Chambre del'Expropriation
ARRÊT N° 4
N° RG 19/01361 - N° Portalis DBVL-V-B7D-PSKF
M. F... K...
Mme I... K...
C/
Commune COMMUNE D'ESSÉ
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me LAHALLE
Me GUILLON-COUDRAY
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 17 MARS 2020
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de Chambre,
Assesseur : Madame Andrée GEORGEAULT, Conseillère,
Assesseur : Madame Florence BOURDON, Conseillère,
GREFFIER :
Madame Virginie SERVOUZE, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 17 Janvier 2020
devant Madame Andrée GEORGEAULT, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial
EN PRÉSENCE DE :
Madame W... V..., le Commissaire du Gouvernement d'Ille-et-Vilaine (35) représentant la D.R.F.I.P (35 ET 22) EVALUATION DOMANIALE - EXPROPRIATION
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 17 Mars 2020 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTS :
Monsieur F... K...
[...]
[...]
Représenté par Me Vincent LAHALLE de la SELARL LEXCAP, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
Madame I... K...
[...]
[...]
Représentée par Me Vincent LAHALLE de la SELARL LEXCAP, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
INTIMÉE :
COMMUNE D'ESSÉ
[...]
[...]
[...]
Représentée par Me Sophie GUILLON-COUDRAY de la SELARL CABINET COUDRAY, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
******
Par arrêté du 22 mars 2016, le préfet de la région Bretagne, préfet d'Ille-et-Vilaine, a déclaré d'utilité publique la création d'une zone d'aménagement concertée dite '[...]' sur la commune de Essé (Ille-et-Vilaine), afin d'offrir des logements d'habitation et de construire un bâtiment public.
Les parcelles d'une surface de 32 934 m² cadastrées [...] , [...] et [...] appartenant à M. F... K... et Mme I... K..., louées à M. D... K..., agriculteur, sont dans l'emprise de cette zone d'aménagement concerté.
Faute d'accord sur le montant des indemnités offertes (notamment 2,30 Euros le m² de terres libres), la commune d'Essé a saisi le juge de l'expropriation.
Par jugement du 14 janvier 2019, le juge de l'expropriation près le tribunal de grande instance de Rennes a :
- rejeté la demande de sursis à statuer des expropriés, comme étant mal fondée ;
- fixé à la somme de :
- soixante quatre mille cinq cent cinquante et un euros (64 551), le montant de l'indemnité principale due par la commune d'Essé à MmeI... et M. F... K...,
- sept mille quatre cent cinquante-cinq euros et dix centimes (7455,10), le montant de l'indernnité de remploi,
- mille deux cent cinquante euros (1 250), le montant de l'indemnité pour perte d'arbres,
- laissé les dépens à la charge des dépens à la commune d'Essé,
- dit que chacune des parties gardera la charge des frais irrépétibles par elle exposés,
- rejeté toute autre demande, plus ample ou contraire.
Par déclaration du 27 janvier 2019, M. F... K... et Mme I... K... ont interjeté appel de cette décision.
Dans leurs conclusions du 23 mai 2019, ils demandent à la cour de :
- annuler le jugement,
- à titre principal, surseoir à statuer jusqu'à ce que l'administration fiscale fournisse aux époux K... de manière complète et loyale les informations prévues à l'article L. 322-10 du code de l'expropriation et nécessaires à leurs droits,
- subsidiairement, fixer à 326 835, 80 Euros les indemnités d'expropriation leur revenant,
- condamner la commune de Essé à leur verser la somme de 5 000 Euros au titre de l'indemnité pour frais irrépétibles,
- condamner la commune de Essé aux dépens et accorder le bénéfice de l'article 699 du Code de procédure civile à la Selarl Lexcap.
Par conclusions du 5 août 2019, la commune de Essé demande à la cour de :
- confirmer le jugement,
- condamner les époux K... à lui verser la somme de 2 500 Euros au titre de l'indemnité pour frais irrépétibles et à supporter les dépens d'appel.
Par conclusions du 18 juin 2019, le commissaire du gouvernement a demandé à la cour de :
- rejeter la demande d'annulation du jugement,
- principalement, confirmer le jugement en ce qui concerne la fixation des indemnités,
- subsidiairement, fixer le montant de l'indemnité principale sur la base du prix de 2, 20 Euros le m², pratiquer un abattement de 10 % pour occupation, confirmer le jugement sur les autres points.
MOTIFS :
Sur la nullité du jugement :
Les époux K... font valoir que le juge n'a pas, en application de l'article16 du Code de procédure civile, fait respecter le principe de l'égalité des armes reconnu par l'article 6 de la déclaration de sauvegarde des droits de l'Homme. Ils exposent qu'ils n'ont pu obtenir l'application effective de l'article L. 322-10 du Code de l'expropriation et de l'article L. 135 B du Livre des procédures fiscales : ils indiquent n'avoir pu obtenir auprès de l'administration fiscale que des renseignements très partiels, voire erronés, de sorte que le principe de l'égalité des armes n'est pas respecté et que le jugement doit être annulé. Il conviendra, par l'effet dévolutif, de statuer au fond sur l'affaire.
La commune d'Essé expose que l'administration fiscale a répondu aux deux demandes -peu précises- des époux K..., qui, selon elle, se méprennent sur le sens à donner aux termes de l'article R. 311-12 du Code de l'expropriation.
Le commissaire du gouvernement expose que les demandes étaient imprécises, que la demande de renseignements relative 'aux terrains à bâtir et non classés comme étant à bâtir' ne correspond à aucune des catégories permettant de satisfaire une réponse par l'application 'patrim'. Il ajoute que les quatre termes de comparaison (TC) qu'il a fournis concernent des parcelles à usage agricole et ne correspondent pas aux attentes de la parties expropriée.
Il apparaît que les propriétaires expropriés peuvent conformément aux termes de l'article L. 322-10 du code de l'expropriation qui renvoie aux termes de l'article L. 135 B du Livre des procédures fiscales dans sa version en vigueur au moment des faits, demander à l'administration fisacle de leur transmettre 'les éléments d'information qu'elle détient au sujet des valeurs foncières déclarées à l'occasion des mutations intervenues dans les cinq dernières années et qui sont nécessaires à la fixation des indemnités d'expropriation'. Les époux K... ont ainsi demandé par courrier du 29septembre 2017 les éléments d'information sur l'évaluation des parcelles expropriées ('terrains à bâtir et non classés comme étant à bâtir de toutes superficies') et réitéré leur demande par courrier du 13 septembre 2018. L'administration a répondu par courrier du 19 septembre 2018, joignant 'deux tableaux de synthèse reflètant les opérations de cession à titre onéreux de terrains agricoles connus, de nature semblable ou présentant des caractéristiques proches de biens objets de la procédure de préemption par la ville de Essé intervenues sur une période de 5 ans antérieure audit fait générateur', exposant encore que les termes de comparaison portent uniquement sur des terrains de nature de terre ... dont les surfaces ont été volontairement bornées entre 30 000 et 40 000 m² et recencées en 2013, 2014, 2015, 2016 et 2017, aucune mutation n'étant intervenue en 2018.
Compte tenu de la demande que les époux K... avaient faite qui s'avèrait dénuée de précision, l'administration a répondu en limitant le champ de ses investigations aux terrains bénéficiant d'une superficie comparable à celle des époux K... et situés dans un rayon géographique de 5 km et sur une période de cinq ans ; la production de nouveaux termes de comparaison par le commissaire du gouvernement dont ils ont pu discuter ne permet pas de rapporter la preuve que l'administration n'a pas fourni les éléments d'information adaptés à la demande telle qu'elle était faite par les époux K....
Il apparaît en conséquence que les époux K... ont disposé des éléments d'information au soutien de leur défense et qu'ils ne peuvent à bon droit soutenir que l'égalité des armes pour les parties au procès n'a pas été respectée ; la demande d'annulation du jugement sera écartée, non fondée.
Sur le sursis à statuer :
Les époux K... demandent le sursis à statuer en raison des informations incomplètes qui leur ont été fournies, en raison de l'impossibilité dans laquelle ils se trouvent de solliciter et obtenir de nombreux TC grâce au service 'demande de valeur foncière' ; de la sorte, ils demandent un sursis à statuer jusqu'à ce qu'il soit répondu loyalement à leur demande d'information faite en application de l'article L. 322-10 du Code de l'expropriation.
La commune de Essé conteste la demande de sursis.
La cour remarque que l'administration fiscale a fourni des informations qui répondent aux demandes formulées par les époux K... et remarque que, comme l'a précisé la commune, les époux K... ont fait état de TC qu'ils ont trouvés grace au service 'demande de valeur foncière'.
Par conséquent, la demande de sursis à statuer sera rejetée.
Sur le fond :
Sur l'indemnité due pour l'expropriation des parcelles [...] , [...] et [...] :
Sur les dates :
- Date de référence : 21 février 2013
Elle n'est pas discutée ; en application des dispositions des articles L. 213-6 et L. 213-4 du Code de l'urbanisme, et compte tenu de ce que les biens expropriés sont soumis au droit de préemption institué par délibération du 28janvier 2013, c'est la date à laquelle est devenu opposable aux tiers le plus récent des actes rendant public, approuvant, révisant ou modifiant le plan d'occupation des sols ou approuvant, modifiant ou révisant le plan local d'urbanisme et délimitant la zone dans laquelle est situé le bien.
- Date de consistance des biens
Il s'agit de la date de l'ordonnance d'expropriation du 13 novembre 2017.
- Date d'évaluation :
Il s'agit de la date du jugement du 14 janvier 2019.
Sur la description des parcelles :
Elles forment un ensemble homogène, d'une superficie de 32 934 m², en nature de terres agricole, sans contruction, avec quelques arbres (trois chènes, un cerisier et douze ragoles). Elles sont données à bail rural au fils des expropriés, M. D... K.... Les parcelles [...] et [...] sont bordées par la [...] et un groupe scolaire est intégré dans le tènement en bordure de voie.
Sur la qualification juridique des terres expropriées :
Les époux K... exposent pour les parcelles [...] et [...] : ces parcelles sont classées en zone 2AU au PLU et ne sont pas en 'secteur constructible' au sens de l'article L. 322-3 du Code de l'expropriation. Mais selon les époux K..., elles se trouvent en 'situation privilégiée', en raison de leur classement, de leur proximité immédiate du centre-bourg et des réseaux publics.
Ils exposent pour la parcelle [...] : par décision du 17décembre2012, le conseil municipal a déclassé la parcelle qui était en zone constructible 1 Nae en zone 2AU, de sorte que le bien est désormais en zone inconstructible. La commune savait parfaitement quels étaient les projets des époux K..., les avait rencontrés à plusieurs reprises sans jamais s'entendre sur le prix, et a finalement pris le parti de déclasser cette seule parcelle. L'intention dolosive de l'expropriante est démontrée, qui ne souhaitait que 'maitriser les coûts' de la réalisation de son projet. Aussi, le zonage à retenir est N 1AE, qui correspond à un classement constructible.
Les époux K... exposent que le critère matériel précisé par l'article L. 322-3 du Code de l'expropriation est rempli pour la parcelle [...] : desserte par un réseau viaire ([...] au Nord), dimensionnement des réseaux pour la parcelle [...] ne devant pas être apprécié à l'échelle globale alors que le document d'urbanisme (règlement zone 1 Nae) n'impose pas une opération d'ensemble, le réseau électrique ayant la capacité suffisante, le réseau d'assainissement également. Les époux K... demandent que la parcelle [...] soit qualifiée de 'terrain à bâtir'.
La commune d'Essé expose que les trois parcelles sont en zone 2AU du PLU, donc en zone non constructible, et que la valeur vénale peut tenir compte de la situation privilégiée de ces parcelles.
Pour la parcelle [...] , elle rappelle la définition de l' 'intention dolosive', lorsque le classement de la parcelle procède non de considération d'intérêt général mais de la volonté délibérée de léser le propriétaire exproprié, expose que la modification a été faite dans le cadre de la révision générale du document d'urbanisme, dans le cadre d'une modification plus étendue visant à instituer un zonage AU homogène sur trois secteurs d'extension urbaine, ce qui a justifié un zonage plus favorable pour certaines parcelles ([...] et [...], [...] de Nca en 2AU) et moins favorable pour certaines autres ([...], [...] de 1nAe en 2AU). Elle ajoute que le critère matériel n'est pas acquis pour la parcelle [...] , que ce soit la voirie, le réseau d'électricité basse tension, le réseau d'eau potable, le réseau d'assainissement collectif.
Le commissaire du gouvernement soutient que les trois parcelles sont en zone 2AU et que rien ne permet de soutenir que la modification du PLU invoquée par les expropriés relève d'une intention dolosive de la commune.
Sur la qualification des parcelles [...] et [...] :
La qualification de terres agricoles n'est pas discutée.
Sur la qualification de la parcelle [...] :
L'historique du zonage du tènement explique la démarche de la commune : originellement, les parcelles [...], [...], [...] et [...] formaient une parcelle unique [...] qui, en 2001, disposait de trois zonages : 1NAe, 2NAe et Nca. La parcelle [...] en zone 1 NAe a été acquise par la commune au prix de 1, 50 le m². Les autres parcelles sont restées la propriété des épouxK....
Dans le cadre de la révision du POS et en vue d'un aménagement cohérent, les diverses zones ont été uniformisées ; la zone 1 Nae n'apportait pas de garantie suffisante pour la rationnalisation de l'urbanisme, et selon la présentation du PLU, l'objectif était la protection stricte de l'urbanisation ultérieure, dans le cadre d'une opération d'ensemble, ce que permettait le zonage uniforme en 2 AUe. La cour constate que la parcelle [...] n'est pas la seule concernée par le déclassement que les époux K... dénoncent, que le classement en zone 2 AUe concerne tous les secteurs de la commune, que par ailleurs, les parcelles [...] et [...] bénéficient à la suite de ce nouveau zonage d'un classement plus favorable, ce que les époux K... ne critiquent pas.
Il apparaît ainsi que c'est en raison de considérations d'ordre général que le classement en zone 2 Aue de la parcelle [...] a été opéré, et que la volonté délibérée de la commune de léser les époux K... n'est pas établie.
Par conséquent, la parcelle [...] se trouve en zone non constructible et il n'y a pas lieu d'examiner les critères matériels utiles à la qualification en terrain à bâtir de cette parcelle, dès lors que le critère juridique précisé à l'article L. 322-3 du Code de l'expropriation fait défaut.
Sur la situation privilégiée des parcelles :
Il apparaît que les trois parcelles sont homogènes ; la parcelle [...] est particulièrement bien située, bordée par la route, à grande proximité du centre-ville, la parcelle [...] borde la voie publique. Les trois parcelles disposent de réseaux divers proches et à proximité du centre-ville. Il peut être reconnu une situation privilégiée pour les parcelles [...] et [...] et hautement privilégiée pour la parcelle [...] .
Sur l'évaluation à retenir pour les parcelles [...] , [...] et [...] :
Les parties produisent divers termes de comparaison (TC) :
TC 1 : Vente SAFER / commune de Essé du 4 juillet 2013 : ZY 31
parcelle d'une superficie de 5 396 m², classée en zone A du PLU (inconstructible) soit 0, 45 Euro le m²
TC 2 : jugement Essé-P... du 14 janvier 2005 : ZD 91
parcelle d'une superficie de 46 743 m², en zones 2NAe et 1 NAI au prix de 0, 90 euro le m²
TC 3 : Vente K...-commune de Essé du 19 avril 2007 : [...]
parcelle de 2 000 m² en zone 1NAe du POS au prix de 1, 50 Euro le m².
TC 4 : vente Q.../ commune de Essé du 4 août 2017 : [...]
parcelle [...] d'une superficie de 15 636 m² classée en 2AU du PLU au prix de 1, 96 Euro le m² en valeur occupée.
TC 5 : vente O... P...-Y... P... de parcelle [...] du 9décembre 2014 :
parcelle d'une superficie de 17 770 m², classé en zone A au prix de 0, 38 Euro le m²
TC 6 : vente N...-Z... de la parcelle [...] du 14 novembre 2018 :
superficie de 2 986 m² classé en zone A, au prix de 0, 70 Euro le m².
TC 7 : vente de la parcelle [...] du 20 avril 2017 :
parcelle d'une superficie de 4 460 m² classée en zone A au prix de 3,13Euros le m². Il s'agit d'un endroit clos sur lequel est édifié un abri pour animaux, équipé en eau, en électricité.
Les époux K... estiment que le prix de 4 Euros le m² doit être retenu, la commune propose le prix de 1, 96 Euros le m², de même que le commissaire du Gouvernement.
Les termes de comparaison 5 et 6 présentés par les époux K... comportaient une erreur dans la valeur qu'ils énonçaient qui a été rectifiée par le commissaire du gouvernement. Ces TC ne seront pas repris. Le TC 7 concerne un bien très différent, clos, avec un abri pour animaux, eau et un poteau électrique, il ne peut être utilisé utilement.
Un compromis avait été signé le 16 mai 2012 entre les époux K... et la société Acanthe Bretagne, qui devait acquérir les parcelles [...] , [...] et [...] pour le prix de 6 Euros le m². La vente n'a en définitive pas eu lieu. Par conséquent, le prix retenu ne peut être considéré pertinent. Enfin, la vente intervenue entre Mme R... et M. E... le 12 février 2016 concerne des parcelles situées sur la commune du Theil de Bretagne et ne peut être alors considérée comme pertinente.
Le TC 1 concerne une terre en zone agricole très excentrée, non privilégiée et ne sera pas retenu pour ces raisons. Le TC 2 concerne une parcelle à usage agricole certes dans une zone à urbanisation future, mais la mutation (2005) est ancienne, ce qui ne permet pas de comparaison pertinente. Le TC 3 concerne la vente de la parcelle [...] , propriété K... à la commune en 2007 en zone 1 NAe qui jouxte les parcelles [...] et [...] en zone 1AUe, le TC 4 concerne la vente d'une parcelle contigüe de celles des époux K.... En définitive, seuls les TC n°3 et 4, bien que relatifs à des cessions de surfaces plus petites et le premier un peu ancien sont susceptibles de donner quelques indications pertinentes. La base de prix devant être considérée sera celle du TC 4, soit 1, 96 Euros le m².
Toutefois, à la différence de la parcelle [...] , les parcelles des époux K... sont encore plus proches du centre-ville et sont plus homogènes. Leur situation telle qu'elle a été précisée plus haut conduira la cour à fixer le prix du m² pour la parcelle [...] à 3 Euros, et celui du m² des parcelles [...] et [...] à 2, 20 Euros.
Soit la parcelle [...] (7 444 m² X 3 Euros) en situation hautement privilégiée = 22 332 Euros
Soit les parcelles [...] et [...] ([...] m² [...] m² X2,20Euros) en situation privilégiée = 56 078 Euros
En tout : 78 410 Euros
Sur l'abattement :
Il apparaît que ces parcelles étaient louées au fils des époux K... selon un bail rural. Cependant, si la commune n'en fait pas état dans ses écritures, les époux K... invoquent un abattement de 10 %, qui est repris par le commissaire du gouvernement. L'abattement pour occupation de 10 % s'impose alors (7 841 Euros).
L'indemnité due s'élève alors à 70 569 Euros (78 410 - 7 841).
Sur l'indemnité de remploi :
Cette indemnité est calculée ainsi :
20 % sur 5 000 :1 000
10 % sur 10 000 : 1 500
10 % sur (70 569 - 15 000) soit : 5 556, 90 Euros
SOIT : 5 806, 90 Euros.
Sur l'indemnité définitive pour l'expropriation des parcelles :
Elle s'élève à la somme de 76 375, 90 (70 569 + 5 806, 90).
Sur les indemnités accessoires :
Perte de fermages :
Les époux K... exposent avoir loué plusieurs parcelles, notamment la parcelle [...] (divisée ensuite en [...] , [...], [...] et [...]) à leur fils D... par bail rural du 21 décembre 2011. Ils précisent que le fermage s'élevait à 2925 Euros pour l'année 2017 pour une superficie globale de 150611 m², soit pour les parcelles expropriées à 639, 65 Euros. Ils ajoutent que la perte doit être appréciée au regard du temps nécessaire pour retrouver d'autres terres agricoles disponibles sur la commune, soit quatre années. Par conséquent, l'indemnité doit être fixée à la somme de 2 558, 60 Euros.
La commune estime que la pièce 44 versée par les appelants ne justifie pas le montant du fermage, que les indemnités de dépossession et de remploi réparent la perte invoquée. Enfin, elle estime que la durée de quatre années est surévaluée et injustifiée.
Le commissaire du gouvernement estime que le taux de rentabilité annuelle est si faible que la demande n'est pas justifiée.
En l'espèce, le bail rural est produit aux débats. Il porte sur plusieurs parcelles appartenant aux époux K... (dont les parcelles [...] , [...] et [...]) pour une surface globale de 150 611 m². En 2017, le montant du fermage s'était élevé à 2 935, 20 Euros pour la location de toutes ces terres, soit pour les parcelles [...] , [...] et [...], à 639, 65 Euros.
Rien ne justifie la durée pendant laquelle aucun loyer ne sera perçu.
Par conséquent, une indemnité fixée à 639, 65 Euros sera allouée aux époux K....
Perte d'arbres : elle n'est pas discutée (1 250Euros).
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement, par mise à disposition au greffe,
Infirmant le jugement sur le quantum de l'indemnité totale ;
Condamne la commune de Essé à payer à M. et Mme K... la somme globale de 78 265, 55 Euros ;
Confirme le surplus du jugement ;
Condamne la commune de Essé à payer à M. et Mme K... la somme de 1 000 Euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles et à supporter les dépens d'appel ;
Accorde à la société Lexcap le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Le Greffier, La Présidente,