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29/04/2022 | FRANCE | N°19/02200

France | France, Cour d'appel de Rennes, 8ème ch prud'homale, 29 avril 2022, 19/02200


8ème Ch Prud'homale





ARRÊT N°218



N° RG 19/02200 -

N° Portalis DBVL-V-B7D-PVF3













Association ICOOPA



C/



M. [D] [Y]

















Infirmation partielle











Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 29 AVRIL 2022






COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Président de chambre,

Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller,

Monsieur Emmanuel ROCHARD, Conseiller,



GREFFIER :



Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé







DÉBATS :



A l'audience publique du 03 Dé...

8ème Ch Prud'homale

ARRÊT N°218

N° RG 19/02200 -

N° Portalis DBVL-V-B7D-PVF3

Association ICOOPA

C/

M. [D] [Y]

Infirmation partielle

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 29 AVRIL 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Président de chambre,

Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller,

Monsieur Emmanuel ROCHARD, Conseiller,

GREFFIER :

Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 03 Décembre 2021

devant Monsieur Emmanuel ROCHARD, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

En présence de Madame [K] [E], Médiatrice judiciaire

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 29 Avril 2022, date à laquelle a été prorogé le délibéré initialement fixé au 18 mars précédent par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE et intimée à titre incident :

L'Association ICOOPA prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :

[J] - B.P. 114

29203 MORLAIX CEDEX

Représentée par Me Frédérick DANIEL, Avocat au Barreau de BREST

INTIMÉ et appelant à titre incident :

Monsieur [D] [Y]

né le 16 Avril 1982 à BREST (29)

demeurant10 Kleuz Fos

29870 LANDEDA

Représenté par Me Dominique LEYER, Avocat au Barreau de BREST

M. [D] [Y] a été engagé par l'Association ICOOPA en contrat à durée indéterminée à compter du 18 janvier 2010, en qualité de comptable adjoint. Il a ensuite exercé des fonctions de technicien de gestion. La relation de travail était régie par la convention collective des 5 branches industries alimentaires du 21 mars 2012.

Par lettre recommandée avec avis de réception datée du 27 octobre 2016, M. [Y] a informé son employeur de sa démission. Le préavis a pris fin le 27 janvier 2017.

Le 9 juin 2017, M. [Y] a saisi le conseil de prud'hommes de Brest aux fins principalement de voir requalifier sa démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur à lui verser :

- 15.900 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 7.326 € à titre de préavis : demande non maintenue à l'audience,

- 733 € au titre des congés payés afférents : demande non maintenue à l'audience,

- 3.710 € à titre d'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement,

- 2.612 € au titre des heures supplémentaires impayées,

- 262 € au titre des congés payés afférents,

- 15.900 € au titre de l'indemnité pour travail dissimulé,

- 2.255 € au titre du 13ème mois,

- 420 € au titre des chèques vacances,

- 1.000 € à titre de dommages-intérêts pour non remise du certificat de travail,

- 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

La cour est saisie d'un appel régulièrement formé le 2 avril 2019 par l'Association ICOOPA à l'encontre du jugement prononcé le 1er mars 2019 par lequel le conseil de prud'hommes de Brest a :

' En la forme, reçu M. [Y] en sa requête,

' Dit que la démission de M. [Y] s'analyse en une démission claire et non équivoque,

' Condamné l'Association ICOOPA à verser à M. [Y] les sommes suivantes avec intérêts de droit :

- 2.612 € au titre des heures supplémentaires,

- 262 € au titre des congés payés,

- 240 € au titre du 13ème mois,

- 420 € au titre des chèques vacances,

- 500 € à titre de dommages-intérêts pour retard dans la délivrance des documents sociaux,

- 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

' Débouté les parties du surplus de leurs demandes,

' Laissé les dépens à la charge de chacune des parties pour ceux par elles exposés.

Vu les écritures notifiées par voie électronique le 29 avril 2019, suivant lesquelles l'Association ICOOPA demande à la cour de :

' Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné l'Association ICOOPA à payer à M. [Y] les sommes suivantes :

- 2.612 € au titre des heures supplémentaires,

- 262 € au titre des congés payés,

- 240 € au titre du 13ème mois,

- 420 € au titre des chèques vacances,

- 500 € à titre de dommages-intérêts pour retard dans la délivrance des documents sociaux,

' Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [Y] de ses demandes aux titres du travail dissimulé et de la requalification de sa démission,

' Débouter M. [Y] de toutes ses demandes,

' Le condamner à payer 3.000 € à l'association ICOOPA au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Vu les écritures notifiées par voie électronique le 24 novembre 2021, suivant lesquelles M. [Y] demande à la cour de :

' Dire que la démission de M. [Y] de l'Association ICOOPA doit être qualifiée de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' Condamner l'Association ICOOPA à payer à M. [Y] :

- 15.900 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 7.326 € à titre de préavis,

- 733 € au titre des congés payés,

- 3.710 € à titre d'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement,

- 41.085,80 € au titre des heures supplémentaires impayées,

- 15.900 € au titre de l'indemnité pour travail dissimulé,

' Confirmer pour le reste la décision dont appel,

' Condamner l'Association ICOOPA à payer à M. [Y] la somme de 5.000 € au titre des frais irrépétibles de l'article 700 du code de procédure civile,

' Rejeter toute demande contraire,

' Condamner l'Association ICOOPA aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est datée du 25 novembre 2019.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions notifiées par voie électronique.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur les heures supplémentaires

Pour infirmation à ce titre, l'Association ICOOPA soutient que la demande en rappel d'heures supplémentaires est prescrite. Au surplus, elle ajoute que la demande est infondée car M. [Y] n'a jamais démontré qu'il a réalisé des heures supplémentaires ou qu'elles lui ont été demandées par son employeur.

Pour augmentation du quantum de condamnation à ce titre, M. [Y] rétorque qu'il a accompli des heures supplémentaires pour faire face aux absences prolongées de Mme [S] et M. [L]. Il explique également qu'il est aussi fondé à solliciter la condamnation de son employeur à lui payer les heures supplémentaires effectuées pour la formation de Mme [R].

* sur la prescription

Aux termes de l'article L.3245-1 du code du travail, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

En l'espèce, les demandes de rappels de salaires formées par M. [Y] portent sur la période à compter du mois de janvier 2010 (pièce n°13 du salarié), alors qu'il a saisi le conseil de prud'hommes le 9 juin 2017.

S'il invoque les dispositions de l'article 2240 du code civil, qui prévoit que 'la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait, interrompt le délai de prescription', M. [Y] produit aucun élément permettant de constater que l'Association ICOOPA a donné un accord explicite pour interrompre la prescription, avant que celle-ci ne soit acquise.

Il s'ensuit que la demande d'heures supplémentaires relative à la période antérieure au 27 janvier 2014 est prescrite.

* sur le bien fondé de la demande

Selon l'article L. 3121-10 du Code du travail, la durée légale du travail effectif des salariés est fixée à trente-cinq heures par semaines civile ; l'article L. 3121-22 énonce que les heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire fixée par l'article L. 3121-10, ou de la durée considérée comme équivalente, donnent lieu à une majoration de salaire de 25% pour chacune des huit premières heures supplémentaires, les heures suivantes donnant lieu à une majoration de 50 %.

Une convention ou un accord de branche étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoir un taux de majoration différent qui ne peut être inférieur à 10%.

En application de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

En l'espèce, M. [Y] produit au débat un relevé d'heures supplémentaires de juin 2014 à janvier 2015 (pièce 13), des tableaux récapitulatifs présentant des relevés d'heures pour la même période (pièce 24), ses entretiens annuels 2014-2015 et 2015-2016 où sont abordés 'les heures supp non soldées' (pièces 14 et 15) ainsi que le tableau des dossiers de Mme [S] et M. [L] qui lui ont été confiés pendant leurs arrêts de travail (pièce 37).

L'employeur auquel il appartient d'assurer le contrôle des heures de travail effectuées ne peut sérieusement invoquer le fait de pas avoir demandé l'accomplissement de ces heures et ne peut feindre de n'avoir pas tacitement admis l'exécution des heures supplémentaires revendiquées dès lors qu'il est établi que le sujet a été discuté lors des entretiens annuels.

L'employeur qui ne produit aucun élément relatif au contrôle du temps de travail de M. [Y], ne discute aucun des éléments précis produits par le salarié, de sorte qu'il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en qu'il condamné l'Association ICOOPA à verser au salarié la somme de 2.612 € au titre des heures supplémentaires, 262 € au titre des congés payés ainsi que la prime de 240 € au titre du 13ème mois..

Sur les chèques vacances

Suivant l'article R 2323-21 du code du travail, dans sa version en vigueur, 'Le comité d'entreprise assure la gestion des activités sociales et culturelles qui n'ont pas de personnalité civile, à l'exception des centres d'apprentissage et de formation professionnelle.

Quel que soit leur mode de financement, cette gestion est assurée :

1° Soit par le comité d'entreprise ;

2° Soit par une commission spéciale du comité ;

3° Soit par des personnes désignées par le comité ;

4° Soit par des organismes créés par le comité et ayant reçu une délégation.

Ces personnes ou organismes agissent dans la limite des attributions qui leur ont été déléguées et sont responsables devant le comité'.

En l'espèce, il ressort des débats que c'est le comité d'entreprise qui finance les activités sociales et culturelles, notamment, les chèques vacances. M. [Y] ne peut donc pas solliciter son employeur pour l'indemnisation de chèques vacances qui ne lui auraient pas été attribués. Il sera débouté de sa demande et le jugement infirmé de ce chef.

Sur le travail dissimulé et sur la rupture du contrat de travail

Il résulte des articles 542 et 954 du code de procédure civile que, lorsque l'appelant ne demande, dans le dispositif de ses conclusions, ni l'infirmation des chefs du dispositif du jugement dont il recherche l'anéantissement ni l'annulation du jugement, la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement.

L'appel incident n'est pas différent de l'appel principal par sa nature ou son objet, de sorte que les conclusions de l'appelant principal ou de l'appelant incident doivent déterminer l'objet du litige porté devant la cour d'appel et comporter en conséquence dans le dispositif une demande d'infirmation ou de réformation du jugement attaqué.

En l'occurrence, dans ses écritures, Me [I] pour M. [Y] ne sollicite ni confirmation, ni infirmation, ni réformation des chefs du jugement.

Précisément, le dispositif des conclusions de l'intimé du 24 novembre 2021 vise à 'Dire que la démission de M. [Y] de l'Association ICOOPA doit être qualifiée de licenciement sans cause réelle et sérieuse' et 'Condamner l'Association ICOOPA à payer à M. [Y]' différentes sommes.

Après avoir soulevé cette difficulté à l'audience de plaidoirie, sans qu'il soit apporté d'explications satisfaisantes et en l'absence de précision dans le dispositif des conclusions de M. [Y], la cour ne peut que confirmer le jugement en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes aux titres du travail dissimulé et de la requalification de sa démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les dommages-intérêts pour retard dans la remise des documents de rupture

Il ne peut y avoir de réparation sans preuve du préjudice subi, l'existence et l'évaluation de celui-ci relevant de l'appréciation souveraine des juges du fond sur la base des justificatifs produits aux débats.

En l'espèce, M. [Y] n'apporte aucun élément permettant de justifier de la réalité d'un préjudice à ce titre. La demande sera donc rejetée, le jugement déféré étant infirmé sur ce point.

Sur les frais irrépétibles

Les éléments de la cause et la situation économique respective des parties justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif, sans qu'il y ait lieu de modifier les dispositions du jugement à ce titre.

L'employeur, qui succombe en appel, doit être débouté de la demande formulée à ce titre et condamné à indemniser le salarié intimé des frais irrépétibles qu'il a pu exposer pour assurer sa défense.

***

*

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,

DECLARE irrecevable comme étant prescrite la demande formée par M. [D] [Y] au titre du paiement des heures supplémentaires concernant la période accomplie avant le 27 janvier 2014 ;

INFIRME partiellement le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés

DEBOUTE M. [D] [Y] de ses demandes de condamnation de l'Association ICOOPA au titre des chèques vacances et à titre de dommages-intérêts pour retard dans la délivrance des documents sociaux ;

CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus ;

et y ajoutant,

CONDAMNE l'Association ICOOPA à verser à M. [D] [Y] la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, outre la somme déjà allouée en première instance sur ce fondement ;

DÉBOUTE l'Association ICOOPA de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE l'Association ICOOPA aux dépens d'appel.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 8ème ch prud'homale
Numéro d'arrêt : 19/02200
Date de la décision : 29/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-29;19.02200 ?
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