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13/05/2022 | FRANCE | N°19/01024

France | France, Cour d'appel de Rennes, 2ème chambre, 13 mai 2022, 19/01024


2ème Chambre





ARRÊT N°301



N° RG 19/01024

N° Portalis DBVL-V-B7D-PRC4













SAS PRÉSERVATION DU PATRIMOINE DE L'OUVERTURE (PPO)



C/



Mme [C] [E] épouse [X]

Mme G [M]

SA DOMOFINANCE



















Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée













Copie exécutoire délivrée



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à :

- Me VERRANDO

- Me GRENO

- Me LECLERCQ

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 13 MAI 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur Jean-François PO...

2ème Chambre

ARRÊT N°301

N° RG 19/01024

N° Portalis DBVL-V-B7D-PRC4

SAS PRÉSERVATION DU PATRIMOINE DE L'OUVERTURE (PPO)

C/

Mme [C] [E] épouse [X]

Mme G [M]

SA DOMOFINANCE

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me VERRANDO

- Me GRENO

- Me LECLERCQ

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 13 MAI 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,

Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Ludivine MARTIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 25 Février 2022,

devant Madame Hélène BARTHE-NARI, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 13 Mai 2022, après prorogation, par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

SAS PRÉSERVATION DU PATRIMOINE DE L'OUVERTURE (PPO)

[Adresse 7]

[Localité 5]

Représentée par Me Marie VERRANDO de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Mathilde LOHEAC de la SELAS AVOGAMA, plaidant, avocat au barreau de NANTES

INTIMÉES :

Madame [C] [E] épouse [X]

née le 23 Janvier 1937 à [Localité 9]

[Adresse 2]

[Localité 4]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/003114 du 19/04/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RENNES)

Madame [M] ès qualité de tuteur de Monsieur [X] désignée à cette fonction suivant jugement en date du 26 juin 2016

[Adresse 8]

[Localité 3]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/003112 du 19/04/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RENNES)

Représentées par Me Catherine GRENO, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-NAZAIRE

SA DOMOFINANCE

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Erwan LECLERCQ de la SCP LECLERCQ & CASTRES, postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me William MAXWELL de la SAS MAXWELL MAILLET BORDIEC, plaidant, avocat au barreau de BORDEAUX

EXPOSE DU LITIGE

A la suite d'un démarchage à domicile, M. [T] [X] et Mme [C] [E] son épouse (les époux [X]) ont, selon bon de commande du 6 octobre 2015, commandé à la société Préservation du Patrimoine de l'Ouverture (la société PPO) la réalisation de travaux d'isolation thermique extérieur sur leur maison d'habitation, moyennant le prix de 15 300 euros TTC.

En vue de financer cette opération, la société Domofinance a, selon offre acceptée le même jour, consenti aux époux [X] un prêt de 15 300 euros au taux de 1,93 % l'an, remboursable en une mensualité de 221,62 euros puis 83 mensualités de 210,77 euros, assurance emprunteurs inclus, avec un différé d'amortissement de 6 mois.

Par jugement du 24 juin 2016, le juge des tutelles de Saint-Nazaire a placé M. [X] sous tutelle, Mme [Z] [M], mandataire judiciaire à la protection des majeurs, étant désignée en qualité de tutrice.

Prétendant avoir été abusés par le démarcheur et que le bon de commande était irrégulier, Mme [X] et Mme [M], ès-qualités de tutrice de M. [X], ont, par actes des 25 et 26 janvier 2018, fait assigner devant le tribunal d'instance de Saint-Nazaire la société PPO et la société Domofinance en annulation des contrats de vente et de crédit, et en remboursement des échéances échues et payées.

Par jugement du 21 novembre 2018, le tribunal d'instance a :

prononcé l'annulation du contrat passé entre les époux [X] et la société PPO,

constaté l'annulation de plein droit du contrat passé entre les époux [X] et la société Domofinance,

ordonné la remise des choses en l'état, et condamné la société Domofinance à rembourser aux époux [X] la somme de 2 367,82 euros,

condamné la société PPO à rembourser à la société Domofinance la somme de 15 300 euros,

débouté la société PPO de sa demande en paiement,

débouté la société Domofinance de sa demande en paiement à l'encontre des époux [X],

condamné la société PPO et la société Domofinance à payer aux époux [X] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

La société PPO a relevé appel de ce jugement le 14 février 2019, et aux termes de ses dernières conclusions du 9 juillet 2021, elle demande à la cour de :

la dire recevable et bien fondée en son appel,

À titre principal,

infirmer le jugement attaqué en ce qu'il a prononcé l'annulation du contrat passé entre Mme et M. [X] et la société PPO, sur la base de l'article L.121-17 du code de la consommation,

Et, statuant à nouveau,

dire et juger que les époux [X] étaient des personnes capables au 6 octobre 2015,

constater que le bon de commande du 6 octobre 2015 respecte les dispositions légales et réglementaires en vigueur au jour de sa signature,

constater l'absence de violences de la société PPO à l'encontre de Mme [X],

Par conséquent,

dire et juger que le bon de commande du 6 octobre 2015 est valablement conclu,

débouter Mme [Z] [M], es-qualités de tutrice de M. [X], et Mme [X] de toute demande de nullité du contrat,

À titre subsidiaire,

infirmer le jugement attaqué en ce qu'il :

l'a condamnée à rembourser à Domofinance la somme de 15 300 euros,

l'a déboutée de sa demande en paiement,

Et, statuant à nouveau,

condamner Mme [Z] [M], es-qualités de tutrice de M. [X], et Mme [X] à lui verser la somme de 10 000 euros correspondant aux travaux entrepris au titre des restitutions réciproques,

ordonner la compensation des créances,

En tout état de cause,

infirmer le jugement attaqué en ce qu'il a :

condamné la société PPO et la société Domofinance à payer aux époux [X] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la société PPO et la société Domofinance aux entiers dépens,

Et, statuant à nouveau,

débouter Mme [Z] [M], es-qualités de tutrice de M. [X], et Mme [X] de toutes leurs demandes à son encontre,

débouter la société Domofinance de toutes demandes à son encontre,

condamner Mme [Z] [M], es-qualités de tutrice de M. [X], et Mme [X] à lui payer la somme de 2 500 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de leurs dernières conclusions du 24 juin 2019, Mme [M], ès-qualités de tutrice de M. [X], et Mme [X] demandent à la cour de :

confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat par application de l'article 'L.121-23' du code de la consommation,

Y ajoutant,

constater la nullité du contrat de vente en date du 6 octobre 2015 faute de capacité à contracter par application de l'article 1108 du code civil à l'égard de M. [X],

constater que le contrat de vente à l'égard de Mme [X] est nul pour cause de violence par application des articles 1142 et 1143 du code civil,

débouter la société PPO de sa demande en fixation de valeur de ses travaux à la somme de 10 000 euros et procéder à la compensation,

constater que la banque Domofinance a commis une faute par application des articles 1134 et L.311-21 du code de la consommation et en conséquence confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat principal, entraînant la nullité du contrat de crédit, et que cette faute exclue le remboursement du capital emprunté,

condamner la société Domofinance au paiement de la somme de 2 367,82 euros indûment versée,

confirmer le jugement attaqué en ses autres dispositions,

Et y ajoutant,

condamner la société PPO au paiement de la somme de 3 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

condamner la société PPO aux entiers dépens d'appel.

Aux termes de ses dernières conclusions du 25 octobre 2021, la société Domofinance demande enfin à la cour de :

statuer ce que de droit sur la nullité du contrat de vente ;

Si la cour infirme le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de vente principal et celle corrélative du contrat de prêt accessoire,

infirmer le jugement déféré en toutes ses autres dispositions,

débouter Mme [X] et Mme [M], ès qualité de tutrice de M. [X], de l'ensemble de leurs demandes dirigées à son encontre,

Si la cour confirme le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat principal et celle subséquente du contrat de crédit affecté,

constater l'absence de faute du prêteur,

infirmer subséquemment le jugement déféré en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en paiement à l'encontre des époux [X] et l'a condamnée à payer aux époux [X], la somme de 2 367,82 euros au titre des échéances réglées, la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens,

Statuant à nouveau,

ordonner la remise des choses en l'état,

condamner les époux [X] à lui rembourser le montant du capital emprunté, soit 15 300 euros, sous déduction des mensualités déjà réglées,

condamner la société PPO à garantir les emprunteurs du remboursement de cette somme, sur le fondement des dispositions de l'article L.311-33 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n °2010-737 du 1er juillet 2010,

Subsidiairement, si la cour, confirmant le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de vente et celle corrélative du contrat de prêt affecté, le confirmait également en ce qu'il a dit que le préteur n'était pas fondé à solliciter, directement auprès des emprunteurs, la restitution du capital prêté,

confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société PPO à lui payer la somme de 15 300 euros,

En tout état de cause,

condamner tout succombant à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner tout succombant aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées par les parties, l'ordonnance de clôture ayant été rendue le 13 janvier 2022.

EXPOSE DES MOTIFS

Sur la nullité du contrat principal

Aux termes des articles L 121-18-1 et L. 121-17 devenus L. 221-9, L 221-5, L. 111-1, R. 111-1 et R. 111-2 du code de la consommation, les ventes et fournitures de services conclues à l'occasion d'une commercialisation hors établissement doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire est remis au client et notamment comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

le nom du professionnel, ou la dénomination sociale et la forme juridique de l'entreprise, l'adresse géographique de son établissement et, si elle est différente, celle du siège social, son numéro de téléphone et son adresse électronique,

le cas échéant, son numéro d'inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,

les informations relatives à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte,

son éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, ainsi que les coordonnées de l'assureur ou du garant,

les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du bien ou service concerné,

le prix du bien ou du service,

les modalités de paiement,

en l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service,

les modalités prévues par le professionnel pour le traitement des réclamations,

s'il y a lieu, les informations relatives à la garantie légale de conformité, à la garantie des vices cachés de la chose vendue ainsi que, le cas échéant, à la garantie commerciale et au service après-vente,

la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation,

lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit, ainsi que le formulaire type de rétractation,

le numéro d'inscription du professionnel au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,

s'il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et identifié par un numéro individuel en application de l'article 286 ter du code général des impôts, son numéro individuel d'identification,

l'éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, les coordonnées de l'assureur ou du garant ainsi que la couverture géographique du contrat ou de l'engagement..

Il ressort de l'examen du bon de commande produit par la société PPO que les informations relatives au droit de rétractation sont, en ce qui concerne le point de départ de ce délai, erronées.

En effet, les conditions générales du contrat mentionnent que le client dispose d'un délai de rétractation de quatorze jours à compter du jour de la conclusion de la commande pour exercer son droit de rétractation, et le formulaire de rétractation est quant à lui ainsi libellé :

'Formulaire de rétractation : annulation de la commande, conditions : compléter et signer ce formulaire, l'envoyer par lettre recommandée avec avis de réception, l'expédier au plus tard le quatorzième jour à partir du jour de la commande, si ce délai expire normalement un samedi, un dimanche ou jour férié, le premier jour ouvrable suivant.'

Or, aux termes de l'article L.121-21 du code de la consommation, dans sa rédaction en vigueur entre le 8 août 2015 et le 1er juillet 2016 applicable au contrat litigieux conclu le 6 octobre 2015, le consommateur dispose, pour exercer son droit de rétractation, d'un délai de quatorze jours commençant à courir à compter du jour de la réception du bien par le consommateur pour les contrats de vente et les contrats de prestation de service incluant la livraison de biens, le consommateur pouvant, pour les contrats conclus hors établissement, exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat.

Il en résulte que si les époux [X] pouvaient exercer leur droit de rétractation dès la conclusion du contrat conclu à leur domicile à la suite d'une opération de démarchage, le délai de quatorze jours ne commençait néanmoins à courir qu'à compter de la livraison des équipements d'isolation, et non à compter du jour de la commande.

Ainsi, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres motifs de nullités invoqués, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat conclu le 6 octobre 2015 entre les époux [X] la société PPO.

Cette annulation a pour conséquence de remettre les parties dans leur situation antérieure, de sorte qu'elle doit entraîner la restitution des prestations reçues de part et d'autre.

Toutefois, le prix de l'installation ayant été financé intégralement à crédit au moyen d'un prêt affecté soumis aux dispositions des articles L. 311-32 et L. 311-33 devenus L. 312-55 et L. 312-56 du code de la consommation, cette obligation de restitution du vendeur sera exécutée sous la forme de la garantie de remboursement du capital prêté, ainsi que la cour le décidera ci-après conformément à la demande expresse du prêteur.

D'autre part, la restitution en nature s'avérant impossible puisque les biens livrés aux époux [X] sont désormais incorporés à la maison d'habitation dont ils sont propriétaires, ceux-ci sont tenus d'une obligation de restitution par équivalent.

A cet égard, la société PPO propose de fixer à la somme de 10 000 euros la compensation en valeur des travaux réalisés sur la maison d'habitation des époux [X].

Cependant, la société PPO ne produit aucune pièce permettant de parvenir à une telle estimation, étant observé que les travaux ont été exécutés en l'espace d'une seule journée ainsi qu'il ressort du procès-verbal de réception signé le 21 octobre 2015 par M. [X], ce qui apparaît peu crédible au regard d'une telle prestation comprenant, selon le bon de commande, la préparation du support, la pose d'un profiler galvanisé, une isolation, un premier passage d'enduit, un régulateur de fond, un enduit de finition et un nettoyage de fin de chantier.

Ainsi, au regard des éléments de la cause, et tenant compte du fait que la société PPO a procédé à l'exécution des travaux alors que le délai de rétractation n'était pas écoulé, la cour considère que l'indemnité de restitution à laquelle les époux [X] sont tenus envers la société PPO, sera exactement fixée à la somme de 5 000 euros.

Sur la nullité du contrat de prêt

Aux termes des dispositions de l'article L. 311-32 devenu L. 312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

Il n'est pas contesté que le crédit consenti par la société Domofinance est un crédit accessoire à une vente ou à une prestation de services.

En raison de l'interdépendance des deux contrats, l'annulation du contrat principal conclu avec la société PPO emporte donc annulation de plein droit du contrat accessoire de crédit conclu entre les époux [X] et la société Domofinance.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a constaté l'annulation de plein droit du contrat de crédit.

La nullité du prêt a pour conséquence de remettre les parties dans leur situation antérieure, de sorte qu'elle doit, sauf faute du prêteur, entraîner la restitution des prestations reçues de part et d'autre, c'est à dire du capital versé par le prêteur et des échéances réglées par les emprunteurs.

À cet égard, les époux [X] concluent à la confirmation de la disposition du jugement les ayant dispensés de rembourser le capital prêté, en faisant valoir que le prêteur se serait fautivement dessaisi des fonds en faveur de la société PPO sans vérifier la régularité du bon de commande, et au vu d'une fiche de réception ne comportant aucune désignation du matériel livré et installé, et ne permettant pas de s'assurer de l'exécution des travaux d'isolation commandés.

La société Domofinance soutient quant à elle qu'elle a débloqué les fonds sur remise d'une fiche de réception des travaux signée des emprunteurs, et, d'autre part, qu'aucun texte ne met à la charge du prêteur l'obligation de débloquer les fonds sur justification d'un bon de commande.

Il est cet égard de principe que le prêteur commet une faute excluant le remboursement du capital emprunté lorsqu'il libère la totalité des fonds, alors qu'à la simple lecture du contrat de vente il aurait dû constater que sa validité était douteuse au regard des dispositions protectrices du code de la consommation relatives aux ventes hors établissement.

Or, il a été précédemment relevé que le bon de commande conclu avec la société PPO, par l'intermédiaire de laquelle la société Domofinance faisait présenter ses offres de crédit, comportait des irrégularités formelles apparentes qui auraient dû conduire le prêteur, professionnel des opérations de crédit affecté, à ne pas se libérer des fonds entre les mains du fournisseur avant d'avoir à tout le moins vérifié auprès des époux [X] qu'ils entendaient confirmer l'acte irrégulier.

Pour prétendre qu'elle n'avait pas à s'assurer de la régularité formelle du bon de commande, la société Domofinance soutient qu'elle n'était légalement pas tenue de détenir un exemplaire du contrat principal, mais le déblocage des fonds entre les mains du vendeur sans s'assurer de l'existence d'un contrat de vente dont le prêt était l'accessoire constitue par lui-même une faute la privant de son droit à restitution du capital prêté.

Il en résulte qu'en versant les fonds entre les mains du fournisseur, sans procéder à des vérifications complémentaires sur la régularité formelle du contrat principal, la société Domofinance qui ne pouvait ignorer les énonciations du bon de commande au vu duquel elle a apporté son concours, a commis une faute susceptible de la priver du droit d'obtenir le remboursement du capital emprunté.

Toutefois, la société Domofinance fait valoir à juste titre que la dispense de remboursement du capital emprunté est subordonnée à la démonstration par les emprunteurs de l'existence d'un préjudice en lien causal avec la faute du prêteur.

Or, les époux [X] ne caractérisent nullement l'existence de leur préjudice, dès lors que du fait de l'annulation du contrat principal et des restitutions réciproques qui en découlent, ils obtiennent la restitution du prix sous la forme de la garantie de remboursement du capital prêté.

Il convient donc, après réformation du jugement attaqué sur ce point, de condamner les époux [X] à restituer le capital emprunté à la société Domofinance.

L'annulation du contrat principal et du crédit affecté étant survenue du fait du vendeur, il convient, puisque la société Domofinance en fait la demande expresse, de condamner la société PPO à garantir les époux [X] de leur condamnation au remboursement du capital emprunté à la société Domofinance en application de l'article L. 311-33 devenu L. 312-56 du code de la consommation.

Cette garantie, qui tient aussi lieu pour le vendeur d'exécution de son obligation de restitution du prix de l'installation après annulation du contrat de vente financé entièrement au moyen d'un crédit affecté, doit porter sur la totalité du capital emprunté de 15 300 euros, et non sur le reliquat dû par les emprunteurs après éventuelle compensation avec les mensualités de remboursement du prêt honorées par les emprunteurs.

En effet, compte tenu de l'anéantissement du prêt annulé, la société Domofinance doit rembourser aux époux [X] les sommes versées en exécution du contrat de prêt, et c'est donc à juste titre que le premier juge a condamné la société Domofinance à restituer aux époux [X] la somme de 2 367,82 euros au titre des échéances réglées.

Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

Sur les demandes accessoires

La disposition du jugement attaqué relative à l'application de l'article 700 du code de procédure civile est fondée sur d'exactes considérations d'équité et sera donc également confirmée.

Il serait en outre inéquitable de laisser à la charge des époux [X] l'intégralité des frais exposés par eux à l'occasion de l'instance d'appel et non compris dans les dépens, en sorte que la société PPO sera condamnée à leur payer une somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Les autres demandes d'application de l'article 700 du code de procédure civile plus amples ou contraires formées à hauteur d'appel seront quant à elles rejetées.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Infirme le jugement rendu le 21 novembre 2018 par le tribunal d'instance de Saint-Nazaire en ce qu'il a :

condamné la société Préservation du Patrimoine de l'Ouverture à rembourser à la société Domofinance la somme de 15 300 euros,

débouté la société Préservation du Patrimoine de l'Ouverture de sa demande en paiement,

débouté la société Domofinance de sa demande en paiement à l'encontre des époux [X],

Et statuant à nouveau sur ces chefs réformés,

Condamne M. [X], représenté par sa tutrice Mme [M], et Mme [X] à payer à la société Préservation du Patrimoine de l'Ouverture la somme de 5 000 euros, à titre d'indemnité de restitution ;

Déboute la société Domofinance de sa demande en paiement de la somme de 15 300 euros envers la société Préservation du Patrimoine de l'Ouverture ;

Condamne M. [X], représenté par sa tutrice Mme [M], et Mme [X] à payer à la société Domofinance la somme de 15 300 euros au titre de la restitution du capital emprunté, sauf à déduire l'ensemble des règlements effectués par les emprunteurs au prêteur au cours de la période d'exécution du contrat de prêt ;

Condamne la société Préservation du Patrimoine de l'Ouverture à garantir intégralement M. [X], représenté par sa tutrice Mme [M], et Mme [X] de leur obligation de remboursement du capital emprunté de 15 300 euros, avant déduction des règlements effectués par les emprunteurs au cours de la période d'exécution du contrat de prêt ;

Confirme le jugement attaqué en ses autres dispositions ;

Condamne la société Préservation du Patrimoine de l'Ouverture à payer à M. [X], représenté par sa tutrice Mme [M], et Mme [X] une somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Préservation du Patrimoine de l'Ouverture aux dépens d'appel ;

Rejette toutes autres demandes contraires ou plus amples.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19/01024
Date de la décision : 13/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-13;19.01024 ?
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