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04/06/2019 | FRANCE | N°17/05402

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 04 juin 2019, 17/05402


1ère Chambre





ARRÊT N°258/2019



N° RG 17/05402 - N° Portalis DBVL-V-B7B-OD4Y













M. [Y] [A]



C/



Mme [G] [A]

















Copie exécutoire délivrée



le :



à :











RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 04 JUIN 2019





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÃ

‰BATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame [B] COCCHIELLO, Présidente de Chambre,

Assesseur : Madame Brigitte ANDRÉ, Conseillère, entendue en son rapport

Assesseur : Madame Christine GROS, Conseillère,



GREFFIER :



Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé







DÉBATS :



A l'a...

1ère Chambre

ARRÊT N°258/2019

N° RG 17/05402 - N° Portalis DBVL-V-B7B-OD4Y

M. [Y] [A]

C/

Mme [G] [A]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 04 JUIN 2019

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame [B] COCCHIELLO, Présidente de Chambre,

Assesseur : Madame Brigitte ANDRÉ, Conseillère, entendue en son rapport

Assesseur : Madame Christine GROS, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 02 Avril 2019

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 04 Juin 2019 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANT :

Monsieur [Y] [A]

né le [Date naissance 1] 1954 à QUIMPER

[Adresse 1]

[Adresse 2]

Représenté par Me Christophe LHERMITTE de la SCP GAUTIER/LHERMITTE, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représenté par la SELARL LAUNAY-MASSE-GOAOC, Plaidant, avocat au barreau de QUIMPER

INTIMÉE :

Madame [G] [A]

née le [Date naissance 2] 1956 à QUIMPER

[Adresse 3]

[Adresse 4]

Représentée par Me Myriam BATTET-TANNIOU, avocat au barreau de BREST

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte authentique des 22, 23 et 19 mai 2012, Mme [G] [H], née le [Date naissance 3] 1923, veuve de [N] [A] décédé en1979, a donné à sa fille, [G] [A], la nue-propriété d'une maison d'habitation dépendant de la communauté ayant existé avec son époux, sise à [Adresse 5], cadastrée section [Cadastre 1] et [Cadastre 2], d'une contenance de 32 ares et 43 centiares. La valeur en pleine propriété de cet immeuble était fixée à 300.000 euros, soit une valeur en nue-propriété de 240.000 euros. Mme [G] [A] devait en conséquence régler une soulte de 60.000 euros à chacun de ses trois frère et s'urs, Mme [Z] [A] épouse [K], M. [Y] [A] et Mme [B] [A]. L'acte notarié précisait que la soulte due à [O] [A] et à sa soeur [B] était réglée comptant en dehors de la comptabilité du notaire à concurrence de la somme de 55 000 euros, le solde de 5 000 euros dû à chacun des coindivisaires devant être réglé au plus tard le 30 juin 2014 sans intérêts jusqu'à cette date et au taux de 6 % ensuite.

Mme [G] [H] étant décédée le [Date décès 1] 2013, son fils a écrit au notaire chargé de la succession, le 12 septembre 2013, pour réclamer le paiement de la soulte, demande réitérée le 5 novembre 2013, des demandes amiables ayant également été adressées directement à la donataire, lesquelles ont été suivies le 7 mai 2015, d'un commandement aux fins de saisie-vente. Seule la somme de 5 000 euros augmentée des intérêts dus à compter du 30 juin 2014 a été payée.

Par lettre du 16 juin 2014, Mme [G] [A] faisait valoir qu'elle ne pouvait payer la soulte s'élevant alors à 60 000 euros et indiquait mettre la maison en vente, ce qu'elle faisait au mois de juillet suivant. Le 8 juin 2015, son notaire indiquait qu'une vente était en cours et que dès la signature de l'acte, elle verserait une somme de 56 560 euros représentant le solde dû après déduction de la quote-part de son frère dans les frais d'acte, soit 3 440 euros. Cette vente n'était néanmoins pas réalisée.

Le 17 mai 2016, [Y] [A] a fait assigner [G] [A] devant le tribunal de grande instance de Quimper en paiement de la soulte.

Par jugement du 27 juin 2017, le tribunal de grande instance de Quimper a :

-débouté M. [Y] [A] de sa demande principale ;

-débouté M. [Y] [A] et Mme [G] [A] de leurs demandes de dommages et intérêts ;

-condamné M. [Y] [A] à payer à Mme [G] [A] la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

-condamné M. [Y] [A] aux dépens ;

-dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

M. [A] a relevé appel du jugement, demandant à la cour de :

-constater que la déclaration contenue dans l'acte de donation-partage de mai 2012 au rapport de Me [U] selon laquelle la première fraction de la soulte à lui due par Mme [G] [A] d'un montant de 55.000 euros a été payée doit être regardée comme fausse ;

-retirer toute valeur libératoire de la quittance à cet acte authentique,

-constater en outre, l'absence de donation entre vifs dans les formes prescrites notamment par l'article 931 du Code civil,

-constater son absence d'intention libérale au profit de sa s'ur [G] [A],

-condamner Mme [G] [A] à lui verser :

la somme de 55 000 euros en principal assortie des intérêts au taux de 6 % à compter du 30 juin 2014 (cf. donation-partage),

la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et propos vexatoires et diffamants,

-débouter Mme [G] [A] de toutes ses demandes ;

- la condamner au paiement de la somme de 6 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Mme [A], demande à la cour de:

-confirmer le jugement dont appel sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

- vu l'acte notarié établi par Maître [U] le 29 mai 2012 quittançant le règlement de la somme de 55 000 euros et l'existence d'une intention libérale, débouter M. [Y] [A] de toutes ses demandes fins et conclusions à son égard ;

-constater que la soulte de 5000 euros a dûment été réglée ainsi que le montant des intérêts ;

-condamner M. [Y] [A] à lui régler une somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts au regard du préjudice moral subi ;

-condamner M. [Y] [A] à lui payer une somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les frais et dépens.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la Cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées par M. [A] le 16 février 2018 et par Mme [A] le 18 décembre 2017.

EXPOSE DES MOTIFS

Les premiers juges ont justement retenu que nonobstant la quittance donnée dans l'acte authentique des 22, 23 et 29 mai 2012 qui ne fait foi que jusqu'à preuve contraire, M. [A] avait régulièrement apporté la preuve du non-paiement de la soulte de 55 000 euros, notamment par les propres reconnaissances écrites de la débitrice. Ainsi dans sa lettre écrite au notaire le 17 juin 2014, celle-ci écrivait : 'pour raisons familiales, cette somme due n'a pas été versée ce jour à mon frère car, comme convenu lors de la signature de la donation-partage, il s'était engagé, par contrat moral à ne pas percevoir cette somme', contrat qui serait selon elle resté purement verbal.

Il incombe dès lors à Mme [G] [A] d'apporter la preuve du fait que son frère lui a consenti la donation de la somme de 55 000 euros, cette intention libérale ne se présumant pas.

Contrairement à ce qu'ont relevé les premiers juges, seule une partie de la soulte, d'un montant de 55 000 euros, a été versée à Mme [K] par la comptabilité du notaire, le solde dû à chaque coïndivisaire ayant fait l'objet de modalités de paiement différé identiques de sorte qu'il n'est pas possible d'en déduire la volonté de M. [O] [A] de renoncer au paiement du premier acompte. A cet égard, celui-ci expose, de manière crédible, que la reconnaissance de paiement contenue dans l'acte notarié n'avait pour seul objectif que de permettre à sa soeur [G] d'obtenir de la banque le prêt qu'elle sollicitait pour désintéresser leur soeur aînée. Il n'est en tout cas pas soutenu que l'acte de donation-partage constituait une donation déguisée destinée à éluder les droits du fisc, aucun élément dans les échanges entre les parties n'évoquant un tel projet qui n'est d'ailleurs pas soutenu devant la cour.

Le fait que Mme [G] [A] ait avancé le paiement des frais d'actes tant qu'elle n'avait pas désintéressé son frère n'est pas non plus significatif, celle-ci n'ayant d'ailleurs pas manqué de réclamer de son frère la quote-part à sa charge.

Pour s'opposer à la demande en paiement de la somme de 55.000 euros, [G] [A] soutient que son frère a renoncé à percevoir cette soulte, étant animé à son égard d'une intention libérale. Elle explique celle-ci par sa volonté de la gratifier en raison des soins et de l'aide apportés à leur mère, de la volonté de leurs parents de maintenir l'immeuble dans le patrimoine familial et des difficultés financières qu'elle rencontrait. Mais M. [O] [A], qui affirme avoir seulement voulu aider leur mère à conserver son cadre de vie et ses deux soeurs célibataires, très proches l'une de l'autre, à garder la maison après son décès si elles le souhaitaient, affirme avoir seulement accepté le paiement différé de la soulte qui représentait la majeure partie de ses droits successoraux.

Accueillant la version de [G] [A], les premiers juges ont déduit la preuve de la renonciation de son frère à lui réclamer le paiement du capital de 55 000 euros, des courriels échangés entre le frère et ses soeurs et des attestations versées aux débats par [G] [A], notamment de celles de sa soeur [B] qui admet pourtant avoir toujours eu des relations conflictuelles avec [O] [A], ce qui permet de douter de son objectivité.

Or si des mails échangés, il ressort que [O] [A] s'engageait à aider ses soeurs, il n'est pas possible de déduire de ses écrits, pourtant prolixes, dépourvus d'autocensure et passablement exaltés, que l'aide promise excéderait l'octroi de facilités dans le paiement de la soulte. L'interprétation que donne [O] des dits courriels est confortée par le fait qu'il envisageait la situation de ses deux soeurs de manière globale ('vous garderez la maison... Vous aurez déjà un endroit pour poser vos valises' écrivait-il à [B]) et invoquait l'intérêt de leur mère : 'Moi je signerai avec joie... ceci je le ferais pour [W] et pour toi et pour maman... donc n'aie jamais peur, je serais toujours là, auprès de vous, toi, [W], maman et d'autres qui auront besoin de moi.'

Ainsi si les courriels versés aux débats révèlent une certaine solidarité fraternelle face aux exigences intempestives de leur soeur aînée, ils n'expriment ni la volonté de M. [A] de se dépouiller de son patrimoine au profit de sa soeur [G], ni la reconnaissance d'une dette à son égard en raison de sa présence auprès de leur mère avec laquelle elle cohabitait depuis 2007 (et non 2003), ni la prise en compte d'une situation particulière justifiant le traitement privilégié d'[G] dont la situation familiale, professionnelle et sociale était comparable à la sienne, hormis le fait, non négligeable psychologiquement, que [O] [A] vivait en couple depuis plusieurs années, qu'il était propriétaire de son propre logement qu'il avait le projet d'améliorer et auquel il manifestait un grand attachement qu'il ne montrait pas pour la maison parentale et qu'enfin il pouvait se prévaloir d'une créance au moins aussi importante que celle de sa soeur en raison de l'aide apportée à leur mère. Il existait de fait entre les parties au litige des intérêts divergents qui n'étaient compensés ni par une différence de situation patrimoniale, ni par un attachement fraternel profond, les relations au sein de la fratrie tout comme entre l'intimée et la compagne de M. [A] étant, selon ses propres pièces, dégradées depuis longtemps. Au demeurant, il est incohérent pour [G] [A] de prêter à son frère une intention libérale inhabituelle dans les relations entre membres d'une même fratrie parvenus à l'âge adulte et non liés par des intérêts particuliers tout en le décrivant comme une personne en proie à des excès de violences physiques et verbales, adoptant à son égard un comportement harcelant et entretenant un climat de terreur.

[O] [A] justifie qu'il a lui-même beaucoup aidé leur mère après son veuvage, résidant avec elle de 1979 à 1988, années pendant lesquelles il lui réglait une pension tout en prenant en charge des frais d'entretien de la maison. Il justifie avoir continué à l'aider financièrement jusqu'à son décès, notamment par la prise en charge de partie de ses frais médicaux. Sa soeur ne démontre pas avoir apporté la même contribution financière même si sa présence aux côtés de leur mère dans les derniers mois de sa vie a été indéniablement utile, étant cependant relevé que l'appelant participait également à cette charge à l'exécution de laquelle elle lui reproche seulement d'avoir parfois fait faux-bond. Pour la période antérieure à son accident cérébral vasculaire de décembre 2012, il est démontré que la de cujus disposait d'une autonomie lui permettant de vivre seule de sorte que la cohabitation avec sa fille n'était pas nécessaire. Ainsi par exemple le fait qu'elle n'ait pu conduire son véhicule sur de longues distances selon sa fille (annotation de la pièce 116) ne signifiait pas qu'elle ne pouvait pas conduire le dit véhicule (conclusions page 27).

Ces éléments ne révèlent pas davantage que les courriels versés aux débats, l'existence au profit de [G] [A] d'une créance 'morale' à l'encontre de son frère du fait d'une aide apportée à leur mère, créance qui aurait expliqué la prétendue intention libérale.

Il sera également relevé que la volonté des parties de maintenir dans le patrimoine familial le bien acquis par les parents après le décès de leur mère ne ressort pas des échanges entre elles, étant relevé qu'aucun des trois enfants susceptibles de nourrir un tel désir n'a de descendant. Au contraire, [O] [A] mettait en doute, dans un courriel du 1er mai 2013 adressé à sa soeur [B], la capacité d'[G] à conserver et entretenir le bien qu'elle a d'ailleurs mis en vente dès 2014 (pièce 125), le retrait ensuite opéré n'ayant manifestement pour but que d'asseoir sa position dans le cadre de l'actuelle procédure. Il n'est en tout cas pas possible de déduire de ce courriel une intention libérale alors qu'il suggérait au contraire qu'[G] aurait intérêt à se séparer d'une maison dont elle était de fait seule propriétaire.

Les pièces produites révèlent enfin que les relations dans la fratrie avaient toujours été houleuses, y compris du vivant du père, que [O] [A] souffrait depuis son service militaire, d'une certaine instabilité psychologique qui peut éclairer certains de ses propos et postures, que [B] [A] indique avoir craint son frère dès les années 1980 et avoir convenu avec leur mère qu'elle ne le verrait pas lors de ses visites à celle-ci pour éviter les conflits, que l'entente entre les parties, même avant le décès de leur mère, était compromise, [G] [A] notifiant le 7 avril 2013 à son frère son refus de le rencontrer à l'improviste (pièce 24). Ceci obère sérieusement la force probante des attestations émises par [B] [A], partie indirectement intéressée au litige, et jette un doute sérieux sur la prétendue cohésion familiale qui seule aurait seule rendue crédible l'intention imputée à [O] [A].

Les attestations retenues par le tribunal à titre de preuve de la libéralité alléguée ne sont guère plus probantes :

- Mme [M] rapporte que son neveu lui avait déclaré en avril 2013 'qu'il était riche et que ses soeurs ne manqueraient jamais de rien' et qu'il aurait ensuite renié la parole donnée à sa renonciation de part d'héritage, prétendument devant témoins au rang desquels le rédacteur ne figurait pas ;

- les attestations [J], [Z], [X], [A], [G], [V], [Y] se bornent à faire état des confidences d' [G] [A], peu de ces rédacteurs ayant rencontré son frère et aucun d'entre eux n'ayant personnellement été témoin d'un engagement formulé par lui ; or les propos de la prétendue gratifiée, même rapportés par des tiers, sont dénués de force probante tout comme ses propres écrits ;

- M. [B] indique avoir entendu [G] [A] déclarer devant lui et son frère le 4 mai 2013 'Par amour pour moi, mon frère [Y] [Q] ne m'a pas demandé de lui régler sa part, sur cette maison de [Localité 1]... Si mon frère m'avait demandé sa part sur cette maison, je n'aurais jamais pu garder la maison' ; mais il ne résulte pas de cette attestation que [O] [A] ait, à cette occasion, confirmé avoir définitivement renoncé au paiement de la soulte à lui revenir étant relevé qu'à cette date les relations entre les parties étaient déjà sérieusement dégradées ainsi que le révèle le mail adressé par Mme [A] à son frère le 7 avril précédent et le fait qu'elle imputait, dès le 3 juin suivant, ses troubles anxio-dépressifs au comportement de son frère qu'elle qualifiait d'harcelant ; à supposer même qu'il soit resté taisant devant M. [B], ce silence ne vaudrait pas acquiescement à la position exprimée par sa soeur ;

- Mme [I] et M. [W] font état l'une de conversation tenue avec [G] [A] et sa mère (alors âgée d'au moins 89 ans) et l'autre des confidences faites par la de cujus à une date non précisée, celle-ci ayant pu mal exprimer les intentions qu'elle imputait à son fils ; rien ne permet de déduire de ces conversations que M. [A] s'était engagé définitivement à renoncer à sa créance, cette volonté ne pouvant se déduire du fait qu'il ne l'ait pas exigée du vivant de l'usufruitière du bien ; le caractère partiellement inexact de l'attestation de M. [W] est par ailleurs démontré révélant qu'il reprend essentiellement la version exposée par l'intimée.

Ni ces attestations, ni celle de [B] [A], ni les autres attestations produites ne permettent d'affirmer que M. [A] s'est formellement engagé devant des tiers, dans des conditions dénuées de toute ambiguïté, à consentir une libéralité déguisée à sa soeur qui n'était pas dans une situation de besoin justifiant une telle libéralité.

Au contraire, la position de [O] [A], plus cohérente et vraisemblable au regard des circonstances de la cause, est confortée par de nombreuses pièces, y compris par la première attestation émise par sa soeur [B] qui indique, le 16 juillet 2014 : 'Il avait été convenu que nous aviserions [du paiement de la soulte] lorsqu'elle envisagerait de se séparer de ce bien, sans déterminer d'échéances précises'. Même si [B] [A] est ensuite revenue sur ce témoignage au regard de l'évolution du litige auquel elle était étroitement associée par l'intimée, ses explications pour justifier l'inexactitude de ces déclarations initiales sur l'honneur, beaucoup moins calculées, sont peu convaincantes.

A l'appui de sa position, [O] [A] produit, outre l'attestation de sa compagne qui a au moins autant de valeur que celle de [B] [A], l'attestation de M. [T] [S]. Ce dernier indique avoir recueilli, un an avant son décès, les confidences de la de cujus venue seule le voir à Quimperlé, laquelle expliquait 'qu'un arrangement avait été trouvé entre ses enfants dans le cadre de la donation-partage portant sur la maison familiale... [G] sa fille avait pu obtenir un crédit pour payer la part de sa soeur [Z], qui exigeait un paiement immédiat, [Y] [Q] acceptant de différer le paiement de sa part tant que sa mère serait en vie. Au décès de Mme [A], cette maison aurait été soit vendue pour qu'[Y] [Q] touche sa part, soit ses deux soeurs [G] et [B] faisaient le choix de conserver la maison et alors de désintéresser leur frère'.

M. [C] [A], architecte , atteste également avoir recueilli des confidences similaires de la part de la de cujus.

Ces deux attestations contredisent de manière beaucoup plus circonstanciées celles émises par Mme [I] et M. [W] qui étaient pourtant les seules attestations qui ne se bornaient pas à reproduire ses griefs et déclarations. Elles relatent en outre les déclarations effectuées spontanément par la de cujus hors la présence de sa fille, ce qui leur donne une force probante supérieure.

Les autres attestations dont se prévaut l'appelant confirment le fait qu'il n'a jamais émis devant des tiers l'intention d'abandonner ses droits successoraux au profit de sa soeur. La force probante de ces attestations est renforcée par la copie de la lettre qu'il avait adressée au mois de mai 2012 à Mme [J] [Q] qui la joint à son attestation. M. [O] [A] y indiquait incidemment : 'Bonne nouvelle, ma soeur [G] veut garder la maison de ma mère avec ma soeur [B]. Je m'en réjouis. Nous avons récemment fait les papiers chez le notaire. [G] garde la maison de [Localité 1] mais j'ai demandé qu'elle me verse ma part de mon héritage en compensation'. Rien dans la forme et le contenu de ce courrier ne permet d'affirmer qu'il aurait été établi a posteriori pour les besoins de la procédure.

Il s'ensuit que la preuve du prétendu contrat moral, dont l'existence n'est attestée par aucun écrit, ni aucune circonstance le rendant plausible, n'est pas apportée de sorte que [G] [A] ne démontre pas que son frère lui a fait don du capital de 55 000 euros représentant l'essentiel de ses droits successoraux. Le jugement critiqué sera en conséquence infirmé.

Cependant des intérêts au taux de 6 % n'ayant été stipulés qu'en cas de retard de paiement de la somme de 5 000 euros, la somme de 55 000 euros portera intérêts au taux légal à compter du commandement de payer du 7 mai 2015.

Sur les demandes respectives en dommages-intérêts

Mme [G] [A] succombant dans ses prétentions, sa demande de dommages-intérêts sera rejetée.

M. [O] [A] ne démontre pas que sa soeur a, dans la présentation de sa défense, commis des abus justifiant les dommages-intérêts réclamés. Il n'y a pas lieu en conséquence d'accueillir sa demande.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Confirme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Quimper le 27 juin 2017 en ce qu'il a retenu que la quittance libératoire contenue dans l'acte de donation-partage du 29 mai 2012 était fausse ;

Le réformant pour le surplus et statuant à nouveau,

Condamne Mme [G] [A] à payer à M. [O] [A] la somme de 55 000 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 7 mai 2015 ;

Condamne Mme [G] [A] à payer à M. [O] [A] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette le surplus des demandes ;

Condamne Mme [G] [A] aux dépens de la procédure de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17/05402
Date de la décision : 04/06/2019

Références :

Cour d'appel de Rennes 1A, arrêt n°17/05402 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-06-04;17.05402 ?
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