La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/05/2019 | FRANCE | N°16/09399

France | France, Cour d'appel de Rennes, 9ème ch sécurité sociale, 15 mai 2019, 16/09399


9ème Ch Sécurité Sociale








ARRET N°251





N° RG 16/09399 - N° Portalis DBVL-V-B7A-NRJI




















Société COMPAGNIE ARMORICAINE DE TRANSPORTS - ETABLISSEMEN T TIV





C/





Organisme Urssaf BRETAGNE


























Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


>



















Copie exécutoire délivrée


le :





à :

















Copie certifiée conforme délivrée


le:





à:


REPUBLIQUE FRANCAISE


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE RENNES


ARRÊT DU 15 MAI 2019








COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



...

9ème Ch Sécurité Sociale

ARRET N°251

N° RG 16/09399 - N° Portalis DBVL-V-B7A-NRJI

Société COMPAGNIE ARMORICAINE DE TRANSPORTS - ETABLISSEMEN T TIV

C/

Organisme Urssaf BRETAGNE

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Copie certifiée conforme délivrée

le:

à:

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 15 MAI 2019

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Benoît HOLLEAUX, Président de chambre,

Assesseur : Monsieur Pascal PEDRON, Conseiller,

Assesseur : Madame Laurence LE QUELLEC, Conseillère,

GREFFIER :

Mme Loeiza ROGER, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 06 Mars 2019

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 15 Mai 2019 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats ;

DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:

Date de la décision attaquée : 28 Octobre 2016

Décision attaquée : Jugement

Juridiction : Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'Ille et Vilaine

****

APPELANTE :

Société COMPAGNIE ARMORICAINE DE TRANSPORTS (CAT) - ETABLISSEMENT TIV, Prise en la personne de ses représentants légaux

[...]

[...]

Comparante en la personne de Mme P... B... (DRH) en vertu d'un pouvoir général

et

assistée de Me Olivier CHENEDE de la SELARL CAPSTAN OUEST, avocat au barreau de NANTES,

INTIMÉE :

Organisme Urssaf BRETAGNE

[...]

[...]

représentée par Mme O... F... (Représentant légal) en vertu d'un pouvoir spécial

FAITS ET PROCÉDURE :

La société Compagnie Armoricaine de Transports (CAT), qui exploite un fonds de commerce de transport de voyageurs, a fait l'objet d'une vérification de l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires par l'Urssaf de Bretagne pour ses trois établissements situés à Rennes, Saint-Malo et La Selle en Luitré, pour la période allant du 1er août 2008 au 31 décembre 2010.

Cette vérification a donné lieu à des régularisations sur 15 points pour un montant total de 155.391 €, notifiées par lettre d'observations du 16 septembre 2011.

La société s'est vue notifier trois mises en demeure du 23 novembre 2011 d'un montant de :

114.708 € (soit 100.301 € en cotisations et 14.407 € en majorations de retard) pour son établissement de Rennes ;

31.016 € (soit 26.884 € en cotisations et 4.132 € en majorations de retard) pour son établissement de St Malo ;

32.242 € (soit 28.200 € en cotisations et 4.042 € en majorations de retard) pour son établissement de La Selle en Luitré.

La société a procédé au règlement du redressement ainsi opéré.

Par courrier recommandé du 20 décembre 2011, la société a saisi la commission de recours amiable (CRA) de l'Urssaf contestant la régularité du contrôle et 3 chefs de redressement.

Lors de sa séance du 08 novembre 2012, la CRA a :

décidé d'annuler le redressement sur les frais professionnels pour le montant extrapolé en raison du non-respect de la procédure de vérification par échantillonnage et extrapolation,

décidé de maintenir le redressement sur les primes de médailles du travail ;

annuler le redressement concernant les avantages en nature véhicule, les principes développées valant observation pour l'avenir ;

décidé de maintenir le redressement sur l'indemnité de requalification.

Par courrier du 11 janvier 2013, l'Urssaf Bretagne a informé la société que la mise à jour des comptes de la société suite à l'annulation totale ou partielle de deux chefs de redressement a fait apparaître un solde créditeur de 31.913,80€.

Le 12 février 2013, la société a porté le litige devant le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Ille et Vilaine.

Par jugement du 28 octobre 2016, le tribunal a :

écarté des débats les conclusions de la société CAT 35 déposées le 28 septembre 2016;

déclaré recevable la demande de la société CAT 35 relative à l'irrégularité formelle des chefs de redressement contestés mais au fond l'en a déboutée ;

déclaré irrecevables les prétentions relatives :

à la reconstitution d'une base brute afin d'y appliquer les taux de cotisations en vigueur pour les points n°4, 6, 7, 10 et 12,

à l'assujettissement au versement transport des chefs de redressement 8, 10, 12 et 14,

au versement des cotisations FNAL et la demande de remboursement desdites cotisations depuis le 1er janvier 2008,

tous ces points n'ayant pas été soumis à la commission de recours amiable ;

constaté que la société CAT 35 a réglé le redressement notifié ;

donné acte à l'Urssaf Bretagne qu'elle annule son redressement relatif au 'rappel de salaire suite à décision de justice' de Mme S..., soit la somme de 896 € et, en tant que de besoin, condamné l'Urssaf Bretagne à rembourser cette somme à la société CAT 35 ;

confirmé la décision déférée pour le seul chef de redressement restant en litige (n°5) relatif à 'Primes de médaille du travail 'corporative'' et débouté la société CAT 35 de son recours ;

dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de quiconque.

Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu que le calendrier de procédure contresigné par les parties n'avait pas été respecté par la société CAT 35 qui a conclu la veille de l'audience provoquant une nouvelle demande de renvoi de la part de l'Urssaf ; que, par conséquent, il y a lieu d'écarter les conclusions de la société CAT 35 déposées sans motif légitime le 28 septembre au lieu du 28 avril 2016, lesquelles, par leur tardiveté, portent atteinte aux droits de l'Urssaf Bretagne.

Le tribunal a relevé qu'il découle des articles R.142-1 et R.142-18 du code de la sécurité sociale, que la saisine de la CRA est un préalable nécessaire à toute réclamation contentieuse ; qu'il s'agit d'une formalité substantielle et d'ordre public, à défaut de laquelle le recours contentieux est déclaré irrecevable ; que le tribunal des affaires de sécurité sociale ne peut être saisi d'une réclamation contre une décision d'un organisme de sécurité sociale qu'après que celle-ci ait été soumise à la CRA en sorte qu'à défaut d'une telle saisine le cotisant est irrecevable à contester ultérieurement la validité de la mise en demeure ; que, lorsque le recours amiable est limité à un seul chef de redressement, l'expiration du délai de forclusion de l'article R.142-1 confère un caractère définitif à la décision de l'organisme sur les autres chefs, de sorte qu'elle ne peut plus être remise en cause devant la juridiction contentieuse même par voie d'exception ; que la société CAT 35 qui a contesté, dans sa lettre de saisine de la CRA du 20 décembre 2011, les chefs de redressement relatifs aux points n°5, 8 et 11 est recevable à invoquer l'irrégularité des chefs de redressement contestés, la réclamation comprenant nécessairement les conditions de la validité formelle du redressement ; qu'en revanche elle est irrecevable à contester les points n°4, 6, 7, 8 (pour l'assujettissement au versement transport), 10, 12 et 14, tous ces points n'ayant pas été soumis à la CRA.

Le tribunal a considéré que le principe du contradictoire était respecté dès lors que la lettre d'observations permet à l'employeur de connaître, pour chaque chef de redressement, l'étendue de son obligation, la nature, le mode de calcul et le montant des redressements opérés ; que l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale n'exige pas la communication intégrale à l'employeur du rapport complet de l'inspecteur et de toutes ses annexes, mais oblige seulement à cet agent à communiquer ses observations à l'employeur pour provoquer éventuellement dans les 30 jours ses explications sur les irrégularités relevées ; que l'erreur de plume imputable à l'Urssaf dans le courrier du 11 janvier 2013 ne saurait justifier l'annulation de la procédure de contrôle.

Le tribunal a retenu, s'agissant du redressement concernant la médaille du travail, qu'il n'était pas établi, à la lecture des précédentes lettres d'observation et des pièces visées par l'Urssaf, que l'ensemble des éléments afférents aux médailles du travail a été soumis à l'examen de l'Urssaf lors du précédent contrôle de 2007 portant sur la période 2005-2007 et que l'organisme de recouvrement a pris une position en toute connaissance de cause ; qu'au demeurant la société demanderesse ne produit aucune pièce à l'appui.

Le 09 décembre 2016, la société a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 17 novembre 2016.

PRÉTENTIONS ET MOYENS :

Par ses conclusions n°2 auxquelles s'est référé et qu'a développées son conseil à l'audience, la société CAT, appelante, demande à la cour, par voie d'infirmation du jugement déféré, de :

A titre liminaire,

déclarer recevables les arguments et moyens de la concluante rejetés irrégulièrement en 1ère instance ;

A titre principal sur la forme,

annuler les opérations de contrôle diligentées par l'Urssaf Bretagne pour défaut de respect du formalisme du contrôle et pour défaut de production d'annexes explicatives et détaillées à sa lettre d'observations ;

A titre subsidiaire et sur le fond,

annuler l'ensemble des chefs de redressement ;

A défaut,

rectifier leur base et l'assiette de calcul des réintégrations ;

A tout le moins et à titre éminemment subsidiaire,

rectifier le montant des cotisations dues conformément à ses demandes quant au versement transport et au Fnal 0,10 % ;

condamner l'Urssaf Bretagne à lui verser la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ses conclusions responsives auxquelles s'est référée et qu'a développées sa représentante à l'audience, l'Urssaf Bretagne, intimée, demande à la cour, de confirmer le jugement déféré, la régularité de la procédure de contrôle et la régularité des mises en demeures, de condamner la société CAT 35 au paiement de la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et débouter la société CAT 35 de l'ensemble de ses demandes et prétentions.

Dans le corps de ses écritures, l'Urssaf demande à la cour de sommer la société CAT 35 de produire l'original de l'exemplaire de la lettre d'observations qu'elle a reçue le 21 septembre 2011 avant de se prononcer sur la régularité de celle-ci.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l'audience du 06 mars 2019.

MOTIFS :

Sur la régularité de la procédure de contrôle

- Sur la remise de la Charte du cotisant

La société reproche à l'Urssaf de ne pas verser aux débats l'exemplaire de la Charte du cotisant remise lors de son arrivée dans les locaux, ce qui constitue une violation des droits du cotisant et rend le contrôle irrégulier.

Au soutien de sa prétention, l'appelante n'articule aucun fondement juridique.

En l'espèce, l'Urssaf justifie par la pièce n°8 de ses productions que 'la charte du cotisant contrôlé', 'dont le modèle est fixé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale', a été remise à M. A... G..., contrôleur de gestion, et Mme V... B..., responsable des ressources humaines, qui en ont accusé réception le 22 février 2011, premier jour du contrôle. Il importe peu que la copie de l'exemplaire de la charte remise ne soit pas produite par l'organisme de recouvrement au cours de la procédure contentieuse et ce d'autant plus que la société confirme dans ses écritures qu''effectivement ce document lui a bien été remis'. Comme le souligne l'Urssaf, aucun texte législatif ou réglementaire n'impose aux organismes de recouvrement une telle production devant les juridictions.

L'appelante invoque les arrêts rendus par la Cour de cassation les 18 septembre et 09 octobre 2014. Cette jurisprudence n'est nullement applicable en l'espèce puisque les décisions concernent seulement les mentions obligatoires de l'avis préalable de contrôle et le défaut de remise de la Charte du cotisant.

Par ailleurs, la société précise que l'accusé de réception de la remise fait état de l'Urssaf de Rennes qui est un organisme de recouvrement inconnu et inexistant. Sur ce point, la cour rappelle que l'Urssaf Bretagne a été créé par regroupement des Urssaf de chacun des quatre départements bretons par arrêté ministériel du 07 août 2012 régulièrement publié au Journal Officiel du 29 août 2012, soit postérieurement au 22 février 2011, date d'accusé de réception de la charte du cotisant, en sorte que l'Urssaf d'Ille et Vilaine justifiait encore à cette date de sa capacité et qualité à agir.

Par suite, ce moyen ne saurait sérieusement prospérer.

- Sur le défaut de signature de la lettre d'observations

La société se prévaut de la lettre d'observations versée aux débats par l'Urssaf pour soutenir qu'à aucun moment dans ce document ne sont respectées les dispositions de l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale permettant au cotisant de visualiser la signature des inspecteurs du recouvrement.

Au soutien de sa prétention, l'appelante n'articule aucun fondement juridique.

L'Urssaf réplique que seul l'original signé a été adressé à la société qui ne nie pas l'avoir reçu, de sorte qu'elle ne rapporte pas la preuve de l'absence de signature d'un ou des inspecteurs sur sa propre lettre d'observations.

En l'espèce, la société a reçu le 21 septembre 2011 la lettre d'observations adressée par l'Urssaf en lettre recommandée avec accusé de réception (pièce n°10 des productions de l'Urssaf). Si l'organisme de recouvrement verse aux débats une copie de la lettre d'observations portant mention des noms des deux inspecteurs mais non signée (pièce n°1 de ses productions), la société n'indique nullement avoir reçu non signé l'original de la lettre d'observations du 16 septembre 2011. En tout état de cause, la société, qui doit prouver la réalité de ses assertions et qui ne communique pas l'exemplaire original de la lettre d'observations qu'elle a reçue, n'établit par aucune de ses productions que ladite lettre ne comporte pas la signature de MM. J... et T..., inspecteurs chargés du recouvrement.

Par suite, ce moyen ne saurait sérieusement prospérer.

- Sur le défaut d'annexe

La société soutient que l'Urssaf n'a pas pris la peine de détailler son mode de calcul dans sa lettre d'observations et de livrer en annexe le chiffrage de ses redressements, ce qui la laisse dans l'incapacité la plus totale de vérifier la réintégration opérée et le montant du redressement.

Au soutien de sa prétention, l'appelante n'articule aucun fondement juridique.

L'Urssaf réplique que l'inspecteur n'a aucune obligation, au regard des dispositions de l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale, de fournir des annexes ni d'individualiser ou de préciser pour chaque chef de redressement son montant pour chacun des salariés.

L'article R.243-59 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, prévoit qu''à l'issue du contrôle, les inspecteurs du recouvrement communiquent à l'employeur ou au travailleur indépendant un document daté et signé par eux mentionnant l'objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle. Ce document mentionne, s'il y a lieu, les observations faites au cours du contrôle, assorties de l'indication de la nature, du mode de calcul et du montant des redressements envisagés'.

Ainsi, si cet article impose que soient énoncées les modalités de calcul, il est satisfait à cette obligation par l'énoncé des textes applicables, du principe de détermination de l'assiette de la régularisation, de l'indication du montant des assiettes et des taux applicables par année. L'inspecteur n'est pas tenu de faire figurer à la lettre d'observations ni dans des annexes les calculs dans leurs détails.

En l'espèce, à la lecture de la lettre d'observations, il apparaît que les inspecteurs du recouvrement ont rappelé les règles applicables et mentionné le montant par année et le montant global des cotisations dues en précisant les bases et les taux, de sorte que les dispositions précitées ont été respectées. Force est de constater que la société appelante, contrairement à ce qu'elle allègue, a été mise en mesure de vérifier l'exactitude du redressement opéré.

Par suite, aucune nullité ne saurait être encourue de ce chef.

- Sur la méthode de sondage/extrapolation pour les frais professionnels

La société se prévaut de la parfaite mauvaise foi et violation permanente par l'Urssaf des droits des cotisants, et de ce que l'organisme n'a jamais respecté les méthodes d'échantillonnage scientifique, ce que la commission de recours amiable a reconnu dans sa délibération du 08 novembre 2012, pour demander judiciairement l'annulation du redressement pour l'année 2010, soit la somme de 56.760 €.

L'Urssaf réplique que la commission de recours amiable a effectivement constaté que la procédure prévue à l'article R.243-59-2 du code de la sécurité sociale n'avait pas été respectée et a, par conséquent, prononcé l'annulation du redressement portant sur les années 2008 et 2009 et partiellement sur 2010, les inspecteurs ayant bien constaté des anomalies à l'examen des frais pour cette année. Elle précise que l'étude des notes de frais (correspondant à des petits-déjeuners, déjeuners et dîners) de l'année 2010 a permis de constater que les indemnités versées ne répondaient pas aux conditions d'exonération et que pour certains frais aucun justificatif n'a pu être présenté lors du contrôle.

En l'espèce, la commission de recours amiable a annulé le redressement sur les frais professionnels, pour le montant extrapolé, en raison du non-respect de la procédure de vérification par échantillonnage et extrapolation définie par l'arrêté du 11 avril 2007, et a maintenu le redressement pour les frais vérifiés en exhaustif sur 2010.

Il convient de relever que la société ne développe aucun argument juridique au soutien de sa demande tendant à l'annulation du redressement au titre de l'année 2010, se contentant d'invoquer la mauvaise foi de l'organisme et le non-respect par ce dernier des méthodes d'échantillonnage, alors même que l'Urssaf établit que le redressement sur 2010 est un redressement basé au réel sur les seules anomalies constatées au titre de ladite année.

Dans ces conditions, ce moyen ne saurait prospérer.

- Sur la remise du rapport de contrôle

L'article R.243-59 alinéa 5 du code de la sécurité sociale n'exige pas la communication intégrale à l'employeur du rapport complet de l'agent de contrôle avec toutes ses annexes, mais oblige seulement cet agent à présenter ses observations. Néanmoins, l'Urssaf a produit en cause d'appel une copie dudit rapport daté du 07 novembre 2011.

Sur la remise de ce rapport de contrôle, la société n'articule aucun moyen précis.

- Sur le défaut de signature des mises en demeure

La société soutient que les trois mises en demeure datées du 23 novembre 2011 ne respectent pas les dispositions de l'article R.243-59 et L.244-2 du code de la sécurité sociale permettant au cotisant de visualiser la signature du directeur de l'Urssaf, de sorte que le contrôle doit être annulé.

L'Urssaf réplique que les mises en demeure doivent satisfaire aux exigences des articles L.244-2 et R.244-1 et non de l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale. Elle précise que seuls les originaux adressés au cotisant sont signés et que la preuve que les mises en demeures que la société a reçues ne comporteraient pas la signature du directeur, formalité qui n'est d'ailleurs pas exigée par les textes précités, n'est pas rapportée.

Il ressort de la lecture combinée des articles L.244-2 et R.244-1 du code de la sécurité sociale que, dans le cadre d'un contrôle d'assiette de cotisations, le redressement doit être précédé d'une mise en demeure adressé au cotisant par lettre recommandée avec accusé de réception.

Selon l'alinéa 2 de l'article 4 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, dans sa version en vigueur, toute décision prise par l'une des autorités administratives (dont les organismes de sécurité sociale) mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention en caractères lisibles du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci.

Il convient de rappeler que la mise en demeure délivrée par l'Urssaf n'est pas de nature contentieuse, de sorte que les articles 640 à 694 du code de procédure civile ne lui sont pas applicables.

Aussi, l'omission des mentions prévues par l'alinéa 2 de l'article 4 précité n'affecte pas la validité de la mise en demeure prévue par l'article L.244-2 du code de la sécurité sociale dès lors que celle-ci indique la dénomination de l'organisme qui l'a émise.

La société ne communique pas les exemplaires originaux des trois mises en demeure qu'elle a reçues. En revanche, l'intimée verse aux débats une copie de ces mises en demeure lesquelles ne comportent pas la signature du directeur mais mentionnent le nom de l'organisme émetteur, à savoir l'Urssaf d'Ille et Vilaine (pièce n°2 de ses productions). Il s'ensuit que l'absence de signature n'affecte en rien la validité des trois mises en demeure.

L'arrêt de la Cour de cassation du 06 novembre 2014 dont se prévaut l'appelante est inapplicable au litige en ce qu'il concerne la nullité d'une lettre d'observations pour défaut de signature de l'ensemble des inspecteurs du recouvrement ayant participé aux opérations de contrôle, étant rappelé que cette exigence est expressément prévue par l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale.

L'arrêt de la Cour de cassation du 20 septembre 2018 n'est également pas applicable au cas d'espèce en ce qu'il concerne le caractère suffisant ou non des mentions contenues dans la mise en demeure pour permettre au cotisant de connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation.

Par suite, ce moyen ne saurait prospérer.

- Sur le courrier du 11 janvier 2013

La société soutient que le courrier litigieux est radicalement incompatible avec les constats antérieurs faits par l'Urssaf lors de son contrôle et viole manifestement les droits du cotisant en ne respectant pas la décision de la commission de recours amiable du 08 novembre 2012.

Au soutien de sa prétention, l'appelante n'articule aucun fondement juridique.

L'Urssaf réplique qu'en lieu et place de l'indication des établissements visés (Rennes, Fougères et Saint Malo), le courrier du 11 janvier 2013 indique à tort les années 2008, 2009 et 2010 mais que cette erreur de plume intervenant dans un courrier postérieur à une décision de la commission de recours amiable ne saurait justifier une annulation des opérations de contrôle et donc du redressement. Elle ajoute que le courrier indique à tort une assiette de cotisation de 1.439 € au lieu de 5.851 € pour la seule année 2010.

C'est par des motifs pertinents que la cour adopte que les premiers juges, au vu des éléments produits aux débats, ont considéré que l'erreur de plume imputable à l'Urssaf ne saurait justifier l'annulation de la procédure de contrôle.

Sur le bien-fondé du redressement

- Sur le chef de redressement n°5 'Primes de médaille du travail'

La lettre d'observations fait les constatations suivantes :

'En l'espèce, l'examen de la comptabilité a permis de constater le versement de primes. La vérification a permis de constater que ces primes correspondent à l'octroi de médailles d'honneur du travail 'Fédération nationale des transports de voyageurs'. Ces primes ont été exclues à tort de l'assiette des cotisations, ne s'agissant pas de la médaille d'honneur du travail officielle délivrée par la Préfecture. Il s'ensuit une régularisation en application des textes susvisés'.

Pour l'infirmation du jugement, la société se prévaut de l'existence d'une pratique antérieure dûment validée par l'Urssaf, de sorte qu'elle doit bénéficier d'une sécurisation juridique. Elle précise que, lorsque l'Urssaf l'avait contrôlée le 29 octobre 2007 au titre des années 2005, 2006 et 2007, elle n'avait rien trouvé à redire et que, dès lors qu'aujourd'hui les pratiques sociales sont identiques, l'Urssaf ne peut pas violer sa propre parole et la redresser sur des thématiques qu'elle avait elle-même validées tacitement ou expressément lors d'un précédent contrôle.

Pour la confirmation du jugement, l'Urssaf réplique que la preuve de la décision implicite ne saurait résulter du seul examen des pièces comptables ne suscitant aucune observation sur le point en litige lors du précédent contrôle et que l'existence d'une décision antérieure implicite suppose une prise de position en toute connaissance de cause dans une situation de fait identique. Elle soutient qu'à la lecture de la lettre d'observations du 02 janvier 2008, il ne ressort pas que les vérifications de l'inspecteur ont porté sur le point litigieux et qu'en toute connaissance de cause, il n'a pas formulé d'observation sur ce point précis dans sa lettre d'observations. Elle ajoute que la simple production de la lettre d'observations ne suffit pas à démontrer l'existence d'un accord tacite. Sur le bien-fondé du redressement, l'Urssaf indique que la société n'émet aucun grief.

L'article R.243-59 dernier alinéa du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, dispose : ' L'absence d'observations vaut accord tacite concernant les pratiques ayant donné lieu à vérification, dès lors que l'organisme de recouvrement a eu les moyens de se prononcer en toute connaissance de cause. Le redressement ne peut porter sur des éléments qui, ayant fait l'objet d'un précédent contrôle dans la même entreprise ou le même établissement, n'ont pas donné lieu à observations de la part de cet organisme'.

Si aucun redressement ne peut être effectué sur des pratiques vérifiées lors d'un précédent contrôle et n'ayant fait l'objet d'aucune observation de la part de l'Urssaf, c'est à la condition que l'organisme ait eu les moyens de se prononcer en toute connaissance de cause sur ces pratiques. Il appartient au cotisant d'apporter la preuve de cet accord tacite lors du précédent contrôle.

En l'espèce, l'appelante ne produit pas la lettre d'observations adressée à l'issue du contrôle opéré en 2007 mais une lettre en réponse de l'inspecteur du recouvrement datée du 02 janvier 2008 portant sur certains points redressés, de sorte qu'il n'est pas établi que l'Urssaf se soit prononcée sur les primes versées au titre de la médaille d'honneur du travail lors du contrôle antérieur à celui de 2011. Force est de constater que l'existence d'un accord tacite n'est pas rapportée.

Par suite, le jugement déféré doit être confirmé.

- Sur le chef de redressement n°11 'Rappel de salaire suite à décision de justice ou injonction de l'inspection du travail'

Il convient de relever au terme des débats que ce chef de redressement n'est plus contesté, l'Urssaf et la société sollicitant la confirmation du jugement en ce qu'il a annulé ledit redressement.

- Sur la recevabilité des contestations portant sur le versement transport, sur la remontée en brut des sommes nettes et sur le versement des cotisations FNAL

Pour l'infirmation du jugement, l'appelante soutient que le tribunal a considéré de manière incorrecte qu'en ne soulevant pas tous ses arguments devant la commission de recours amiable, elle ne pouvait plus s'en prévaloir devant le tribunal, alors qu'il est de jurisprudence constante qu'un cotisant peut soulever devant une juridiction judiciaire tout argument qui lui semble pertinent pour la défense de ses intérêts, sans que puisse lui être valablement opposée l'absence de saisine de la commission sur ce point.

Pour la confirmation du jugement, l'intimée réplique qu'il résulte des articles R.142-1 et R.142-18 du code de la sécurité sociale que la saisine préalable de la commission de recours amiable est une formalité substantielle et d'ordre public dont la sanction en cas d'inobservation de cette procédure est l'irrecevabilité du recours. Elle expose que la société a explicitement indiqué que sa contestation portait sur la médaille du travail, les avantages en nature véhicule, l'indemnité de requalification et sur le non-respect de la procédure d'échantillonnage/extrapolation. Elle soutient qu'à aucun moment la société n'a contesté son assujettissement au versement transport pour certains chefs de redressement, sur la remontée en brut des chefs de redressement n°4, 6, 7 10 et 12, et sur la demande de remboursement des cotisations FNAL.

Il résulte de l'article R.142-1 alinéa 3 du code de la sécurité sociale que 'les contestations formées à l'encontre des décisions prises par les organismes chargés du recouvrement des cotisations, des majorations et des pénalités de retard doivent être présentées à la commission de recours amiable dans un délai d'un mois à compter de la notification de la mise en demeure'.

L'article R.142-18 alinéa 1er du même code précise : 'Le tribunal des affaires de sécurité sociale est saisi, après l'accomplissement, le cas échéant, de la procédure prévue à la section 2 du présent chapitre, par simple requête déposée au secrétariat ou adressée au secrétaire par lettre recommandée dans un délai de deux mois à compter soit de la date de la notification de la décision, soit de l'expiration du délai d'un mois prévu à l'article R.142-6'.

Il résulte de la combinaison de ces deux textes que le tribunal des affaires de sécurité sociale ne peut être saisi, sauf exception, qu'après accomplissement de la procédure de recours amiable.

L'étendue de la saisine de la commission de recours amiable d'un organisme de sécurité sociale se détermine au regard du contenu de la lettre de réclamation.

La société a saisi la commission de recours amiable de l'Urssaf Bretagne, par lettre du 20 décembre 2011, en ces termes :

'Nous avons reçu le 24 novembre 2011 une mise en demeure de votre organisme datée du 23 novembre 2011.

Nous entendons en contester les fondements notamment sur les points suivants :

1- Sur la régularité du contrôle

(...)

2- Sur le contenu du redressement

Ceci dit et s'agissant des autres reproches que vous nous faites sur le site de Rennes, nous les contestons et de ce que nous avons pu comprendre, nos remarques sont les suivantes :

Point n°5 relatif aux primes de médaille du travail

Vous nous avez redressé sur ce thème la somme de 12 944 euros au titre des années 2008, 2009, 2010 pour les charges de sécurité sociale et d'assurance chômage.

Nous contestons ce redressement sur le fond et ce pour les raisons suivantes :

Nous entendons nous prévaloir des dispositions protectrices de l'article R 243-59 du Code de la Sécurité Sociale issu du décret du 28 mai 1999 puisque cette thématique de redressement alors même que nos pratiques de paie et de versement de primes étaient identiques, n'ont jamais fait l'objet de la moindre critique de votre organisme sur les points précis que vous nous reprochez aujourd'hui, notamment lors de votre précédente lettre d'observation en date du 29 octobre 2007 concernant les années 2005 et 2006.

Vous voudrez bien en conséquence annuler ce redressement.

Point n°8 relatif aux avantages en nature véhicule

Vous nous avez redressé sur ce thème la somme de 2 766 euros au titre des années 2008, 2009, 2010 pour les charges de sécurité sociale et d'assurance chômage.

Nous contestons ce redressement sur le fond et ce pour les raisons suivantes :

Nous entendons nous prévaloir des dispositions protectrices de l'article R 243-59 du Code de la Sécurité Sociale issu du décret du 28 mai 1999 puisque cette thématique de redressement alors même que nos pratiques de paie et de versement de primes étaient identiques, n'ont jamais fait l'objet de la moindre critique de votre organisme sur les points précis que vous nous reprochez aujourd'hui, notamment lors de votre précédente lettre d'observation en date du 29 octobre 2007 concernant les années 2005 et 2006.

Vous voudrez bien en conséquence annuler ce redressement.

Point n°11 relatif à l'indemnité de requalification de CDD de Mademoiselle Z... S...

Vous nous avez redressés sur ce thème la somme de 896 euros au titre de l'année 2010 pour les charges de sécurité sociale et d'assurance chômage.

Nous contestons ce redressement sur le fond et ce pour les raisons suivantes :

Le 24 juin 2010, le CPH de Fougères nous condamnait à une indemnité de requalification CDD CDI de Mademoiselle S... (salariée initialement embauchée en CDD puis en CDI) pour la somme nette à titre de dommages et intérêts de 1 289 € sur le fondement de l'article L 1245-2 du Code du Travail.

Cette somme a un caractère indemnitaire et une nature de dommages et intérêts. Elle ne doit donc pas être soumise à l'assiette des cotisations sociales.

En aucun cas, il ne s'agit d'une somme versée sur le fondement de l'article L 1243-4 du Code du Travail, à savoir :

En cas de rupture anticipée du CDD,

Du versement des salaires jusqu'au terme du contrat,

Puisque Mademoiselle S... était déjà en CDI et qu'elle a demandé que des dommages et intérêts pour l'irrégularité de son CDD initial d'embauche.

Nous ne sommes pas du tout dans le cadre de la jurisprudence du 7 octobre 2010 de la cour de Cassation (n°0912-404 requalifiant ces sommes en salaire soumis à charges sociales.

Vous voudrez bien en conséquence annuler ce redressement.

3. Conclusion

Vous voudrez bien rectifier notre redressement de ces sommes.

(...)'.

Il s'ensuit que la société a entendu contester la mise en demeure sur plusieurs points notamment sur la régularité du contrôle et sur le contenu du redressement. S'agissant de ce second point, il ressort clairement des termes de la saisine que la société a limité sur le fond son recours aux chefs de redressement n°5, 8 et 11, à l'exclusion des autres chefs.

Il convient dès lors de déclarer irrecevable les demandes de la société relatives à son assujettissement au versement transport pour les chefs de redressement n°8, 10, 11, 12 et 14, à la remontée en brut des chefs de redressement n°4, 6, 7 10 et 12, et à la restitution des sommes dues au titre de la cotisation de 0,10 % 'FNAL plafonnée' ainsi que l'a retenu le tribunal à bon droit.

Succombant en son recours, la société CAT 35 sera condamnée en équité à verser à l'Urssaf Bretagne la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et sera par voie de conséquence déboutée de sa demande sur le même fondement.

PAR CES MOTIFS :

La COUR, statuant contradictoirement par arrêt mis à disposition au greffe,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

Y AJOUTANT,

CONDAMNE la Compagnie Armoricaine de Transports 35 à payer à l'Urssaf Bretagne la somme de 1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE la Compagnie Armoricaine de Transports 35 de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 9ème ch sécurité sociale
Numéro d'arrêt : 16/09399
Date de la décision : 15/05/2019

Références :

Cour d'appel de Rennes SS, arrêt n°16/09399 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-05-15;16.09399 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award