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29/04/2022 | FRANCE | N°19/04058

France | France, Cour d'appel de Rennes, 8ème ch prud'homale, 29 avril 2022, 19/04058


8ème Ch Prud'homale





ARRÊT N°215



N° RG 19/04058 -

N° Portalis DBVL-V-B7D-P3S3













M. [T] [U]



C/



SAS CIMLEC INDUSTRIE

















Infirmation partielle













Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 29 AVRI

L 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Président de chambre,

Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller,

Madame Gaëlle DEJOIE, Conseillère,



GREFFIER :



Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé







DÉBATS :



A l'audience publique du 25 Fé...

8ème Ch Prud'homale

ARRÊT N°215

N° RG 19/04058 -

N° Portalis DBVL-V-B7D-P3S3

M. [T] [U]

C/

SAS CIMLEC INDUSTRIE

Infirmation partielle

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 29 AVRIL 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Président de chambre,

Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller,

Madame Gaëlle DEJOIE, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 25 Février 2022

devant Monsieur Philippe BELLOIR, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

En présence de Madame Laurence APPEL, Médiatrice judiciaire

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 29 Avril 2022, date à laquelle a été prorogé le délibéré initialement fixé au 08 Avril précédent par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANT et intimé à titre incident :

Monsieur [T] [U]

né le 15 Juin 1971 à NANTES (44)

demeurant 3 bis rue Arago

44100 NANTES

Comparant à l'audience et représenté par Me Laurent LE BRUN de la SCP CALVAR & ASSOCIES, Avocat au Barreau de NANTES

INTIMÉE et appelante à titre incident :

La SAS CIMLEC INDUSTRIE prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :

1-3 rue Chappe - Z.I. DES GARENNES

78130 LES MUREAUX

Représentée par Me Charles PIOT substituant à l'audience Me Audrey BALLU-GOUGEON de la SELARL BALLU-GOUGEON, VOISINE, Avocats postulants du Barreau de RENNES et ayant Me Laurent GUYOMARCH, Avocat au Barreau de TOULOUSE, pour conseil

M. [T] [U] a été embauché selon contrat à durée indéterminée par la SAS CIMLEC INDUSTRIE à compter du 14 mars 2016 en qualité de responsable d'affaires, statut cadre, position II, coefficient 100. La convention collective applicable est celle des ingénieurs et cadres des industries métallurgiques.

Le 10 mai 2017, M. [U] a été convoqué à un entretien préalable à licenciement fixé au 17 mai 2017.

Le 24 mai 2017, la SAS CIMLEC INDUSTRIE a notifié à M. [U] son licenciement pour insuffisance professionnelle et l'a dispensé d'exécuter son préavis à compter du 2 juin 2017.

Le 2 novembre 2017, M. [U] a saisi le conseil de prud'hommes de Nantes aux fins de :

' Dire nulle et de nul effet sa convention de forfait jours,

' Condamner la SAS CIMLEC INDUSTRIE au paiement des sommes suivantes, avec intérêts de droit et capitalisation :

- 27.894 € à titre des dommages-intérêts pour licenciement abusif,

- 13.176,38 € au titre des heures supplémentaires avec majoration de 25%,

- 1.317,63 € au titre des congés payés afférents,

- 3.229,46 € au titre des heures supplémentaires avec majoration de 50%,

- 322,94 € au titre des congés payés afférents,

- 7.748,99 € au titre du repos compensateur,

- 27.894 € à titre des dommages-intérêts pour travail dissimulé,

- 3.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens,

' Fixer la moyenne des derniers mois de salaire à la somme de 4.649 €,

' Exécution provisoire du jugement à intervenir.

La cour est saisie d'un appel régulièrement formé par M. [U] le 20 juin 2019 du jugement du 16 mai 2019 par lequel le conseil des prud'hommes de Nantes a :

' Dit que le licenciement de M. [U] repose sur une cause réelle et sérieuse,

' Dit que la convention de forfait jours de M. [U] est nulle,

' Dit que la preuve de la réalisation des heures supplémentaires n'est pas rapportée,

' Débouté M. [U] de ses demandes,

' Condamné la SAS CIMLEC INDUSTRIE à verser à M. [U] la somme de 1.200 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' Partagé les dépens par moitié entre les parties.

Vu les écritures notifiées par voie électronique le 21 janvier 2022, suivant lesquelles M. [U] demande à la cour de :

' Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que le licenciement de M. [U] était justifié par une cause réelle et sérieuse,

' Déclarer le licenciement de M. [U] sans cause réelle et sérieuse,

' Condamner la SAS CIMLEC INDUSTRIE à payer à M. [U] la somme de 30.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,

' Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré nulle la convention de forfait en jours mais le réformer pour le surplus,

' Débouter la SAS CIMLEC INDUSTRIE de son appel incident sur ce point,

' Condamner la SAS CIMLEC INDUSTRIE à payer à M. [U] les sommes suivantes, avec intérêts de droit et capitalisation :

- Au titre des heures supplémentaires, à titre principal,

- 8.147,49 € au titre des heures supplémentaires entre la 38ème et la 43ème heure avec majoration de 25%,

- 814,74 € au titre des congés payés afférents,

- 1.521,23 € au titre des heures supplémentaires après la 43ème heure avec majoration de 50%,

- 152,12 € au titre des congés payés afférents,

- Au titre des heures supplémentaires, à titre subsidiaire,

- 4.023,62 € au titre des heures supplémentaires entre la 35ème et la 38ème heure,

- 402,36 € au titre des congés payés afférents,

- Au titre du repos compensateur, la somme de 7.748,99 €

- A titre des dommages-intérêts pour travail dissimulé, la somme de 27.894 €,

En tout état de cause,

' Condamner la SAS CIMLEC INDUSTRIE à payer à M. [U] la somme de 3.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens,

' Fixer la moyenne des derniers mois de salaire à la somme de 4.649 €.

Vu les écritures notifiées par voie électronique le 7 février 2022, suivant lesquelles la SAS CIMLEC INDUSTRIE demande à la cour de :

' Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- Dit que le licenciement de M. [U] était justifié par une cause réelle et sérieuse,

- Considéré que M. [U] ne rapportait pas la preuve des heures supplémentaires effectuées ni l'élément intentionnel du travail dissimulé,

' Dire que le licenciement de M. [U] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

' Débouter l'appelant de ses prétentions à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,

' Dire que M. [U] ne rapporte la preuve d'aucune réalisation d'heures supplémentaires et que le délit de travail dissimulé n'est pas constitué,

' Débouter M. [U] de ses prétentions au titre des heures supplémentaires, du repos compensateur et des dommages-intérêts pour travail dissimulé,

' Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- Déclaré nulle la convention de forfait en jours,

- Condamné la SAS CIMLEC INDUSTRIE au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' Dire que le forfait annuel jours auquel était soumis M. [U] est parfaitement valide,

En tout état de cause,

' Condamner M. [U] au paiement de la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est en date du 10 février 2022.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions notifiées via le RPVA.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les heures supplémentaires

Pour confirmation du jugement en ce qu'il a déclaré nulle la convention de forfait jours mais infirmation en ce qu'il l'a débouté de ses demandes au titre des heures supplémentaires, du travail dissimulé et du repos compensateur, M. [U] reproche à l'employeur d'avoir mis en 'uvre une clause de forfait de durée du travail sans mise en place du document de contrôle imposé par la convention collective et sans aucun contrôle de sa charge de travail à l'occasion de l'entretien annuel prévu par le code du travail ; que le décompte précis qu'il produit justifie de l'intégralité des heures supplémentaires qu'il a accomplies ; que la volonté de l'employeur de dissimuler des heures accomplies est démontrée.

Pour infirmation du jugement en ce qu'il a déclaré nulle la convention et confirmation du rejet des demandes de M. [U] au titre des heures supplémentaires, du repos compensateur et du travail dissimulé, la société CIMLEC rétorque que les dispositions de la convention collective de la métallurgie relatives au forfait annuel en jours ont été validées par la Cour de cassation, que le contrôle du nombre des jours travaillés a été effectué via l'outil de pointage utilisé dans l'entreprise et dont elle fournit les exemples, que M. [U] est dès lors malvenu de contester les décomptes établis par ses soins et adressés à sa hiérarchie'; que M. [U] était régulièrement informé des jours travaillés comme en attestent les compteurs actualisés figurant sur ses bulletins de paie, qu'il a bénéficié d'une entretien annuel d'évaluation ainsi que d'un entretien professionnel au cours duquel ont été évoquées l'organisation et la charge de travail de l'intéressé et l'amplitude de ses journées d'activité, et qu'il n'a jamais fait état au cours de ces entretiens de la moindre problématique de surcharge de travail'; que l'absence de tenue de l'entretien annuel ne vaut pas ipso facto nullité du forfait annuel jours ainsi que l'ont retenu à tort les premiers juges'; que même en cas d'annulation d'une convention de forfait jours, qui remet le salarié dans une situation juridique lui permettant de revendiquer le paiement d'heures supplémentaires, c'est à la condition qu'il rapporte les éléments suffisamment précis prévus aux dispositions de l'article L3171-4 du code du travail'; que les horaires allégués en l'espèce par la salarié sont contredites par les autres pièces qu'il verse aux débats, ainsi que par les extraits de pointage que la société produit elle-même.

Toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales de travail, dans le respect des principes généraux de protection de la sécurité et de la santé du travailleur. L'employeur doit en outre s'assurer régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail.

Aux termes de l'article L.3121-39 du code du travail dans leur rédaction antérieure au 10 août 2016 :

'La conclusion de conventions individuelles de forfait, en heures ou en jours, sur l'année est prévue par un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche. Cet accord collectif préalable détermine les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait, ainsi que la durée annuelle du travail à partir de laquelle le forfait est établi, et fixe les caractéristiques principales de ces conventions.'

Aux termes de l'article L.3121-46 du même code :

'Un entretien annuel individuel est organisé par l'employeur, avec chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours sur l'année. Il porte sur la charge de travail du salarié, l'organisation du travail dans l'entreprise, l'articulation entre l'activité professionnelle et la vie personnelle et familiale, ainsi que sur la rémunération du salarié.'

Aux termes de l'article L3121-55 du même code dans sa version résultant de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016':

'La forfaitisation de la durée du travail doit faire l'objet de l'accord du salarié et d'une convention individuelle de forfait établie par écrit.'

Aux termes de l'article L3121-63 dans sa rédaction issue la même loi du 8 août 2016':

'Les forfaits annuels en heures ou en jours sur l'année sont mis en place par un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche.'

Aux termes de l'article L3121-65 dans sa version résultant de la même loi, en vigueur du 10 août 2016 au 22 décembre 2017':

'I.-A défaut de stipulations conventionnelles prévues aux 1° et 2° du II de l'article L. 3121-64, une convention individuelle de forfait en jours peut être valablement conclue sous réserve du respect des dispositions suivantes :

1° L'employeur établit un document de contrôle faisant apparaître le nombre et la date des journées ou demi-journées travaillées. Sous la responsabilité de l'employeur, ce document peut être renseigné par le salarié ;

2° L'employeur s'assure que la charge de travail du salarié est compatible avec le respect des temps de repos quotidiens et hebdomadaires ;

3° L'employeur organise une fois par an un entretien avec le salarié pour évoquer sa charge de travail, qui doit être raisonnable, l'organisation de son travail, l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle ainsi que sa rémunération.

II.-A défaut de stipulations conventionnelles prévues au 3° du II de l'article L. 3121-64, les modalités d'exercice par le salarié de son droit à la déconnexion sont définies par l'employeur et communiquées par tout moyen aux salariés concernés. Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, ces modalités sont conformes à la charte mentionnée au 7° de l'article L. 2242-8.'

En l'espèce, le contrat de travail signé par M. [U] (pièce n°1 du salarié/pièce n°3 de l'employeur) comporte notamment'les clauses suivantes':

- «'la durée du travail est régie par la convention collective de la métallurgie et par l'accord d'entreprise sur le temps de travail du 20 décembre 2011 et ses avenants postérieurs existants et futurs'» (article 5) ,

- «'le suivi de l'activité de Monsieur [U] [T] sera effectué en nombre de jours, celui-ci étant fixé à un maximum de 218 jours par période annuelle d'activité (soit 217 plus la journée de solidarité)'», avec la précision que le salarié «'bénéficiera d'un repos journalier minimum de 11 heures consécutives et de 35 heures de repos hebdomadaires et sera soumis aux durées maximales légales de travail'»,

- «'un entretien spécifique par an sera organisé afin de vérifier que la charge de travail et l'organisation du travail du point de vue de [M. [U]] et de l'entreprise sont cohérentes avec la rémunération et une bonne articulation entre vie professionnelle et vie personnelle'».

La société CIMLEC INDUSTRIE a également versé aux débats

- le «'protocole d'accord sur le travail des cadres'» du 20 décembre 2001 (pièce n°6), prévoyant la possibilité de conventions de forfait jours (fixés à 217 jours calculés sur une période de référence du 1er juin au 31 mai de l'année suivante), et prévoyant au titre du «'contrôle de l'accord'':

* Un suivi des journées ou demi-journées travaillées et non travaillées sera effectué conformément aux dispositions légales et conventionnelles,

* En outre, le salarié bénéficie, chaque année, d'un entretien avec son supérieur hiérarchique au cours duquel seront évoquées l'organisation et la charge du travail de l'intéressé et l'amplitude de ses journées d'activité. Cette amplitude et cette charge de travail devront rester raisonnables et assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail des intéressés'» ;

- des «'extraits de pointage'» saisis par M. [U] (pièce n°9) qui ne couvrent que les semaines 32, 36, 37 et 46 de 2016, 9 et 11 de 2017 qui font apparaître sur les semaines concernées des temps de travail uniformes de «'7,6'» mais n'apportent pas d'information plus complète concernant sa charge de travail et la répartition de son temps de travail';

- les comptes-rendus de l'entretien annuel d'évaluation de M. [U] et de son entretien professionnel, tous deux du 14 février 2017 (pièce n°5), ne comportant aucune rubrique à compléter ni aucune observation relatives à la charge et à l'organisation du travail du salarié ou à l'amplitude de ses journées d'activité.

Il ressort de ces éléments que la société CIMLEC INDUSTRIE n'a établi avec M. [U] aucune convention individuelle prévoyant les mesures de suivi relatives au forfait en jours, absentes du contrat de travail qui ne prévoyait aucun suivi particulier mais rappelait seulement la nécessité d'un repos journalier de 11 heures et d'un repos hebdomadaire de 35 heures et celle d'un entretien annuel.

En outre, au vu des pièces produites, l'employeur ne justifie de la tenue d'aucun entretien périodique au cours de l'exécution du contrat de travail dans le but de s'assurer régulièrement que la charge de travail du salarié restait raisonnable et permettait une bonne répartition de son temps de son travail, ce sur quoi les «'extraits'» produits demeurent parfaitement insuffisants.

Le jugement entrepris doit en conséquence être confirmé, les dispositions des articles L.3121-39, L.3121-46 et L3121-65 précités du code du travail n'ayant pas été respectées à l'égard de M. [U].

Sur les heures supplémentaires

Il résulte des dispositions des articles L. 3171-2, alinéa 1er, L. 3171-3 et L. 3171-4 du code du travail, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

En l'espèce, M. [U] a seulement visé à l'appui de sa demande de rappel d'heures supplémentaires':

- ses agendas (pièce n°6) couvrant la période de mars 2016 (semaine 11) à juin 2017 (semaine 25),

- un tableau détaillé (pièce n°8) indiquant des heures de début et de fin de journée et le nombre d'heures effectuées ainsi que le nombre d'heures 'pointé sur base CIMLEC' et le différentiel,

- un tableau synthétique qui reprend les informations du précédent (pièce n°11) et mentionnant le nombre d'heures de travail en résultant, calculé chaque semaine pour en déduire un nombre d'heures supplémentaires par semaine distinguant les heures comprises entre la 38ème et la 43ème heure et les heures effectuées au-delà.

M. [U] présente des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments relatifs au volume des heures supplémentaires prétendument effectuées

La société CIMLEC communique en réponse plusieurs tableaux extraits de son logiciel de pointage (sa pièce n°9) qui établissent sur les semaines concernées (semaines 32, 36, 37, 46 de 2016 et 9 et 11 de 2017) que les heures déclarées par M. [U] sur ces périodes ne dépassent pas les 38 heures hebdomadaires.

Sur les autres périodes concernées, l'employeur ne communique en revanche aucun élément de nature à justifier les heures effectivement réalisées et se limitait à contester le décompte fourni par son salarié.

Au vu de ces éléments d'appréciation et après analyse des tableaux complets versés aux débats, les éléments produits par M. [U] justifient de faire droit partiellement à sa demande de rappel d'heures supplémentaires, à hauteur de 8.122,91 € brut sur l'ensemble de la période et 812,29 € brut au titre des congés payés afférents. Le jugement entrepris sera donc réformé dans cette limite.

Au vu de ce qui précède, M. [U] est également bien fondé à solliciter le paiement au titre du repos compensateur, sur la base d'un dépassement de 226,5 heures du contingent annuel, de la somme de 5.823,31€ augmentée de 582,33€ de congés payés afférents.

Sur le travail dissimulé

Pour infirmation à ce titre, M. [U] reprend l'argumentation relative aux nombreuses heures de travail effectuées non rémunérées.

L'article L.8221-1 du code du travail prohibe le travail totalement ou partiellement dissimulé défini par l'article L.8221-3 du même code relatif à la dissimulation d'activité ou exercé dans les conditions de l'article L.8221-5 du même code relatif à la dissimulation d'emploi salarié.

Aux termes de l'article L.8223-1 du code du travail, le salarié auquel l'employeur a recours dans les conditions de l'article L.8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L.8221-5 du même code relatifs au travail dissimulé a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Selon l'article L.8221-5 du même code en sa rédaction applicable au présent litige, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

'1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L.1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L.3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.'

En l'espèce, il a été précédemment retenu que des heures supplémentaires ont été effectuées par M. [U] sans avoir été rémunérées par l'employeur.

Cependant, outre que le volume d'heures supplémentaires retenu plus haut s'avère sensiblement inférieur à celui revendiqué par M. [U], celui-ci ne justifie d'aucune alerte de sa part ni d'une demande adressée à l'employeur durant l'exercice de son contrat de travail.

Le salarié ne vise en effet aucune autre pièce de nature à caractériser plus précisément une intention, de la part de l'employeur, de se soustraire aux dispositions légales relatives à l'organisation de son travail.

Dans ces circonstances, l'élément intentionnel de l'infraction de travail dissimulé ne résulte d'aucune pièce au dossier et ne peut être déduit du seul fait que l'employeur n'a pas mis en 'uvre des mesures particulières de suivi de la charge de travail.

L'infraction de travail dissimulé n'est donc pas caractérisée au sens des dispositions légales précitées. Le jugement entrepris sera confirmé à ce titre.

Sur la rupture du contrat de travail

Pour infirmation, M. [U] conteste les motifs du licenciement et soutient principalement que le secteur qui lui a été confié correspondait à un secteur géographique où l'entreprise CIMLEC n'était pas implantée'; qu'il n'existait aucun historique de chiffre d'affaires et de clientèle'; que sa hiérarchie ne l'a jamais soutenu ou accompagné dans son travail'; qu'il a dû faire face d'une part à des difficultés à être concurrentiel dans la mesure où les prix qu'il proposait intégraient les déplacements des techniciens depuis la région rennaise, d'autre part à des perturbations causées par certains techniciens avec des clients'; qu'en dépit de ces obstacles, il est parvenu à démarcher plus de 165 entreprises (au-delà des attentes de son employeur) et n'a nullement démérité'; qu'il ne peut pas non plus être tenu responsable du mode d'organisation de l'entreprise et encore moins de sa politique tarifaire, de son organisation ou encore du management délégué à son responsable hiérarchique, M. [Z], celui-ci déterminant lui-même « l'économie des chantiers » en intervenant sur les offres'; que la comparaison de ses résultats avec ceux de son collègue M. [S] n'est pas pertinente'; que la société n'est pas en mesure de fournir les données chiffrées de l'agence de Nantes postérieurement au départ de M. [U] pour la bonne et simple raison qu'elle a décidé de la fermer, alors que si les résultats de cette agence de NANTES avaient été imputables à l'insuffisance personnelle de M. [U] la société CIMLEC aurait maintenu cet établissement et sa présence sur le secteur.

Pour confirmation, la société CIMLEC INDUSTRIE fait valoir que l'insuffisance de résultats de M. [U] est parfaitement étayée selon les termes de la lettre de licenciement'; que M. [U] avait pourtant été recruté en considération de sa forte expérience au poste de Responsable d'affaires et qu'il n'a pas produit les résultats auxquels lui-même s'était engagé'; que la société CIMLEC a depuis intégré le Groupe SPIE lui-même présent dans la région nantaise ; que les circonstances de la fermeture de l'agence de Nantes ne font pas obstacle à l'évocation d'une quelconque insuffisance de la part de son responsable.

Selon l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Ainsi l'administration de la preuve concernant le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe-t-elle pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.

L'insuffisance professionnelle peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement lorsqu'elle repose sur des éléments précis, objectifs et imputables au salarié.

L'insuffisance de résultats ne peut constituer, en soi, une cause de licenciement. Il appartient au juge de rechercher si les mauvais résultats allégués procèdent d'une insuffisance professionnelle ou d'une faute imputable au salarié ou de son incapacité à atteindre les objectifs fixés et de vérifier si les objectifs fixés au salarié lors de l'accomplissement de sa prestation de travail, qui peuvent être définis unilatéralement par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, étaient ni excessifs, ni irréalisables, mais au contraire réalistes.

En l'espèce, la lettre de licenciement, datée du 24 mai 2017 (pièce n°8 de la société CIMLEC /n°3 de M. [U]), qui circonscrit les limites du litige et qui lie le juge, retient à l'encontre du salarié une insuffisance professionnelle ainsi développée par l'employeur :

'Monsieur

Par lettre recommandée présentée en date du 10 mai 2017 nous vous avons convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement. Celui-ci a eu lieu le 17 mai 2017.

Au cours de cet entretien vous avez été reçu par Madame [R] [M], responsable RH adjointe et moi-même. De votre côté, vous étiez accompagné par Monsieur [C] [B], Délégué Syndical Force Ouvrière. Nous vous avons exposé les motifs qui nous amenaient à envisager votre licenciement et avons pris note de vos observations.

Les faits invoqués, tels qu'ils vous ont été exposés lors de cet entretien préalable, sont les suivants :

Vous avez été recruté le 14 mars 2016 comme responsable d'affaires avec notamment pour objectif de développer commercialement le secteur de Nantes / Saint-Nazaire. A ce titre, votre fonction prévoyait d'étudier le marché accessible sur ce secteur, d'effectuer les démarches commerciales nécessaires afin de développer un chiffre d'affaires récurrent, et gérer le suivi contractuel technique et économique des commandes clients. La stratégie de CIMLEC Industrie était d'abord de développer commercialement pour ensuite structurer l'antenne locale par des recrutements d'équipes opérationnelles dès que le chiffre d'affaires le permettrait. Notre choix s'était porté sur votre candidature en raison de votre connaissance du secteur Nantais où vous résidez, votre expérience professionnelle commerciale et technique laissant présager un bon niveau d'autonomie, et vos propositions sur des actions commerciales pouvant être menées et pouvant donner des résultats tangibles dans un délai raisonnable.

Après plus de 6 mois de présence au sein de notre société, nous avons demandé à vous rencontrer pour aborder et éventuellement lever nos inquiétudes quant à vos premiers résultats très en retrait, aussi bien en terme d'entrées de commandes que de devis. Nous nous sommes ainsi vus le 30 novembre 2016 avec votre responsable hiérarchique, Monsieur [F] [Z]. A cette occasion, vous nous avez exposé une synthèse de vos démarches, avec notamment 132 actions commerciales auprès de prospects. Vous précisiez alors qu'un temps supplémentaire était nécessaire pour concrétiser ces actions commerciales en consultations et commandes. A cette même date, il vous semblait qu'un budget de 500 K€ d'entrées de commandes et 460 K€ de Chiffre d'Affaires pour l'année 2017 était tout à fait raisonnable et atteignable. A l'écoute de vos arguments, nous avions décidé de refaire un point courant 1er trimestre 2017, d'une part pour une analyse plus complète de l'exercice 2016, et d'autre part pour étudier l'évolution de votre portefeuille de devis. Pour faciliter les échanges avec votre hiérarchie et vos collègues, vous apporter un soutien technique dans la construction des offres, et vous accompagner dans l'appréhension des outils, méthodes de travail et procédures, nous avions également convenu que vous seriez présent a minima une journée par semaine à votre agence de rattachement, le Rheu. Ceci devait permettre de pallier aux difficultés que vous pouviez rencontrer par votre éloignement géographique.

Monsieur [Z] a réalisé votre entretien individuel d'évaluation le 14 février 2017, durant lequel il a malheureusement fait le même constat que fin novembre 2016.

A la date du 15 mai 2017, vos entrées de commandes cumulées sont de 10,4 K €, alors que votre objectif annuel est de 500 K €. De plus, à cette même date, votre portefeuille devis est de 203 K € pondéré à 33K € après intégration des pourcentages de chances. Ce portefeuille est composé de 7 devis pour 6 clients différents. Ces indicateurs mettent en évidence que vous êtes très loin de la trajectoire vous permettant d'atteindre votre objectif annuel.

Depuis votre arrivée chez CIMLEC industrie, vous avez émis pour 833K€ de devis pour 19 clients différents. Ces chiffres sont à comparer à ceux de vos réussites commerciales (entrées de commandes) qui sont de 112 K € (102 K € en 2016, 10 K € en 2017) pour 8 clients. Il ressort de façon assez claire, que malgré vos 132 actions commerciales (vos chiffres de fin novembre 2016), peu de nouveaux prospects ont fait appel à CIMLEC industrie pour le chiffrage de travaux, et encore moins ont passé commande.

On ne peut évidemment pas se contenter de démarches commerciales qui n'aboutissent pas par des commandes clients.

Ce constat en terme d'entrées de commandes se vérifie inévitablement en chiffre d'affaires. En effet, à fin avril 2017, vous avez produit 47 K € pour un objectif annuel de 460 K €. Un tel volume ne peut bien évidemment pas vous permettre de vous autofinancer à hauteur de 40 % sur vos affaires comme prévu au budget.

Au-delà de cette problématique de chiffre d'affaires et d'autofinancement, la rentabilité de vos affaires (Marge sur Coûts Directs) sur les 4 premiers mois de 2017 est de - 29,10 % alors que votre objectif est de + 25 %. Même si les dégradations d'affaires ne peuvent pas vous être intégralement imputées notamment en raison de quelques malfaçons du personnel de chantier, vous avez malgré tout la responsabilité contractuelle et financière de ces affaires, ainsi que la mission d'encadrement technique du personnel chargé de la réalisation.

Vos explications lors de l'entretien ne nous ont pas convaincu et n'ont pas permis d'expliquer objectivement cette situation. Vous vous réfugiez systématiquement derrière des raisons imputables à votre hiérarchie ou à des tiers, sans pour autant reconnaître la moindre responsabilité à ces constats.

Nous citons ci-après vos principaux prétextes :

1. La stratégie pour cibler les prospects n'est pas clairement exposée,

2. Votre responsable hiérarchique, Monsieur [Z], rajoute systématiquement des coûts de revient à vos chiffrages, et plus particulièrement des grands déplacements,

3. Nous ne savons pas faire les efforts commerciaux nécessaires pour nous mettre au prix du marché,

4. Certains salariés font ce qu'ils veulent et ne sont pas gérables, Messieurs [W] et [K] plus particulièrement,

5. Certains salariés n'interviennent pas de façon professionnelle aussi bien au regard des malfaçons constatées que de leur communication avec les clients,

6. Certains salariés auraient décidé de 'saboter' le chantier de la DCNS,

7. CIMLEC industrie aurait décidé de se retirer de Nantes et aurait déjà mis à jour son site Internet.

Nous ne pouvons pas accepter de telles explications que nous estimons être une fuite de responsabilités. Nous pouvons d'ailleurs apporter quelques éléments de réponses à vos allégations :

1. Nous attendions précisément de vous que vous nous proposiez une stratégie commerciale sur votre secteur, c'est notamment pour cette raison que notre choix s'était porté sur vous,

2. Il est normal d'intégrer les vrais coûts dans le prix de revient d'une affaire. Si le personnel est en grand déplacement, le prix de revient doit en tenir compte,

3. Même si l'objectif de CIMLEC Industrie est de prendre des commandes rentables, nous savons y déroger dès lors qu'une stratégie est présentée (meilleure rentabilité sur les futures commandes ou travaux supplémentaires identifiées par exemple),

4. Même si certains salariés sont plus difficilement manageables, nous n'appliquons aucune différence de traitement,

5. Même si les malfaçons auxquelles vous faites références sont indéniables, comment expliquer que nous ne soyons pas confrontés à de tels problèmes sur nos autres chantiers '

6. Cet argument nous semble totalement hallucinant d'autant plus que c'est la première fois que nous l'entendons. Pourquoi le personnel aurait-il pris une telle décision à votre encontre '

7. Nous vous avons reprécisé que notre stratégie d'implantation sur Nantes n'avait pas évoluée (sic), et qu'il n'y avait eu aucune mise à jour du site Internet. Nous avons juste constaté ensemble, une incohérence d'informations sur ce site, une vue indique bien l'antenne de Nantes contrairement à une autre.

Face à un tel constat, nous avons le regret de vous informer que nous sommes contraints de vous licencier pour insuffisance professionnelle.

Vous disposez d'un préavis d'une durée de trois mois qui débutera à la date de présentation de la présente lettre. Toutefois, nous souhaitons vous dispenser de l'exécution de votre préavis à compter du 2 juin 2017 au soir. Nous vous précisons que la durée de votre préavis non effectué vous sera rémunérée.

A l'expiration de votre préavis, votre solde de tout compte et son reçu, votre attestation Pôle Emploi, votre certificat de travail ainsi qu'une lettre d'information sur la portabilité des droits santé et prévoyance, vous seront acheminés par lettre recommandée avec avis de réception.

Par ailleurs nous vous prions de bien vouloir restituer à Monsieur [Z] (') Concernant votre véhicule de fonction, (')

Nous vous prions d'agréer, Monsieur, l'expression de nos salutations distinguées.'

La société CIMLEC verse aux débats':

- Pièce n° 1 : un courriel du 27 octobre 2015 du cabinet de recrutement ISB Brothers détaillant le profil expérimenté de M. [U] et ses compétences spécifiques et relevant son expérience professionnelle en matière de développement commercial, son choix de «'création de sa propre société'», sa «'solide expérience acquise dans le développement commercial pendant 15 années'», insistant sur son «'taux de transformation de devis de 70% avec un maintien de marge de 40 %'», sa «'présence depuis de nombreuses années sur la région nantaise qui lui a permis de créer d'étroites collaborations avec ses clients dans de multiples métiers »;

- Pièce n°12 : un courriel du 7 Septembre 2016 adressé par M [U] à sa hiérarchie intitulé «'Sujet: Prévision 2019'» dans lequel il formule une projection de chiffre d'affaires sur les années suivantes en précisant «'Pour la faire, j'ai pris des hypothèses sur mes plus grosses cibles. Dis-moi ce que tu en pense (sic) »';

- Pièces n°10 et 11 : l'état des prises de commandes de M. [U] entre 2016 et avril 2017'et des extraits du «'tableau de bord gestion'» montrant en particulier les écarts entre les objectifs annoncés par M. [U] lui-même sur les périodes considérées et les résultats effectifs concernant les prises de commandes (PC), production et marge sur coûts directs (MCD), résultats partiellement repris dans la lettre de licenciement'qui mentionne notamment': le «'15 mai 2017, vos entrées de commandes cumulées sont de 10,4 K€, alors que votre objectif annuel est de 500 K€. chiffre d'affaires (') En effet, à fin avril 2017, vous avez produit 47 K€ pour un objectif annuel de 460 K€'»'; Il convient de rappeler que M. [U] a été embauché en mars 2016 et que les résultats sur l'année 2017 tels qu'exposés dans ces tableaux sont limités à ceux du premier quadrimestre';

- Pièce n° 14': un tableau comparatif des données chiffrées entre l'agence Normandie confiée à M. [S], qui intègre la totalité de l'année 2017, et les résultats de M [U] évoqués ci-dessus ;

- Pièce n°5': les comptes rendus des entretien individuel d'évaluation et entretien professionnel de M. [U] réalisés le 14 février 2017 par son responsable M. [Z], qui appellent plusieurs observations':

* M. [Z] ne contredit pas les observations formulées par M. [U] selon lesquelles il n'est «'pas facile de déplacer le personnel de Rennes sur Nantes'» et «'le développement de l'antenne de Nantes est long car le contexte est difficile (concurrence)'» et le conforte même en ces termes «'l'activité sur Nantes a du mal à démarrer, les résultats ne sont pas à la hauteur des objectifs fixés'»';

* L'évaluateur décrit comme «'non atteints'» d'une part les deux objectifs économiques des «'résultats'» et du «'pointage des heures'» mais estime «'partiellement atteint'» l'objectif commercial de «'création et développement de l'antenne de Nantes'» et «'atteints'» les deux autres objectifs commerciaux consistant à «'réussir à transférer les clients historiques vers CIMLEC'» et à la «'création d'une base client et prospect'» ainsi que les deux objectifs de production'consistant à «'mettre en 'uvre toutes les actions nécessaires pour tenir nos engagements contractuels et pour assurer la satisfaction de nos clients'» et «'RH': participer aux recrutements du personnel de l'antenne de Nantes'»';

* Parmi les évaluations des «'compétences techniques', comportementales, et managériales », sur l'échelle allant de 1 (très insuffisant) à 4 (très satisfaisant), seul l'item «'est autonome techniquement au niveau des chiffrages'» est évalué par M. [H] à 2 (insuffisant) alors que tous les autres sont évalués à 3 (satisfaisant), en particulier ceux indiquant': «'motivé et investi'», «'respect des directives'», «'pense société'», «'possède l'esprit d'équipe'» respecte ses engagements'»';

* Aucune évaluation n'est formulée concernant les compétences «'managériales» de M. [U], alors même que plusieurs fonctions sur ce point apparaissent sur son contrat de travail et sur la fiche de poste produite par l'employeur (pièces n°3 et 4)';

* Le détail des items ainsi évalués peine d'autant plus à justifier la mention globale par l'évaluateur d'«'insuffisantes'» au titre du «'bilan global des performances'» qu'aux avis sur la «'définition des moyens nécessaires à la réalisation des objectifs'» formulés par le salarié indiquant «'Besoin d'un chef d'équipe sur Nantes'», «'soutient (sic) et de synergie de la part du groupe'», et «'définir une stratégie de développement'», M. [Z] se contente de répondre par la mention «'en phase avec [T]'»';

* Alors que M. [U] indique dans les «'commentaires généraux'» que selon lui «'avec plus de soutien et définition des cibles il est possible de faire beaucoup plus notamment en partageant les informations'», M. [Z] rappelle «'l'activité sur Nantes a du mal à démarrer, les résultats ne sont pas à la hauteur des objectifs. La visibilité pour 2017 via le carnet d'offres et les chiffres de janvier 2017 pose question sur les capacités à tenir les engagements. Pourtant [T] a été impliqué dans l'élaboration du budget 2017. L'atteinte des objectifs de 2017 est une nécessité pour la pérennité de l'antenne de Nantes'»';

* Aucune solution n'est proposée, aucun axe d'amélioration n'est indiqué, alors même que le rappel est effectué dès la première page d'un «'RDV avec DG le 30/11/2016 pour faire un point d'avancement et mise en évidence des inquiétudes face à la situation'».

Contrairement à ce que soutient la société CIMLEC, ces documents ne sont pas de nature à rapporter la preuve d'une insuffisance de M. [U] au regard de ses missions telles que définies au contrat de travail et à la fiche de poste susvisés ; à défaut de définir quels manquements seraient imputables à M. [U] dans l'exercice de ses missions, il ne saurait être tenu pour seul responsable d'une insuffisance de résultats attendus et de la circonstance que les objectifs n'étaient pas atteints, alors même que la société ne répond pas aux observations de M. [U] s'agissant des difficultés auxquelles il a dû faire face et qu'il justifie avoir signalées par divers courriers (sa pièce n°4) et dont la société ne conteste pas la réalité mais se contente de répondre comme dans la lettre de licenciement que «'nous attendions précisément de vous que vous nous proposiez une stratégie commerciale sur votre secteur'», «'même si certains salariés sont plus difficilement manageables, nous n'appliquons aucune différence de traitement'», «'si les malfaçons auxquelles vous faites références sont indéniables, comment expliquer que nous ne soyons pas confrontés à de tels problèmes sur nos autres chantiers ''».

La société CIMLEC vie sa pièce n°14 faisant état des données comparées pour les années 2016 et 2017 de M. [U] (pièce n°11 précitée) et de M. [S] sur la région Normandie sans en faire aucune analyse ni expliquer en quoi la comparaison pourrait se révéler pertinente en l'absence d'autres éléments objectifs sur la situation de cet autre secteur géographique ; la société se contente d'affirmer dans ses écritures que les deux salariés étaient placés «'dans des conditions parfaitement semblables'», qu'il existerait dans le deux cas «'un référentiel commun'», que la comparaison des résultats «'est parfaitement fondée'», sans en justifier par le moindre élément extérieur à ses seules allégations.

Au vu de l'ensemble de ces éléments d'appréciation et compte tenu des exigences liées aux responsabilités confiées à M. [U] dans sa fonction de responsable d'affaires, de la faible ancienneté dans l'entreprise de l'intéressé, dont l'absence de résultats satisfaisants sont évalués sur moins d'une année, les insuffisances de résultats n'étant pas liées à la démonstration d'insuffisances repérées dans les méthodes commerciales, techniques et de management de M.[U] et le prétendu manque de perspectives d'amélioration à court ou moyen terme n'étant nullement caractérisé, il n'est pas établi par l'ensemble des pièces versées aux débats une quelconque insuffisance professionnelle de M. [U] pour le poste exercé.

Il y a lieu par conséquent d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse et débouté M. [U] de ses demandes de ce chef.

M. [U] expose avoir perçu les indemnités de chômage et n'avoir retrouvé un emploi stable à partir du mois d'octobre 2021, et produit les justificatifs de son affiliation à Pôle emploi (pièces n°9 et 10).

Compte tenu de la perte d'une ancienneté de seulement d'un an et deux mois pour un salarié âgé de 46 ans et des conséquences matérielles et morales du licenciement à son égard sur sa situation postérieurement à la rupture du contrat, l'évaluation du préjudice résultant du licenciement injustifié sera limitée à 9.000€.

Sur l'article 700 du Code de procédure civile

L'équité et la situation économique respective des parties justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré nulle la convention de forfait jours;

INFIRME le jugement entrepris pour le surplus ;

Statuant de nouveau,

CONDAMNE la société CIMLEC Industrie à payer à M. [U] les sommes suivantes:

- 8.122,91 € brut au titre des heures supplémentaires,

- 812,29 € brut au titre des congés payés afférents,

- 5.823,31 € au titr du repos compensateur,

- 582,33 € au titre des congés payés afférents.

- 9.000 € net au titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif';

Y ajoutant,

CONDAMNE la société CIMLEC Industrie à payer à M. [U] la somme de 1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

D ÉBOUTE la société CIMLEC Industrie de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société CIMLEC Industrie aux entiers dépens d'appel.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 8ème ch prud'homale
Numéro d'arrêt : 19/04058
Date de la décision : 29/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-29;19.04058 ?
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