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31/05/2022 | FRANCE | N°20/00991

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 31 mai 2022, 20/00991


1ère Chambre





ARRÊT N°211/2022



N° RG 20/00991 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QPCD













M. [V] [Z]

Mme [O] [Z]



C/



S.A.R.L. DIATLAN

















Copie exécutoire délivrée



le :



à :







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 31 MAI 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS

DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Aline DELIÈRE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique VEILLARD, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Caroline BRISSIAUD, Conseillère,





GREFFIER :



Madame Juliette VANHERSEL, lors des débats, et Madame Marie-Claude COURQUIN, lors du prononcé,


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1ère Chambre

ARRÊT N°211/2022

N° RG 20/00991 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QPCD

M. [V] [Z]

Mme [O] [Z]

C/

S.A.R.L. DIATLAN

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 31 MAI 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Aline DELIÈRE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique VEILLARD, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Caroline BRISSIAUD, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Juliette VANHERSEL, lors des débats, et Madame Marie-Claude COURQUIN, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l'audience publique du 21 Mars 2022 devant Madame Véronique VEILLARD, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 31 Mai 2022 par mise à disposition au greffe, après prorogation du délibéré annoncé au 24 mai 2022 à l'issue des débats

****

APPELANTS :

Monsieur [V] [Z]

né le [Date naissance 4] 1968 à [Localité 7]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représenté par Me Yohan VIAUD de la SELARL PARTHEMA, avocat au barreau de NANTES

Madame [O] [Z]

née le [Date naissance 3] 1970 à [Localité 6]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Yohan VIAUD de la SELARL PARTHEMA, avocat au barreau de NANTES

INTIMÉE :

La S.A.R.L. DIATLAN exerçant sous l'enseigne ARLIANE DIAGNOSTIC IMMOBILIER agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Céline DEMAY de la SCP DEPASSE, DAUGAN, QUESNEL, DEMAY, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Jean-Marc PEREZ de la SELARL AVOX, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte en date du 5 juillet 2018, M. et Mme [G] ont vendu à M. et Mme [Z] une maison d'habitation sise [Adresse 2].

Lors de cette vente, les vendeurs, transmettaient aux acquéreurs un diagnostic immobilier datant du 12 novembre 2017 et réalisé par la sarl Diatlan, exerçant sous l'enseigne Arliane Diagnostic Immobilier (ci-après la sarl Diatlan) qui concluait à la présence d'amiante au sein de la chaufferie.

A l'occasion de travaux de mise en place de velux à l'étage, la société Soprema, chargée du chantier, alertait M. et Mme [Z] de la présence d'ardoises fibrociment amiantées sur la toiture, ce que confirmait le rapport du laboratoire ITGA du 1er novembre 2018.

En l'absence de réponse à leur mise en demeure du 20 novembre 2018 d'avoir à prendre en charge le désamiantage et la réfection de leur toiture, M. et Mme [Z] assignaient la sarl Diatlan devant le tribunal de grande instance de Nantes, qui, par jugement réputé contradictoire du 12 décembre 2019 rendu sous le bénéfice de l'exécution provisoire, condamnait celle-ci à payer à M. et Mme [Z] les sommes de :

- 12.838,66 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice lié au surcoût occasionné pour la réfection de la toiture, avec indexation sur l'évolution de l'indice BT 01 depuis le 15 octobre 2018,

- 1.500 € au titre des frais irrépétibles,

Outre la charge des dépens.

Le préjudice de jouissance n'était pas retenu faute pour les requérants d'établir une impossibilité d'habiter.

M. et Mme [Z] ont interjeté appel le 10 février 2020 sur le quantum des dommages et intérêts et le rejet du préjudice de jouissance.

PRÉTENTIONS ET MOYENS

M. et Mme [Z] exposent leurs demandes et moyens dans leurs dernières conclusions notifiées et remises au greffe le 12 janvier 2022 auxquelles il est renvoyé en application de l'article 455 alinéa 1 du code de procédure civile.

Ils demandent à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a caractérisé la responsabilité délictuelle de la société Diatlan et en ce qu'il l'a condamnée aux entiers dépens de l'instance et au paiement d'une somme de 1.500 € au titre des frais irrépétibles,

- infirmer le jugement en ce qu'il a limité la réparation du préjudice subi par eux à la somme de 12.838,66 € correspondant au seul surcout représenté par le désamiantage,

- infirmer le jugement en ce qu'il les a déboutés de leur demande de réparation au titre du préjudice de jouissance,

- en conséquence et jugeant de nouveau,

- condamner la société Diatlan à leur payer la somme de 32.900,24 € au titre du préjudice, avec intérêts au taux légal à compter de la date de notification des conclusions et capitalisation des intérêts échus depuis plus d'une année,

- condamner la société Diatlan à leur payer une somme de 5.000 € en réparation du préjudice de jouissance,

- condamner la société Diatlan aux dépens d'appel et au paiement d'une somme de 3.000 € au titre des frais irrépétibles.

La sarl Diatlan expose ses demandes et moyens dans ses dernières conclusions notifiées et remises au greffe le 18 janvier 2022 auxquelles il est renvoyé en application de l'article 455 alinéa 1 du code de procédure civile.

Elle demande à la cour de :

- dire que le préjudice de M. et Mme [Z] correspond à la perte de chance de négocier le prix d'acquisition de la maison connaissance prise de la présence d'amiante dans les ardoises de couverture,

- subsidiairement,

- dire que la réparation intégrale du préjudice subi par M. et Mme [Z] correspond au surcoût des travaux liés à la présence d'amiante,

- dans l'un et l'autre cas,

- dire que l'indemnisation allouée par le tribunal dans le jugement entrepris est satisfactoire,

- confirmer en conséquence le jugement en toutes ses dispositions,

- débouter M. et Mme [Z] de leurs demandes,

- les condamner aux dépens de la procédure d'appel.

MOTIFS DE L'ARRÊT

A titre liminaire, il convient de rappeler que l'office de la cour d'appel est de trancher le litige et non de donner suite à des demandes de "constater", "dire" ou "dire et juger" qui ne constituent pas des prétentions au sens des articles 4, 5 et 954 du code de procédure civile mais la reprise des moyens censés les fonder.

1) Sur la demande de dommages et intérêts en réparation de la présence d'amiante dans la toiture

M. et Mme [Z] soutiennent que la sarl Diatlan a commis un manquement à ses obligations contractuelles dans le cadre de sa mission de diagnostic de l'amiante, qu'elle n'a pas contrôlé la toiture alors qu'un simple contrôle visuel permettait d'identifier la présence d'amiante, qu'ils peuvent prétendre à la réparation intégrale du préjudice subi constitué par le fait d'avoir acquis un bien amianté sur la base d'un diagnostic contraire, qu'enfin, il est de jurisprudence constante que la réparation englobe le coût du désamiantage et celui de la réfection de la toiture. Ils soutiennent que les travaux ont été réalisés durant 4 semaines, justifiant l'octroi de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice de jouissance.

La sarl Diatlan soutient que le désamiantage n'est pas nécessaire, ni au plan de la réglementation, ni en pratique, que sa faute de diagnostic liée à une absence de contrôle de la toiture n'étant pas contestée, elle doit réparation non pas du remplacement de la toiture mais du préjudice né du surcoût des travaux en présence d'amiante ou du préjudice de n'avoir pas permis à M. et Mme [Z], sur le fondement de la perte de chance, de négocier à la baisse le prix du bien acquis.

En droit, il résulte de l'article 1240 du code civil que tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Il est constant que le tiers à un contrat peut invoquer tout manquement contractuel qui lui a causé un dommage sur le fondement de la responsabilité délictuelle.

Enfin, il est également de jurisprudence constante, ainsi que l'a rappelé le premier juge, que l'erreur du diagnostiqueur, tenu à une obligation de résultat dans l'exercice de sa mission d'information, engage sa responsabilité, de sorte qu'il doit indemniser l'intégralité du préjudice résultant de l'inexactitude de son rapport.

Au cas particulier, la faute et la responsabilité de la sarl Diatlan n'étant pas contestées, il s'agit dès lors de déterminer le préjudice subi par M. et Mme [Z] du fait du caractère erroné du rapport de diagnostic "amiante" établi le 12 novembre 2017 qui ne mentionnait pas la présence d'amiante sur la toiture, mais seulement dans la partie chaufferie, laquelle présence d'amiante en toiture était ultérieurement confirmée par le rapport du laboratoire ITGA du 1er novembre 2018.

M. et Mme [Z] ont donc acquis le logement sans être informés de la présence d'amiante sur la toiture de la maison.

Leur préjudice s'analyse comme l'impossibilité dans laquelle ils se sont trouvés au moment de l'achat d'évaluer la nécessité de travaux, leur caractère obligatoire ou non, leur périmètre et leur ampleur et, dans l'affirmative, le montant de ceux-ci.

A ce titre, il résulte de la règlementation sur l'amiante qu'il n'est pas obligatoire de changer une toiture contenant de l'amiante si celle-ci ne présente pas de détérioration ni de fibres volatiles. Il est en revanche obligatoire d'appliquer les mesures de protection adaptées en cas de travaux réalisés sur ce type de toiture.

M. et Mme [Z] produisent un devis de la société Soprema en date du 15 octobre 2018 qui chiffre les travaux de désamiantage et la réfection totale de la couverture en ardoise pour un montant de 28.720,54 € hors taxe.

Toutefois, ainsi que l'a retenu le premier juge, ils n'établissent pas que la toiture présente des détériorations telles qu'elle appellerait un remplacement total, ni même du reste partiel. La seule présence de matériaux amiantés, dont il n'est pas établi que les fibres sont volatiles, est insuffisante à justifier un changement complet de toiture.

Ainsi, le préjudice de M. et Mme [Z] ne saurait être évalué au montant de l'ensemble des opérations de désamiantage et de réfection complète de la toiture, mais doit être circonscrit au seul surcoût du désamiantage en cas de remplacement total de ladite toiture.

Ce surcoût a été précisément chiffré par la société Soprema dans son devis du 15 octobre 2018 à la somme de 11.671 € hors taxe, soit 12.838,66 € toutes taxes comprises, retenue à juste titre par le premier juge comme constituant le préjudice réel et certain de M. et Mme [Z].

Le jugement sera en conséquence confirmé sur ce point.

2) Sur la demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice de jouissance

M. et Mme [Z] soutiennent avoir fait réaliser les travaux de remplacement de la toiture, qui auraient duré 4 semaines, pendant lesquelles ils ont supporté la présence d'un échafaudage, le bâchage de la toiture, avec création d'infiltrations, et les désagréments liés à ce chantier.

Ce préjudice allégué est en réalité en lien avec le remplacement de la toiture, lequel remplacement, ainsi qu'il l'a été ci-dessus jugé, n'est pas retenu au nombre des préjudices recevables.

M. et Mme [Z] ne peuvent justifier d'aucun préjudice de jouissance lié aux opérations de désamiantage par elles-mêmes.

Le rejet de la demande de réparation dudit préjudice de jouissance prononcé par le premier juge sera confirmé.

3) Sur les dépens et les frais irrépétibles

Succombant, M. et Mme [Z] supporteront solidairement les dépens d'appel. Le jugement sera confirmé s'agissant des dépens de première instance.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Nantes le 12 décembre 2019,

Y ajoutant,

Condamne M. [V] [Z] et Mme [O] [Z] aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20/00991
Date de la décision : 31/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-31;20.00991 ?
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