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22/04/2022 | FRANCE | N°22/00213

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre etrangers/hsc, 22 avril 2022, 22/00213


COUR D'APPEL DE RENNES



N° 110/22

N° N° RG 22/00213 - N° Portalis DBVL-V-B7G-SVUV



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT





O R D O N N A N C E



articles L 741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile



Nous, Sylvie ALAVOINE, conseiller à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de

Morgane LIZEE greffier lors des débats et de Sandrine KERVAREC, greffière lors de la mise à disposition au greffe,





Statuant sur l'a...

COUR D'APPEL DE RENNES

N° 110/22

N° N° RG 22/00213 - N° Portalis DBVL-V-B7G-SVUV

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

articles L 741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

Nous, Sylvie ALAVOINE, conseiller à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Morgane LIZEE greffier lors des débats et de Sandrine KERVAREC, greffière lors de la mise à disposition au greffe,

Statuant sur l'appel formé par la CIMADE le 21 Avril 2022 à 15h15 pour :

Mme [V] [P]

née le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 2] ( MONGOLIE)

de nationalité Mongole

ayant pour avocat Me Omer GONULTAS, avocat au barreau de RENNES

d'une ordonnance rendue le 20 Avril 2022 à 17h02 par le juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de RENNES qui a ordonné la prolongation du maintien de Mme [V] [P] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée maximale de trente jours à compter du 21 avril 2022 à 19h40;

En l'absence de représentant du préfet de MORBIHAN, dûment convoqué,

En l'absence du procureur général régulièrement avisé, (avis écrit)

En présence de [V] [P], assisté de Me Omer GONULTAS, avocat,

Après avoir entendu en audience publique le 22 Avril 2022 à 11 H l'appelant assisté de M. [H] [W], interprète en langue mongole, et son avocat en leurs observations,

Avons mis l'affaire en délibéré et le 22 Avril 2022 à 14h30, avons statué comme suit :

Par arrêté du 22 mars 2022 notifié le même jour, le Préfet du Morbihan a fait obligation à Madame [V] [P] de quitter le territoire français sans délai.

Par arrêté du 22 mars 2022 notifié le même jour, le Préfet du Morbihan a placé Madame [V] [P] dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire et a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes d'une demande de prolongation de la rétention par requête du 23 mars 2022.

Par ordonnance du 24 mars 2022, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes a autorisé la prolongation de la rétention pour une durée de vingt-huit jours, jusqu'au 21 avril 2022. Cette ordonnance a été confirmée par la cour d'appel de Rennes suivant arrêt du 25 mars 2022.

Sur saisine du préfet du Morbihan par requête reçue le 19 avril 2022 et par ordonnance du 20 avril 2022, le juge des libertés et de la détention de Rennes a ordonné la prolongation du maintien de Madame [V] [P] dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 30 jours à compter du 21 avril 2022 à 19h40.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 21 avril 2022, Madame [V] [P] a interjeté appel de cette ordonnance, se prévalant au soutien de sa demande d'infirmation, de l'irrégularité de la notification de l'ordonnance déférée et reprenant les deux moyens soulevés devant le juge des libertés et de la détention, à savoir l'insuffisance des diligences de la préfecture et l'incompatibilité de son état de santé avec le maintien en détention.

À l'audience du 22 avril 2022, Madame [V] [P], assistée d'un interprète en langue mongole et de son avocat, a développé oralement les termes de son mémoire d'appel.

Le préfet ne comparait ni ne se fait représenter.

Selon avis écrit du 22 avril 2022, le procureur général a sollicité le rejet du moyen soulevé par l'appelant et tiré de l'irrégularité de la procédure à raison du caractère tardif de la notification de l'ordonnance entreprise, et demandé la confirmation de l'ordonnance déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'appel interjeté par Madame [V] [P] dans les formes et délais légaux, est recevable.

- Sur la notification de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention :

Il ressort de l'ordonnance déférée que Madame [V] [P] était présente lors des débats d'audience, mais absente lors du prononcé de l'ordonnance rendue le même jour à 17h12, ayant en effet été reconduite au centre de rétention, dès les débats terminés, pour des raisons sanitaires liées à l'infection de Covid.

Cette ordonnance a été transmise immédiatement dès son prononcé en audience publique par télécopie, par le greffe du juge des libertés et de la détention au directeur du centre de rétention administrative et ce aux fins de notification à l'intéressée, par le biais d'un interprète en langue mongole.

Le greffe du centre de rétention a notifié, par le truchement d'un interprète en langue mongole, cette ordonnance à Madame [V] [P] le 20 avril 2022 à 09h20, ainsi qu'il a été noté sur le formulaire de notification, et ce par erreur matérielle, comme l'indique à juste titre l'appelante, la notification ayant eu lieu le 21 avril à 09h20.

S'il est ainsi établi que Madame [V] [P] n'a pas eu connaissance de l'ordonnance déférée dès son prononcé, du reste, il n'en est résulté pour elle aucune atteinte à ses droits, non seulement quant à sa liberté en ce que le juge des libertés et de la détention a maintenu sa rétention, mais également quant à son droit de voir son affaire réexaminée dans le cadre d'un recours, l'appel de l'ordonnance critiquée ayant en effet été déclaré recevable.

Ce moyen ne saurait donc prospérer.

* Sur les diligences du Préfet :

Conformément aux dispositions de l'article l742-4 du CESEDA, 'le juge des libertés et de la détention peut, dans les mêmes conditions qu'à l'article L. 742-1, être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :
1° En cas d'urgence absolue ou de menace d'une particulière gravité pour l'ordre public ;
2° Lorsque l'impossibilité d'exécuter la décision d'éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l'intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l'obstruction volontaire faite à son éloignement ;
3° Lorsque la décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison :
a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l'exécution de la décision d'éloignement ;
b) de l'absence de moyens de transport.
L'étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l'article L. 742-2.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d'une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas soixante jours.'

Selon l'article L747-3 du CESEDA, un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet.

En vertu de ce dernier article, et conformément à une jurisprudence constante, il appartient à la préfecture de justifier de ses diligences en vue de la mise à exécution de la mesure d'éloignement, et ce dès le placement en rétention et en toute hypothèse dès le premier jour ouvrable suivant cette mesure.

Dans le cas d'espèce, Madame [V] [P] est placée en rétention administrative depuis le 22 mars 2022 à 19h40 sur le fondement d'une obligation de quitter le territoire français sans délai, notifiée le jour même.

Au vu des pièces produites, il est constant et d'ailleurs non contesté :

- que l'intéressée ne disposant d'aucun document de voyage valide, les autorités consulaires mongoles ont été saisies dès le 23 mars 2022 aux fins de délivrance d'un laissez-passer consulaire,

- que ce laissez-passer consulaire a été délivré le 28 mars 2022,

- que dès le 29 mars 2022, la préfecture a sollicité le Pôle central d'éloignement d'une demande de réservation d'un vol à destination de la Mongolie, avec une première disponibilité à compter du 04 avril 2022,

- qu'une nouvelle demande de routing a été effectuée le 07 avril 2022 avec une préférence pour le 16 avril 2022,

- que le 15 avril 2022, le Pôle central d'éloignement a communiqué un routing pour le 23 avril 2022.

Dans ce contexte, c'est par une analyse circonstanciée et des motifs pertinents qu'il convient d'adopter que le juge des libertés et de la détention a considéré qu'en sollicitant une demande de laissez passer consulaire dès le 23 mars 2022, date du placement en rétention de Madame [V] [P], puis un routing dès l'obtention du document de voyage, avec relance du Pôle central d'éloignement, la préfecture a bien effectué toutes les diligences pour mettre en oeuvre la mesure d'éloignement. C'est donc à juste titre et au visa des dispositions de l'article L741-3 b du CESEDA que le premier juge en a déduit que la demande de la préfecture aux fins de voir prolonger une nouvelle fois le maintien en rétention administrative de Madame [V] [P] est fondée en ce qu'il est établi que la mesure d'éloignement n'a pu être exécutée en raison de la délivrance tardive des documents des documents de voyage et de l'absence à ce jour de moyen de transport et a rejeté ce moyen.

- Sur l'incompatibilité de l'état de santé avec le maintien en rétention :

Aux termes de l'article L741-4 du CESEDA, la décision de placement en rétention prend en compte l'état de vulnérabilité et tout handicap de l'étranger. Le handicap moteur, cognitif ou psychique et les besoins d'accompagnement de l'étranger sont pris en compte pour déterminer les conditions de son placement en rétention.

Par ailleurs, l'article L744-4 du même code prévoit que l'étranger en rétention a le droit de demander l'assistance d'un médecin.

Si Madame [V] [P] justifie d'un suivi régulier pour un diabète de type 2 et une hypertension artérielle au travers d'un certificat du médecin du centre de rétention administrative de [3] daté du 11 avril 2022, ainsi que d'une prise médicamenteuse, et prétend tant en première instance qu'en cause d'appel, que son état de santé n'est pas compatible avec son maintien en détention, au demeurant, et ainsi que l'indique à juste titre le juge des libertés et de la détention, le préfet, prenant pris en compte l'état de santé de Madame [V] [P], a considéré qu'il n'en résultait aucune vulnérabilité de nature à faire obstacle à un placement en rétention administrative, l'état de santé de l'intéressée ayant été jugé, un médecin qui l'a examiné le 22 mars 2022 comme étant compatible avec la mesure de garde à vue dont elle faisait alors l'objet.

Devant la cour, Madame [V] [P] pas plus que devant le juge des libertés et de la détention, ne produit aux débats la moindre pièce médicale de nature à établir que son état de santé actuel est incompatible avec son maintien en rétention administrative. En tout état de cause, elle dispose du droit de demander à rencontrer un médecin durant le temps de sa rétention.

Ce moyen sera donc rejeté.

L'ordonnance sera donc confirmée en ce qu'elle a fait droit à la demande du préfet en ordonnant la prolongation du maintien en rétention administrative de Madame [V] [P] pour une durée de 30 jours supplémentaires à compter du 21 avril 2022 à 19h40.

Les dépens de la présente instance seront laissés à la charge du Trésor Public.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement,

Déclarons l'appel recevable,

Confirmons l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes en date du 20 avril 2022 ;

Laissons les dépens à la charge du Trésor Public.

Fait à Rennes, le 22 Avril 2022 à 14h30

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION, LE CONSEILLER,

Notification de la présente ordonnance a été faite ce jour à [V] [P], à son avocat et au préfet

Le Greffier,

Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général.

Le Greffier


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre etrangers/hsc
Numéro d'arrêt : 22/00213
Date de la décision : 22/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-22;22.00213 ?
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