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04/09/2020 | FRANCE | N°17/01446

France | France, Cour d'appel de Rennes, 2ème chambre, 04 septembre 2020, 17/01446


2ème Chambre





ARRÊT N° 411



N° RG 17/01446 - N° Portalis DBVL-V-B7B-NXSL













M. [O] [K]



C/



M. [B] [F]

Mme [H] [G]

M. [L] [W]



















Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours















Copie exécutoire délivrée



le :



à :

- Me FOUQUAU

T

- Me CHAUDET

- Me GOUZE











RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 04 SEPTEMBRE 2020



COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,

Assesseur : Madame Marie-Odile GELOT-BARBIER, Conseillère,...

2ème Chambre

ARRÊT N° 411

N° RG 17/01446 - N° Portalis DBVL-V-B7B-NXSL

M. [O] [K]

C/

M. [B] [F]

Mme [H] [G]

M. [L] [W]

Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me FOUQUAUT

- Me CHAUDET

- Me GOUZE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 04 SEPTEMBRE 2020

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,

Assesseur : Madame Marie-Odile GELOT-BARBIER, Conseillère,

Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère, rédactrice,

GREFFIER :

Mme Aichat ASSOUMANI

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 04 Septembre 2020 par mise à disposition au greffe ,

****

APPELANT :

Monsieur [O] [K] agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'héritier de Monsieur [P] [K] décédé le [Date décès 4] 2018

né le [Date naissance 3] 1975 à [Localité 20]

[Adresse 13]

[Localité 16]

Représenté par Me Arnaud FOUQUAUT, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représenté par Me FLOT Pascal , Plaidant, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMÉS :

Monsieur [B] [F]

né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 17]

[Adresse 11]

[Localité 14]

Représenté par Me Dominique GOUZE de la SELARL SOCIETE JUDICIAIRE ET JURIDIQUE DE L'OUEST, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de QUIMPER

Madame [H] [G]

née le [Date naissance 5] 1966 à [Localité 18]

[Adresse 10]

[Localité 7]

Représentée par Me Dominique GOUZE de la SELARL SOCIETE JUDICIAIRE ET JURIDIQUE DE L'OUEST, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de QUIMPER

Monsieur [L] [W] Expert Maritime

[Adresse 12]

[Localité 8]

Représenté par Me Jean-david CHAUDET de la SCP JEAN-DAVID CHAUDET, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représenté par Me Dominique LACAN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTERVENANTE :

Madame [C] [U] épouse [K] ès qualité d'héritière de Monsieur [P] [K] décédé le [Date décès 4] 2018

née le [Date naissance 6] 1950 à [Localité 15]

[Adresse 9]

[Localité 2]

Représentée par Me Arnaud FOUQUAUT, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me FLOT Pascal , Plaidant, avocat au barreau de MONTPELLIER

EXPOSE DU LITIGE:

Le 4 mars 2013, M. [O] [K] et son père, M. [P] [K], ont acheté auprès de M. [B] [F] et de Mme [H] [G] un voilier modèle 'First 405" de marque Beneteau immatriculé sous le numéro 685680. Préalablement à la vente, comme le bateau se trouvait à sec au parc du chantier naval des Abers à [Localité 19], ils ont fait procéder à une visite préalable par M. [W], expert maritime, qui a considéré que le bon état de présentation du navire et l'état de ses équipements permettaient de fixer son prix de vente à 47 000 euros.

Lors de la livraison du bateau à [Localité 16] sur le parc du chantier Marine Technic Services, des avaries ont été constatées notamment sur la coque. Le cabinet d'expertise Medexp, intervenu à la demande des acheteurs, a fait état de nombreuses faiblesses structurelles importantes nécessitant des réparations avant toute navigation. Par courrier en date du 10 mars 2013, MM. [K] se sont rapprochés des vendeurs afin qu'ils viennent constater l'état du voilier.

A la suite du refus des vendeurs, MM. [K] ont saisi par la voie du référé le président du Tribunal de grande instance de Narbonne aux fins d'obtenir la désignation d'un expert judiciaire. Par ordonnance du 4 juin 2013 du président du tribunal de grande instance de Narbonne, statuant en la forme du référé, M [A] [M] a été mandaté pour examiner le voilier. Il a déposé son rapport définitif le 28 décembre 2013. Il a conclu à l'existence de désordres antérieurs à l'achat affectant notamment la coque du bateau et empêchant toute navigation en l'état.

Par acte d'huissier en date du 28 novembre 2014, MM. [K] ont assigné M. [F], Mme [G] et M. [W] en résolution ou anéantissement de la vente du navire et en paiement de diverses sommes au titre des préjudices subis.

Par décision du 7 février 2017, le tribunal a :

- débouté MM. [O] et [P] [K] de l'ensemble de leurs demandes,

- condamné MM. [O] [K] et [P] [K] à payer à M. [B] [F] et Mme [H] [G] la somme de 1 500 euros et à M. [L] [W] la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné MM. [K] au entiers dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du jugement.

Par déclaration en date du 27 février 2017, M. [O] [K] et son père ont relevé appel de ce jugement.

Le [Date décès 4] 2018, M. [P] [K] est décédé. Par conclusions en intervention volontaire, notifiées le 23 avril 2020, Mme [C] [K] née [U], son épouse et M. [O] [K] sont intervenus à la procédure d'appel en leurs qualité d'héritiers de M. [P] [K] pour reprendre ses demandes en appel, sollicitant la révocation de l'ordonnance de clôture prise le 12 mars 2020.

Par ordonnance du 4 mai 2020, l'ordonnance de clôture en date du 12 mars 2020 a été révoquée et la clôture renvoyée à l'audience de plaidoirie du 19 mai 2020.

Aux termes de leurs dernières conclusions signifiées également le 23 avril 2020, Mme [K] en sa qualité d'héritière et M. [O] [K], tant en sa qualité d'héritier qu'en son nom personnel, demandent à la cour de :

Vu l'article 1641 du code civil,

Vu l'article 1147 du code civil,

Vu les articles 1991et suivants du code civil,

- infirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau,

à titre principal,

- dire et juger que des vices cachés affectent le voilier acquis par MM. [K] et le rendent impropre à sa destination,

- prononcer la résolution de la vente,

- condamner solidairement M. [F] et Mme [G] au paiement de la somme de 47 000 euros au titre de la restitution du prix de vente du voilier,

- condamner solidairement M. [F] et Mme [G] au paiement de la somme de 44 449,91 euros au titre des préjudices subis,

à titre subsidiaire,

- dire et juger que les demandes formulées à l'encontre de M. [W] sont recevables,

- dire et juger que M. [W] a commis des fautes de nature à engager sa responsabilité,

- condamner M. [W] au paiement de la somme de 69 919,40 euros au titre de l'ensemble des préjudices subis par MM. [K],

en tout état de cause,

- condamner tout succombant au paiement de la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Aux termes de leurs dernières écritures signifiées le 3 janvier 2018, M.[F] et Mme [G] demandent à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

- débouter les appelants de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

au surplus, constater le caractère apparent des désordres dont il est excipé et dont la cause tient dans la vétusté du navire - 27 ans lors de la transaction-, transaction dont le montant s'est situé très sensiblement en dessous de l'argus et dans le bas de la fourchette du marché sur ce type d'unité intrinsèquement ancienne.

En conséquence, débouter les appelants de l'ensemble de leuts demandes matérielles et immatérielles, à l'encontre des concluants qui ne sauraient être tenus des carences de l'expert choisi par les acheteurs.

Vu l'article 9 du code de procédure civile, constater que les consorts [K] et tout particulièrement M. [O] [K], demeurent dans l'incapacité de justifier des préjudices dont il font état, outre le fait qu'ils devront être nécessairement rejetés au visa de l'article 1150 du code civil.

Vu l'article 564 du code de procédure civile, et la pièce 5 de Mme [G] et de M. [F], soit l'attestation Marine Technic Service du 22 novembre 2017,

A titre infiniment subsidiaire, si contre toute attente, les consorts [K] devaient prospérer dans leur action résolutoire,

- constater leur incapacité à opérer une quelconque restitution en nature vu l'état d'abandon du navire depuis cinq ans et les condamner à verser aux concluants la somme de 47 000 euros correspondant à leur créance de restitution par équivalent,

- en conséquence, ordonner la compensation de cette créance avec celle détenue par les appelants sur les concluants, née de l'obligation pour ces derniers de restituer le prix de vente,

Vu l'article 1382 du code civil, considérer la faute de M. [W] à l'encontre des concluants,

en conséquence, dire M. [W] seul tenu de l'ensemble des autres demandes soutenues par les réquérants et le cas échéant le condamner à garantir les concluants de toute condamnation qui pourrait être mise à leur charge, au titre des divers préjudices et frais induits depuis la vente du navire y compris les dépens.

Vu l'article 700 du code de procédure civile et la somme exposés par les concluants dans le cadre du référé expertise, puis désormais dans la procédure au fond, leur faire allouer une indemnit de 6000 euros par la ou les parties succombant.

Par conclusions notifiées le 27 avril 2020, M. [W] demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et de condamner les appelants à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article de de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous es dépens.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées par les parties, l'ordonnance de clôture ayant été rendue à l'audience le 19 mai 2020.

En application de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale, et les parties ayant confirmé leur accord, il a été statué sans débat.

EXPOSÉ DES MOTIFS :

Sur la garantie des vices cachés :

Les consorts [K] invoquent en appel la seule garantie des vices cachés quand en première instance, ils fondaient leur action également sur l'absence de délivrance conforme. Sur ce point, ils rejoignent l'analyse faite par les premiers juges selon laquelle les défauts affectant le navire ne pouvaient être considérés comme des défauts de conformité dans la mesure où ils rendaient la chose impropre à son usage. Mais, ils font grief au jugement de les avoir déboutés de leur action subsidiaire en considérant que les vices affectant le navire étaient apparents, qu'ils n'ont pas fait l'objet de dissimulation et étaient visibles par un professionnel au moment de la vente.

M.[F] et Mme [G], qui sollicitent la confirmation de la décision de première instance, font valoir d'ailleurs que les désordres dont font état les appelants, figuraient déjà dans le rapport du premier expert et qu'ils étaient, comme souligné par l'expert judiciaire, ' apparents sans démontage'. Ils relèvent que l'expert judiciaire a également noté que la plupart des désordres relevaient de la vétusté du bateau comme les défaillances structurelles. Ils soulignent que les acquéreurs, dont l'un au moins avait déjà été propriétaire d'un navire de plaisance, ont fait le choix de ne pas venir visiter en personne le navire dont ils connaissaient l'âge (27 ans) et les désordres apparents signalés dans le rapport de M. [W]. Ils considèrent que MM. [K] ont manqué à tout le moins de diligence, ou ne se sont pas suffisamment renseignés sur le coût des réparations nécessaires pour une remise en état d'un bateau de 27 ans, dont le prix de vente, était conforme au prix du marché au regard de son état. Ces travaux, chiffrés par M. [M] à la somme de 25 419 euros, résultent selon eux, de l'état de vétusté du navire et des désordres qu'il comportait lesquels étaient apparents, y compris pour des profanes, auxquels ont été signalés la souplesse des fonds et la nécessité de changer le joint de quille tous les ans.

Les consorts [K] rappellent qu'ils ne sont pas des professionnels et soutiennent que les vices n'étaient pas apparents. Ils font valoir d''une part, que le fait qu'ils aient pris le soin de solliciter l'avis d'un expert pour constater l'état du voilier avant la vente, ne les rend pas professionnels pour autant et capables, notamment, de tirer les conséquences des constatations particulièrement techniques de l'expert intervenu en amont. D'autre part, ils soutiennent que les vices constatés par l'expert judiciaire ne sont pas apparents pour un acheteur profane. Ils soulignent que MM. [K] père et son fils étaient incapables d'identifier les vices litigieux et d'en mesurer la gravité. Ils n'avaient pas la compétence pour apprécier l'état du moteur et les conséquences d'un décollement de la quille.

L'expert judiciaire, M. [M] a listé plusieurs désordres affectant le navire acquis par M.M [K] :

- un arbre porte hélice flambé,

- un joint de quille décollé,

- une déformation de la coque à l'arrière de la quille, sous moteur ,

- une fissure bordé tribord sous rail de fargue,

- un moteur dont l'état, en l'absence de traces de maintenance est à surveiller,

- un coude d'échappement hors service,

- une melanture de mât détruite par la corrosion,

- un gréement de dormant non vu mais à remplacer par sécurité.

L'expert a conclu que la majorité des désordres constatés existaient au moment de la vente et que le voilier était impropre à sa destination. Il souligne que le voilier n'est pas en état de naviguer , le risque d'arrachement de la quille et donc le chavirage, n'étant pas à négliger . Il a estimé par ailleurs, que les vices n'avaient fait l'objet d'aucune dissimulation et qu'ils étaient visibles par le professionnel mandaté par les acheteurs.

Dans ses réponses aux dires des parties, M. [M] a précisé que l'ensemble des désordres avait une antériorité précédant le grutage et le transport du voilier de sorte que les dernières et récentes manipulations n'étaient pas en cause. Il a indiqué que les désordres étaient tous apparents sans démontage et que la plupart, comme les défaillances structurelles, relevaient de la vétusté, soulignant que les colles utilisées à l'époque étaient insuffisamment durables et qu'elles se rompaient sous l'effet des petits chocs de la navigation. L'expert a souligné également que les désordres relevaient d'atteintes à la qualité structurelles du voilier, ce qui était fondamental. Or, il a noté que M. [W] avait qualifié ces désordres de mineurs.

Il s'avère en effet que dans son rapport de visite préalable, M. [W] a noté que 'dans le fonds du carré, les tissus de verre sont par fois décollés à la jonction avec les varangues de contremoulage. Ces désordres mineurs pourraient être provoqués par la pression de la quille sur le bordé de fond quand le navire est posé sur le fond au moment de la sortie de l'eau au chantier'. Aucune précision n'est apportée dans le rapport sur le joint de quille décollé ni sur la flexibilité anormale de la coque qui a été constatée par toutes les parties lors des opérations d'expertise judiciaire.

Toutefois, il convient de noter que l'expert judiciaire a conclu que M. [W] avait examiné le voilier à sec sur bers d'hivernage avant l'achat, le 28 février 2013, alors que le voilier avait été calé en prenant des précautions particulières lesquelles n'ont pas été portées à la connaissance de l'expert. Il a précisé cependant que cette information aurait pu influencer son expertise bien que les désordres visibles existants qu'il avait constatés ne l'aient pas suffisamment alerté sur leurs conséquences. M. [M] a également noté que la révélation de la flexibilité de la coque avait été facilitée pour le deuxième expert par le fait que celui-ci avait examiné le navire à sec lors de sa manipulation de levage et de calage.

En conséquence, les constatations de M. [W] ne rendaient pas suffisamment compte de la gravité des conséquences des désordres sur l'état du navire de sorte que les acheteurs, profanes en la matière, n'étaient pas en mesure de percevoir les vices affectant le navire dans toute leur étendue et importance, étant précisé que la vétusté invoquée par les intimés ne peut justifier l'impossibilité d'usage du voilier. En effet, si les acheteurs avaient conscience d'acheter un voilier de 27 ans, ils entendaient néanmoins pouvoir en user normalement . M. [W] , tenant compte de la vétusté du navire et des menues réparations à y apporter , a estimé sa valeur vénale à la somme de 47 000 euros, étant rappelé que l'expert judiciaire a noté dans son rapport que le prix estimé du bateau se situait entre 46 400 et 52 200 euros. M. [M] a chiffré les travaux de remise en état à 25 419,49 euros TTC.

Il s'ensuit que c'est à tort que le tribunal a débouté les acquéreurs de leur demande en résolution de la vente. Sa décision sera infirmée. Les consorts [K], faisant le choix de l'action résolutoire, la résolution de la vente du voilier sera prononcée. M. [F] et Mme [G] devront restituer le prix de vente de 47 000 euros aux appelants agissant en leurs qualité d'héritiers de M. [P] [K] mais également pour M. [O] [K] en son nom personnel.

Les intimés, prétextant l'impossibilité de restitution du navire dans un état équivalent à celui dans lequel il a été vendu en 2013, en raison de l'absence d'entretien du bateau par les acquéreurs, soutiennent que les consorts [K] seraient alors redevables d'une créance à leur égard d'un montant égal à celui de la transaction et qui devrait se compenser avec la restitution du prix.

Les consorts [K] concluent à l'irrecevabilité de cette demande nouvelle en appel au visa de l'article 564 du code de procédure civile. M. [F] et Mme [G] répliquent à ce moyen qu'ils peuvent former une demande nouvelle en appel s'ils ont eu connaissance d'un fait nouveau . Or, ils estiment que l'état d'abandon du navire qui a été porté à leur connaissance par un courrier de l'entreprise Marine Technic Services en date du 22 novembre 2017 constitue un tel fait. De surcroît, ils rappellent qu'une demande de compensation est recevable en appel si elle est opposée à une demande adverse.

La demande nouvelle des intimés répond effectivement aux critères de recevabilité exceptionnels de l'article 564 du code de procédure civile pour être examinée par la cour. Cependant, la lettre de la société Marine Technic Services, seul document produit par les intimés à l'appui de leur demande, qui fait état de l'absence de protection sur le pied de mât du bateau, exposé au intempéries ne peut suffire à établir l'existence de dommages imputables aux acheteurs et dont le coût de réparation serait équivalent au montant du prix d'achat. Ce courrier précise d'ailleurs que le mât a été 'déposé depuis la réception du bateau sur des portes mâts dans la zone technique à l'extérieur, aux intempéries et à l'accès à tout le monde sans n'avoir jamais eu de la part du propriétaire une protection quelconque' . Il sera rappelé que l'expert judiciaire a noté dans son rapport que l'emplanture du mât sur la quille était détruite par la corrosion. Enfin, les dégradations alléguées à l'intérieur du bateau, provoquées selon les intimés par l'orifice laissé par le pied de mât, ne sont pas davantage établies. En conséquence, M. [F] et Mme [G] ne peuvent se prévaloir d'aucune créance à l'encontre des appelants et seront donc déboutés de leur demande de compensation.

Sur l'indemnisation des autres préjudices :

Les consorts [K] réclament en outre, l'indemnisation de leurs préjudices sur le fondement de l'article 1645 du code civil, au motif que les vendeurs connaissaient les vices affectant le voilier qu'ils vendaient. Ils en veulent pour preuve le courrier en date du 28 mars 2013 adressé par ces derniers aux termes duquel, ils indiquent que le 'chantier breton , qui avait pris en charge le bateau depuis 20 ans, prenait des précautions toutes particulières dans ses manutentions. Mais malgré cela, compte tenu de la souplesse intrinsèque des fonds et des reprises antérieures visibles, ... la réfection systématique du joint congé de quille s'imposait et lui était confiée.' Soulignant également l'absence de traces de maintenance du moteur par des professionnels relevée par l'expert judiciaire, pour en conclure que les intimés ne pouvaient ignorer l'état de dégradation avancée du moteur à propulsion pas plus qu'ils ne pouvaient ne pas connaître l'absence de remplacement depuis dix ans du gréement dormant, ils sollicitent donc la somme de 29820 euros au titre de leur préjudice de jouissance et la somme de 14 679,91 euros au titre des frais de stationnement conformément aux évaluations de M. [M].

M. [F] et Mme [G] ne répondent pas sur ce moyen sur la garantie des vices cachés mais sur la non conformité, qui n'est plus soutenue par les appelants, soulignant l'absence de toute réserve des acheteurs et du représentant de la société Marine Technic Services. Ils discutent par ailleurs les sommes demandées par les appelants. Il peut donc être considéré que les initmés ne contestent pas leur connaissance des vices affectant le navire, qu'ils ont imputés à plusieurs reprises à la vétusté du navire et dont ils n'ont cessé de rappeler le caractère apparent.

M. [M] a chiffré le préjudice de jouissance à la somme de 4 970 euros pour une année en retenant la perte d'une saison de navigation soit deux semaines en haute saison et deux semaines en moyenne saison après application d'un coefficient de vétusté sur un prix de location de 17 000 euros à l'année . Cette valeur locative n'est pas contestée par les intimés. Les consorts [K] ne réclament plus la perte économique relative à la location d'un studio subi par M. [O] [K] qui comptait résider sur le bateau de sorte que les arguments développés par M. [F] et Mme [G] sur ce point sont sans objet. Les appelants sollicitent donc la somme de 29 820 euros correspondant à une perte de jouissance sur six ans soit du 9 mars 2013 au 8 mars 2019. Toutefois compte tenu du décès de M. [P] [K] survenu le [Date décès 4] 2018, il conviendra d'allouer à Mme [K] venant aux droits de M. [P] [K] et M.[O] [K] tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'héritier de son père la somme de :

(4 970 x 4 ans) + (4970 x 11/12 ) = 24 435, 83 euros.

Le préjudice de jouissance de M. [O] [K] du 3 février 2018 au 8 mars 2019 sera indemnisé par l'allocation de la somme de 5 384,17 euros.

Les consorts [K] sollicitent par ailleurs, au titre des frais de stationnement du bateau, la somme de 5124,91 euros TTC pour la période du 9 ars 2013 au 8 mars 2014 et la somme de 9 555 euros TTC pour la période du 9 mars 2014 au 31 août 2017. Ils ne justifient toutefois que du paiement de la somme de 8 645 euros, étant précisé que dans son courrier en date du 22 novembre 2017, la société Marine Technic Services indique que les frais de stationnement ne sont plus honorés sans précision de date toutefois. M. [F] et Mme [G] ne seront donc condamnés qu'au paiement de cette somme au titre des frais de stationnement.

Sur la demande des intimés à être relevés et garanties par l'expert M [W] :

M. [F] et Mme [G] demandent à être relevés et garantis de toute condamnation prononcée à leur charge par M. [W] au motif d'une part que leur bonne foi ne saurait être remise en cause du simple fait qu'il est acquis et admis par les appelants eux mêmes qu'aucun vice n'était caché et d'autre part qu'ils ne sauraient être tenus des carences du mandataire professionnel des consorts [K] dans l'analyse faite des constats qu'il a effectués et rapportés.

Mais les intimés ne peuvent demander à être relevés et garantis des condamnations prononcées à leur encontre par l'expert M [W],dont l'erreur d'appréciation est sans incidence sur leur responsabilité et n'a préjudicié qu'aux acquéreurs, dès lors qu'ils sont tenus, en application de l'article 1645 du code civil, outre la restitution du prix, de tous les dommages-intérêts envers les acheteurs à raison de leur connaissance de l'existence des vices affectant le navire,. Ils seront donc déboutés de leur demande.

Sur les demandes accessoires

Le jugement dont appel étant infirmé dans ses dispositions principales, les dispositions concernant les dépens et frais irrépétibles le seront également.

M. [F] et Mme [G] succombant en leurs demandes seront condamnés aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Il serait enfin inéquitable de laisser à la charge des consorts [K] l'intégralité des frais exposés par eux à l'occasion de l'instance d'appel et non compris dans les dépens, en sorte qu'il leur sera alloué une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Aucune considération d'équité ou d'odre économique ne justifie par contre de faire droit à la demande de M. [W] au titre de l'article de l'article 700 du code de procédure civile du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Infirme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Quimper le 7 février 2017,

Statuant à nouveau,

Prononce la résolution de la vente du voilier modèle 'First 405" de marque Beneteau immatriculé sous le numéro 685680 intervenue le 4 mars 2013 entre MM. [P] et [O] [K] et M. [F] et Mme [G],

Condamne in solidum M. [F] et Mme [G] à payer à Mme [C] [K] en sa qualité d'héritière de M. [P] [K] et M. [O] [K] ès qualités et en son nom personnel la somme de 47 000 euros au titre de la restitution du prix de vente et à reprendre possession du bateau litigieux à leurs frais et en l'état en son stationnement actuel,

Condamne in solidum M. [F] et Mme [G] à payer à Mme [C] [K] en sa qualité d'héritière et M. [O] [K] ès qualités et en son nom personnel la somme de 24 435, 83 euros au titre du préjudice de jouissance subi jusqu'au décès de M. [P] [K],

Condamne in solidum M. [F] et Mme [G] à payer à M. [O] [K] la somme de

5 384,17 euros au titre de son préjudice de jouissance du 3 février 2018 au 9 mars 2019,

Condamne in solidum M. [F] et Mme [G] à payer à Mme [C] [K] en sa qualité d'héritière de M. [P] [K] et M. [O] [K] ès qualités et en son nom personnel la somme de 8 645 euros au titre des frais de stationnement du navire,

Condamne in solidum M. [F] et Mme [G] à payer à Mme [C] [K] et M. [O] [K] la somme de 3 000 euros en application de l'article de l'article 700 du code de procédure civile du code de procédure civile,

Déboute M. [F] et Mme [G] de leurs demandes dirigées contre M. [L] [W],

Déboute M. [L] [W] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute demande plus ample ou contraire,

Condamne in solidum M. [F] et Mme [G] aux entiers dépens de première instance et d'appel en ce compris les frais d'expertise.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 17/01446
Date de la décision : 04/09/2020

Références :

Cour d'appel de Rennes 1B, arrêt n°17/01446 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-09-04;17.01446 ?
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