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30/04/2019 | FRANCE | N°17/03842

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 30 avril 2019, 17/03842


1ère Chambre





ARRÊT N°192/2019



N° RG 17/03842 - N° Portalis DBVL-V-B7B-N6XH













Mme [B] [S]



C/



M. [R] [B]

Mme [F] [I] épouse [B]

















Copie exécutoire délivrée



le :



à :







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 30 AVRIL 2019





COMPOSITION DE LA C

OUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de Chambre,

Assesseur : Madame Brigitte ANDRÉ, Conseillère,

Assesseur : Madame Christine GROS, Conseillère,



GREFFIER :



Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé



DÉBATS :



A l'audience publique...

1ère Chambre

ARRÊT N°192/2019

N° RG 17/03842 - N° Portalis DBVL-V-B7B-N6XH

Mme [B] [S]

C/

M. [R] [B]

Mme [F] [I] épouse [B]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 30 AVRIL 2019

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de Chambre,

Assesseur : Madame Brigitte ANDRÉ, Conseillère,

Assesseur : Madame Christine GROS, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 25 Février 2019 devant Madame Françoise COCCHIELLO, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 30 Avril 2019 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

Madame [B] [S]

née le [Date naissance 1] 1934 à [Localité 1] (35)

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Jean-Paul RENAUDIN de la SCP GUILLOU-RENAUDIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Emmanuel NGUYEN, Plaidant, avocat au barreau de Saint-Malo

INTIMÉS :

Monsieur [R] [B]

né le [Date naissance 2] 1934 à [Localité 3]

[Adresse 2]

[Adresse 3]

Représenté par Me Benoît GEORGE de la SELARL LEXAVOUÉ RENNES ANGERS, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représenté par Me Sarah BONENFANT, Plaidant, avocat au barreau de Saint-Malo

Madame [F] [I] épouse [B]

née le [Date naissance 3] 1934 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Adresse 3]

Représentée par Me Benoît GEORGE de la SELARL LEXAVOUÉ RENNES ANGERS, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Sarah BONENFANT, Plaidant, avocat au barreau de Saint-Malo

EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant un acte authentique du 17 décembre 1964, M. et Mme [B] ont acquis des parcelles avec une maison d'habitation d'une contenance totale de 13 ares 70 centiares, le tout cadastré à [Localité 5] sous les numéros [Cadastre 1] et [Cadastre 2] de la section C. Leur voisine, Mme [B] [S] est propriétaire d'une parcelle cadastrée n°[Cadastre 1] de la section C de la commune de Plerguer sur laquelle est édifié un bâtiment jouxtant leur fonds et faisant face à leur maison.

Après une déclaration préalable de travaux, Mme [S] a, dans le courant de 2014, rénové ce bâtiment, notamment par la pose de fenêtres et d'une porte-vitrée en façade.

Faisant valoir, d'une part, qu'elle a aménagé ainsi des vues portant atteinte à leur intimité et, d'autre part, qu'elle leur reproche à tort d`avoir scellé un crochet au mur de sa propriété, les époux [B] l'ont assignée devant le tribunal d'instance de Saint Malo par acte du 13 novembre 2015.

Par jugement du 18 avril 2017, le tribunal d'instance de Saint Malo a :

-condamné Mme [S] à retirer la porte et les fenêtres de son bâtiment situé sur la parcelle cadastrée section C n° [Cadastre 1] à [Localité 5] et à remettre les lieux dans leur état antérieur ou du moins à rendre les ouvertures totalement opaques, dans les deux mois de la signification du présent jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à l'expiration de ce délai ;

-condamné Mme [S] à payer aux époux [B] la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts ;

-condamné Mme [S] à leur payer celle de 1.500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

-condamné Mme [S] aux entiers dépens ;

-ordonné l'exécution provisoire ;

-rejeté le surplus des demandes.

Par déclaration d'appel du 24 mai 2017, Mme [S] a relevé appel du jugement du tribunal d'instance de Saint Malo rendu le 18 avril 2017.

Par conclusions du 16 août 2017, Mme [S], demande à la cour de :

-dire recevables et bien fondés les prétentions et demandes de Mme [S] ;

-réformer la décision du 18 avril 2017 rendue par le tribunal d'instance de Saint Malo en tous ses motifs et dispositions ;

-rejeter l'ensemble des moyens, fins et prétentions de M. et Mme [B];

-condamner solidairement M. et Mme [B] à payer à Mme [S] la somme de 5 000 € a titre de dommages et intérêts ;

-condamner solidairement M. et Mme [B] à payer à Mme [S] la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

-condamner les mêmes aux entiers dépens de première instance (comprenant notamment les frais de constat d'huissier) et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions du 16 octobre 2017, M. et Mme [B], demandent à la cour de :

vu l'article 544 du Code civil

vu les articles 675 et suivants du Code civil

vu l'article 1382 (1240) du Code civil

vu l'article 23 de la loi DCRA en date du 22 avril 2000,

-dire et juger Mme [S] particulièrement mal fondée en l'appel par elle interjeté du jugement rendu le 18 avril 2017 par le tribunal d'instance de Saint Malo,

-déclarer Mme [S] irrecevable et en tout cas mal fondée en toutes ses demandes,

-dire bien jugé, mal appelé,

-confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions non contraires aux présentes, notamment en ce qu'elle a condamné Mme [S] à retirer la porte et les fenêtres de son bâtiment situé sur la parcelle cadastrée section C N°[Cadastre 1] à [Localité 5] et à remettre les lieux dans leur état antérieur ou du moins à rendre les ouvertures totalement opaques, à compter de la signification du jugement de première instance rendu le 18 avril 2017 sous astreinte de 50 euros par jour de retard,

-constater que Mme [S] ne dispose d'aucune servitude de vue sur les parcelles section C n° [Cadastre 1] et n° [Cadastre 2] appartenant aux consorts [B],

-constater la non-conformité des travaux réalisés par Mme [S] avec la déclaration préalable en date du 6 juin 2014,

-condamner Mme [S] à payer à M. et Mme [B] une somme qui sera portée à 5000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice de jouissance,

-condamner Mme [S] à payer à M. et Mme [B] une somme qui sera portée à 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner Mme [S] aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distribution pour ces derniers au profit de la SELARL Lexavoué Rennes Angers lesquels seront recouvrés en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Le 4 février 2019, l'appelante a déposé deux nouvelles pièces. Le même jour, le conseil des intimés demandaient le report de l'ordonnance de clôture afin d'être en mesure d'en prendre connaissance et y répondre.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 5 février 2019.

Par conclusions de procédure des 13 et 22 février 2019, les époux [B] ont demandé à la cour de rejeter des débats les pièces n° 11 et 12 communiquées le 4 février 2019 par Mme [S].

Par conclusions du 21 février 2019, Mme [S] conclut au débouté des époux [B].

MOTIFS :

Sur le rejet des pièces n° 11 et 12 communiquées la veille de la clôture de l'instruction par Mme [S] :

Considérant que Mme [S] a fait appel de la décision le 24 mai 2017, qu'elle a conclu au fond le 16 août 2017, que les époux [B] ont répliqué le 16 octobre 2017, que les parties ont été avisées le 30 octobre 2018 du calendrier de procédure selon lequel l'ordonnance de clôture serait prononcée le 5 février 2019 et l'affaire plaidée le 25 février 2019 ; que Mme [S] a communiqué deux nouvelles pièces numérotées 11 et 12 le 4 février 2019, veille de la clôture ; que les époux [B] ont sollicité le report de la clôture qui a été refusé et que l'ordonnance de clôture a été prononcée le 5 février 2019,

Considérant que les époux [B] exposent que les pièces ainsi communiquées sont tardives, et que leur rejet s'impose afin de respecter le principe du contradictoire ; que Mme [S] estime que ces pièces corroborent les précédentes et que les époux [B] pouvaient y apporter une contestation immédiate,

Mais considérant que les époux [B] n'expliquent pas dans leurs conclusions déposées le 22 février 2019 en quoi ces deux pièces désorganisent leur défense, seule considération de nature à établir la violation du principe du contradictoire ; que dès lors, les époux [B] seront déboutés de leur demande de rejet de pièces,

Sur le fond :

Sur les demandes des époux [B] :

Considérant que Mme [S] fait valoir qu'elle aménage sa grange et n'a fait que changer l'encadrement des fenêtres qui étaient de simples "jours", que les travaux ont été faits conformément à la déclaration préalable à l'autorité administrative, qu'elle affirme n'avoir aucune servitude de vue sur la parcelle des consorts [B], qu'elle ne nuit pas à leur intimité,

Considérant que les époux [B] exposent que le bâtiment de Mme [S] ne bénéficiait d'aucune vue sur leur fonds ; qu'en 1970, elle a fait réaliser des travaux d'installation de fenêtres et porte donnant vue sur leur fonds, ce qui a donné lieu à un premier contentieux à l'issue duquel les époux [S] acquiesçaient à la demande de remise en état des lieux ; que pour le litige actuel, Mme [S] a sollicité des autorisations de réaliser des travaux, modifiant à plusieurs reprises ses demandes de sorte qu'elle a finalement obtenu la délivrance d'un certificat de déclaration tacite pour la pose de fenêtres sans aucune précision, contrairement à ce qui aurait du être,

Que les travaux entrepris ont donné lieu à la pose de verres transparents ou quasi transparents, de sorte que leur intimité n'est pas préservée, que le procès-verbal dressé par Maître [T], huissier de justice le 23 avril 2015, établit l'existence des vues directes sur leur parcelle,

Qu'ils estiment que la création de vues dans un immeuble désormais habité leur cause un trouble anormal de voisinage, qu'ils ont recherché une issue amiable au litige vainement,

Mais considérant que le titre de propriété de Mme [S] en date du 21 avril 1960 précise que ce bâtiment " n'a aucun droit sur la cour à l'Est et que la porte gerbière et les deux abat-jour de ce bâtiment continueront d'exister et pourront être ouverts, mais ne donneront aucun droit de passage ou autre sur le terrain",

Qu'il résulte des termes de cet acte qu'aucune vue, directe ou non, sur le fonds voisin n'est établi et ne peut l'être,

Considérant dès lors que, quelle que soit l'autorisation administrative effectivement obtenue par Mme [S], elle doit, si elle entend rénover le bâtiment, installer des porte et fenêtres présentant une opacité complète, afin de respecter l'interdiction qui lui est faite de ne pas avoir de vue sur la propriété voisine,

Considérant que le procès-verbal établi par Maître [T] le 23 avril 2015 permet de constater que l'ancienne gibecière est équipée d'une fenêtre en PVC blanc à deux ventaux et verre dépoli, avec garde-corps en verre transparent, que l'ancienne porte au rez de chaussé a été remplacée par une porte-fenêtre en PVC blanc ouvrant sur toute sa hauteur, à deux ventaux équipés d'un double vitrage au verre dépoli, qu'au rez de chaussée à 1,19 et 1, 46 mètre du sol, les deux anciens abat-jour ont été remplacés par deux fenêtres en PVC blanc ouvrante à vantail équipées d'un double vitrage en verre dépoli,

Considérant qu'il s'induit de ces constatations que l'interdiction faite à Mme [S] de créer des vues sur le fonds voisin n'est manifestement respectée ; que le procès-verbal dressé par Maître [X] le 17 novembre 2015 permet de constater que les vitrages sont translucides, ce qui ne permet pas de constater qu'ils ne permettent pas la vue sur la propriété de ses voisins ; que les dernières pièces versées aux débats (n° 11 et 12) ne rapportent pas la preuve contraire, dès lors que la date de l'intervention de la société Tryba pour le changement des vitrages n'est pas connue,

Considérant que le jugement sera confirmé sur le seul point du dispositif concernant la condamnation de Mme [S] à rendre les ouvertures laissant passer le jour mais ne permettant pas la vue ; que cette condamnation sera assortie d'une astreinte ; que sera infirmée la condamnation à remettre les lieux dans leur état antérieur, dès lors que le titre de Mme [S] précise que la porte gerbière et les deux abat-jour de ce bâtiment peuvent continuer d'exister (ce qui peut justifier leur rénovation) et être ouverts,

Considérant que Mme [S] connaît parfaitement ses droits et ses obligations, que les époux [B] produisent en effet un document intitulé "désistement" établi par les parties le 5 août 1972 par lequel Mme [S], qui avait posé des portes et fenêtres, avait remis les lieux en l'état "conforme avec la situation antérieure et en conformité avec les droits et obligations respectifs des parties" ; que ce document n'est pas contesté par Mme [S] ;

Considérant qu'il sera alloué aux époux [B] qui subissent des vues droites sur leur fonds depuis plusieurs années des dommages-intérêts à hauteur de 3000 Euros,

Sur le scellement de l'anneau dans le mur de Mme [S] :

Considérant que Mme [S] reproche aux époux [B] d'avoir creusé son mur pour y installer un anneau, et de porter ainsi atteinte à son droit de propriété,

Considérant que les époux [B] exposent n'avoir jamais scellé l'anneau se trouvant dans le mur de Mme [S], lequel se trouvait là lorsqu'ils ont acquis leur propriété,

Mais considérant que que la cour constate que Mme [S] n'a repris aucune prétention sur ce point dans le dispositif de ses conclusions, la seule infirmation du jugement s'avèrant insuffisante pour saisir la cour

d'une prétention sur ce point,

PAR CES MOTIFS :

Déboute les époux [B] de leur demande de rejet des pièces n° 11 et 12 communiquées par Mme [S] le 4 février 2019,

Infirme le jugement en ce qu'il a condamné Mme [S] à remettre les lieux en l'état ainsi que sur le quantum des dommages-intérêts alloués,

Statuant à nouveau :

Déboute les époux [B] de leur demande de remise des lieux en leur état antérieur,

Condamne Mme [B] [S] à réaliser des ouvertures laissant le passage de la lumière mais empêchant toute vue sous astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard passé le délai d'un mois après la signification de cet arrêt, et ce, pendant trois mois,

Condamne Mme [B] [S] à payer à M. [R] [B] et Mme [F] [I] épouse [B] la somme de 3000 Euros à titre de dommages-intérêts,

Condamne Mme [B] [S] à payer à M. [R] [B] et Mme [F] [I] épouse [B] la somme de 1500 Euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles,

Condamne Mme [B] [S] aux dépens qui seront recouvrés avec le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17/03842
Date de la décision : 30/04/2019

Références :

Cour d'appel de Rennes 1A, arrêt n°17/03842 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-04-30;17.03842 ?
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