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27/04/2022 | FRANCE | N°20/01526

France | France, Cour d'appel de Rennes, 9ème ch sécurité sociale, 27 avril 2022, 20/01526


9ème Ch Sécurité Sociale





ARRÊT N°



N° RG 20/01526 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QRAV













[4]



C/



CPAM DU FINISTERE

































Copie exécutoire délivrée

le :



à :











Copie certifiée conforme délivrée

le:



à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE F

RANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 27 AVRIL 2022



COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Elisabeth SERRIN, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère,

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère,



GREFFIER :



Madame Adeline TIREL, lors des débats, et Monsieur Philip...

9ème Ch Sécurité Sociale

ARRÊT N°

N° RG 20/01526 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QRAV

[4]

C/

CPAM DU FINISTERE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Copie certifiée conforme délivrée

le:

à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 27 AVRIL 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Elisabeth SERRIN, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère,

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Adeline TIREL, lors des débats, et Monsieur Philippe LE BOUDEC, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l'audience publique du 23 Février 2022

devant Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, magistrat rapporteur, tenant seule l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 27 Avril 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats ;

DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:

Date de la décision attaquée : 14 Février 2020

Décision attaquée : Jugement

Juridiction : Tribunal Judiciaire de QUIMPER

****

APPELANTE :

La Société [4]

[Adresse 6]

[Localité 3]

représentée par Me Xavier BONTOUX de la SELARL FAYAN-ROUX, BONTOUX ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON substitué par Me Yann BOUGENAUX, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

LA CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU FINISTERE

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Madame [C] [J] en vertu d'un pouvoir spécial

EXPOSÉ DU LITIGE :

M. [V] [O], salarié de la société [4] (enseigne centre Leclerc) (la société) en qualité d'employé commercial, a été victime d'un malaise survenu le 4 mars 2019 à 8h30 sur son lieu de travail.

La déclaration d'accident du travail complétée par l'employeur le 5 mars 2019 mentionne les circonstances suivantes :

Activité de la victime : mise en rayon

Nature de l'accident : Monsieur [O] a fait un malaise au rayon liquide. Il tenait des propos incohérents et avait un côté paralysé (suspicion d'AVC)

Eventuelles réserves motivées : Les pompiers qui l'ont pris en charge soupçonnent un AVC.

Horaires de la victime le jour de l'accident : 5h00 à 12h00.

Le certificat médical initial établi par le docteur [M] du Centre hospitalier de [5], le 4 mars 2019 fait état d'un 'AVC du tronc cérébral hémorragique'.

À cette déclaration d'accident du travail, l'employeur a joint une lettre de réserves dans les termes suivants :

« Nous vous adressons, ci-après, la déclaration d'accident du travail relative au malaise déclaré par M. [O] comme étant survenu le 4 mars 2019.

Nous émettons nos plus vives réserves quant à la relation de causalité directe et unique avec le travail.

En effet, nous considérons que ce malaise trouve son origine dans une cause totalement étrangère au travail.

Ainsi, M. [O] se trouvait à son poste de travail lorsqu'il a ressenti un malaise se traduisant par des propos incohérents et avait un côté paralysé (suspicion AVC).

Or, en l'espèce, il n'existe aucun lien direct et certain entre le travail de notre salarié et le malaise dont il a été victime. De plus, durant sa journée de travail, il effectuait les tâches qui lui ont été confiées de manière tout à fait normale et les conditions de travail étaient tout ce qu'il peut y avoir de plus habituel.

Nous avons donc des suspicions sur l'existence d'un éventuel état pathologique antérieur évoluant pour son propre compte sur lequel nous vous demandons de bien vouloir mener une enquête.

[...]

Compte tenu de ces éléments, la présomption d'origine professionnelle ne pourra bénéficier à l'assuré et, par conséquent, cet accident ne pourra être pris en charge au titre de la législation professionnelle ».

Le 15 mai 2019, après instruction, la caisse primaire d'assurance maladie du Finistère (la caisse) a reconnu le caractère professionnel de l'accident dont a été victime M. [O].

Contestant l'opposabilité de cette décision de prise en charge, la société a saisi le 5 juillet 2019, par l'intermédiaire de son conseil, la commission de recours amiable de la caisse.

Le 17 septembre 2019, la société a porté le litige devant le tribunal de grande instance de Quimper, se prévalant d'une décision implicite de rejet de ladite commission.

Lors de sa séance du 31 octobre 2019, la commission de recours amiable a confirmé l'opposabilité à l'égard de la société de la décision de prise en charge de l'accident du travail de M. [O].

Par jugement du 14 février 2020, ce tribunal, devenu le pôle social du tribunal judiciaire de Quimper, a :

- déclaré recevable mais non fondé le recours de la société ;

- débouté la société de l'ensemble de ses demandes ;

- condamné la société aux dépens.

Par déclaration adressée le 26 février 2020, la société a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 17 février 2020.

Par ses écritures parvenues au greffe le 2 octobre 2020 auxquelles s'est référé et qu'a développées son conseil à l'audience, la société demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et en conséquence de :

' à titre principal, sur l'absence d'imputabilité au travail de l'accident du 4 mars 2019 :

- constater que l'accident dont M. [O] a été victime n'est pas imputable à son travail ;

- juger inopposable à la société la décision de prendre en charge l'accident du 15 mai 2019 (sic) ;

' à titre subsidiaire, sur la mise en oeuvre d'une expertise médicale judiciaire :

- ordonner, avant dire droit, une expertise médicale judiciaire sur pièces aux frais avancés de la caisse ou l'employeur, le litige intéressant les seuls rapports caisse/employeur, afin de se prononcer sur l'imputabilité de l'accident au travail ;

- nommer tel expert avec pour mission de :

1°- prendre connaissance de l'entier dossier médical de M. [O] établi par la caisse ;

2°- déterminer la cause du malaise dont M. [O] a été victime ;

3°- dire si le malaise a un lien avec son travail ou s'il résulte d'un état pathologique antérieur et/ou indépendant ;

4°- rédiger un pré rapport à soumettre aux parties ;

5°- intégrer dans le rapport d'expertise final les commentaires de chaque partie concernant le pré rapport et les réponses apportées à ces commentaires ;

- renvoyer l'affaire à une audience ultérieure pour qu'il soit débattu du contentieux d'expertise et juger inopposable à la société la décision de prendre en charge l'accident du 4 mars 2019.

Par ses écritures parvenues au greffe le 21 mai 2021 auxquelles s'est référé et qu'a développées son représentant à l'audience, la caisse demande à la cour, au visa des articles L. 411-1 du code de la sécurité sociale et de leur application jurisprudentielle, de :

- confirmer le jugement entrepris ;

- dire que, dans ses rapports avec la société, la caisse établit la matérialité de l'accident du travail de M. [O] et que la présomption d'imputabilité s'applique ;

- constater que la société n'apporte pas la preuve de l'existence d'une cause totalement étrangère, qui serait à l'origine du malaise de M. [O] le 4 mars 2019 ;

- confirmer, en conséquence, l'opposabilité à l'égard de la société de la décision de prise en charge de cet accident du travail du 4 mars 2019 et de l'ensemble de ses conséquences indemnitaires ;

- rejeter la demande d'expertise médicale judiciaire en ce qu'elle n'est aucunement justifiée ;

- déclarer la société mal fondée dans ses prétentions pour la débouter de son appel.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1 - Sur le caractère professionnel de l'accident :

Il résulte de l'article L.411-1 du code de la sécurité sociale que : 'Est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise'.

Constitue un accident du travail un événement ou une série d'événements survenus à des dates certaines par le fait ou à l'occasion du travail, dont il est résulté une lésion corporelle, quelle que soit la date d'apparition de celle ci. (Soc., 2 avril 2003, n° 00-21.768 ; 2e Civ 9 juillet 2020, n° 19-13.852)

Il appartient à la caisse, substituée dans les droits de la victime dans ses rapports avec l'employeur, de rapporter la preuve de la survenance d'une lésion en conséquence d'un événement survenu au temps et au lieu du travail.

En l'espèce, il est constant que M. [O] a été victime d'un malaise aux temps et lieu du travail de sorte que la présomption d'imputabilité trouve à s'appliquer.

Il incombe à l'employeur, une fois acquise la présomption d'imputabilité, de la renverser en établissant qu'une cause totalement étrangère au travail est à l'origine de la lésion.

Il ressort du questionnaire adressé par la caisse à M. [O] qu'à la question « pouvez-vous préciser les circonstances et le lieu de survenue du malaise ' Quel est le facteur déclenchant le malaise ' Veuillez détailler le lien entre ce facteur et le travail », ce dernier a répondu :

« AVC et survenue au travail pendant qu'il remplissait son rayon.

Facteur déclenchant le malaise : hypertension.

Lien entre le malaise et le travail : surcharge de travail, énervé, hausse de la tension » (sic).

À la question « les conditions de travail étaient-elles inhabituelles (perturbation, ambiance, émotion, fatigue anormale, tâches inhabituelles,') et si oui pourquoi ' », M. [O] en a indiqué ceci :

« conditions de travail inhabituelles : oui

Manque de personnel (responsable en vacances). Ambiance peu disposée à l'entraide. De ce fait, surcharge de travail, fatigue, extrêmement contrarié ».

Il a ajouté n'avoir subi aucun symptôme antérieurement au cours de sa journée de travail.

M. [O] a joint à son questionnaire une lettre de Mme [D] [I] (pièce n°3 de la caisse), une collègue de travail, qui relate ceci :

« Je suis employé au centre Leclerc de [Localité 3] depuis bientôt 29 ans.

Je connais donc très bien M. [V] [O]. J'étais présente au magasin le jour où il a eu son problème de santé.

Tout comme lui, je commence mes journées à 5h00 du matin.

Ce jour-là, j'ai croisé [V] [O] vers 5h30 et nous nous sommes dit bonjour. Il m'a alors appris que notre responsable était en vacances. De ce fait, il m'a expliqué qu'il se retrouvait tout seul à débarrasser les promotions de la semaine passée. [V] était très en colère et très énervé. Il faut savoir qu'habituellement, quand le responsable est là, les autres employés de chaque rayon viennent eux-mêmes récupérer leurs marchandises dans la zone promotionnelle et ce jour-là, ils ne l'ont pas fait, laissant à [V] le surplus de travail.

Voilà, ce que je peux dire sur cette journée du 4 mars 2019 ».

Dans son questionnaire, l'employeur a indiqué ceci, à la question « Pouvez-vous nous préciser les circonstances et le lieu de survenue du malaise ' » :

« M. [O] était en zone promo et mettait en rayon. Il a été découvert par un commercial de la société [7] alors qu'il se tenait à la gondole et ne se sentait pas bien ».

L'employeur a précisé que les conditions de travail n'étaient pas inhabituelles et qu'il n'a présenté aucun symptôme avant de commencer sa journée de travail.

Aux termes d'une motivation que la cour fait sienne, les premiers juges ont considéré à raison que la société, qui se contente d'invoquer le caractère habituel des conditions de travail, ne rapportait ni la preuve d'une cause totalement étrangère au travail à l'origine de la lésion constatée, ni d'éléments de nature à faire germer un doute quant à l'existence d'une telle cause au regard des informations fournies par M. [O] dans son questionnaire, confirmées par Mme [I].

Le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions, sauf à préciser que la décision de prise en charge par la caisse, au titre de la législation professionnelle, du malaise subi par M. [O] le 4 mars 2019, est opposable à la société.

2 - Sur les dépens :

L'article R.144-10 du code de la sécurité sociale disposant que la procédure est gratuite et sans frais en matière de sécurité sociale est abrogé depuis le 1er janvier 2019.

Il s'ensuit que l'article R.144-10 précité reste applicable aux procédures en cours jusqu'à la date du 31 décembre 2018 et qu'à partir du 1er janvier 2019 s'appliquent les dispositions des articles 695 et 696 du code de procédure civile relatives à la charge des dépens.

En conséquence, les dépens de la présente procédure exposés postérieurement au 31 décembre 2018 seront laissés à la charge de la société qui succombe à l'instance et qui de ce fait ne peut prétendre à l'application des dispositions l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement dans toutes ses dispositions ;

Y ajoutant :

DÉCLARE opposable à la société [4] la décision de prise en charge par la caisse primaire d'assurance maladie du Finistère, au titre de la législation professionnelle, de l'accident subi par M. [O] le 4 mars 2019 ;

CONDAMNE la société [4] aux dépens, pour ceux exposés postérieurement au 31 décembre 2018.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 9ème ch sécurité sociale
Numéro d'arrêt : 20/01526
Date de la décision : 27/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-27;20.01526 ?
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