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20/04/2022 | FRANCE | N°22/00207

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre etrangers/hsc, 20 avril 2022, 22/00207


COUR D'APPEL DE RENNES



N° 100/22

N° RG 22/00207 - N° Portalis DBVL-V-B7G-SVM5



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



O R D O N N A N C E



article L 3222-5-1 et suivants du code de la santé publique



Ordonnance statuant sur les recours en matière d'isolement et de contention mis en oeuvre dans le cadre de soins psychiatriques sans consentement



Nous, Jean-Denis BRUN, Conseiller à la cour d'appel de RENNES, délégué(é) par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur le

s articles L 3222-5-1 du code de la santé publique, assisté de, Morgane LIZEE, greffière,



Vu l'ordonnance du Juge des libertés et de la...

COUR D'APPEL DE RENNES

N° 100/22

N° RG 22/00207 - N° Portalis DBVL-V-B7G-SVM5

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

article L 3222-5-1 et suivants du code de la santé publique

Ordonnance statuant sur les recours en matière d'isolement et de contention mis en oeuvre dans le cadre de soins psychiatriques sans consentement

Nous, Jean-Denis BRUN, Conseiller à la cour d'appel de RENNES, délégué(é) par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L 3222-5-1 du code de la santé publique, assisté de, Morgane LIZEE, greffière,

Vu l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de RENNES rendue le 18 Avril 2022, notifiée le même jour à Monsieur [G] [J], autorisant le maintien de la mesure d'isolement de :

Monsieur [G] [J]

né le 20 Décembre 2003 à

de nationalité Française

Sans domicile fixe

[Adresse 2]

Actuellement hospitalisé au Centre hospitalier de [1]

( [Localité 3])

Ayant pour conseil Maître Emilie BELLENGER, avocat au barreau de RENNES

Vu la déclaration d'appel formée par Maître Emilie BELLENGER conseil de M. [G] [J] contre cette ordonnance et transmise au greffe de la cour d'appel 19 Avril 2022 à 16H05

Vu les articles L 3222-5-1 et suivants du code de la santé publique,

Vu les observations sollicitées et recueillies sur le recours formé ;

Vu le dossier de la procédure ;

FAITS ET PROCEDURE

Par ordonnance du 18 avril 2022 à 18 h 00 le juge des libertés et de la détention du Tribunal Judiciaire de Rennes, saisi par le Directeur du Centre Hospitalier [1] le 18 avril 2022 à 11 h 12 mn afin qu'il soit statué sur la poursuite de la mesure d'isolement de Monsieur [G] [J] effective depuis le 11 avril 2022 à 18 h 31 mn, a constaté l'absence de contestation de la régularité de la procédure et a autorisé le maintien de la mesure d'isolement.

Cette ordonnance été notifiée à l'Avocat de Monsieur [J] le 18 avril 2022 à 18 h 4 mn'.

Par déclaration motivée de son Avocat reçue le 19 avril 2022 à 16 h 5 mn Monsieur [J] a formé appel de cette ordonnance.

Il conclut à la nullité de l'ordonnance au visa des articles 5 et 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme et 16 du Code de Procédure Civile en soutenant qu'en sollicitant à 12 h 11 mn des observations pour 18 h et en rendant sa décision à 18 h le juge des libertés et de la détention l'a privé du droit de présenter des arguments et n'a pas respecté le principe du contradictoire.

Sur le fond, il soutient, au visa des articles L3222-5-1'I et L3222-5-1 II du Code de la Santé Publique d'une part qu'il n'est pas établi qu'il ait fait l'objet d'une mesure d'hospitalisation sous contrainte alors que le juge des libertés et de la détention avait été saisi le 15 avril 2022 d'une requête aux fins de prolongation de cette mesure et que cette ordonnance n'est pas versée aux débats, d'autre part que le juge des liberté et de la détention n'a pas été saisi au moins vingt-quatre heures avant l'expiration du délai de sept jours à compter de sa présente décision alors que les décisions précédentes du juge des libertés et de la détention ne sont pas versées aux débats et enfin que les pièces communiquées par le Centre Hospitalier ne comportent aucun élément médical afférent au suivi et au renouvellement de la mesure d'isolement.

Il sollicite la mainlevée immédiate de la mesure d'isolement.

La procédure a été communiquée aux parties le 19 avril 2022 entre 17 h 22 mn et 17 h 26 mn avec demande d'observations avant le 20 avril 2022 à 15 h'.

Dans ce délai le Procureur Général a sollicité que soit constatée la nullité de l'ordonnance attaquée du fait du non-respect du principe du contradictoire, le juge des libertés et de la détention ayant statué bien avant l'expiration du délai de 24 heures prévu par l'article L 3222-5-1 du Code de la Santé Publique et donc sans entendre et sans prendre en compte les arguments du conseil du patient, ce qui a nécessairement porté atteinte à ses droits. En effet, saisi le 18 avril 2022 à 9h36,il a statué à 18h le même jour alors que le conseil de M [J] n'avait pas eu le temps de lui transmettre ses écritures.

MOTIFS

L'appel, formé dans les formes et délais légaux, est recevable.

Sur l'annulation de l'ordonnance,

L'article 16 du Code de Procédure Civile dispose que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

L'article R3211-36 du Code de la Santé Publique dispose que dès réception de la requête, le greffe procède à son enregistrement et la communique notamment à l'avocat du patient.

L'article R3211-38 du Code de la Santé Publique prévoit que l'Avocat du patient adresse ses observations et pièces au juge des libertés et de la détention et que les parties peuvent échanger leurs observations et leurs pièces par tout moyen dès lors que le juge peut s'assurer du respect du contradictoire.

Enfin, l'article R3211-39 I du Code de la Santé Publique précise que dans le cadre de la procédure écrite sans audience prévue au III de l'article L. 3211-12-2, le juge des libertés et de la détention statue sur les demandes aux fins de maintien ou de mainlevée de la mesure avant l'expiration, selon le cas, du délai de vingt-quatre heures mentionné au troisième alinéa du II de l'article L. 3222-5-1 applicable aux mesures d'isolement ou de contention ou du délai de sept jours mentionné au cinquième alinéa du même II applicable aux mesures d'isolement.

Il résulte en l'espèce des pièces de la procédure devant le juge des libertés et de la détention que ce dernier a été saisi le 18 avril 2022 par le Directeur du Centre Hospitalier à 11 heures et 12 minutes.

A défaut de pièce de la procédure établissant l'heure à laquelle les pièces ont été communiquées à l'Avocat du patient, il y a lieu', selon les termes de ses conclusions d'appel, de retenir que l'Avocat du patient a reçu communication de la procédure le 18 avril 2022 à 12 h 11 mn.

Un délai d'une heure entre la réception de la requête et la la transmission des pièces et demande d'observations aux parties correspond aux prescriptions de l'article R3211-36 du Code de la Santé Publique'.

De même, il ne peut être fait grief au juge des libertés et de la détention de statuer avant l'expiration du délai de vingt-quatre heures qui lui est fixé s'agissant du contrôle d'une mesure privative de liberté.

En revanche, en laissant un délai de 5 h 49 mn à l'Avocat du patient pour présenter ses observations alors que dans le même temps deux autres procédures pour observations sont communiquées au même Avocat et en rendant sa décision à 18 h alors qu'il avait été précisé à cet Avocat que ses observations étaient attendues à 18 heures et maintenant la mesure d'isolement au seul motif de l'absence de contestation, le juge des libertés et de la détention n'a pas respecté le principe du contradictoire.

L'ordonnance attaquée sera annulée.

Il ressort des dispositions de l'article 562 du Code de Procédure Civile que la dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement.

Il y a lieu de statuer à nouveau.

Sur le fond,

Aux termes de l'article L. 3222-5-1, I, du code de la santé publique, l'isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours et ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète sans consentement.

En l'espèce il ne ressort d'aucune pièce de la procédure que Monsieur [J] ait été encore hospitalisé sans consentement à la date du 18 avril 2022, étant souligné que l'ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant statué sur le maintien de la mesure d'hospitalisation complète ne figure pas les pièces de la procédure débattues contradictoirement.

I.-L'isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours et ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète sans consentement. Il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision motivée d'un psychiatre et uniquement de manière adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient. Leur mise en 'uvre doit faire l'objet d'une surveillance stricte, somatique et psychiatrique, confiée par l'établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin et tracée dans le dossier médical.

La mesure d'isolement est prise pour une durée maximale de douze heures. Si l'état de santé du patient le nécessite, elle peut être renouvelée, dans les conditions et selon les modalités prévues au premier alinéa du présent I, dans la limite d'une durée totale de quarante-huit heures, et fait l'objet de deux évaluations par vingt-quatre heures.

La mesure de contention est prise dans le cadre d'une mesure d'isolement pour une durée maximale de six heures. Si l'état de santé du patient le nécessite, elle peut être renouvelée, dans les conditions et selon les modalités prévues au même premier alinéa, dans la limite d'une durée totale de vingt-quatre heures, et fait l'objet de deux évaluations par douze heures.

II. - A titre exceptionnel, le médecin peut renouveler, au-delà des durées totales prévues au I, les mesures d'isolement et de contention, dans le respect des conditions prévues au même I. Le directeur de l'établissement informe sans délai le juge des libertés et de la détention du renouvellement de ces mesures. Le juge des libertés et de la détention peut se saisir d'office pour y mettre fin. Le médecin informe du renouvellement de ces mesures au moins un membre de la famille du patient, en priorité son conjoint, le partenaire lié à lui par un pacte civil de solidarité ou son concubin, ou une personne susceptible d'agir dans son intérêt dès lors qu'une telle personne est identifiée, dans le respect de la volonté du patient et du secret médical.

Le directeur de l'établissement saisit le juge des libertés et de la détention avant l'expiration de la soixante-douzième heure d'isolement ou de la quarante-huitième heure de contention, si l'état de santé du patient rend nécessaire le renouvellement de la mesure au-delà de ces durées.

Le juge des libertés et de la détention statue dans un délai de vingt-quatre heures à compter du terme des durées prévues au deuxième alinéa du présent II.

Si les conditions prévues au I ne sont plus réunies, il ordonne la mainlevée de la mesure. Dans ce cas, aucune nouvelle mesure ne peut être prise avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures à compter de la mainlevée de la mesure, sauf survenance d'éléments nouveaux dans la situation du patient qui rendent impossibles d'autres modalités de prise en charge permettant d'assurer sa sécurité ou celle d'autrui. Le directeur de l'établissement informe sans délai le juge des libertés et de la détention, qui peut se saisir d'office pour mettre fin à la nouvelle mesure.

Si les conditions prévues au même I sont toujours réunies, le juge des libertés et de la détention autorise le maintien de la mesure d'isolement ou de contention. Dans ce cas, le médecin peut la renouveler dans les conditions prévues audit I et aux deux premiers alinéas du présent II. Toutefois, si le renouvellement d'une mesure d'isolement est encore nécessaire après deux décisions de maintien prises par le juge des libertés et de la détention, celui-ci est saisi au moins vingt-quatre heures avant l'expiration d'un délai de sept jours à compter de sa précédente décision et le médecin informe du renouvellement de ces mesures au moins un membre de la famille du patient, en priorité son conjoint, le partenaire lié à lui par un pacte civil de solidarité ou son concubin, ou une personne susceptible d'agir dans son intérêt dès lors qu'une telle personne est identifiée, dans le respect de la volonté du patient et du secret médical. Le juge des libertés et de la détention statue avant l'expiration de ce délai de sept jours. Le cas échéant, il est à nouveau saisi au moins vingt-quatre heures avant l'expiration de chaque nouveau délai de sept jours et statue dans les mêmes conditions. Le médecin réitère l'information susmentionnée lors de chaque saisine du juge des libertés et de la détention.

Pour l'application des deux premiers alinéas du présent II, lorsqu'une mesure d'isolement ou de contention est prise moins de quarante-huit heures après qu'une précédente mesure d'isolement ou de contention a pris fin, sa durée s'ajoute à celle des mesures d'isolement ou de contention qui la précèdent.

Les mêmes deux premiers alinéas s'appliquent lorsque le médecin prend plusieurs mesures dont la durée cumulée sur une période de quinze jours atteint les durées prévues auxdits deux premiers alinéas.

Les mesures d'isolement et de contention peuvent également faire l'objet d'un contrôle par le juge des libertés et de la détention en application du IV de l'article L. 3211-12-1.

En l'espèce, les pièces communiquées par le Centre Hospitalier [1] montrent que Monsieur [J] faisait l'objet d'une mesure d'isolement depuis le 11 avril 2022 à 18 h 31 mn mais ne mentionnent aucune information du juge des libertés et de la détention avant le 18 avril 2022 et ne font pas état non plus des ordonnances rendues par ce magistrat.

En l'absence de preuve d'une hospitalisation sans consentement et en présence d'une mesure d'isolement ayant duré plus de six jours sans contrôle ni information du juge des libertés et de la détention, cette mesure doit être levée sans délai.

PAR CES MOTIFS,

Déclarons l'appel recevable,

Annulons l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal Judiciaire de Rennes du 18 avril 2022 et statuant à nouveau, ordonnons la mainlevée immédiate de la mesure d'isolement de Monsieur [G] [J],

Laissons les dépens à la charge du Trésor Public.

Ainsi jugé le 20 avril 2022 à 16 heures

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION,Jean-Denis BRUN, Conseiller


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre etrangers/hsc
Numéro d'arrêt : 22/00207
Date de la décision : 20/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-20;22.00207 ?
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