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26/06/2020 | FRANCE | N°17/00318

France | France, Cour d'appel de Rennes, 2ème chambre, 26 juin 2020, 17/00318


2ème Chambre





ARRÊT N° 352



N° RG 17/00318

N° Portalis DBVL-V-B7B-NT6U













M. [K] [G] [D] [J]

Mme [P] [F] [Z] [D] [T] épouse [J]



C/



SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

SELARL MOYRAND-BALLY





















Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée





















Copi

e exécutoire délivrée



le :



à : Me BOURGES











RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 26 JUIN 2020





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre, rédacteur,

Monsieur Jean-François POTHIER, Conse...

2ème Chambre

ARRÊT N° 352

N° RG 17/00318

N° Portalis DBVL-V-B7B-NT6U

M. [K] [G] [D] [J]

Mme [P] [F] [Z] [D] [T] épouse [J]

C/

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

SELARL MOYRAND-BALLY

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me BOURGES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 26 JUIN 2020

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre, rédacteur,

Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,

Madame Marie-Odile GELOT-BARBIER, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Marlène ANGER,

ARRÊT :

Réputé contradictoire, prononcé publiquement le 26 Juin 2020 par mise à disposition au greffe

****

APPELANTS :

Monsieur [K] [G] [D] [J]

né le [Date naissance 4] 1952 à [Localité 9]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par Me Luc BOURGES de la SELARL LUC BOURGES, avocat au barreau de RENNES

Madame [P] [F] [Z] [D] [T] épouse [J]

née le [Date naissance 2] 1954 à [Localité 10]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Luc BOURGES de la SELARL LUC BOURGES, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉES :

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de SYGMA BANQUE

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représentée par Me Erwan LECLERCQ de la SCP LECLERCQ, CASTRES, avocat au barreau de RENNES

SELARL BALLY Pascal ès-qualité de mandataire liquidateur de la société NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES DE FRANCE

[Adresse 6]

[Localité 8]

Assignée par acte d'huissier en date du 4 avril 2017 délivré à personne morale, n'ayant pas constitué avocat

EXPOSÉ DU LITIGE

À la suite d'un démarchage à domicile, M. [J] a, selon bon de commande du 16 juillet 2012, commandé au Groupe solaire de France la fourniture et l'installation de panneaux photovoltaïques moyennant le prix de 34 000 euros TTC.

En vue de financer cette opération, la société Sygma Banque (la société Sygma) a, selon offre acceptée le même jour, consenti aux époux [J] un prêt de 34 000 euros au taux de 5,28 % l'an, remboursable en 168 mensualités de 300,93 euros après un différé d'amortissement de 11 mois.

Par jugements des 18 juin et 12 novembre 2014, le tribunal de commerce de Bobigny a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Nouvelle Régie des jonctions des énergies de France (la NRJEF), exerçant sous la dénomination commerciale 'Groupe solaire de France', puis a prononcé sa liquidation judiciaire.

Prétendant avoir dû se prévaloir de la déchéance du terme du prêt le 5 septembre 2014 en raison du non-paiement des échéances de remboursement depuis le 24 février 2014, la société Sygma a, par acte du 16 février 2016, fait assigner les époux [J] en paiement devant le tribunal d'instance de Vannes.

Prétendant de leur côté que l'installation présentait divers désordres et non-conformités à la commande constatés par un expert désigné par ordonnance de référé du 9 mai 2014 et ayant déposé son rapport le 22 novembre 2015, les époux [J] ont, par actes des 3, 4 et 8 mars 2016, fait assigner la société Sygma, la SCP Moyrand-Bally, ès-qualités de liquidateur de la NRJEF, et la société EISL European Insurances Services, présentée comme étant l'assureur de responsabilité de la société NRJEF, devant le tribunal d'instance de Vannes en résolution des contrats de vente et de prêt et en paiement de dommages-intérêts.

Les deux procédures ont été jointes.

La société BNP Paribas Personal Finance (la BNP) est intervenue volontairement à l'instance en déclarant venir aux droits de la société Sygma en vertu d'un traité de fusion du 1er septembre 2015.

La société Elite Insurance Company est également intervenue à la procédure en déclarant être l'assureur de la société NRJEF, dont la société EISL European Insurances Services n'était que le mandataire gestionnaire de la police.

Par protocole transactionnel du 23 septembre 2016, les époux [J] ont accepté le versement d'une indemnité d'assurance de 10 047,75 euros, en contrepartie de quoi ils se sont désistés de leur action exercée contre l'assureur.

Par jugement du 8 décembre 2016, le premier juge a :

prononcé la résolution du contrat de vente,

constaté la résolution de plein droit du contrat de crédit,

condamné la SCP Moyrand-Bally, ès-qualités de liquidateur de la NRJEF, à payer aux époux [J] 'par inscription au passif' les sommes de 476,40 euros et 1 000 euros à titre de dommages-intérêts et de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

débouté les époux [J] de leurs demandes indemnitaires supplémentaires,

condamné, avec exécution provisoire, les époux [J] à payer à la BNP la somme de 34 000 euros,

ordonné, avec exécution provisoire, à la BNP de faire procéder à leur radiation du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP), sous astreinte de 30 euros par jour de retard à compter du 30ème jour de la signification du jugement,

condamné, 'par fixation au passif' la NRJEF aux dépens, y compris ceux du référé et de l'expertise judiciaire.

Les époux [J] ont relevé appel de cette décision le 13 janvier 2017, pour demander à la cour de :

débouter la BNP de sa demande de restitution du capital emprunté,

condamner la BNP au paiement d'une somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts,

confirmer pour le surplus le jugement attaqué,

subsidiairement, prononcer l'annulation du contrat de vente et constater la nullité du contrat de crédit,

condamner in solidum la SCP Moyrand-Bally, ès-qualités de liquidateur de la NRJEF, et la BNP au paiement d'une indemnité de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, incluant ceux du référé et de l'expertise.

La BNP demande quant à elle à la cour de :

débouter les époux [J] de leur demande de résolution ou d'annulation des contrats de vente et de prêt,

condamner les époux [J] au paiement de la somme de 39 820,35 euros au titre des sommes dues en exécution du contrat de prêt,

à titre subsidiaire, en cas de résolution ou d'annulation des contrats de vente et de prêt, déclarer la demande tendant à voir le prêteur privé de la restitution du capital irrecevable comme nouvelle en cause d'appel,

à défaut, condamner les époux [J] à restituer le capital de 34 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir et capitalisation de ceux-ci par années,

en toute hypothèse, condamner les époux [J] au paiement d'une indemnité de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

la SCP Moyrand-Bally, ès-qualités de liquidateur de la NRJEF, n'a pas constitué avocat devant la cour.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées pour les époux [J] le 28 janvier 2020 et pour la BNP le 20 janvier 2020, l'ordonnance de clôture ayant été rendue le 27 février 2020.

En application de l'article 778 alinéa cinq du code de procédure civile, dont la mise en oeuvre a, vu les circonstances exceptionnelles résultant de la situation sanitaire du pays, été proposée aux avocats qui ont été avisés de la composition de la cour et de la date du délibéré, l'affaire a, sans opposition des parties, été mise en délibéré sans débats.

En raison de l'entrée en vigueur, postérieure à ces avis, de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale ouvrant aux parties un délai de quinze jours pour s'opposer à la procédure sans débat, il leur a été adressé un nouvel avis les informant qu'elles pouvaient solliciter dans ce délai la réouverture des débats et le renvoi de l'affaire, ce qu'elles n'ont pas fait.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Sur la résolution du contrat principal

Au soutien de leur demande en résolution du contrat principal, les époux [J] soutiennent que l'installation présenterait divers désordres et non-conformités à la commande constatés par un expert désigné par le juge des référés, mais ils ne produisent cependant pas le rapport qui aurait été déposé le 22 novembre 2015.

La BNP, qui ne le produit pas davantage mais qui, il est vrai, n'a pas la charge de la preuve des désordres et non-conformités allégués, en cite toutefois divers passages, desquels il ressort que 'de part son exposition, le site de production de la centrale photovoltaïque (...) est parfaitement viable du point de vue solaire, (que) le productible déclaré par le demandeur est conforme aux estimations, malgré les mises en défaut d'un onduleur, (que) l'installation doit donc être maintenue, (que) le maintien à terme de l'installation, après mise en sécurité et mise en conformité, est possible (quand bien même) la liaison électrique entre les panneaux en toiture et les onduleurs est particulièrement dangereuse (et) doit être supprimée et reprise entièrement dans les meilleurs délais, (que) le défaut de production notifié dans les réserves du demandeur n'est pas avéré, (que) malgré la mise en défaut de l'onduleur, la production de la première année est de 5892 KWh et la deuxième année de 6308 KWh, (et que) la puissance de la centrale réellement installée et de 6KWC, supérieure à celle indiquée au bon de commande qui est de 5,92 KWC'.

Il est donc impossible de déduire de la simple évocation de ce rapport d'expertise non produit l'existence de désordres et non-conformités de nature à caractériser des manquements du fournisseur à ses obligations de délivrance et de pose exempte de vice, d'une gravité suffisante pour justifier la résolution du contrat, alors que les acquéreurs ont pu régulariser un contrat de rachat de l'électricité produite en date du 20 février 2013, ce qui témoigne de ce que le raccordement au réseau avait été effectué et que l'installation, terminée, produisait de l'électricité dans des conditions conformes, selon ce qui est rapporté du rapport d'expertise, à ce qui était attendu.

La seule circonstance, relevée par le premier juge, que 'l'installation n'a pas donné satisfaction aux clients' ne suffit pas, en l'absence de production du rapport d'expertise, à justifier une résolution judiciaire, pas davantage que la transaction conclue entre les époux [J] et l'assureur de la société NRJEF, laquelle atteste certes de l'existence de désordres mais non de ce que ceux-ci seraient d'une gravité telle qu'ils ne pouvaient être réparés par une entreprise de reprise en sous-oeuvre grâce à l'indemnité d'assurance.

Enfin, la fourniture, pour une capacité de production égale, de 20 panneaux de puissance supérieure, au lieu des 32 panneaux initialement prévus, constituait un défaut de conformité apparent expressément accepté par la réception sans réserve exprimée dans le certificat de livraison du 4 août 2012.

Il convient donc de réformer le jugement attaqué et de débouter les époux [J] de leur demande de résolution du contrat principal.

Sur la nullité du contrat principal

Au soutien de leur demande subsidiaire en annulation du contrat principal, les époux [J] soutiennent que le bon de commande du 16 juillet 2012 méconnaîtrait le formalisme applicable en matière de démarchage à domicile.

Personnes physiques n'ayant pas la qualité de commerçant, ils ont été démarchés à leur domicile personnel en vue de faire réaliser une installation photovoltaïque sur la toiture de celui-ci, et il sera d'autre part observé que, ni le bon de commande, ni l'offre de crédit affecté, ni aucun autre document contractuel, ne fait mention que cette installation avait une destination professionnelle.

Contrairement à ce que prétend la BNP, il s'en évince donc que, même si l'électricité produite devait être revendue à EDF, cette circonstance ne faisait pas perdre aux époux [J] leur qualité de consommateurs et qu'ils devaient donc bénéficier des règles protectrices du code de la consommation relatives au démarchage à domicile.

À cet égard, aux termes de l'article L.121-23 du code de la consommation dans sa rédaction en vigueur lors de la conclusion du contrat litigieux, les ventes et fournitures de services conclues à l'occasion d'un démarchage au domicile d'une personne physique doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire est remis au client et notamment comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

la désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés,

les conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d'exécution de la prestation de services,

le prix global à payer, les modalités de paiement et, en cas de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur ce type de vente,

la faculté de renonciation ouverte au client ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26.

Or, ainsi que le relèvent à juste titre les époux [J], il ressort de l'exemplaire du bon de commande laissé en leur possession que la marque des panneaux photovoltaïques n'est pas mentionnée.

Pourtant, s'agissant d'une installation à haut niveau de développement technologique destinée à produire de l'énergie, la marque, dont la fonction est de garantir l'origine d'un produit commercialisé, est une caractéristique essentielle pour le consommateur démarché qui doit ainsi pouvoir identifier le fabricant garant de la qualité, de la pérennité et de la sécurité de ses produits, et qui doit aussi pouvoir procéder utilement à des comparaisons de prix tenant compte de la technologie mise en 'uvre durant le délai de rétractation qui lui est ouvert par la loi.

En outre, aucun délai de livraison et d'exécution des travaux d'installation n'est mentionné.

Il convient donc de prononcer l'annulation du contrat principal.

Sur la nullité du contrat de prêt

Aux termes des dispositions de l'article L. 311-32 devenu L. 312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

Il n'est pas contesté que le crédit consenti par la société Sygma est un crédit accessoire à une vente ou à une prestation de services.

En raison de l'interdépendance des deux contrats, l'annulation du contrat principal conclu avec la société NRJEF emporte donc annulation de plein droit du contrat accessoire de crédit conclu entre les époux [J] et la société Sygma.

La nullité du contrat de prêt a pour conséquence de priver de fondement la demande de la société Sygma de condamner les époux [J] au paiement des sommes dues en exécution de celui-ci.

Cette demande sera donc rejetée.

La nullité du prêt a aussi pour conséquence de remettre les parties dans leur situation antérieure, de sorte qu'elle doit, sauf faute du prêteur, entraîner la restitution des prestations reçues de part et d'autre.

À cet égard, la société Sygma sollicite subsidiairement la confirmation du jugement attaqué en ce qu'il a condamné les époux [J] au remboursement du capital emprunté de 34 000 euros, en faisant d'abord valoir que la demande de dispense de remboursement du capital, formée pour la première fois devant la cour, serait irrecevable comme nouvelle.

Cependant, il résulte des articles 563 du 564 du code de procédure civile que les parties peuvent toujours présenter en cause d'appel des moyens nouveaux ainsi que des prétentions nouvelles ayant pour objet de faire écarter une prétention adverse.

La BNP soutient d'autre part qu'en signant le certificat de livraison attestant de l'acceptation sans réserve de la livraison de l'installation, M. [J] lui a donné l'ordre de débloquer les fonds, et que, l'attestation apparaissant complète, elle n'avait pas à procéder à de plus amples vérifications, notamment relativement à la régularité du bon de commande, avant de verser les fonds entre les mains du fournisseur.

Au soutien de leur appel, les époux [J] demandent quant à eux à être dispensés du remboursement du capital emprunté, en faisant grief au prêteur de s'être dessaisi des fonds à la seule vue d'un certificat de livraison qui ne permettait pas, à lui seul, de s'assurer de l'exécution complète du contrat principal, et sans vérifier la régularité de celui-ci.

Il ressort pourtant du certificat de livraison, dont les termes sont dépourvus d'équivoque, que M. [J] a attesté avoir accepté sans réserve la livraison de l'installation et constaté 'expressément que tous les travaux et prestations de services qui devaient être effectués ont été pleinement réalisés'.

Dès lors, la société Sygma, qui n'avait pas à assister les emprunteurs lors de l'exécution du contrat principal, ni à vérifier le bon fonctionnement d'une installation exempte de vice ou la conformité du matériel livré aux stipulations contractuelles, ne peut se voir reprocher de s'être dessaisie des fonds sans tenir compte de désordres qui se sont de toute évidence manifestés postérieurement, ou d'un défaut de conformité apparent d'une installation acceptée par le maître de l'ouvrage.

En revanche, il est de principe que le prêteur commet une faute excluant le remboursement du capital emprunté lorsqu'il libère la totalité des fonds, alors qu'à la simple lecture du contrat de vente il aurait dû constater que sa validité était douteuse au regard des dispositions protectrices du code de la consommation relatives au démarchage à domicile.

Or, il a été précédemment relevé que le bon de commande conclu avec la société NRJEF, par l'intermédiaire de laquelle la société Sygma faisait présenter ses offres de crédit, comportait des irrégularités formelles apparentes qui auraient dû conduire le prêteur, professionnel des opérations de crédit affecté, à ne pas se libérer des fonds entre les mains du fournisseur avant d'avoir à tout le moins vérifié auprès des époux [J] qu'ils entendaient confirmer l'acte irrégulier.

Le prêteur n'avait certes pas à assister les emprunteurs lors de la conclusion du contrat principal, mais il lui appartenait néanmoins de relever les anomalies apparentes du bon de commande avant de se dessaisir du capital prêté.

Il en résulte qu'en versant les fonds entre les mains du fournisseur, sans procéder à des vérifications complémentaires sur la régularité formelle du contrat principal, la société Sygma a commis une faute.

Il sera cependant rappelé que la non-conformité contractuelle relative à des panneaux en nombre inférieur à la commande mais plus puissants était apparente, que l'installation a été acceptée sans réserve après avoir été entièrement réalisée, raccordée au réseau et mise en service pour produire et revendre de l'électricité conformément à ce qui était attendu, quand bien même certaines de ces prestations auraient été réalisées postérieurement au déblocage des fonds empruntés.

En outre, si elle était affectée de désordres, il sera observé que les époux [J] ont obtenu le versement d'une indemnité de 10 047,75 euros de la part de l'assureur de la société NRJEF, sans justifier, ni même alléguer clairement, avoir fait déposer l'installation.

Il en résulte que la faute du prêteur ne leur a causé aucun préjudice avéré, de sorte qu'il convient de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il les a condamnés au remboursement du capital emprunté de 34 000 euros, sauf toutefois à préciser qu'il convient d'en déduire les échéances de remboursement réglées au cours de l'exécution du prêt, qui doivent être restituées de plein droit en conséquence de l'annulation du contrat.

Sur les demandes accessoires

C'est à juste titre que le premier juge a réparé le préjudice moral causé par la société NRJEF aux époux [J] par l'allocation d'une somme de 1 000 euros.

En revanche, l'indemnité complémentaire de 476,40 euros n'est justifiée par aucune pièce et sera par conséquent rejetée en application de l'article 472 du code de procédure civile.

C'est également à juste titre que le premier juge a ordonné à la BNP d'accomplir les diligences nécessaires en vue de la radiation des époux [J] du FICP, puisque l'annulation du contrat de prêt a pour effet d'effacer rétroactivement l'existence des incidents de paiement et que cette inscription est, des lors, dénuée de base légale.

En revanche, il n'y a pas matière en l'état d'assortir cette condamnation d'une astreinte, de sorte que ce chef du jugement attaqué sera réformé.

La BNP sera par ailleurs autorisée à capitaliser les intérêts courant sur sa créance de restitution du capital emprunté par années entières.

Le sort des dépens de première instance, en ce inclus les frais du référé et de l'expertise, a été exactement tranché par le premier juge.

Ayant formé appel principal pour finalement succomber en l'essentiel de leurs prétentions devant la cour, les époux [J] supporteront les dépens d'appel.

Il serait enfin inéquitable de laisser à la charge de la BNP l'intégralité des frais exposés par elle à l'occasion de l'instance d'appel et non compris dans les dépens, en sorte qu'il lui sera alloué une somme de 1 300 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Infirme le jugement rendu le 8 décembre 2016 par le tribunal d'instance de Vannes en ce qu'il a :

prononcé la résolution des contrats de vente et de prêt,

condamné par fixation au passif la société Nouvelle Régie des jonctions des énergies de France au paiement de la somme de 476,40 euros,

et assorti d'une astreinte la condamnation de la société BNP Paribas Personal Finance à faire radier les époux [J] du FICP ;

Prononce l'annulation des contrats de vente et de prêt ;

Dit n'y avoir lieu d'assortir d'une astreinte la condamnation de la société BNP Paribas Personal Finance à accomplir les diligences nécessaires en vue de la radiation des époux [J] du FICP ;

Rejette la demande de fixation de la somme de 476,40 euros au passif de la liquidation judiciaire de la société Nouvelle Régie des jonctions des énergies de France  ;

Confirme le jugement attaqué en ses autres dispositions, sauf à préciser que la condamnation des époux [J] à restituer le capital emprunté de 34 000 euros s'entend sous déduction des sommes réglées par les époux [J] au cours de l'exécution du contrat de prêt ;

Y additant, dit que cette condamnation à restituer le capital emprunté de 34 000 euros produira intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et autorise la société BNP Paribas Personal Finance à les capitaliser par années entières ;

Condamne les époux [J] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance une somme de 1 300 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne les époux [J] aux dépens d'appel ;

Rejette toutes autres demandes contraires ou plus amples.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 17/00318
Date de la décision : 26/06/2020

Références :

Cour d'appel de Rennes 1B, arrêt n°17/00318 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-06-26;17.00318 ?
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