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30/03/2022 | FRANCE | N°19/04356

France | France, Cour d'appel de Rennes, 9ème ch sécurité sociale, 30 mars 2022, 19/04356


9ème Ch Sécurité Sociale





ARRET N°



N° RG 19/04356 - N° Portalis DBVL-V-B7D-P4SV













SAS [5]



C/



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE D'[Localité 4]















Copie exécutoire délivrée

le :



à :











Copie certifiée conforme délivrée

le:



à:

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL D

E RENNES

ARRÊT DU 30 MARS 2022



COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Aurélie GUEROULT, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère,

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère,



GREFFIER :



Monsieur Michael JACOTEZ, lors des déba...

9ème Ch Sécurité Sociale

ARRET N°

N° RG 19/04356 - N° Portalis DBVL-V-B7D-P4SV

SAS [5]

C/

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE D'[Localité 4]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Copie certifiée conforme délivrée

le:

à:

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 30 MARS 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Aurélie GUEROULT, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère,

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Michael JACOTEZ, lors des débats, et Mme Adeline TIREL, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l'audience publique du 25 Janvier 2022

devant Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 30 Mars 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats ;

DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:

Date de la décision attaquée : 12 Avril 2019

Décision attaquée : Jugement

Juridiction : Pôle social du Tribunal de Grande Instance de RENNES

****

APPELANTE :

SAS [5],

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Morgane COURTOIS D'ARCOLLIERES de la SCP MICHEL LEDOUX ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS substituée par Me Laurence MARNAT, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE D'[Localité 4]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par M. [T] [Z], en vertu d'un pouvoir spécial

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 18 avril 2016, M. [L] [H], salarié de la société [3], aux droits de laquelle vient la société [5] (la société), en qualité de maçon, a complété une déclaration de maladie professionnelle pour une « épicondylite coude droit », sur la base d'un certificat médical initial établi par le docteur [R] le 10 mars 2016, faisant état d'une 'épicondylite droite-prise en charge rhumato'.

Par notification du 26 septembre 2016, la caisse primaire d'assurance maladie d'[Localité 4] (la caisse) a informé la société de la fin de l'instruction du dossier et de la possibilité de consulter les pièces.

Le 3 octobre 2016, le mandataire de la société s'est déplacé pour consulter les pièces du dossier.

Le 17 octobre 2016, la caisse a pris en charge la pathologie déclarée par M. [H] au titre de la maladie inscrite au tableau n°57 des maladies professionnelles.

Le 16 décembre 2016, la société a saisi la commission de recours amiable de la caisse en contestation de l'opposabilité de cette décision de prise en charge.

Se prévalant d'une décision implicite de rejet de ladite commission, la société a porté le litige devant le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Ille-et-Vilaine, par lettre reçue le 15 mars 2017.

Parallèlement, dans sa séance du 15 mars 2018, la commission de recours amiable a explicitement rejeté la contestation de la société.

Par jugement du 12 avril 2019, ce tribunal, devenu pôle social du tribunal de grande instance de Rennes, a :

- rejeté le recours de la société ;

- déclaré opposable à la société la décision de prise en charge de la maladie de M. [H] du 17 octobre 2016 ;

- dit n'y avoir lieu à statuer sur les dépens s'agissant d'une procédure engagée avant le 31 décembre 2018.

Par déclaration adressée le 27 juin 2019, la société a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 3 juin 2019.

Par ses écritures parvenues au greffe le 7 janvier 2021 auxquelles s'est référé et qu'a développées son conseil à l'audience, la société demande à la cour de :

- déclarer son appel recevable et bien fondé ;

- infirmer le jugement entrepris ;

En conséquence,

Statuant à nouveau,

A titre principal :

- déclarer la décision prise par la caisse de reconnaître le caractère professionnel de l'affection invoquée par M. [H] du 10 mars 2016 inopposable à la société, les dispositions des anciens articles R. 441-13 et R. 441-14 alinéa 3 du code de la sécurité sociale n'ayant pas été respectées ;

A titre subsidiaire :

- déclarer la décision prise par la caisse de reconnaître le caractère professionnel de l'affection déclarée par M. [H] le 10 mars 2016 inopposable à la société, le caractère professionnel de cette affection n'étant pas établi ;

En tout état de cause :

- condamner la caisse aux dépens.

Par ses écritures parvenues au greffe le 10 mai 2021 auxquelles s'est référé et qu'a développées son représentant à l'audience, la caisse demande à la cour, au visa des articles R. 441-13 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale et vu les pièces de la jurisprudence et des pièces versées aux débats, de :

- débouter la société de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- confirmer le jugement entrepris ;

En conséquence et statuant à nouveau :

A titre principal :

- déclarer opposable à la société la décision de prise en charge de la maladie professionnelle de M. [H], les dispositions des anciens articles R. 441-13 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale ayant été respectées ;

A titre subsidiaire :

- déclarer la décision de prise en charge par la caisse de reconnaître le caractère professionnel de l'affection invoquée par M. [H], le 10 mars 2016, opposable à la société, le caractère professionnel de cette maladie étant parfaitement établi ;

En tout état de cause :

- condamner la société aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1 - Sur le caractère contradictoire de la procédure d'instruction :

La société fait reproche à la caisse de ne pas avoir mis à sa disposition l'entier dossier d'instruction du salarié, en ce que le colloque médico-administratif n'y figurait pas. Elle se fonde sur la liste des pièces dont copie lui a été remise.

Aux termes de l'article R. 441-13 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable à l'espèce :

« Le dossier constitué par la caisse primaire doit comprendre :

1°) la déclaration d'accident ;

2°) les divers certificats médicaux détenus par la caisse ;

3°) les constats faits par la caisse primaire ;

4°) les informations parvenues à la caisse de chacune des parties ;

5°) les éléments communiqués par la caisse régionale.

Il peut, à leur demande, être communiqué à l'assuré, ses ayants droit et à l'employeur, ou à leurs mandataires ».

L'article R. 441-14 poursuit ainsi :

« Dans les cas prévus au dernier alinéa de l'article R. 441-11, la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R. 441-13 ».

En l'espèce, la société a été informée par la lettre datée du 26 septembre 2016 que la maladie en cause était intitulée « tendinopathie des muscles épicondyliens du coude droit » prévue par le tableau n°57 des maladies professionnelles, que l'instruction du dossier était terminée, que la décision interviendrait le 17 octobre 2016 et qu'elle avait la possibilité de venir consulter les pièces constitutives du dossier.

Un représentant de la société, M. [V] [N], animateur QSE, est venu consulter le dossier le 3 octobre 2016 et a attesté « avoir consulté l'entier dossier administratif maladie professionnelle de notre employé [H] [L] ». (pièce n°8 de la caisse)

Certes, l'attestation de consultation du dossier ne comprend aucune liste de pièces mais aucun texte n'impose à la caisse d'établir une telle liste.

Le représentant de l'employeur n'a pas formulé d'observations quant à la régularité du dossier, ni sur cette attestation de consultation du dossier ni par courrier avant que la décision ne soit rendue par la caisse.

Il ressort également de l'attestation de consultation du dossier que copie de certaines pièces du dossier ont été remises au consultant :

- déclaration MP

- questionnaire employeur

- questionnaire entreprise

- enquête.

Contrairement à ce que soutient la société, le fait que le colloque médico-administratif ne figure pas sur la liste des pièces dont copie a été donnée à son représentant est insuffisant pour considérer que ce document ne figurait pas dans le dossier constitué par la caisse et mis à la disposition de ce dernier.

La caisse est ainsi bien fondée à faire valoir, sur la foi des mentions de l'attestation de consultation du dossier, qu'elle rapporte la preuve qu'elle a mis à la disposition du représentant de la société un dossier complet.

Les premiers juges seront approuvés en ce qu'ils ont écarté ce moyen.

2 - Sur le caractère professionnel de la maladie déclarée :

L'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale pose une présomption d'origine professionnelle au bénéfice de toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.

Fixés par décret, les tableaux précisent la nature des travaux susceptibles de provoquer la maladie, énumèrent les affections provoquées et le délai dans lequel la maladie doit être constatée après la cessation de l'exposition du salarié au risque identifié pour être prise en charge.

La maladie déclarée doit correspondre précisément à celle décrite au tableau, avec tous ses éléments constitutifs et doit être constatée conformément aux éléments de diagnostic éventuellement prévus (2e Civ., 17 mai 2004, n° 03-11.968)

Lorsque la demande de la victime réunit ces conditions, la maladie est présumée d'origine professionnelle, sans que la victime ait à prouver le lien de causalité entre son affection et son travail.

Il appartient à la caisse, subrogée dans les droits de la victime, de rapporter la preuve que la maladie qu'elle a prise en charge est celle désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau (2e Civ., 30 juin 2011, n° 10-20.144).

Une fois la présomption d'imputabilité établie, il appartient à l'employeur de démontrer que l'affection litigieuse a une cause totalement étrangère au travail (2e Civ., 13 mars 2014, n° 13-13.663).

La caisse a pris en charge la maladie de M. [H] au titre du tableau n°57B des maladies professionnelles relatif aux affections périarticulaires du coude provoquées par certains gestes et postures de travail, dans sa version applicable au litige, lequel vise notamment au titre de la désignation des maladies la « tendinopathie d'insertion des muscles épicondyliens associée ou non à un syndrome du tunnel radial ».

Le délai de prise en charge prévu audit tableau est de 14 jours et la liste limitative des travaux susceptibles de provoquer ces maladies vise ceux « comportant habituellement des mouvements répétés de préhension ou d'extension de la main sur l'avant-bras ou des mouvements de pronosupination ».

Seule la condition tenant au délai de prise en charge est discutée par la société qui fait valoir que la caisse ne justifie d'aucune pièce objective permettant de fixer la première constatation médicale de la pathologie à une date antérieure au 10 mars 2016, date du certificat médical initial.

Si, aux termes de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien entre sa maladie et une activité professionnelle est assimilée à la date de l'accident, la date de prise en charge au titre de la législation professionnelle est celle de sa première constatation médicale, laquelle doit intervenir dans le délai de prise en charge prévu par l'article L. 461-2 du même code (2e Civ., 16 juin 2011, n° 10-17.786).

L'art. D. 461-1-1 du même code issu du décret du 17 juin 2016 précise que « pour l'application du dernier alinéa de l'article L. 461-2, la date de la première constatation médicale est la date à laquelle les premières manifestations de la maladie ont été constatées par un médecin avant même que le diagnostic ne soit établi. Elle est fixée par le médecin conseil ».

Par ailleurs, si la pièce caractérisant la première constatation médicale d'une maladie professionnelle dont la date est antérieure à celle du certificat médical initial n'est pas soumise aux mêmes exigences de forme que celui-ci et n'est pas au nombre des documents constituant le dossier qui doit être mis à la disposition de la victime ou de ses ayants droit et de l'employeur en application de l'article R. 441-14, alinéa 3, du code de la sécurité sociale, il convient cependant de vérifier en cas de contestation, si les pièces du dossier constitué par la caisse ont permis à l'employeur d'être suffisamment informé sur les conditions dans lesquelles cette date a été retenue (2e Civ., 9 mars 2017, n° 15-29.070).

En l'espèce, il n'est pas contesté que M. [H] a cessé son travail à l'issue de sa journée du 28 janvier 2016 et n'était donc plus exposé au risque à compter du lendemain. Cette fin d'exposition correspond à un arrêt de travail prescrit au titre du risque maladie, tel que cela ressort de l'attestation de paiement des indemnités journalières produite par la caisse (sa pièce n°12).

Le certificat médical initial du 10 mars 2016 ne mentionne aucune date de première constatation médicale.

La déclaration de maladie professionnelle fait référence à une première constatation médicale du 28 janvier 2016.

Cette date du 28 janvier 2016 est également reprise au colloque médico- administratif du 9 juin 2016 dans lequel, à la question 'documents ayant permis de fixer la date de première constatation médicale de la maladie déclarée', le médecin conseil a répondu 'date du 1er arrêt pour cette pathologie'.

Il a été précédemment jugé que le colloque figurait bien au dossier consultable par l'employeur.

La société était dès lors suffisamment informée sur les conditions dans lesquelles cette date a été retenue, ce d'autant qu'elle ne pouvait ignorer l'arrêt de travail de son salarié à compter du 29 janvier 2016.

Force est de constater que la condition tenant au délai de prise en charge est remplie.

Les autres conditions du tableau concerné n'étant pas discutées, la présomption d'imputabilité visée à l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale doit s'appliquer.

La société n'alléguant ni n'établissant l'existence d'une cause totalement étrangère au travail, il y a lieu de confirmer le jugement dans toutes ses dispositions.

2 - Sur les dépens

L'article R.144-10 du code de la sécurité sociale disposant que la procédure est gratuite et sans frais en matière de sécurité sociale est abrogé depuis le 1er janvier 2019.

Il s'ensuit que l'article R.144-10 précité reste applicable aux procédures en cours jusqu'à la date du 31 décembre 2018 et qu'à partir du 1er janvier 2019 s'appliquent les dispositions des articles 695 et 696 du code de procédure civile relatives à la charge des dépens.

En conséquence, les dépens de la présente procédure exposés postérieurement au 31 décembre 2018 seront laissés à la charge de la société qui succombe à l'instance.

PAR CES MOTIFS :

La COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement entrepris dans toutes ses dispositions ;

CONDAMNE la société [5] aux dépens, pour ceux exposés postérieurement au 31 décembre 2018.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 9ème ch sécurité sociale
Numéro d'arrêt : 19/04356
Date de la décision : 30/03/2022

Références :

Cour d'appel de Rennes SS, arrêt n°19/04356 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-03-30;19.04356 ?
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