La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/05/2022 | FRANCE | N°18/08513

France | France, Cour d'appel de Rennes, 3ème chambre commerciale, 10 mai 2022, 18/08513


3ème Chambre Commerciale





ARRÊT N°274



N° RG 18/08513 - N° Portalis DBVL-V-B7C-PNLY













SARL TRANSPORTS RENARD



C/



S.E.L.A.S. CLEOVAL

SCP [G] [U]*































































Copie exécutoire délivrée



le :



à :

Me SGRO

Me PRENEUX

Me GABORIT











RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 10 MAI 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,

Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,

Assesseur : Monsieur Dominique GARET, Conseiller, r...

3ème Chambre Commerciale

ARRÊT N°274

N° RG 18/08513 - N° Portalis DBVL-V-B7C-PNLY

SARL TRANSPORTS RENARD

C/

S.E.L.A.S. CLEOVAL

SCP [G] [U]*

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me SGRO

Me PRENEUX

Me GABORIT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 10 MAI 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,

Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,

Assesseur : Monsieur Dominique GARET, Conseiller, rapporteur

GREFFIER :

Madame Frédérique HABARE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 22 Mars 2022

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 10 Mai 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

Société TRANSPORTS RENARD, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de SAINT-NAZAIRE sous le numéro 398 956 946, agissant sur poursuites et diligences de son Gérant légal en fonction, Monsieur [S] [D], domicilié au siège en cette qualité.

[Localité 5]

[Localité 3]

Représentée par Me Jean-Baptiste SOUFRON de la SELARL FELTESSE WARUSFEL PASQUIER & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

Représentée par Me Hortense SGRO, Postulant, avocat au barreau de NANTES

INTIMÉE :

SCP [G] [U], représentée par Maître [U] [G], agissant en qualité de Mandataire Liquidateur de la société TRANSPORTS [R] immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de SAINT NAZAIRE sous le numéro 341 137 925

[Adresse 6]

[Localité 2]

désigné à cette fonction suivant jugement du Tribunal de Commerce de Saint-Nazaire du 08 février 2012

Représentée par Me Stéphanie PRENEUX de la SELARL BAZILLE, TESSIER, PRENEUX, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Matthieu TOUCANE de la SCP LE HAN BOUREAU TOUCANE KERGALL, Plaidant, avocat au barreau de SAINT-NAZAIRE

INTERVENANTE FORCÉE :

S.E.L.A.S. CLEOVAL, représentée par Maître [W] [N], ès qualité de liquidateur judiciaire de la SARL TRANSPORT RENARD, inscrite au RCS de SAINT NAZAIRE sous le n'398 956 946,

désignée à cette fonction suivant jugement du Tribunal de Commerce de SAINT-NAZAIRE du 31 mars 2021.

[Adresse 1]

[Localité 4]

Assignée en intervention forcée par acte d'huissier en date du 16/06/2021

Représentée par Me Benoit GABORIT de la SELARL MGA, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-NAZAIRE

*********

FAITS ET PROCÉDURE

M. [Y] [R] et son épouse, Mme [Z] [E], étaient propriétaires d'un terrain à construire situé au lieudit [Localité 5].

Suivant acte du 29 avril 1999, ils vendaient ce terrain à la société Natiocrédimurs qui allait y construire des locaux destinés à l'exploitation d'une entreprise de transports.

Aux termes du même acte, la société Natiocrédimurs donnait ces locaux à bail à la société Transports [R] avec promesse de les lui vendre à l'issue du bail, et ce, moyennant le versement d'une indemnité de levée d'option.

La société Transports [R] allait ainsi occuper les lieux pendant plusieurs années, jusqu'à son placement en liquidation judiciaire par jugement en date du 8 février 2012.

Suivant acte du 31 mai 2013, la SCP [U] [G], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Transports [R], levait l'option et acquérait au nom de la liquidation l'immeuble auprès de la société Natiocrédimurs, et ce, dans la perspective de le revendre à la Commune de Montoir-de-Bretagne.

Suivant ordonnance du 16 septembre 2013, le juge commissaire autorisait la cession de gré à gré de l'immeuble au profit de la Commune.

Toutefois, l'acte notarié ne devait jamais être régularisé, dès lors en effet qu'il apparaissait que l'immeuble restait occupé par un tiers, en l'occurrence la société Transports Renard qui, malgré les demandes réitérées de la SCP [U] [G], refusait de quitter les lieux et se prévalait d'un véritable droit d'occupation qui lui aurait été consenti par la société Transports [R].

Considérant au contraire que la société Transports Renard occupait les lieux sans droit ni titre, la SCP [U] [G] ès-qualités saisissait alors le tribunal de commerce de Saint Nazaire d'une action aux fins de voir ordonner son expulsion.

Par jugement du 21 novembre 2018, le tribunal':

- jugeait que la SCP [U] [G] ès-qualités était valablement titrée à la date de sa demande d'expulsion';

- constatait que les locaux et terrains situés au lieudit [Localité 5] appartenaient de droit à la société Transports [R] depuis le 31 mai 2013';

- disait que les sociétés Transports [R] et Transports Renard avaient conclu entre elles un prêt à usage conformément aux dispositions de l'article 1875 du code civil';

- ordonnait l'expulsion de la société Transports Renard ainsi que de tous occupants de son chef, au besoin avec le concours de la force publique et ce, dans un délai de quatre mois à compter de la signification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard jusqu'à parfait délaissement des lieux';

- ordonnait l'enlèvement des biens et facultés mobilières se trouvant dans les lieux de même que leur transfert vers tout lieu approprié, aux frais, risques et périls de la société Transports Renard qui disposerait d'un délai d'un mois pour les retirer à compter de la sommation qui lui en serait faite par l'huissier chargé de l'exécution';

- déboutait la société Transports Renard de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions';

- condamnait la société Transports Renard à payer à la SCP [G] ès-qualités une somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

- ordonnait l'exécution provisoire';

- condamnait la société Transports Renard aux entiers dépens ainsi qu'à tous frais de notification et d'exécution.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 31 décembre 2018, la société Transports Renard interjetait appel de ce jugement.

Elle notifiait ses dernières conclusions d'appelante le 27 mars 2019, avant d'être elle-même placée en liquidation judiciaire par jugement du 31 mars 2021.

La Selas Cleoval intervenait alors à l'instance en qualité de liquidateur judiciaire de la société Transports Renard et concluait à son tour le 16 septembre 2021, déclarant reprendre à son compte les demandes formulées en cause d'appel par ladite société antérieurement à l'ouverture de la procédure collective.

Quant à la SCP [G] ès-qualités, elle concluait pour la dernière fois le 11 octobre 2021.

C'est en cet état de la procédure qu'intervenait l'ordonnance de clôture, en date du 3 mars 2022.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La Selas Cleoval, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Transports Renard, demande à la cour de :

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris';

- débouter la liquidation judiciaire de la société Transports [R] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions';

- dire et juger que la société Transports [R] a bien consenti à la société Transports Renard un bail verbal à usage commercial à compter du 1er octobre 2001';

- dire et juger que cette propriété commerciale relève de l'actif de la liquidation judiciaire de la société Transports Renard';

- dire et juger que la libération effective des lieux est soumise au versement d'une indemnité d'éviction valorisée par la société Transports Renard à hauteur de 440.000 euros';

- fixer la créance de la liquidation judiciaire de la société Transports Renard au passif de la liquidation judiciaire de la société Transports [R] à la somme de 440.000 euros au titre de cette indemnité ;

- condamner la liquidation judiciaire de la société Transports [R] aux entiers dépens.

Au contraire, la SCP [U] [G], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Transports [R], demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il a retenu l'existence d'un contrat de prêt à usage liant les parties';

- confirmer le jugement pour l'ensemble de ses autres dispositions';

En conséquence,

- débouter la Selas Cleoval ès-qualités de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions';

- constater que la société Transports Renard, désormais représentée par son liquidateur judiciaire, se trouve occupante sans droit ni titre des immeubles appartenant à la société Transports [R]';

- ordonner en conséquence son expulsion ainsi que de tous occupants de son chef, au besoin avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier, des locaux situés lieudit [Localité 5], et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir jusqu'à parfait délaissement des lieux';

- ordonner l'enlèvement des biens et facultés mobilières se trouvant dans les lieux et leur transfert vers un lieu approprié, aux frais, risques et périls de la Selas Cleoval ès-qualités qui disposera d'un délai d'un mois pour les retirer à compter de la sommation qui lui en sera faite par l'huissier chargé de l'exécution';

- condamner la Selas Cleoval ès-qualités à verser à la SCP [U] [G] ès-qualités la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';

- condamner la Selas Cleoval ès-qualités aux entiers dépens, dont le coût de tous éventuels actes de notification ou d'exécution ultérieurs.

Il est renvoyé à la lecture des conclusions précitées pour un plus ample exposé des demandes et moyens développés par les parties.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Aux termes de ses conclusions d'appel, que la société Cleoval ès qualités déclare reprendre à son compte, la société Transports Renard ne se prévaut pas (et ne s'est d'ailleurs jamais prévalue) d'un prêt à usage, au sens des articles 1875 et suivants du code civil, portant sur les locaux et immeubles qu'elle occupe au lieudit [Localité 5].

De même, la SCP [U] [G] ès-qualités récuse elle aussi cette qualification.

En conséquence et d'un commun accord entre les parties, le jugement sera infirmé en ce qu'il a retenu que la société Transports Renard occupait les lieux en exécution d'un contrat de prêt à usage, quand bien même le tribunal a également retenu que ce prêt demeurait précaire et que le liquidateur judiciaire de la société Transports [R] était en droit de réclamer à tout moment la restitution des locaux ainsi prêtés.

Par ailleurs et eu égard à l'évolution des fondements juridiques invoqués successivement depuis l'origine du litige par la société Transports Renard pour tenter de justifier son droit d'occupation, la cour s'en tiendra au seul fondement désormais invoqué en cause d'appel, à savoir l'existence d'un bail verbal à usage commercial que la société Transports [R] aurait consenti à la société Transports Renard lors de son entrée dans les lieux au mois d'octobre 2001.

Cependant, à supposer même que la société Transports [R] ait réellement consenti un tel bail à la société Transports Renard, pour autant et en toute hypothèse':

- le bail de la chose d'autrui est inopposable au propriétaire';

- or, à la date à laquelle la société Transports Renard serait devenue locataire, soit courant 2001, la société Transports [R] n'était pas propriétaire de l'immeuble, lequel appartenait en effet à la société Natiocrédimurs qui l'avait acheté aux époux [R] suivant acte du 29 avril 1999.

Dès lors et même à le supposer valable, ce bail serait aujourd'hui inopposable à la liquidation judiciaire de la société Transports [R] venant aux droits de la société Natiocrédimurs elle-même propriétaire de l'immeuble au moment de la conclusion du bail allégué.

En conséquence, la société Transports Renard est effectivement occupante sans droit ni titre, de sorte que la SCP [U] [G] ès-qualités est fondée à réclamer son expulsion.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il l'a ordonnée, et ce, selon les modalités précisées au dispositif de la décision contestée.

A contrario, la Selas Cleoval, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Transports Renard, est sans droit à réclamer le bénéfice d'une indemnité d'éviction.

Elle sera donc déboutée de toute demande à ce titre.

Partie perdante, la Selas Cleoval ès-qualités sera condamnée au paiement d'une somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par la SCP [U] [G] en cause d'appel, le jugement devant en outre être confirmé en ce qu'il a condamné l'appelante au paiement d'une somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance.

Enfin, la Selas Cleoval supportera les entiers dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour :

- infirme le jugement en ce qu'il a dit que les sociétés Transports [R] et Transports Renard avaient conclu entre elles un prêt à usage conformément aux dispositions de l'article 1875 du code civil';

- le confirme pour le surplus de ses dispositions non contraires ;

- y ajoutant :

* déboute la Selas Cleoval, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Transports Renard, de l'ensemble de ses demandes';

* condamne la Selas Cleoval, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Transports Renard, à payer à la SCP [U] [G], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Transports [R], une somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel;

* condamne la Selas Cleoval, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Transports Renard, aux entiers dépens de la procédure d'appel.

Le greffierLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 3ème chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 18/08513
Date de la décision : 10/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-10;18.08513 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award