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06/10/2020 | FRANCE | N°17/07274

France | France, Cour d'appel de Rennes, 3ème chambre commerciale, 06 octobre 2020, 17/07274


3ème Chambre Commerciale





ARRÊT N° 353



N° RG 17/07274



N° Portalis DBVL-V-B7B-OKE2













SARL CDS ENERGY



C/



SELARL [E] [B]

M. [T] [V]

SAS SERV'ELITE

SAS THERMATIS TECHNOLOGIES



















Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée















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le :



à : Me Le Couls Bouvet

Me Groleau

Me Bourges

Me Preneux











RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 06 OCTOBRE 2020





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président d...

3ème Chambre Commerciale

ARRÊT N° 353

N° RG 17/07274

N° Portalis DBVL-V-B7B-OKE2

SARL CDS ENERGY

C/

SELARL [E] [B]

M. [T] [V]

SAS SERV'ELITE

SAS THERMATIS TECHNOLOGIES

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Le Couls Bouvet

Me Groleau

Me Bourges

Me Preneux

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 06 OCTOBRE 2020

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,

Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère, rapporteur, Assesseur : Monsieur Dominique GARET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Isabelle GESLIN OMNES, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 23 Juin 2020

ARRÊT :

réputé contradictoire, prononcé publiquement le 06 Octobre 2020 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

SARL CDS ENERGY, immatriculée au RCS de [Localité 6] sous le n° 803 582 766, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège :

[Adresse 12]

[Localité 7]

Représentée par Me Franck LOYAC substituant Me Dominique LE COULS-BOUVET de la SCP PHILIPPE COLLEU, DOMINIQUE LE COULS-BOUVET, postulant, avocats au barreau de RENNES

Représentée par Me Luc FURET, plaidant, avocat au barreau de LORIENT

INTIMÉS :

SAS SERV'ELITE, immatriculée au RCS de Strasbourg sous le n° 394 987 408, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège :

[Adresse 8]

[Localité 9]

Représentée par Me Etienne GROLEAU de la SELARL GROLEAU, postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Yann NOTHUMB de la SCP YANN NOTHUMB-EDITH PEMPTROIT, plaidant, avocat au barreau de LORIENT

SAS THERMATIS TECHNOLOGIES inscrite au RCS ROMANS sous le n° 408.193.639 prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège.

[Adresse 13]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentée par Me Luc BOURGES de la SELARL LUC BOURGES, postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Justine GRANDMAIRE substituant Me François-Luc SIMON de la SELARL SIMON & ASSOCIES, plaidant, avocats au barreau de PARIS

ASSIGNES EN APPEL PROVOQUE :

SELARL [E] [B], ès qualités de mandataire liquidateur de la sarl Ecothermie, [Adresse 11], nommée à cette fonction par jugement du tribunal de commerce de Lorient en date du 04 07 2014, assigné en appel provoqué par la SAS Thermatis technologies par acte du 26/02/18 remis à personne habilitée

[Adresse 2]

[Localité 6]

non représentée

Monsieur [T] [V]

né le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 10] (75), de nationalité française

[Y]

[Localité 4]

assigné en appel provoqué par la SAS Thermatis technologies par acte du 27/02/18 remis à étude

Représenté par Me Stéphanie PRENEUX de la SELARL BAZILLE, TESSIER, PRENEUX, postulant, avocat au barreau de RENNES

Représenté par Me Grégory SVITOUXHKOFF de la SELARL SELARL D'AVOCATS MAIRE-TANGUY-SVITOUXHKOFF-HUVELIN-G OURDIN-NIVAULT-GOMBAUD, plaidant, avocat au barreau de VANNES

La SAS THERMATIS TECHNOLOGIES appartient au groupe BDR THERMEA et produit sous la marque SOFATH des appareils de chauffage dont elle confie la commercialisation à des distributeurs exclusifs liés par des contrats de concession commerciale.

La société ECOTHERMIE, en vertu d'un contrat du 22 août 2008 signé par son gérant M. [V], était concessionnaire SOFATH et à ce titre exerçait une activité de vente et d'installation de matériels de chauffage et de climatisation SOFATH, en assurant leur maintenance en vertu de contrats d'entretien. Elle bénéficiait d'une exclusivité pour les départements du Finistère, des Côtes d'Armor et du Morbihan.

La société ECOTHERMIE avait une filliale dénommée société ECOTHECNIQUE, spécialisée dans la maintenance et le 13 juin 2013, la société ECOTHERMIE a cédé à la société ECOTHECHNIQUE tous les droits et obligations relatifs aux contrats d'entretien dont elle disposait.

Par acte du 18 septembre 2013, la société ECOTHECHNIQUE a cédé à la société SERV'ELITE, société du groupe BDR THERMEA et moyennant un prix de 225.000 euros une partie de son fonds de commerce soit le service après-vente (entretien et réparation) des équipements SOFATH pour les départements du Finistère, des Côtes d'Armor et du Morbihan passés avec une liste de clients annexée à l'acte de vente; cette vente a fait fait l'objet d'une publication au BODACC.

Par jugement du 04 juillet 2014, la société ECOTHERMIE a été placée en liquidation judiciaire et la SCP [E] [B] désigné mandataire liquidateur; par acte du 05 septembre 2014, sur autorisation du juge commissaire, Me [B] ès-qualités a cédé à la société CDS ENERGY le fonds de commerce de la société ECOTHERMIE.

La société CDS ENERGY n'est pas concessionnaires SOFATH et ne dispose pas de l'agrément SOFATH pour la réparation et l'entretien du matériel SOFATH.

Par lettre circulaire, la société THERMATIS TECHNOLOGIES a informé les clients ayant acquis du matériel SOFATH sur les trois départements précités que la société SERV'ELITE était agréé SOFATH.

Elle a, par ailleurs, refusé de livrer en matériel SOFATH la société CDS ENERGY.

Par acte du 26 janvier 2016, la société CDS ENERGY a assigné devant le tribunal de commerce de Lorient les sociétés THERMATIS et SERV'ELITE en leur reprochant du parasitisme et du dénigrement et en leur réclamant 500.000 euros de dommages et intérêts.

La société THERMATIS a appelé en garantie M. [V] et Me [B] ès-qualités.

Les procédures ont été jointes.

Par jugement du 11 octobre 2017, le tribunal de commerce de Lorient a :

- donné acte à la société CDS ENERGY de sa demande de reprise d'instance,

- débouté la société CDS ENERGY de toutes ses demandes,

- débouté la société SERV'ELITE de sa demande de dommages et intérêts au titre des préjudices causés par l'utilisation frauduleuse de son fichier clients par la société CDS ENERGY,

- ordonné à la société CDS ENERGY de cesser tout démarchage auprès des clients cédés à la société SERV'ELITE par acte de cession du 18 septembre 2014, ceci sous astreinte de 1.000 euros pour tout nouveau contact pris à compter de la signification du jugement et aux frais d'huissier engagés pour les constats,

- dit que la société SERV'ELITE devra le saisir pour toute liquidation d'astreinte,

- débouté les sociétés THERMATIS TECHNOLOGIES et SERV'ELITE de leurs demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- dit que la procédure engagée par la société THERMATIS TECHNOLOGIES contre M. [V] est sans objet,

- condamné la société CDS ENERGY à payer à la société THERMATIS TECHNOLOGIES la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société CDS ENERGY à payer à la société SERV'ELITE la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ,

- condamné la société THERMATIS TECHNOLOGIES à payer à M. [V] la somme de 4.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamné la société CDS ENERGY aux dépens.

Appelante de ce jugement et ayant intimé les seules sociétés THERMATIS TECHNOLOGIES et SERV'ELITE, la société CDS ENERGY, par conclusions du 12 juillet 2018, a demandé que la Cour :

- infirme le jugement déféré,

- condamne solidairement les sociétés SERV'ELITE et THERMATIS TECHNOLOGIES à lui payer :

- une somme de 500.000 euros de dommages et intérêts,

- une somme de 5.000 euros pour tout nouvel acte de parasitisme à son encontre,

- déboute les intimées de leurs demandes,

- les condamne solidairement au paiement de la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamne solidairement aux dépens de première instance et d'appel avec droit de recouvrement pour ceux dont il a été fait l'avance.

La société THERMATIS TECHNOLOGIES a intimé en appel provoqué M. [V] et Me [B] ès-qualités de liquidateur de la société ECOTHERMIE.

Par conclusions du 14 août 2018, la société THERMATIS TECHNOLOGIES a demandé que la Cour :

- confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société CDS ENERGY de ses demandes,

- l'infirme en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts de 50.000 euros contre la société CDS ENERGY,

- constate la recevabilité de ses demandes contre M. [V],

- le condamne en sa qualité de dirigeant de la société ECOTHERMIE à la garantir indemne de toutes condamnations prononcées au bénéfice de la société CDS ENERGY,

- déboute M. [V] de ses demandes,

- condamne la société CDS ENERGY à lui payer la somme de 10.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamne M. [V] et Me [B] en qualité de liquidateur judiciaire de la société ECOTHERMIE à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamne la société CDS ENERGY aux dépens.

Par conclusions du 13 avril 2018, la société SERV'ELITE a demandé que la Cour:

- déboute la société CDS ENERGY de ses demandes,

- la condamne à lui payer la somme de 50.000 euros de dommages et intérêts pour concurrence déloyale,

- subsidiairement, confirme le jugement déféré en ce qu'il ordonné sous astreinte à la société CDS ENERGY de cesser tous démarcharges de ses clients et quant à sa condamnation au paiement de frais irrépétibles,

- condamne la société CDS ENERGY au paiement de la somme de 10.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamne la société CDS ENERGY aux dépens.

Par conclusions du 16 mai 2018, M. [V] a demandé que la Cour :

- déclare irrecevables les prétentions formées contre lui ès-nom,

- subsidiairement, déboute la société THERMATIS de ses demandes,

- la condamne à lui payer la somme de 10.000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- la condamne au paiement de la somme de 6.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamne aux dépens de première instance et d'appel avec droit de recouvrement pour ceux dont il a été fait l'avance.

La SCP [E] [B] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société ECOTHERMIE n'a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, la Cour renvoie aux conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur les prétentions de la société CDS ENERGY :

L'examen des pièces versées aux débats démontre l'existence de différentes relations commerciales entre les parties.

Le 22 août 2008 a été signé un contrat de concession commerciale entre la société THERMATIS TECHNOLOGIES et la société ECOTHERMIE aux termes duquel le concédant (la société THERMATIS TECHNOLOGIES) concédait au concessionnaire (ECOTHERMIE) l'exclusivité de la vente des matériels de la gamme SOFATH pour les départements 29-22-56.

Le concessionnaire s'interdisait de distribuer dans le secteur lui étant concédé tout autre produit que celui du concédant et d'exercer une autre activité professionelle que celle liée directement à la mise en oeuvre du contrat de concession.

L'usage de la marque SOFATH était concédée au concessionnaire.

Ce dernier devait fournir au concédant un état mensuel de chaque installation réalisée avec les coordonnées du client et les caractéristiques précises de l'installation réalisée.

Il était précisé à l'article 12 qu'en cas de cession ou de transmission du fonds de commerce ou de la société ou de modification dans la personne des dirigeants ou associés 'le contrat ne sera poursuivi qu'avec l'accord formel du concédant exprimé par lettre recommandée avec accusé de réception et dans la mesure où le successeur offre toutes les garanties financières, techniques et commerciales. Dans ces hypothèses, le concédant examinera par priorité la candidature du successeur présentée dans les plus brefs délais par le concessionnaire mais ne sera en aucun cas tenu de l'agréer ou de verser une quelconque indemnité pour défaut d'agrément'.

Ce contrat était d'une durée de dix années.

Par contrat du 03 juin 2013 et du 26 août 2013, la société ECOTHERMIE a cédé à sa société ECOTECHNIQUE, dont les associés étaient identiques, ses contrats d'entretien.

Par contrat du 18 septembre 2013 la société ECOTECHNIQUE, moyennant un prix de 225.000 euros a vendu à la société SERV'ELITE ladite branche d'activité, soit la partie du fonds de commerce relative au service après vente d'équipements thermiques de marque SOFATH exploitée dans les départements du Finistère, du Morbihan et des Côtes d'Armor et le matériel servant à son exploitation.

Dans l'acte, le vendeur s'interdisait d'exploiter la clientèle attachée à la branche cédée et de procéder à l'entretien et la réparation de matériels du groupe BDR THERMEA (dont fait partie SOFATH) pendant un délai de cinq années sur les départements mentionnés ci-dessus.

Il était précisé que cette clause ne visait pas l'activité d'installations de chauffage et de climatisation qui pouvait donc être librement exercée par le vendeur ou ses dirigeants directs ou indirects.

Etait annexée une liste de clients signée par les parties (nom, adresse, date de début de contrat, dernier montant payé.

La cession entre ECOTECHNIQUE et SERV'ELITE a fait l'objet d'une publication au BODACC du 13 octobre 2013.

Par acte du 05 septembre 2014, la SCP [E] [B], désigné comme liquidateur judiciaire de la société ECOTHERMIE par jugement du 04 juillet 2014, a vendu à la société CDS ENERGY le fonds de commerce de la société ECOTHERMIE soit l'enseigne, la clientèle, l'achalandage, le matériel et objet servant à son exploitation, la reprise et le suivi des clients en cours de pose et d'installation, les archives papiers, l'informatique et le stockage des données clients, le droit à l'usage de la ligne téléphonique, ceci moyennant un prix de 10.000 euros.

L'acte ne contenait aucune clause envisageant la cession d'un quelconque contrat en cours.

Il ne contenait en annexe aucun fichier.

Il résulte de ces différents contrats que la société CDS ENERGY n'a pas acquis de droit sur le contrat de concession exclusive conclu entre la société SOFATH et la société ECOTHERMIE, puisque aucun contrat en cours ne lui a été cédé.

Il en résulte aussi que par application de l'article 12 de son contrat de concession, la société SOFATH n'avait pas l'obligation de le renouveler avec elle.

Il en résulte de la même façon que :

- les sociétés SOFATH et CDS ENERGY possédaient des fichiers identiques dans la mesure où toutes les installations effectuées par la société ECOTHERMIE depuis le début du contrat de concession jusqu'à sa liquidation judiciaire étaient légitimement inscrites dans le fichier client ECOTHERMIE ainsi que dans le fichier SOFATH puisque ECOTHERMIE n'installait que du matériel SOFATH et qu'elle avait l'obligation de transmettre à la société SOFATH un état mensuel des installations réalisées,

- la société CDS ENERGY ne pouvait prétendre réaliser l'entretien et les réparations des matériels installés par la société ECOTHERMIE avant le 03 juin 2013, la branche d'activité et les contrats ayant été cédés par la société ECOTHERMIE à cette date, et ne pouvant donc se trouver dans le fonds de commerce lors de sa vente en juillet 2014,

- en d'autres termes le fichier acheté par la société CDS ENERGY était constitué

- des acquéreurs anciens de matériel SOFATH dont elle ne pouvait assurer l'entretien puisqu'il est permis de penser que la majorité devait avoir souscrit un contrat d'entretien chez leur installateur,

- des acquéreurs récents, de juin 2013 à juillet 2014, en nombre restreint compte tenu de la dégradation des résultats du fonds,

- des clients potentiels ayant demandé des renseignements.

La société CDS ENERGY n'a pas justifié des fichiers lui ayant été vendus. Les listes de noms qu'elle verse aux débats ne comportent aucune mention qui permettent d'en déterminer la provenance.

Au demeurant, compte tenu du prix payé pour le fonds, ce dernier périclitait et les éléments vendus étaient de peu de valeur.

La société CDS ENERGY ne prétend pas que le contrat de concession exclusive conclu entre la société SOFATH et la société ECOTHERMIE soit illégal. La société SOFATH n'est pas en position dominante sur le marché des appareils de chauffage et des pompes à chaleur, et il s'agit d'un contrat de concession exclusif classique, ayant pour objet de permettre au concédant d'assurer plus efficacement la distribution de ses produits par un distributeur ayant une expérience et une qualification technique certaine, de nature à assurer la satisfaction du client final, tandis que le concessionnaire bénéficie de l'image de la marque du concédant et d'un développement protégé sur un certain territoire.

Aucun contrat n'ayant été cédé lors de la cession du fonds de commerce, la société CDS ENERGY savait que le contrat de concession ne lui avait pas été transmis.

Sur le refus de vente :

En vertu des dispositions de l'article L420-1 du code de commerce 'Sont prohibées même par l'intermédiaire direct ou indirect d'une société du groupe implantée hors de France, lorsqu'elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, les actions concertées, conventions, ententes expresses ou tacites ou coalitions, notamment lorsqu'elles tendent à :

1° Limiter l'accès au marché ou le libre exercice de la concurrence par d'autres entreprises ;

2° Faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse ;

3° Limiter ou contrôler la production, les débouchés, les investissements ou le progrès technique ;

4° Répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement'.

La société CDS ENERGY vise ce texte pour conclure que la société SOFATH, en refusant de lui vendre des pièces de rechange SOFATH s'est frauduleusement entendue avec la société SERV'ELITE pour lui refuser l'accès au marché de l'entretien du matériel SOFATH ;

Toutefois le texte visé est inapplicable au cas d'espèce, en l'absence de 'marché' au sens de ces dispositions, lesquelles visent la commercialisation d'un produit générique.

Les relations contractuelles entre la société SOFATH et la société SERV'ELITE n'ont pas pour objet une entente sur le marché des pompes à chaleur, ou du matériel de chauffage en général, et n'interdisent absolument pas à la société CDS ENERGY de commercialiser toute autre marque que la marque SOFATH. Il n'est même pas allégué que cette dernière soit en position dominante sur le marché des pompes à chaleur et/ou du matériel de chauffage.

Dans ce cadre législatif, le refus de vente entre professionnel est licite et permet de déclarer valide les contrats de concessions exclusifs.

Enfin la société SOFATH n'a pas opposé un refus de vente 'sec' à la société CDS ENERGY: les courriers versés aux débats démontrent que dès début septembre 2014, la société CDS ENERGY a déposé auprès d'elle une candidature pour obtenir un contrat de concession et que la société THERMATIS, en réponse, lui a uniquement demandé de compléter son dossier en lui indiquant qu'elle était en concurrence avec deux autres sociétés.

Le moyen tiré des dispositions de l'article L420-1 du code de commerce n'est pas fondé.

Sur la confusion entretenue par la société SERV'ELITE entre son propre fichier client et celui de la société CDS ENERGY :

En l'absence de toute démonstration de la teneur du fichier client acquis par la société CDS ENERGY, ce moyen n'est pas fondé.

Sur le détournement de clientèle de la société ECOTHERMIE acheté par la société CDS ENERGY :

La société CDS ENERGY reproche aux sociétés SERV'ELITE et THERMATIS d'avoir tenté de s'approprier gratuitement la clientèle de la société ECOTHERMIE.

Compte tenu de la somme payée par la société SERV'ELITE pour acquérir les contrats d'entretien, cette accusation parait peu fondée. De la même façon, la société ECOTHERMIE a cédé à la société ECOTECHNIQUE qui a elle-même cédé à la société SERV'ELITE une branche d'activité, et le contrat fait mention de la reprise des contrats de travail.

Dès lors, les accusations de débauchage de la société CDS ENERGY, au demeurant non appuyées par des faits précis, sont infondées.

Ensuite, il ne peut être tiré aucun enseignement du fait que des offres commerciales aient été adressées à six personnes dont cinq étaient des membres de la famille des anciens gérants ou associés de la société ECOTHERMIE, ces relations familiales pouvant expliquer sans difficultés que leurs coordonnées aient été connues de l'ensemble des protagonistes.

D'autre part, la société ECOTHERMIE n'avait pas le droit, aux termes de son contrat de concession, d'installer des équipements d'une autre marque que SOFATH. Dès lors, la société CDS ENERGY n'explique pas comment des clients non équipés de matériels SOFATH pouvaient se trouver dans son fichier client - et donc faire l'objet d'un démarchage illicite par la société SERV'ELITE.

Ensuite, la société CDS ENERGY reproche aux sociétés SOFATH et SERV'ELITE des actes de parasitisme, lequel consiste à se placer dans le sillage d'une entreprise pour profiter gratuitement des investissements de toute nature que celle-ci a pu réaliser. Cette circonstance n'est pas caractérisée en l'espèce, SOFATH et SERV'ELITE étant implantées sur le marché du matériel SOFATH bien avant que CDS ENERGY ne rachète le fonds de commerce de la société ECOTHERMIE et bénéficiant chacune d'un fichier client SOFATH acquis grâce à leurs propres investissements.

Enfin, et contrairement à ce qu'allègue la société CDS ENERGY, la société THERMATIS- SOFATH, aux termes des contrats de concession exclusive qu'elle signe pour distribuer et entretenir le matériel vendu sous sa marque était parfaitement fondée à écrire aux clients ayant acquis du matériel SOFATH, dont elle détenait légalement le fichier, pour leur indiquer que depuis la liquidation judiciaire de la société ECOTHERMIE, elle n'avait plus de concessionnaire sur le département et que dans l'attente, les clients pouvaient appeler pour entretien des numéros leur étant fournis, ou contacter la société SERV'ELITE.

Il en résulte que la société CDS ENERGY ne démontre ni le détournement de clientèle ni le parasitisme et que le jugement est confirmé en ce qu'il l'a déboutée de toutes ses demandes.

Consécutivement le jugement est aussi confirmé en ce qu'il a déclaré sans objet les appels en garantie.

Sur les prétentions de la société SERV'ELITE :

La société SERV'ELITE réclame une somme de 50.000 euros de dommages et intérêts réparant les actes de concurrence déloyale commis à son encontre par la société CDS ENERGY et la confirmation de sa condamnation sous astreinte à ne plus prendre contact avec ses clients.

A l'appui de sa demande, la société SERV'ELITE verse aux débats un courrier adressé à M. [M] [H], figurant sur la liste des clients annexé à l'acte de cession, émanant de la société CDS ENERGY, rédigé comme suit :

'cher client,

suite à de nombreux témoignages de clients, une entreprise se fait passer pour Ecothermie afin d'exploiter indûment notre fichier client dans le but de procéder à une concurrence nuisible pour notre société, qui pour rappel est basée depuis 25 ans [Adresse 14].

Cette entreprise parasite a déménagé plusieurs fois et a recours à des pratiques plus que contestables, d'un point de vue commercial et professionnel.

Cette société utilise des numéros de téléphone payants pour son support clientèle et de plus et surtout, cette société ne possède:

* aucune garantie en responsabilité civile,

* aucune garantie décennale

Au delà du préjudice commercial qui se réglera auprès des instances compétentes, notre devoir d'information nous conduit à vous tenir informé des faits (....)'.

Elle verse aussi aux débats un courrier adressé par la société CDS ENERGY à M. [U], client figurant sur la liste des clients annexée à l'acte de cession, qui est ainsi rédigé :

'Cher client,

tout d'abord, merci pour la confiance que vous témoignez à ECOTHERMIE CDS ENERGY depuis presque 20 ans déjà. En effet depuis 20 ans, nos techniciens assurent la pose et l'entretien de votre système de chauffage.

Afin de vous remercier de votre fidélité, nous sommes heureux de vous faire profiter de notre nouveau service:

(numéro de téléphone)

1 seul numéro local, disponible 7 jours sur 7 (...)'

Elle verse aux débats un courrier adressé par la société CDS ENERGY à M. [R], qui figure sur la liste de clients annexée à son acte de cession, rédigé comme suit:

'CDS ENERGY/ ECOTHERMIE acteur historique de votre installation, est fier de vous présenter son nouveau service de SAV premium (...)'

Elle verse aux débats un courrier adressé par la société CDS ENERGY à M. [O], qui figure sur liste de clients annexée à son acte de cession, rédigée comme suit:

'cher client d'ECOTHERMIE,

Dans le cadre du rachat de la société ECOTHERMIE, nous vous informons que votre seul et unique interlocuteur concernant votre équipement est désormais la société CDS ENERGY; En tant que client historique et privilégié (...)'

Elle verse aux débats une sommation interpellative adressée à M. [W], client figurant sur la liste annexée à l'acte de cession, qui a utilisé un formulaire préimprimé pour résilier le contrat d'entretien souscrit auprès d'elle et qui déclare 'la lettre de résiliation est bien un modèle qui m'a été présenté à la signature par le représentant de la société CDS ENERGY (...) Je n'ai fait absolument aucune démarche, c'est la société CDS ENERGY qui a envoyé la lettre'.

Elle verse enfin aux débats une attestation de M. [J], client figurant sur la liste annexée à l'acte de cession, indiquant que malgré la souscription depuis 2014 d'un contrat d'entretien avec SERV'ELITE, il recevait régulièrement des courriers de CDS ENERGY laissant supposer qu'il devait se rapprocher d'elle pour signer un contrat d'entretien, jusqu'à ce qu'il recoive un appel de la société CDS ENERGY lui demandant de 'confirmer un rendez vous afin de mettre en ordre notre relation commerciale'.

Il en résulte la démonstration de la réalisation par la société CDS ENERGY, au détriment de la société SERV'ELITE, d'actions de dénigrement caractérisé ainsi que de détournement frauduleux de clients en faisant délibérément usage auprès d'eux d'une fausse qualité, à savoir celle de leur réparateur habituel, ce qu'elle n'était pas.

De tels faits, qui caractérisent une concurrence déloyale et dont la société SERV'ELITE démontre qu'ils se sont produits de façon réitérée sur une longue période puisque certains courriers datent de décembre 2014 et d'autres de janvier 2016, ont entraîné un préjudice d'image et de perte de clientèle, certains contrats ayant été résiliés.

Ils justifient l'allocation d'une somme de 30.000 euros de dommages et intérêts.

L'injonction de cesser tout démarchage et tous contacts avec les clients de la société SERV'ELITE ne peut être confirmée, s'agissant d'une mesure contraire à la liberté du commerce et seul l'abus de cette possibilité pouvant être sanctionné.

Sur les prétentions de la société THERMATIS TECHNOLOGIES :

La société THERMATIS TECHNOLOGIES réclame une somme de 50.000 euros à la société CDS ENERGY pour procédure abusive, étant précisé que parallèlement une autre procédure a opposé les parties devant le tribunal de grande instance de Paris.

La conjonction entre le montant extrêmement élevé de la demande et la faiblesse de la démonstration caractérise l'intention de nuire de la société CDS ENERGY et il est fait droit à la demande à hauteur de la somme de 5.000 euros.

Sur la demande de dommages et intérêts de M. [V] :

Cette demande avait déjà été présentée devant le premier juge, qui a omis de statuer.

Elle vise la société THERMATIS TECHNOLOGIES pour procédure abusive, les faits reprochés subsidiairement à M. [V] par cette dernière n'ayant jamais été commis à titre personnel mais en qualité de gérant de la société ECOTHERMIE, ce qu'il a toujours fait valoir, sans jamais pour autant n'obtenir de réponse à cette pertinente observation.

Sans même que la société THERMATIS TECHNOLOGIES ne cherche à démontrer l'existence d'une faute détachable de ses fonctions de gérant, M. [V] a de nouveau été assigné en intervention forcée en cause d'appel, ceci pour lui demander de garantir des condamnations dont le montant pouvait s'élever à 500.000 euros, montant signifiant la ruine de la majorité des particuliers.

Cette action parfaitement hasardeuse, qui a engendré de légitimes soucis à M. [V] durant plusieurs années, justifie que la société THERMATIS TECHNOLOGIES soit condamnée à lui payer la somme de 8.000 euros de dommages et intérêts.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

La société CDS ENERGY qui succombe, supportera la charge des dépens de l'appel principal et paiera sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel la somme de 5.000 euros à la société SERV'ELITE et celle de 5.000 euros à la société THERMATIS TECHNOLOGIES;

Pour sa part, la société THERMATIS TECHNOLOGIES supportera la charge des dépens afférents à ses appels provoqués et paiera à M. [V] la somme de 6.000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société CDS ENERGY de toutes ses demandes et déclaré sans objet les appels en garantie formés par la société THERMATIS TECHNOLOGIES contre M. [V] et Me [B] ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société ECOTHERMIE, et en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.

L'infirme pour le solde.

Statuant à nouveau :

Condamne la société CDS ENERGY à payer à la société SERV'ELITE la somme de 30.000 euros à titre de dommages et intérêts pour concurrence déloyale.

Déboute la société SERV'ELITE du solde de ses demandes et notamment de celle relative avec une injonction à la société CDS ENERGY de cesser tout démarcharge et toute prise de contact avec ses clients.

Condamne la société CDS ENERGY à payer à la société THERMATIS TECHNOLOGIES la somme de 5.000 euros pour procédure abusive.

Condamne la société THERMATIS TECHNOLOGIES à payer à M. [V] la somme de 8.000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Déboute les parties du solde de leurs demandes.

Condamne la société CDS ENERGY aux dépens de l'appel principal.

Condamne la société CDS ENERGY à payer, au titre de ses frais irrépétibles d'appel, la somme de 5.000 euros à la société SERV'ELITE.

Condamne la société CDS ENERGY à payer, au titre de ses frais irrépétibles d'appel, la somme de 5.000 euros à la société THERMATIS TECHNOLOGIES.

Condamne la société THERMATIS TECHNOLOGIES aux dépens relatifs à ses appels provoqués.

Condamne la société THERMATIS TECHNOLOGIES à payer, au titre de ses frais irrépétibles d'appel, la somme de 6.000 euros à M. [V].

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 3ème chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 17/07274
Date de la décision : 06/10/2020

Références :

Cour d'appel de Rennes 02, arrêt n°17/07274 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-10-06;17.07274 ?
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