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17/05/2022 | FRANCE | N°19/06783

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 17 mai 2022, 19/06783


1ère Chambre





ARRÊT N°190/2022



N° RG 19/06783 - N° Portalis DBVL-V-B7D-QFPR













M. [I] [U]



C/



ASSOCIATION SYNDICALE LIBRE DE [Adresse 7]

















Copie exécutoire délivrée



le :



à :







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 17 MAI 2022





COMPOSITION DE LA COU

R LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Aline DELIÈRE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique VEILLARD, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Caroline BRISSIAUD, Conseillère,





GREFFIER :



Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé





DÉBATS :



A...

1ère Chambre

ARRÊT N°190/2022

N° RG 19/06783 - N° Portalis DBVL-V-B7D-QFPR

M. [I] [U]

C/

ASSOCIATION SYNDICALE LIBRE DE [Adresse 7]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 17 MAI 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Aline DELIÈRE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique VEILLARD, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Caroline BRISSIAUD, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 21 Février 2022 devant Madame Caroline BRISSIAUD, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 17 Mai 2022 par mise à disposition au greffe, après prorogation du délibéré annoncé au 10 mai 2022 à l'issue des débats

****

APPELANT :

Monsieur [I] [U]

né le 20 Juin 1949 à ARQUAN

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représenté par Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉE :

ASSOCIATION SYNDICALE LIBRE DE [Adresse 7], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Guillaume LENGLART de la SELARL LRB, avocat au barreau de NANTES

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [I] [U] est propriétaire avec son épouse d'une parcelle sise à [Localité 6] cadastrée section A n°[Cadastre 2].

Cette parcelle est attenante aux parcelles cadastrées section A n°[Cadastre 4] et n°[Cadastre 3].

L'Association Syndicale Libre de [Adresse 7] est propriétaire de la parcelle cadastrée section A n° [Cadastre 4] à [Localité 6], cette parcelle constituant un espace vert commun à tous les propriétaires membres de l'Association Syndicale Libre de [Adresse 7].

A compter de l'année 2015, M. [U] s'est plaint de la création sur la parcelle n°[Cadastre 4] d'une butte avec excavation autour, ayant eu pour effet de modifier l'écoulement des eaux pluviales, lesquelles stagnent désormais au pied de son mur situé en limite de propriété et s'accumulent dans son jardin, rendant celui-ci en partie inutilisable.

Les tentatives de conciliation préalables par un conciliateur de justice n'ont pas permis de résoudre le litige.

Par acte d'huissier du 30 août 2018, M. [I] [U] a fait assigner l'Association Syndicale Libre de [Adresse 7] devant le tribunal d'instance de Nantes sur le fondement des articles 640 et 641 du Code civil aux fins d'obtenir la condamnation de l'Association Syndicale Libre de [Adresse 7] à effectuer les travaux propres à remettre le sol dans son état initial (surface plane et hauteur) ainsi qu'à lui verser la somme de 2.500 € à titre de dommages et intérêts, outre les frais irrépétibles et les dépens.

Par jugement du 25 juin 2019, le tribunal a considéré que M. [U] ne justifiait pas que la situation alléguée résultait d'une modification des lieux imputable à la partie défenderesse et après avoir débouté ce dernier de ses demandes, l'a condamné à payer à l'Association Syndicale Libre de [Adresse 7] une somme de 850 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Suivant déclaration du 11 octobre 2019, M. [I] [U] a interjeté appel de cette décision.

La clôture est intervenue suivant ordonnance du 1er février 2022.

Aux termes de ses dernières conclusions, transmises le 21 février 2022, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des moyens et prétentions, M. [I] [U] demande à la cour de :

A titre liminaire, vu les demandes conjointes des parties,

Ordonner la révocation de la clôture,

Vu les dispositions des articles 640 et 641 du Code civil et de l'article 202 du Code de procédure civile,

Recevant l'appel, le disant bien fondé et y faisant droit,

Réformer le jugement déféré en ce qu'il a :

-débouté M. [U] de ses demandes tendant à voir condamner l'Association Syndicale Libre de [Adresse 7] à procéder, à tous changements qui s'imposent pour remédier à la situation subie par M. [U], c'est-à-dire en remettant le sol dans son état initial (surface plane et hauteur), condamner l'Association Syndicale Libre de [Adresse 7] à lui verser une indemnité de 2 500 € outre une somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

-condamné M. [U] à payer à l'Association Syndicale Libre de [Adresse 7] une somme de 850 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.

Statuant à nouveau de ces chefs,

-écarter des débats les attestations de la SARL [H] ainsi que des riverains communiquées par l'Association Syndicale Libre de [Adresse 7] sous les numéros 1 à 17,

-condamner l'Association Syndicale Libre de [Adresse 7] à procéder à tous changements qui s'imposent pour qu'il soit mis un terme à l'aggravation de la servitude en remettant notamment le sol de l'angle Sud Est de la parcelle [Cadastre 4] dans son état initial c'est à dire en surface plane et au niveau de ligne identifiable sur les parpaings de la propriété de M. [U] avec respect de l'altimétrie d'origine afin que l'écoulement des eaux reprenne son cours naturel,

-condamner l'Association Syndicale Libre de [Adresse 7] à verser à M. [U] une somme de 2 500 € à titre de dommages intérêts,

Condamner l'Association Syndicale Libre de [Adresse 7] à verser à M. [U] une somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

-condamner l'Association Syndicale Libre de [Adresse 7] aux entiers dépens d'instance et d'appel lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile,

A titre subsidiaire, ordonner une expertise et désigner à cette fin tel expert qu'il plaira à la cour aux fins notamment de déterminer notamment si l'altimétrie a été modifiée en limite des parcelles [Cadastre 4], [Cadastre 3] et [Cadastre 2], si la pente d'écoulement des eaux a également été modifiée et s'il en résulte une modification ou une aggravation de la servitude.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises le 16 février 2022, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des moyens et prétentions, l'Association Syndicale Libre (ASL) de [Adresse 7] demande à la cour de :

-Confirmer le jugement du tribunal d'instance de Nantes du 25/06/2019, en ce qu'il a débouté M. [U] de ses demandes et condamner M. [U] à verser une indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

-Rejeter l'ensemble des demandes de M. et Mme [U] à l'encontre de l'Association Syndicale Libre de [Adresse 7],

-Condamner M. [U] à verser à l'Association Syndicale Libre de [Adresse 7] la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

MOTIFS DE L'ARRÊT

1°/ Sur la révocation de l'ordonnance de clôture et l'admission des conclusions postérieures

Les parties sollicitent conjointement la révocation de l'ordonnance de clôture rendue le 1er février 2022 afin :

-pour M. [U], de faire admettre aux débats ses conclusions postérieures après régularisation de la date qui y était mentionnée. Il expose en effet avoir transmis le 31 janvier 2022 des conclusions datées par erreur du 13 janvier 2022, date de ses premières conclusions d'appelant,

-pour l'ASL, de faire admettre aux débats ses conclusions en réponse. Elle expose en effet ne pas avoir répondu aux dernières conclusions transmises le 31 janvier 2022 par l'appelant, soit la veille de la clôture, l'erreur de date portée sur les conclusions lui ayant laissé penser que l'appelant ne faisait que notifier à nouveau ses premières conclusions d'appelant du 13 janvier 2022.

Le respect du principe du contradictoire étant une cause grave au sens de l'article 802 du code de procédure civile, il y a lieu de révoquer, à la demande conjointe des parties, l'ordonnance de clôture du 1er février 2022 et d'admettre aux débats :

-les conclusions transmises par M. [U] le 21 février 2022 qui sont identiques à celles transmises le 18 février 2022, si ce n'est l'ajout de la demande de révocation de l'ordonnance de clôture,

-les conclusions transmises par l'ASL de [Adresse 7] le 16 février 2022.

2°/ Sur les demandes principales de M. [U]

*En droit

S'agissant des servitudes d'écoulement d'eau, l'article 640 du code civil dispose que «les fonds inférieurs sont assujettis envers ceux qui sont plus élevés, à recevoir les eaux qui en découlent naturellement sans que la main de l'homme y ait contribué. Le propriétaire inférieur ne peut point élever de digue qui empêche cet écoulement. Le propriétaire supérieur ne peut rien faire qui aggrave la servitude du fonds inférieur».

L'article 641 du code civil précise que « tout propriétaire a le droit d'user et de disposer des eaux pluviales qui tombent sur son fonds.

Si l'usage de ces eaux ou la direction qui leur est donnée aggrave la servitude naturelle d'écoulement établie par l'article 640, une indemnité est due au propriétaire du fonds inférieur (...). »

En outre, il résulte de l'article 702 du code civil que le propriétaire du fonds dominant est soumis à la règle de la fixité de la servitude, qui lui interdit d'apporter à l'état des lieux des modifications entraînant une aggravation de la charge grevant le fonds servant.

Les juges apprécient souverainement s'il y a eu ou non aggravation d'une servitude.

Enfin, aux termes de l'article 1353 du code civil : « Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation. »

* En fait

En l'espèce, il n'est pas contesté qu'en raison de la déclivité naturelle du terrain, une servitude d'écoulement des eaux pluviales grève le fonds cadastré A n°[Cadastre 2] appartenant à M. [U] au profit du fonds cadastré section A n° [Cadastre 4] relevant du lotissement de [Adresse 7].

Agissant sur le fondement des articles 640 et 641 précités, il incombe à M. [U], sur qui pèse la charge de la preuve, de démontrer d'une part, que des modifications ont été apportées de la main de l'homme sur le fonds dominant et d'autre part, que ces modifications ont aggravé la situation du fonds servant.

M. [U] fait valoir qu'en 2015, une butte a été érigée sur la parcelle n°[Cadastre 4], à l'angle limitrophe des parcelles n°[Cadastre 2] et n°[Cadastre 3], le long de la parcelle n°[Cadastre 3]. Selon lui, l'édification de cette butte s'est accompagnée d'un creusement du sol et ces travaux ont modifié la configuration du terrain ainsi que son altimétrie, avec pour conséquence de modifier le sens naturel de ruissellement des eaux pluviales souterraines. Il expose que celles-ci étaient auparavant naturellement réparties entre les fonds n°[Cadastre 2] et n°[Cadastre 3] et que depuis les aménagements réalisés sur le fonds voisin en 2015, l'intégralité des eaux pluviales s'écoule et stagne sur son terrain.

L'ASL conteste avoir créé une butte en 2015 et rappelle que des plantes existaient déjà à l'angle de la parcelle en 2014, de sorte que le « talus paysager » constaté par l'huissier de justice, devait déjà exister.

Il résulte des photographies produites que, d'évidence, la parcelle n°[Cadastre 4] a fait l'objet postérieurement à l'année 2014, à tout le moins, d'un réaménagement paysager puisque le massif arbusif (notamment composé d'un rhododendron) qui se situait à l'angle Sud Est de la parcelle n'existait déjà plus lors du constat dressé le 20 février 2018 par l'huissier de justice mandaté par M. [U]. De fait, ce massif a été remplacé par de jeunes plantations de petite taille (les parties s'accordent pour dire qu'il s'agit notamment d'un photinia) ainsi que par l'installation d'une sorte de palissade et d'un portail qui n'existaient pas auparavant.

Dans son procès-verbal de constat daté du 20 février 2018, l'huissier de justice mandaté par M. [U] a relevé l'existence 'd'un talus paysager'  de 20 centimètres de hauteur.

La photographie annexée à ce constat rend effectivement compte d'un léger dénivelé à l'endroit litigieux sans qu'il soit possible de dire si ce dénivelé résulte de la surélévation du terrain existant (création d'une butte ou plutôt d'un petit tertre) ou de son excavation, ce qui n'est pas équivalent. Par ailleurs, la cour constate, qu'au cours de ses opérations, non contradictoires bien que réalisées sur la parcelle du voisin, l'huissier n'a pas objectivé l'importance de ce « talus » au moyen d'un instrument de mesure. La photographie permet en effet difficilement à la cour de se convaincre de la hauteur de ce monticule de terre, d'autant que sur la photographie n°19 produite par l'ASL (qu'elle date de janvier 2018, sans vérification possible), aucun talus n'est véritablement perceptible.

En tout état de cause à supposer que ce talus existe, les photographies produites ne permettent pas de rendre compte de l'état du terrain avant les nouvelles plantations réalisées sur la parcelle n°[Cadastre 4] en 2014/2015, puisque compte tenu de la présence du massif arbusif, assez fourni, le sol n'est pas visible.

Au surplus, l'ASL produit plusieurs attestations indiquant qu'aucun travaux de nature à modifier l'état du sol n'a été effectué.

Contrairement à ce que soutient M. [U], le seul fait que la société [H] soit l'entreprise prestataire de l'ASL pour l'entretien des extérieurs du lotissement ne suffit pas à démontrer l'insincérité des deux attestations établies. Il n'y a pas lieu, sur le fondement de l'article 202 du code de procédure civile, d'écarter des débats ces deux attestations dont il appartient à la cour d'apprécier la valeur probante.

Dans ces attestations, l'entreprise [H] ne précise pas si c'est elle qui a procédé à l'arrachage du massif existant (notamment le rhododendron) et à son remplacement par d'autres plantations (notamment le photinia) ni si elle est intervenue pour l'installation de la palissade et du portail. Elle se contente de dire « qu'il n'y a pas eu création de butte ni de creusement du sol » et qu'il n'y a eu « aucun travaux effectués de nature à modifier l'état du sol ». Il est raisonnable de penser que ce professionnel, étant chargé de l'entretien de la parcelle et notamment de la tonte de la pelouse, aurait remarqué la création d'un dénivelé de 20 cm sur le fond de la parcelle. Son témoignage reste donc probant même s'il n'est pas à l'origine des travaux de plantation.

S'agissant des attestations des propriétaires du lotissement, M. [U] déduit vainement du courrier du président de l'ASL en date du 15 septembre 2018 (pièce n°3 appelant) que les attestations produites auraient été dictées et qu'elles seraient à ce titre irrecevables.

Cependant, dans son courrier adressé aux colotis, le président de l'ASL ne fait que solliciter le témoignage des colotis « qui le souhaitent », en joignant « un exemple d'attestation ». Il ne peut donc être soutenu que celles-ci ont été 'dictées', ce terme induisant l'existence d'une contrainte, nullement caractérisée en l'espèce. Il n'y a donc pas lieu d'écarter les attestations des colotis pour ce motif.

En revanche, en application de l'article 202 du code de procédure civile, l'attestant doit retranscrire ce qu'il a personnellement constaté. En l'espèce, ne peuvent valablement attester de l'absence de travaux ayant modifié la configuration du sol, que les colotis installés dans le lotissement avant l'année 2015, date alléguée des travaux litigieux. Or, la plupart des attestations produites ne comporte pas cette précision, ce qui n'affecte en rien leur validité mais les prive de toute valeur probante.

La cour ne retiendra donc que l'attestation de Mme [F] (pièce n°4 intimée), laquelle est particulièrement intéressante dans la mesure où celle-ci est propriétaire de la parcelle n°[Cadastre 3] qui jouxte les parcelles en cause n°[Cadastre 4] et [Cadastre 2]. Elle est donc particulièrement bien placée pour savoir quels travaux ont été engagés sur la parcelle voisine. Or, elle atteste que depuis l'achat de sa maison en 2002, il n'a été effectué aucun travaux de nature à modifier l'état du sol sur le fonds n°[Cadastre 4].

Ce témoignage est confirmé par l'attestation de M. [E] [O] (pièce n°16), lequel atteste que depuis sa présence dans le lotissement en 2004, aucun travaux de nature à modifier l'état du sol n'a été effectué. Le fait que celui-ci ne réside pas à proximité immédiate de la parcelle n° [Cadastre 4] est sans aucune incidence, dès lors que pour sortir du lotissement, il est amené à emprunter la voie longeant la parcelle n°[Cadastre 4] et que rien ne lui interdit de se rendre dans cet espace vert.

L'ASL produit en outre plusieurs photographies (notamment la pièce n°18 où le rhododendron est encore visible) établissant qu'avant même le réaménagement paysager réalisé en 2014/2015, de l'eau pouvait stagner à l'angle Sud Est de la parcelle n°[Cadastre 4] et que la situation est restée exactement la même après les travaux de réaménagement, à l'occasion de fortes pluies. Il s'en déduit que la problématique d'eau stagnante à cet endroit préxistait aux réaménagements paysagers d'une part, et que l'eau continuant à stagner, la pente n'a pas été modifiée.

En outre, s'il résulte du relevé d'altimétrie du lotissement lors de sa construction que les pentes naturelles conduisent les eaux pluviales vers l'angle Sud Est de la parcelle n°[Cadastre 4], soit vers les propriétés [U] et [F], rien ne permet d'affirmer comme le soutient M. [U] que les eaux se versaient pour moitié sur son fonds et pour moitié sur le fonds n°[Cadastre 3] d'une part, ni qu'à la faveur des travaux allégués, les eaux pluviales auraient été intégralement détournées en direction de son fonds d'autre part.

M. [U] ne démontre pas que les points altimétriques, tels qu'ils résultent du plan du lotissement lors de sa construction, auraient été modifiés par la main de l'homme, en dehors de tout phénomène d'érosion naturelle. Par ailleurs, M. [U] ne peut, sans inverser la charge de la preuve, reprocher à l'ASL de ne pas produire un relevé altimétrique actualisé afin de démontrer l'absence de modification des sols.

La cour ne saurait être convaincue par l'argumentation relative à la nécessité pour faire pousser un photinia sur un terrain humide, de créer une élévation permettant un meilleur drainage, dès lors que des arbustes étaient déjà plantés à cet endroit.

M. [U] ne démontre pas davantage l'aggravation de la situation de son fonds dans la mesure où il ne produit, comme en première instance, qu' un seul constat d'huissier daté du 20 février 2018, dont il ressort que le fonds de son jardin est gorgé d'eau.

Il reconnaît cependant dans ses écritures que son terrain est humide. Il n'est donc pas surprenant qu'au mois de février, après de fortes pluies, son terrain soit détrempé.

M. [U] ne justifie par aucune pièce de l'état antérieur de son jardin ni de la récurrence ou de l'aggravation de ce phénomène de stagnation (un seul constat d'huissier produit, daté de 2018), étant observé que les aménagements qu'il a mis en place (balançoire, niche) sont toujours présents lors du constat d'huissier, sans que soit démontré un état de dégradation lié à l'humidité, les rendant inutilisables.

Au total, M. [U] échoue à faire la preuve que des modifications apportées par la main de l'homme sur le fonds dominant auraient eu pour effet d'aggraver la charge résultant de la servitude d'eaux pluviales pesant sur son terrain.

Le jugement sera par conséquent confirmé en ce qu'il a débouté M. [U] de l'intégralité de ses demandes.

3°/ Sur la demande subsidiaire d'expertise judiciaire

L'article 146 du code de procédure civile dispose qu'une mesure d'instruction ne peut être ordonnée sur un fait que si la partie qui l'allègue ne dispose pas d'éléments suffisants pour le prouver. En aucun cas, une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l'administration de la preuve.

M. [U] qui se contente de produire un constat d'huissier daté de 2018 et un relevé altimétrique qui ne fait que confirmer la déclivité du terrain rendant inéluctablement humide sa parcelle, ne justifie d'aucun élément précis ni d'aucune pièce sérieuse au soutien de ses prétentions.

La cour ne saurait faire droit à cette demande d'instruction qui au demeurant n'avait pas été présentée devant le premier juge, afin de pallier la carence de M. [U] dans l'administration de la preuve devant la cour d'appel.

4°/ Sur les demandes accessoires

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irépétibles seront confirmées.

Succombant de nouveau en appel, M. [U] sera condamné aux dépens et à payer à l'ASL la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, lui-même étant débouté de sa propre demande sur ce fondement.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Ordonne la révocation de l'ordonnance de clôture du 1er février 2022 et déclare en conséquence recevables les conclusions déposées par M. [I] [U] le16 février 2022 et par l'Association Syndicale Libre de [Adresse 7] le 21 février 2022 ;

Ordonne la clôture de l'instruction au jour de l'audience ;

Déboute M. [I] [U] de sa demande d'expertise ;

Déboute M. [I] [U] de sa demande tendant à écarter des débats les attestations de la SARL [H] et celles des riverains communiquées par l' Association Syndicale Libre de [Adresse 7] sous les numéros 1 à 17 ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 25 juin 2019 par le tribunal d'instance de Nantes ;

Y ajoutant,

Déboute M. [I] [U] de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [I] [U] à payer à l'Association Syndicale Libre de [Adresse 7] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [I] [U] aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19/06783
Date de la décision : 17/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-17;19.06783 ?
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