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24/04/2022 | FRANCE | N°22/00215

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre etrangers/hsc, 24 avril 2022, 22/00215


COUR D'APPEL DE RENNES

N° 22/102

N° N° RG 22/00215 - N° Portalis DBVL-V-B7G-SVZT



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



O R D O N N A N C E



article L 3222-5-1 et suivants du code de la santé publique



Ordonnance statuant sur les recours en matière d'isolement et de contention mis en oeuvre dans le cadre de soins psychiatriques sans consentement



Nous, Aline DELIERE, Présidente de chambre à la cour d'appel de RENNES, déléguée par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés su

r les articles L 3222-5-1 et suivants du code de la santé publique, assistée de Vanessa CLAIR, greffière,



Vu l'ordonnance du Juge ...

COUR D'APPEL DE RENNES

N° 22/102

N° N° RG 22/00215 - N° Portalis DBVL-V-B7G-SVZT

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

article L 3222-5-1 et suivants du code de la santé publique

Ordonnance statuant sur les recours en matière d'isolement et de contention mis en oeuvre dans le cadre de soins psychiatriques sans consentement

Nous, Aline DELIERE, Présidente de chambre à la cour d'appel de RENNES, déléguée par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L 3222-5-1 et suivants du code de la santé publique, assistée de Vanessa CLAIR, greffière,

Vu l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de RENNES rendue le 23 Avril 2022, notifiée le même jour à Monsieur [Z] [P], autorisant le maintien de la mesure d'isolement de :

Monsieur [Z] [P]

né le 09 Décembre 1989 à [Localité 4] ( CONGO)

[Adresse 1]

[Localité 2]

Actuellement hospitalisé au Centre Hospitalier [3] à [Localité 2]

Ayant pour conseil Maître Myrième OUESLATI, avocat au barreau de RENNES

Vu la déclaration d'appel formée par le conseil de M. [Z] [P] contre cette ordonnance et transmise au greffe de la cour d'appel le 23 Avril 2022 à 18h42 ;

Vu les articles L 3222-5-1 et suivants du code de la santé publique,

Vu les observations sollicitées et recueillies sur le recours formé ( avis du Parquet Général en date du 24/04/2022 à 10h30) ;

Vu le dossier de la procédure ;

FAITS ET PROCEDURE

M. [Z] [P] est hospitalisé au centre hospitalier [3] à [Localité 2] sans son consentement depuis le 12 avril 2022, à la demande d'un tiers (Mme [E] [P], sa mère), suivant la procédure d'urgence.

Il a été placé en isolement à compter du 19 avril 2022 à 14 h 34.

Le 22 avril 2022, le directeur de l'établissement a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes d'une requête aux fins de statuer sur la poursuite de la mesure d'isolement, en application des articles L3222-5 et suivants du code de la santé publique.

Par ordonnance du 23 avril 2022, le juge des libertés et de la détention a autorisé le maintien de la mesure d'isolement de M. [P].

Cette décision a été notifiée le 23 avril 2022 à 11 h 21 à M. [P], par l'intermédiaire du directeur de l'établissement.

L'avocate de M. [P] a fait appel le 23 avril 2022 à 18 h 42 suivant une déclaration d'appel motivée adressée par courriel à la cour d'appel.

Elle demande à la cour d'annuler l'ordonnance déférée au motif que :

-en violation de l'article R3211-12 5° du code de la santé publique, il n'a pas été communiqué au juge des libertés et de la détention l'avis d'un psychiatre ne participant pas à la prise en charge de la personne qui fait l'objet de soins, indiquant les motifs médicaux qui feraient obstacle à son audition, le docteur [W] ayant donné son avis étant le médecin traitant de M.[P].

Sur le fond, elle demande à la cour d'infirmer l'ordonnance déférée et d'ordonner la mainlevée de la mesure d'isolement aux motifs que :

-en violation de l'article L3222-5-1 alinéa 1 du code de la santé publique, la mesure d'isolement n'a pas été prise sur décision motivée d'un psychiatre, ce fait ne ressortant pas des pièces du dossier,

-en violation de l'article L3211-3 alinéas 2 et 3 du code de la santé publique, M. [P] n'a pas été informé de ses droits et voies de recours ouverts à l'encontre de la décision d'isolement et de son renouvellement et ce manquement lui a fait grief car il a été placé dans l'impossibilité de faire valoir ses droits,

-en violation de l'article R3211-12 5° du code de la santé publique, il n'a pas été communiqué au juge des liberté et de la détention l'avis d'un psychiatre ne participant pas à la prise en charge de la personne qui fait l'objet de soins, indiquant les motifs médicaux qui feraient obstacle à son audition, le docteur [W] ayant donné son avis étant le médecin traitant de M. [P] et ce manquement a fait grief à M. [P] car le médecin traitant n'est pas un médecin impartial et M.[P] n'a pas été entendu par le juge des liberté et de la détention sur la foi du certificat délivré par ce médecin.

Les observations des parties et du ministère public ont été sollicitées le 24 avril 2022 à 9 h 44, le délai de réponse étant fixé à 12 h.

Par avis du 24 avril 2022, le ministère public conclut au rejet des exceptions de nullité soulevées et à la confirmation de l'ordonnance.

Le directeur de l'établissement n'a pas adressé d'observations à la cour.

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

Sur la recevabilité de l'appel

L'appel, interjeté dans les formes et délais légaux, est recevable.

Sur la demande de nullité de l'ordonnance déférée

L'article R3211-12 5° du code de la santé publique dispose :

« Sont communiqués au juge des libertés et de la détention afin qu'il statue :

(...)

5° Le cas échéant :

( ...)

b) L'avis d'un psychiatre ne participant pas à la prise en charge de la personne qui fait l'objet de soins, indiquant les motifs médicaux qui feraient obstacle à son audition. »

La procédure de contrôle des mesures d'isolement ne prévoit pas que le juge des libertés et de la détention entende l'intéressé. L'article L3211-12-2 III du code de la santé publique dispose en effet que par dérogation au I du même article le juge des libertés et de la détention, saisi d'une demande de mainlevée de la mesure d'isolement prise en application de l'article L3222-5-1, saisi aux fins de prolongation de la mesure statue sans audience, selon une procédure écrite.

En conséquence, les dispositions de l'article R3211-12 5° ne sont pas applicables en l'espèce et M. [P] ne peut soutenir que l'avis du docteur [W] du 22 avril 2022 indiquant qu'il ne peut être entendu a pour conséquence de rendre nulle l'ordonnance du juge des liberté et de la détention.

Sur la demande d'infirmation de l'ordonnance déférée

L'article L3222-5-1 I alinéa 1 du code de la santé publique dispose : « L'isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours et ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète sans consentement. Il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision motivée d'un psychiatre et uniquement de manière adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient. Leur mise en 'uvre doit faire l'objet d'une surveillance stricte, somatique et psychiatrique, confiée par l'établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin et tracée dans le dossier médical. »

La mesure d'isolement a débuté le 19 avril 2022 à 14 h 34.

La pièce « BE isolement » du centre hospitalier contenant le rapport de l'exécution de la mesure d'isolement, versée à la procédure, mentionne :

-date et heure de prescription (1er jour) 19 avril 2022 à 14 h 34,

-nom du psychiatre ayant décidé du renouvellement de la mesure : docteur [W] ; date de la décision 19 avril 2022 ; heure de la décision 18 h 26.

Puis les observations cliniques du docteur [D], qui a examiné le patient le 19 avril 2022 à 18 h 20, sont exposées, suivies des observations régulières ultérieures jusqu'au 22 avril 2022.

Le nom du médecin prescripteur de la mesure d'isolement, qui a débuté à 14 h 34, n'est pas indiqué et ne ressort d'aucune autre pièce de la procédure. Le docteur [W] n'est intervenu qu'à 18 h 26.

Contrairement à ce que le premier juge a retenu, la production des avis médicaux suivants, à compter du 19 avril 2022 à 18 h 20, ne permet pas de s'assurer que la mesure d'isolement a été prise à 14 h 34 sur la décision motivée d'un psychiatre, qui serait le docteur [W].

Il n'est pas établi que la décision d'isolement à compter de 14 h 34 a été prise sur la décision motivée d'un psychiatre et il ne peut être vérifié si le placement en isolement a été réalisé de manière adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient.

A défaut, la procédure de placement en isolement est irrégulière.

La mainlevée de la mesure d'isolement sera donc ordonnée, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens soulevés par M. [P].

PAR CES MOTIFS

Déclarons l'appel recevable,

Rejetons la demande de nullité de l'ordonnance rendue le 23 avril 2022 par le juge des liberté et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes statuant sur le maintien de la mesure d'isolement prise à l'égard de M. [Z] [P],

Infirmons l'ordonnance rendue le 23 avril 2022 par le juge des liberté et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes statuant sur la demande de maintien de la mesure d'isolement à l'égard de M. [Z] [P],

Statuant à nouveau,

Ordonnons la mainlevée de la mesure d'isolement prise à l'égard de M. [Z] [P],

Laissons les dépens à la charge de l'Etat.

Fait à Rennes, le 24 Avril 2022 à 12 h30

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION,Aline DELIERE, Présidente de chambre


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre etrangers/hsc
Numéro d'arrêt : 22/00215
Date de la décision : 24/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-24;22.00215 ?
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