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10/05/2022 | FRANCE | N°20/01010

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 10 mai 2022, 20/01010


1ère Chambre





ARRÊT N°182/2022



N° RG 20/01010 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QPFG













M. LE DIRECTEUR RÉGIONAL DES FINANCES PUBLIQUES DILE DE FRANCE



C/



Mme [V] [X]



















Copie exécutoire délivrée



le :



à :











RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 10 MAI 20

22





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Aline DELIÈRE, Présidente de chambre entendue en son rapport,

Assesseur : Madame Véronique VEILLARD, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Caroline BRISSIAUD, Conseillère,



GREFFIER :



Madame Marie-Claude ...

1ère Chambre

ARRÊT N°182/2022

N° RG 20/01010 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QPFG

M. LE DIRECTEUR RÉGIONAL DES FINANCES PUBLIQUES DILE DE FRANCE

C/

Mme [V] [X]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 10 MAI 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Aline DELIÈRE, Présidente de chambre entendue en son rapport,

Assesseur : Madame Véronique VEILLARD, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Caroline BRISSIAUD, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 01 mars 2022

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 10 mai 2022 par mise à disposition au greffe, après prorogation du délibéré annoncé au 03 mai 2022 à l'issue des débats

****

APPELANT :

L'État représenté par le Directeur Régional des Finances Publiques d'Ile de France et de [Localité 3] qui élit domicile en ses bureaux du Pôle de gestion fiscale et des affaires juridiques, Pôle Juridictionnel Judiciaire

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Anne DENIS de la SELARL ANNE DENIS, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représenté par Me Jean-Yves BENOIST, Plaidant, avocat au barreau du MANS

INTIMÉE :

Madame [V] [X]

née le 30 Mai 1996 à [Localité 5]

Chez M. [S] [X]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Bertrand GAUVAIN de la SCP GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Philippe HUET, Plaidant, avocat au barreau de RENNES

FAITS ET PROCÉDURE

M. [S] [X] a fait une donation-partage au profit de ses trois enfants, Mme [V] [X], Mme [E] [X] et M. [B] [X], par deux actes notariés du 29 décembre 2010, de la nue-propriété de parts sociales de la société Soreprim, d'une part, et de la nue-propriété de parts sociales de la société Holding FMR et de la société FII, d'autre part.

Les actes de donation-partage ont été déposés au Pôle enregistrement de [Localité 5]-Est le 30 décembre 2010.

Le notaire a calculé les droits d'enregistrement et appliqué l'abattement d'un montant de 156 974 euros prévu à l'article 779 I du code général des impôts à la donation-partage concernant les parts sociales de la société Soreprim.

L'acte notarié concernant les parts sociales de la société Holding FMR et de la société FII a été enregistré le 30 décembre 2010 sous le numéro 3826 après versement des droits d'enregistrement (119 844 euros).

Une demande de paiement différé et fractionné des droits d'enregistrement sur la donation-partage des parts de la société Soreprim a été faite et acceptée le 18 janvier 2011. L'acte a été enregistré à cette date sous le numéro 174.

Le 12 décembre 2014, l'administration fiscale a adressé à Mme [V] [X] une proposition de rectification, à laquelle elle a répondu le 12 janvier 2015.

Par courrier du 10 décembre 2015, l'administration fiscale l'a informée qu'elle maintenait les rectifications proposées.

Selon avis du 29 janvier 2016, les droits en principal d'un montant de 58 585 euros et les intérêts de retard d'un montant de 11 014 euros ont été mis en recouvrement.

Mme [V] [X] a contesté la rectification par courrier du 27 juillet 2017, contestation rejetée le 20 octobre 2017 par l'administration fiscale.

Le 18 décembre 2017, Mme [V] [X] a assigné devant le tribunal de grande instance de Rennes le directeur régional des finances publiques d'Ile de France et de Paris (le DRFP) en dégrèvement des droits supplémentaires.

Par jugement du 9 janvier 2020 (RG 17-07952), le tribunal de grande instance a :

-rejeté le moyen tiré de la prescription soulevé par Mme [V] [X],

-infirmé la décision de rejet du 20 octobre 2017,

-fait droit à la demande de dégrèvement de Mme [V] [X] pour un montant global de 69 599 euros se décomposant en 58 585 euros au titre des droits de succession en principal et 11 014 euros au titre des intérêts de retard,

-ordonné le remboursement des droits acquittés,

-dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

-laissé les dépens à la charge du trésor public.

Le DRFP a fait appel le 11 février 2020 de tous les chefs du jugement à l'exception du chef rejetant l'exception de prescription.

Il expose ses moyens et ses demandes dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées le 25 juin 2020, auxquelles il est renvoyé.

Il demande à la cour de :

-infirmer le jugement des chefs dont il a été fait appel,

-statuant à nouveau, dire la procédure de rectification fondée en ce qu'elle détermine la chronologie des actes selon la date de leur enregistrement,

-confirmer la décision de rejet prononcée par l'administration,

-condamner Mme [V] [X] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Mme [V] [X] expose ses moyens et ses demandes dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées le 17 septembre 2020, auxquelles il est renvoyé.

Elle demande à la cour de :

-valider la chronologie réelle des donations à savoir donation-partage portant sur les parts sociales de la SARL Soreprim précédant la donation-partage portant sur les parts sociales de la société Holding FMR et des parts sociales de la SARL FII,

-confirmer le jugement,

-lui allouer la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE L'ARRÊT

L'article 784 du code général des impôts dispose :

«'Les parties sont tenues de faire connaître, dans tout acte constatant une transmission entre vifs à titre gratuit et dans toute déclaration de succession, s'il existe ou non des donations antérieures consenties à un titre et sous une forme quelconque par le donateur ou le défunt aux donataires, héritiers ou légataires et, dans l'affirmative, le montant de ces donations ainsi que, le cas échéant, les noms, qualités et résidences des officiers ministériels qui ont reçu les actes de donation, et la date de l'enregistrement de ces actes.

La perception est effectuée en ajoutant à la valeur des biens compris dans la donation ou la déclaration de succession celle des biens qui ont fait l'objet de donations antérieures, à l'exception de celles passées depuis plus de six ans, et, lorsqu'il y a lieu à application d'un tarif progressif, en considérant ceux de ces biens dont la transmission n'a pas encore été assujettie au droit de mutation à titre gratuit comme inclus dans les tranches les plus élevées de l'actif imposable.

Pour le calcul des abattements et réductions édictés par les articles 779, 780,790 B, 790 D, 790 E et 790 F il est tenu compte des abattements et des réductions effectués sur les donations antérieures visées au deuxième alinéa consenties par la même personne.'»

L'article 779 I du code général des impôts dispose : «'- Pour la perception des droits de mutation à titre gratuit, il est effectué un abattement de 156 974 € sur la part de chacun des ascendants et sur la part de chacun des enfants vivants ou représentés par suite de prédécès ou de renonciation.

Entre les représentants des enfants prédécédés ou renonçants, cet abattement se divise d'après les règles de la dévolution légale.

En cas de donation, les enfants décédés du donateur sont, pour l'application de l'abattement, représentés par leurs descendants donataires dans les conditions prévues par le code civil en matière de représentation successorale.'»

Les deux actes de donation-partage ont été reçus par le notaire le 29 décembre 2010. L'acte portant sur les parts sociales de la société Soreprim (ci après donation-partage n°1) ne mentionne pas de donations antérieures. L'acte de donation portant sur les parts sociales de la société Holding FMR et de la société FII (donation-partage n°2) mentionne la donation antérieure portant sur les parts sociales de la société Soreprim. Ces actes ne sont pas versés à la procédure mais ce fait, rappelé dans le jugement, n'est pas contesté et est établi.

L'article 635-1 1° du code général des impôts dispose :

«'Doivent être enregistrés dans le délai d'un mois à compter de leur date :

I. Sous réserve des dispositions des articles 637 et 647 :

1° Les actes des notaires à l'exception de ceux visés à l'article 636 (...)'»

L'article 1705-1° du code général des impôts dispose :

«'Les droits des actes à enregistrer ou à soumettre à la formalité fusionnée sont acquittés, savoir :

1° Par les notaires, pour les actes passés devant eux (')'»

L'article 1701 alinéas 1 et 2 du code général des impôts dispose :

«'Les droits des actes et ceux des mutations par décès sont payés avant l'exécution de l'enregistrement, de la publicité foncière ou de la formalité fusionnée, aux taux et quotités réglés par le présent code.

Nul ne peut en atténuer ni différer le paiement sous le prétexte de contestation sur la quotité, ni pour quelque autre motif que ce soit, sauf à se pourvoir en restitution s'il y a lieu.'»

L'article 717 I du code général des impôts dispose :

I. ' Par dérogation aux dispositions de l'article 1701, le paiement des droits d'enregistrement et de la taxe de publicité foncière peut être fractionné ou différé selon des modalités fixées par décret.'»

Les deux actes de donation-partage ont été déposés le 30 décembre 2010 ensemble aux fins d'enregistrement. La donation-partage n°2 a été enregistrée le 30 décembre 2010, après paiement immédiat des droits d'enregistrement. La donation-partage n°1 a été enregistrée le 18 janvier 2011, après l'instruction et l'acceptation d'une demande de paiement différé des droits.

Le DRFP soutient que l'abattement de l'article 779 I du code général des impôts doit être appliqué dans l'ordre d'enregistrement effectif des actes. L'intimée soutient que l'abattement doit être appliqué selon la date de présentation des actes à l'enregistrement et selon l'ordre des actes s'ils ont été dressés et présentés le même jour.

Il se déduit des articles 635-1, 1705-1 et 1701 du code général des impôts que :

-les notaires doivent enregistrer leurs actes dans le délai d'un mois à compter de leur date,

-ils doivent payer les droits d'enregistrement avant l'exécution de l'enregistrement, sous la sanction du refus d'enregistrement,

-le calcul des droits, incluant l'abattement, doit être fait au moment de la demande d'enregistrement, de telle sorte que le notaire paye les droits avant l'exécution de l'enregistrement.

Le calcul des droits d'enregistrement, incluant l'abattement, doit donc avoir lieu avant l'enregistrement. Ce n'est donc pas la date de l'enregistrement qui détermine le calcul des droits d'enregistrement, incluant l'abattement, mais la date du dépôt de la demande d'enregistrement.

En conséquence, si deux actes de donation sont dressés le même jour par le notaire et présenté le même jour aux fins d'enregistrement, l'abattement de l'article 779 I doit être appliqué au premier acte dressé par le notaire, donc en l'espèce à la donation-partage n°1 qui ne fait pas état de donations antérieures.

L'administration fiscale relève le fait que selon l'article 784 alinéa 1 du code général des impôts, les actes de donation doivent indiquer les dates d'enregistrement des donations antérieures et en déduit que c'est la date de l'enregistrement qui détermine la chronologie des donations successives. Mais cet article n'impose pas l'indication de la date d'enregistrement, celle-ci ne devant être indiquée que 'le cas échéant', si la donation a été enregistrée, et il ne peut en être déduit que c'est la date d'enregistrement qui détermine la chronologie des donations successives.

L'administration fiscale cite, comme l'intimée, l'arrêt rendu le 15 mars 1988 (n°86-15912) par la chambre commerciale de la cour de cassation. Mais il ressort de cet arrêt que les droits qui doivent être payés sont ceux résultant des dispositions fiscales, applicables aux actes considérés, en vigueur au jour de la présentation à la formalité. Le jour du dépôt de la demande d'enregistrement, même si l'enregistrement dépend du paiement des droits et même si le paiement des droits est différé, est celui où les droits doivent être calculés pour tous les actes concernés par la demande.

L'administration fiscale cite également la réponse ministérielle Valleix (question n°39457, JO du 5 juin 2000) et soutient que les parties ne peuvent pas choisir la donation sur laquelle l'abattement sera imputé. Mais cette question relate le cas d'un contribuable qui a fait des donations successives à ses descendants et qui veut renoncer au bénéfice de l'abattement déjà pratiqué sur la première donation pour l'appliquer à une donation ultérieure. La réponse, qui est négative, renvoie cependant à l'application des textes légaux. En tout état de cause, elle ne concerne pas le cas de la demande d'enregistrement de deux actes de donation le même jour ouvrant l'un et l'autre le droit à l'abattement, comme en l'espèce.

En conséquence, le jugement qui a infirmé la décision de rejet du 20 octobre 2017 après avoir retenu que l'administration fiscale ne pouvait modifier la chronologie des actes et appliquer l'abattement sur la donation-partage n°2, sera confirmé en toutes ses dispositions.

Les dépens d'appel seront mis à la charge du trésor public.

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de l'intimée les frais qu'elle a exposés qui ne sont pas compris dans les dépens et sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement rendu le 9 janvier 2020 (RG 17-07952) en toutes ses dispositions,

Déboute Mme [V] [X] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Laisse les dépens à la charge du trésor public.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20/01010
Date de la décision : 10/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-10;20.01010 ?
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