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04/05/2022 | FRANCE | N°22/00235

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre etrangers/hsc, 04 mai 2022, 22/00235


COUR D'APPEL DE RENNES



N° 125/22

N° RG 22/00235 - N° Portalis DBVL-V-B7G-SWZC



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT





O R D O N N A N C E



articles L 741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile



Nous, Jean-Denis BRUN, conseiller à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Mor

gane LIZEE, greffière placée ,



Statuant sur l'appel formé le 03 Mai 2022 à 10h07 par la Prefecture de LOIRE ATLANTIQUE à l'encontre d...

COUR D'APPEL DE RENNES

N° 125/22

N° RG 22/00235 - N° Portalis DBVL-V-B7G-SWZC

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

articles L 741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

Nous, Jean-Denis BRUN, conseiller à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Morgane LIZEE, greffière placée ,

Statuant sur l'appel formé le 03 Mai 2022 à 10h07 par la Prefecture de LOIRE ATLANTIQUE à l'encontre de :

M. [L] [B]

né le [Date naissance 1] 1987 à [Localité 2] - ALGERIE

de nationalité Algérienne

ayant pour avocat Me Elodie PRAUD, avocat au barreau de RENNES

d'une ordonnance rendue le 02 Mai 2022 à 17h51 par le juge des libertés et de la détention du Tribunal judiaire de RENNES qui a constaté l'irrégularité de la procédure, dit n'y avoir lieu à prolongation de la rétention de M. [L] [B], condamné le prefet de LOIRE ATLANTIQUE ès qualité de représentant de l'état à verser à Maître Elodie PRAUD conseil de M.[B] la somme de 400 euros sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991

En l'absence de représentant du préfet de LOIRE ATLANTIQUE, dûment convoqué,

En l'absence du procureur général régulièrement avisé, (avis écrit )

Enl'absence de [L] [B], représenté par Me Elodie PRAUD, avocat,

Après avoir entendu en audience publique le 04 Mai 2022 à 11 H 00 le conseil de M.[B] en ses observations

Avons mis l'affaire en délibéré et le 04 Mai 2022 à 14h00, avons statué comme suit :

Par arrêté du 29 avril 2022 notifié le même jour le Préfet de Loire Atlantique a fait obligation à Monsieur [L] [B] de quitter le territoire français.

Par arrêté du 29 avril 2022 notifié le même jour le Préfet de Loire Atlantique a placé Monsieur [L] [B] en rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire.

Par requête du 30 avril 2022 le Préfet de Loire Atlantique a saisi le juge des libertés et de la détention du Tribunal Judiciaire de Rennes d'une demande de prolongation de la rétention de Monsieur [L] [B].

Monsieur [L] [B] a saisi le juge des libertés et de la détention d'une contestation de la régularité de l'arrêté de placement en rétention.

Par ordonnance du 02 mai 2022 le juge des libertés et de la détention a, au visa des articles L744-8 et R.744-12 du CESEDA et de l'article 16 de la Directive 2008/115 CE, constaté qu'aucun élément de la procédure ne permettait d'établir que le règlement intérieur du Centre de Rétention Administrative ait été mis à disposition de l'intéressé dans une langue qu'il comprend dans le sens où l'interessé, qui comprend la langue arabe mais ne la lit pas n'a pas bénéficié d'une lecture de ce règlement intérieur dans une langue qu'il comprend, a dit n'y avoir lieu à prolongation de la rétention et a condamné le Préfet de Loire Atlantique au paiement de la somme de 400,00 Euros sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par déclaration motivée reçue le 03 mai 2022 le Préfet de Loire Atlantique a formé appel de cette décision en ses dispositions relatives à la prolongation de la rétention en soutenant que Monsieur [L] [B] avait signé le procès-verbal de notification des droits en rétention qui précisait que le règlement intérieur du Centre de Rétention dans une langue qu'il comprend avait été mis à sa disposition et a joint le formulaire de notification à sa déclaration d'appel.

Selon mémoire du 03 mai 2022 le Procureur Général a fait valoir que dès lors que certaines pièces de la procédure administrative antérieure à l'arrivée au Centre de Rétention avaient été notifiées à Monsieur [B] avec le concours d'un interprète  et avec la mention que l'intéressé ne savait pas lire l'arabe (par exemple : notification de la décision de placement en rétention et de l' arrêté d'assignation à résidence du 9/03/2022), il existait des raisons sérieuses de penser que cela reflète la réalité de la situation, à savoir que Monsieur [B] était illettré et devait avoir le concours systématique d'un interprète pour lui lire toute pièce devant lui être notifiée. Dans ces conditions, la mention figurant sur le procès-verbal de notification de ses droits en rétention intitulée [B] REGISTRE CRA (règlement intérieur du CRA) intervenue le 29 avril à 21h00 au terme de laquelle :  « qu'après lecture faite par elle-même de la présente information qu'elle nous déclare comprendre, la personne signe avec nous » était manifestement une formule type qui ne signifiait en rien que le signataire ait compris ses droits et ce d'autant plus que ce document lui a été remis hors la présence de tout interprète. Dans ces conditions, la procédure est effectivement irrégulière et l'intéressé est fondé à en faire constater l'irrégularité.

A l'audience, Monsieur [L] [B], représenté par son Avocat , sollicite la confirmation de l'ordonnance attaquée aux mêmes motifs que ceux retenus par le juge des libertés et de la détention.

Le Préfet de Loire Atlantique n'a pas comparu.

MOTIFS

L'appel, formé dans les formes et délais légaux, est recevable.

L'article L744-8 du CESEDA dispose :

« Dans chaque lieu de rétention, un document rédigé dans les langues les plus couramment utilisées, et décrivant les droits de l'étranger au cours de la procédure d'éloignement et de rétention, ainsi que leurs conditions d'exercice, est mis à disposition des personnes retenues. »

L'article R744-12 du même Code précise :

« Dans chaque lieu de rétention, un règlement intérieur, dont les modèles sont fixés, pour les centres et les locaux de rétention, par arrêté conjoint du ministre chargé de l'immigration et du ministre de l'intérieur, organise la vie quotidienne, dans des conditions conformes à la dignité et à la sécurité de ses occupants. Il rappelle notamment les droits et devoirs des étrangers retenus, ainsi que les modalités pratiques d'exercice par ces derniers de leurs droits. Il mentionne notamment les conditions dans lesquelles s'exerce la circulation des étrangers dans le lieu de rétention, notamment, le cas échéant, l'accès aux espaces à l'air libre.
Le règlement intérieur est établi par le responsable du lieu de rétention et approuvé par le préfet territorialement compétent.
Il est traduit dans les langues les plus couramment utilisées désignées par un arrêté du ministre chargé de l'immigration. Un exemplaire en langue française et traduit dans ces langues est affiché dans les parties communes du lieu de rétention. En l'espèce, c'est par des motifs adoptés que le juge des libertés et de la détention a constaté après un examen précis des pièces de la procédure débattues contradictoirement qu'aucune d'entre elle n'établissait qu'il ait été donné lecture du règlement intérieur du Centre de Rétention à Monsieur [L] [B] dans une langue comprise de lui. Il a été porté atteinte à ses droits puisque dans l'ignorance de ces derniers il ne pouvait les exercer. »

E nfin, l'article 16 de la directive 2008/115/CE paragraphes 4 et 5 disposent :

« 4.   Les organisations et instances nationales, internationales et non gouvernementales compétentes ont la possibilité de visiter les centres de rétention visés au paragraphe 1, dans la mesure où ils sont utilisés pour la rétention de ressortissants de pays tiers conformément au présent chapitre. Ces visites peuvent être soumises à une autorisation.

5.   Les ressortissants de pays tiers placés en rétention se voient communiquer systématiquement des informations expliquant le règlement des lieux et énonçant leurs droits et leurs devoirs. Ces informations portent notamment sur leur droit, conformément au droit national, de contacter les organisations et instances visées au paragraphe 4. »

En l'espèce, c'est par des motifs adoptés que le juge des libertés et de la détention a constaté après un examen précis des pièces de la procédure débattues contradictoirement qu'aucune d'entre elle n'établissait qu'il ait été donné lecture du règlement intérieur du Centre de Rétention à Monsieur [L] [B] dans une langue comprise de lui. Il a été porté atteinte à ses droits puisque dans l'ignorance de ces derniers il ne pouvait les exercer.

Il y a lieu de confirmer la décision attaquée y compris en ses dispositions relatives à l'application de l'article 37 de la Loi du 10 juillet 1991.

PAR CES MOTIFS

Déclarons l'appel recevable,

Confirmons l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal Judiciaire de Rennes du 02 mai 2022 en toutes ses dispositions,

Laissons les dépens à la charge du Trésor Public.

Ainsi jugé le 04 mai 2022 à 14 heures.

LE GREFFIERLE CONSEILLER DELEGUE

Notification de la présente ordonnance a été faite ce jour à [L] [B], à son avocat et au préfet

Le Greffier,

Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général.

Le Greffier


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre etrangers/hsc
Numéro d'arrêt : 22/00235
Date de la décision : 04/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-04;22.00235 ?
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