [Localité 21].

Le relevé du compte joint des époux entre le 12 janvier et le 6 février porte sur l'année 2009 et ne peut établir que la somme de 260 000 euros, payée par chèque des 22 et 31 janvier 2008, n'a pas été encaissée sur ce compte, comme le soutient l'intimé.

Les appelants rapportent donc bien la preuve que le prix et les frais de l'acquisition du terrain de [Localité 21] par les époux [T]-[W], soit un montant total de 233 000 euros, ont été payés par des fonds propres de [F] [T].

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté la demande de récompense de M. [Y] [T] et Mme [V] [T] à l'encontre de la succession de [M] [W] au titre de l'acquisition du terrain de [Localité 21].

L'article 1469 du code civil dispose :'«'La récompense est, en général, égale à la plus faible des deux sommes que représentent la dépense faite et le profit subsistant.

Elle ne peut, toutefois, être moindre que la dépense faite quand celle-ci était nécessaire.

Elle ne peut être moindre que le profit subsistant, quand la valeur empruntée a servi à acquérir, à conserver ou à améliorer un bien qui se retrouve, au jour de la liquidation de la communauté, dans le patrimoine emprunteur. Si le bien acquis, conservé ou amélioré a été aliéné avant la liquidation, le profit est évalué au jour de l'aliénation ; si un nouveau bien a été subrogé au bien aliéné, le profit est évalué sur ce nouveau bien.'»

Ce mode de calcul est impératif.

Il ne sera donc pas fait droit à la demande de M. [Y] [T] et Mme [V] [T] qui porte sur la moitié des fonds propres investis par leur père, soit la moitié de la dépense faite, sans tenir compte des dispositions de l'article 1469 du code civil, alors même que M. [E] [T], dans ses conclusions, a relevé qu'il n'était pas justifié du mode de calcul de la récompense au regard de ces dispositions.

La cour fixera donc seulement le montant des fonds propres investis par [F] [T] pour acquérir le terrain de [Localité 21].

3) Sur la demande de récompense des consorts [T]-[N] au titre de l'appartement de [Adresse 17]

L'appartement de [Adresse 17] a été acquis des époux [A] le 24 juillet 2008 par les époux [T]-[W] au prix de 230 000 euros.

M. [Y] [T] et Mme [V] [T] soutiennent que le prix a été payé avec des fonds propres de [F] [T] provenant du solde du prix de vente de ses parts sociales dans la SARL FORVAL, du prix de vente de ses véhicules, de fonds remis par la société AG2R et de fonds remis par la SCI Domaine de Bresson. Ils réclament une récompense de 139 481,34 euros, soit la moitié de la somme de 278 962,69 euros, qui correspond, selon eux, aux fonds propres de leur père employés à l'acquisition de l'appartement au profit de la communauté.

Les pièces versées à la procédure établissent que :

-le 13 mars 2008, selon le reçu du notaire, [F] [T] a versé un dépôt de garantie de 11 750 euros par chèque n°6482788, débité du compte personnel de [F] [T] le 19 juin 2008,

-le 22 avril 2008, les époux [T]-[W] ont remis un chèque de 200 euros n°7400011, débité du compte personnel de [F] [T] le 6 mai 2008,

-le 18 juillet 2008, la somme de 134 000 euros a été payée par un chèque de banque de la BPN Paribas, selon le reçu du notaire (acompte sur prix de vente [A]),

-le 23 juillet 2008, la somme de 71 051 euros (chèque de banque BNP paribas du 22 juillet 2008) a été débitée du compte personnel de [F] [T],

-le 29 juillet 2008 un chèque n°7842221 de 350 euros, selon le reçu du notaire qui indique «'complément acte de vente [A]'», a été débité du compte personnel de [F] [T].

La somme de 134 000 euros a été payée le 18 juillet 2008 depuis le compte joint des époux, ce montant n'apparaissant pas en effet au débit des relevés du compte personnel de [F] [T] entre le 17 juillet et le 1er août 2008 et provenant donc nécessairement du compte joint des époux.

Après le paiement du prix d'acquisition du terrain de [Localité 21], [F] [T] disposait encore de la somme de 89 000 euros, au 3 avril 2008, provenant de la vente de ses parts sociales, versée sur le compte joint des époux. La cour considère que cette somme, qui a transité sur le compte joint du couple, a bien été affectée au paiement d'une partie du prix de l'appartement de [Localité 16], et est comprise dans la somme de 134 000 euros payée depuis le compte joint du couple.

M. [Y] [T] et Mme [V] [T] ne justifient pas, cependant, que la différence entre la somme de 134 000 euros (payée depuis le compte joint) et celle de 89 000 euros correspond également à des fonds propres de leur père.

Par ailleurs, les pièces visées ci-dessus établissent que [F] [T] a financé l'acquisition de l'appartement de [Adresse 17] depuis son compte personnel à hauteur de 83 351 euros (11 750 + 200 + 71 051 + 350 euros). Ceci étant, les époux étant mariés depuis le 11 août 2007, les revenus de [F] [T], versés sur ce compte, sont tombés dans la communauté et les appelants ne démontrent pas que la totalité de la somme de 83 351 euros correspond à des fonds propres de [F] [T].

Le 18 juillet 2008 le compte personnel de [F] [T] a été crédité de la somme de 45 362,53 euros, payée par chèque. Les appelants soutiennent, sans être contredit, qu'il s'agit du prix de vente de véhicules par leur père, émis par la SAS SA CARMO et produisent une attestation de la BNP Paribas en ce sens. Il s'agit bien de fonds propres, qui compte-tenu de la date de leur encaissement, ont servi à payer pour partie le prix de l'appartement et qui sont compris dans la somme de 83 351 euros.

M. [Y] [T] et Mme [V] [T] font également état des sommes de 13 113,03 euros et 11 414,41 euros qui correspondent à deux virements par la société AG2R, encaissés sur le compte personnel de [F] [T], sous l'intitulé virement support La Mondiale, les 18 avril et 7 mai 2008, en remboursement de placements. Contrairement à ce que soutient l'intimé, ces fonds sont bien des fonds propres de [F] [T], qui appellent récompense car, compte-tenu des dates d'encaissement sur le compte personnel de celui-ci, ils ont servi à payer l'appartement. Ils sont également compris dans la somme de 83 351 euros.

M. [Y] [T] et Mme [V] [T] font ensuite état d'un chèque de 13 732,84 euros débité le 24 juin 2008 du compte personnel de [F] [T], qui correspondrait au solde du prix d'achat. Mais il n'est pas établi que cette somme, alors que l'essentiel du prix de vente a été payé après cette date et que le dernier encaissement par le notaire, dont il est justifié, date du 29 juillet 2008, correspond bien au solde du prix d'achat et a été versée au notaire pour payer le bien de [Localité 16].

L'acte de vente du 24 juillet 2008 précise que le prix est payable, à hauteur de la somme de 30 000 euros, directement entre les mains des vendeurs, au plus tard le 30 septembre 2008 par un seul versement, sans intérêts. Il est établi qu'un chèque de 30 000 euros a été débité du compte personnel de [F] [T] le 1er septembre 2008.

M. [E] [T] soutient que cette somme a été payée avec un prêt de 70 000 euros, souscrit et remboursé par la communauté, mais dont le montant a été versé sur le compte personnel de [F] [T] le 25 août 2008, quelques jours avant le paiement de la somme de 30 000 euros. Il n'est pas établi, dans ces conditions, que la somme de 30 000 euros provient de fonds propres de [F] [T].

Les appelants produisent enfin la copie de 3 chèques émis par la SCI Domaine de Bresson (constituée par [F] [T] avec sa première épouse, le 15 juillet 1991), à l'ordre de [F] [T], qui établissent qu'il a reçu :

-100 000 euros le 10 septembre 2008,

-20 072,17 euros le 10 septembre 2008 (montant du remboursement du compte courant d'associé),

-18 000 euros le 16 novembre 2008.

Ils ne justifient cependant ni que ces fonds ont été versés sur le compte personnel de [F] [T] ou sur le compte joint ni qu'ils ont servi à payer le prix et les frais de l'appartement de [Localité 16], alors que le prix et les frais ont été payés entre le 13 mars et le 29 juillet 2008, soit avant l'émission des trois chèques par la SCI Domaine de Bresson.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, la cour estime qu'il est démontré que la communauté a profité, par l'acquisition de l'appartement de [Adresse 17], des fonds propres de [F] [T] à hauteur de la somme totale de 158 889,97 euros (89 000 + 45 362,53 + 13 113,03 + 11 414,41 euros ).

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté la demande de récompense de M. [Y] [T] et Mme [V] [T] à l'encontre de la succession de [M] [W] au titre de l'acquisition de l'appartement de [Adresse 17].

L'article 1469 du code civil dispose :'«'La récompense est, en général, égale à la plus faible des deux sommes que représentent la dépense faite et le profit subsistant.

Elle ne peut, toutefois, être moindre que la dépense faite quand celle-ci était nécessaire.

Elle ne peut être moindre que le profit subsistant, quand la valeur empruntée a servi à acquérir, à conserver ou à améliorer un bien qui se retrouve, au jour de la liquidation de la communauté, dans le patrimoine emprunteur. Si le bien acquis, conservé ou amélioré a été aliéné avant la liquidation, le profit est évalué au jour de l'aliénation ; si un nouveau bien a été subrogé au bien aliéné, le profit est évalué sur ce nouveau bien.'»

Ce mode de calcul est impératif.

Il ne sera donc pas fait droit à la demande de M. [Y] [T] et Mme [V] [T] qui porte sur la moitié des fonds propres investis par leur père, soit la moitié de la dépense faite, sans tenir compte des dispositions de l'article 1469 du code civil, alors même que le tribunal et M. [E] [T], dans ses conclusions, ont relevé qu'il n'était pas justifié du mode de calcul de la récompense au regard de ces dispositions.

La cour fixera donc seulement le montant des fonds propres investis par [F] [T] pour acquérir l'appartement de [Adresse 17].

4) Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens

Parties perdantes en appel, les intimés seront condamnés aux dépens.

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de M. [Y] [T] et Mme [V] [T] les frais qu'ils ont exposés qui ne sont pas compris dans les dépens et leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déclare irrecevable la demande d'aide juridictionnelle provisoire formée par M. [E] [T],

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [Y] [T] et Mme [V] [T] de leurs demandes de récompenses à l'encontre de la succession de Mme [W],

Statuant à nouveau,

Dit que le prix et les frais accessoires d'acquisition du terrain de [Localité 21] ont été payés par des fonds propres de [F] [T] à hauteur de 233 000 euros,

Dit que le prix et les frais accessoires d'acquisition de l'appartement de [Adresse 17] ont été payés par des fonds propres de [F] [T] à hauteur de 158 889,97 euros,

Déboute M. [Y] [T] et Mme [V] [T] de leurs demandes de «'Dire qu'il y a lieu à récompenses de ce chef à hauteur de 139 481,34 euros pour [Localité 16] et 116 500 euros pour [Localité 21]'»,

Déboute M. [Y] [T] et Mme [V] [T] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne in solidum M. [E] [T], Mme [O] [X] et M. [D] [L] aux dépens exposés en appel.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20/03039
Date de la décision : 31/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-31;20.03039 ?
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