1ère Chambre
ARRÊT N°132/2019
N° RG 17/02531 - N° Portalis DBVL-V-B7B-N2ZA
M. G... V...
C/
L'Etat représenté par le Directeur Régional des Finances Publiques d'Ile de France et du département de Paris
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 19 MARS 2019
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de Chambre,
Assesseur : Madame Brigitte ANDRÉ, Conseillère,
Assesseur : Madame Christine GROS, Conseillère, entendue en son rapport
GREFFIER :
Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 29 Janvier 2019
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 19 Mars 2019 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANT :
Monsieur G... V...
né le à POILLEY (50220)
[...]
[...]
Représenté par Me Jean-David CHAUDET de la SCP JEAN-DAVID CHAUDET, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me Maud BONDIGUEL-SCHINDLER, Plaidant, avocat au barreau de RENNES
INTIMÉE :
L'Etat représenté par le Directeur Régional des Finances Publiques d'Ile de France et du département de Paris qui élit domicile en ses bureaux du Pôle juridictionnel judiciaire, Pôle fiscal parisien 1
[...]
[...]
Représentée par Me Anne DENIS de la SELARL ANNE DENIS, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me Jean-Yves BENOIST, plaidant, avocat au barreau du MANS
Monsieur et Madame V..., soumis à l'impôt sur la fortune, ont acquis des actions de la société Finaréa Entreprise dans le cadre de la loi TEPA. Au titre de leur déclaration pour les années 2009 et 2010, ils ont déclaré leur souscription à hauteur des sommes de 4 580 € en 2009 et 5 040 € en 2010 ; ils ont à ce titre bénéficié d'une réduction d'impôt de 75 % de ces souscriptions en application de l'article 885 OV bis du code général des impôts.
En 2012, le service des impôts des particuliers de Rennes Ouest a remis en cause ces réductions, considérant que la société Finaréa Entreprise ne peut pas être considérée comme une société holding animatrice de groupe. L'imposition supplémentaire a été mise en recouvrement à hauteur de 3 888 € au titre de l'année 2009 et 4 069 € au titre de l'année 2010.
Après réclamation de Monsieur V..., l'administration fiscale a admis un dégrèvement partiel. Ont été laissées à la charge de Monsieur V... les sommes de 3 859 € au titre de l'année 2009 et 4 039 € au titre de l'année 2010.
Monsieur V... a saisi le tribunal de grande instance de Rennes qui, par jugement du 6 mars 2007, l'a débouté de sa réclamation et a confirmé la décision de l'administration fiscale.
Monsieur V... a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 4 avril 2017.
Par ordonnance du 10 avril 2018, le conseiller de la mise en état a débouté Monsieur V... de sa demande de communication de pièces, soit les rescrits «'Truffle'» et «'Partech'» et de sa demande de question préjudicielle portant sur les articles 42 et 47 de la Charte des Droits fondamentaux de l'Union Européenne.
Vu les conclusions du 3 juillet 2017 auxquelles il est renvoyé pour exposé des moyens et arguments de Monsieur V... qui demande à la cour de :
À titre liminaire :
-ordonner la communication par la Direction générale des finances publiques, représentée par le Directeur départemental des finances publiques d'Ille et Vilaine, sous astreinte provisoire, pendant deux mois, de 1.000€ par jour de retard à compter du huitième jour suivant la signification de la décision à intervenir, des rescrits Truffle et Partech dans leur version originale ou expurgée des éléments prétendument confidentiels ;
-dire que, passé ce délai de deux mois, la partie qui y a intérêt pourra saisir le juge de céans d'une demande de liquidation de l'astreinte provisoire et fixation de l'astreinte définitive ;
En tout état de cause :
-infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
À titre principal :
-dire que la présente procédure ne peut être dirigée contre Monsieur V... bénéficiant d'attestations émises par Finaréa Entreprises, non remises en cause par l'administration fiscale;
En conséquence,
-dire nulle la décision de rehaussement prise à l'encontre Monsieur V... ;
À titre subsidiaire :
-dire que la procédure fiscale préalable à la présente procédure contentieuse est entachée d'irrégularités qui entraînent son annulation ;
En conséquence,
-dire nulle ladite procédure fiscale et prononcer la décharge des rehaussements ;
À titre très subsidiaire :
-dire que la décision de rehaussement puis de mise en recouvrement prise à l'encontre des concluants n'est pas fondée ;
En conséquence,
-annuler ladite décision et décharger le concluant de tous les impositions, droits, intérêts et pénalités mis à leur charge de ce chef ;
-le cas échéant, en cas de difficulté d'interprétation du droit de 1'Union européenne, poser à la Cour de justice de l'Union européenne une question préjudicielle, dans les termes suggérés aux motifs ;
En tout état de cause :
-condamner l'Etat au paiement de 10.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Avec toutes conséquences de droit et de dépens.
Vu les conclusions du 5 décembre 2018 auxquelles il est renvoyé pour exposé des moyens et arguments de l'État représenté par le directeur régional des finances publiques d'Ile de France et du département de Paris qui demande à la cour de :
-dire l'appel mal fondé et le rejeter ;
-déclarer l'appelant irrecevable, en tout cas mal fondé en toutes ses demandes, fins et conclusions ; l'en débouter ;
-constater que l'appelant ne rapporte pas la preuve écrite de ses prétentions, et le débouter de son appel ainsi que de toutes ses demandes ;
-reconnaître les rappels fondés en droit et en fait ;
En conséquence,
-confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Rennes du 6 mars 2017 favorable à l'administration ;
-confirmer la décision administrative de rejet du 17 avril 2013 et rejeter la demande en décharge des rappels mis en recouvrement, d'un montant de 7 898 euros ;
-rejeter, en toute hypothèse, la demande fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile;
-condamner l'appelant aux entiers dépens d'appel, dont distraction pour ces derniers au profit de l'avocat soussigné aux offres de droit ;
-condamner l'appelant à verser à l'État la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 janvier 2019.
MOTIFS DE LA DÉCISION:
Sur la communication des rescrits:
Aux termes de l'article L80A du livre des procédure fiscale: «'Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration.
Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales ».
Et aux termes de l'article L80B du même code : « La garantie prévue au premier alinéa de l'article L80 A est applicable :
1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ; elle se prononce dans un délai de trois mois lorsqu'elle est saisie d'une demande écrite, précise et complète par un redevable de bonne foi (...) »
Monsieur V... soutient que les rescrits « Truffle » et « Partech » détenus par l'administration constituent l'état du droit applicable en 2009 et 2010, à l'ensemble des opérateurs mobilisant le même schéma. Dès lors que les réponses de l'administration aux sociétés «'Truffle'» et «'Partech'» n'ont pas été publiées, Monsieur V... ne peut utilement se prévaloir de la prise de position de l'administration dont la portée est limitée à la situation personnelle de ces sociétés au regard d'un texte fiscal. Par voie de conséquence, à supposer que ces rescrits aient protégé les contribuables ayant fait des versements au profit des sociétés Truffle et Partech d'un rappel de droits au titre des années 2009 et 2010, la décision de rehaussement administrée à Monsieur V... n'est pas contraire au principe d'égalité devant la loi et les charges publiques.
Monsieur V... se prévaut de la communication de la commission européenne publiée le 19 juillet 2016, relative à la notion d''«'aide d'Etat'». Il soutient que cette communication souligne que les rescrits fiscaux procurent un avantage sélectif à leurs bénéficiaires lorsqu'ils appliquent erronément le droit fiscal national ou encore lorsqu'ils ne sont pas disponibles pour les entreprises se trouvant dans une situation juridique et fiscale similaire. Dans sa communication, la commission écrit que lorsqu'un rescrit «'avalise un résultat qui ne reflète pas de manière fiable le résultat qui aurait été obtenu en appliquant le régime de droit commun, ce rescrit pourrait conférer un avantage sélectif à son destinataire dans la mesure où ce traitement sélectif entraîne une diminution de l'impôt dû par le destinataire( ...)par comparaison avec les entreprises se trouvant dans une situation factuelle et juridique similaire». Mais en tout état de cause, dès lors que les communications de la commission de l'Union européenne n'ont pas de valeur contraignante pour les Etats, Monsieur V... ne peut utilement s'en prévaloir pour soutenir que par le biais de la protection du rescrit, les sociétés Truffle et Partech ont bénéficié d'un avantage sélectif.
Dans leur prospectus respectifs, les sociétés Partech et Truffle informent leurs souscripteurs que le rescrit qu'elles ont obtenu n'est pas une garantie formelle de l'absence de remise en cause de l'avantage fiscal qu'il aura obtenu au titre de sa souscription. La société Partech écrit ainsi : «'Le souscripteur ne bénéficie d'aucune garantie formelle de satisfaction des Holdings ISF Innovation aux critères imposés par l'administration fiscale lors de la délivrance du rescrit, ni d'une garantie de remise en cause ultérieure de l'éligibilité fiscale, notamment au regard des critères imposés par l'administration fiscale»
Il ressort ainsi de ces prospectus que la réponse apportée par l'administration à la demande de rescrit ne protège pas leur souscripteurs d'une remise en cause des réductions d'ISF afférentes à leur souscriptions.
Il résulte de tout ceci que les rescrits 'Truffle' et 'Partech' ne porte que l'appréciation d'une situation de fait invoquée, et qu'ils ne sont pas utiles à la solution du présent litige. Par voie de conséquence, Monsieur V... sera débouté de sa demande de communication des rescrits.
Sur la régularité de la procédure d'imposition:
Sur l'incompétence territoriale du service ayant procédé à la rectification de l'ISF 2009 et 2010:
Monsieur V... soutient que les services des impôts des particuliers de Rennes Ouest étaient incompétents pour contrôler l'adéquation entre la déclaration d'activité effectuée par Finaréa Entreprises et son activité réelle.
Il ressort des dispositions de l'article 350 terdecies de l'annexe III du code général des impôts que les fonctionnaires de la direction générale des finances publiques sont compétents pour contrôler les déclarations d'ISF lorsque le lieu de dépôt de la déclaration d'ISF est situé dans le ressort de leurs services d'affectation.
En l'espèce, Monsieur V... a déposé ses déclarations fiscales des années 2009 et 2010 dans le département d'Ille et Vilaine, dans le ressort de la compétence du service des impôts des particuliers de Rennes Ouest. Dès lors, les fonctionnaires de ce service étaient compétents pour opérer le contrôle de ces déclarations au regard de l'ensemble des éléments portés sur les déclarations d'ISF, et notamment les attestations qui lui avaient été remises par la société Finaréa, conduisant à analyser la qualité de holding animatrice ou non de celle-ci.
Le moyen tiré de l'incompétence territoriale du service ayant procédé à la rectification de l'ISF 2009 et 2010 sera rejeté.
Sur l'opposabilité à l'administration des attestations produites par Monsieur V... à l'appui de ses déclarations d'ISF:
Il résulte des dispositions de l'article 885-O Vbis, dans leur rédaction applicable au titre des années 2009 et 2010 que «'le redevable peut imputer sur l'impôt de solidarité sur la fortune 75 % des versements effectués au titre de souscriptions au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés, en numéraire ou en nature par apport de biens nécessaires à l'exercice de l'activité, à l'exception des actifs immobiliers et des valeurs mobilières, ainsi qu'au titre de souscriptions dans les mêmes conditions de titres participatifs dans des sociétés coopératives ouvrières de production définies par la loi n°78-763 du 19 juillet 1978 ou dans d'autres sociétés coopératives régies par la loi n°47617775 portant statut de la coopération. Cet avantage fiscal ne peut être supérieur à 50000 euros.
La société bénéficiaire des versements mentionnée au premier alinéa doit satisfaire aux conditions suivantes :
a) Etre une petite et moyenne entreprise au sens de l'annexe I au règlement (CE) n° 800 / 2008 de la Commission du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité (Règlement général d'exemption par catégorie) ;
b) Exercer exclusivement une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, à l'exclusion des activités de gestion de patrimoine mobilier définie à l'article 885O quater notamment celles des organismes de placement en valeurs mobilières, et des activités de gestion ou de location d'immeubles. Cette condition n'est pas exigée pour les entreprises solidaires au sens de l'article L4443-3-2 du code du travail qui exercent une activité de gestion immobilière à vocation sociale ;
c) Avoir son siège de direction effective dans un Etat membre de la Communauté européenne ou dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale ;
d) Ses titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé français ou étranger;
e) Etre soumise à l'impôt sur les bénéfices dans les conditions de droit commun ou y être soumise dans les mêmes conditions si l'activité était exercée en France ;
f) Etre en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion au sens des lignes directrices concernant les aides d'Etat visant à promouvoir les investissements en capital-investissement dans les petites et moyennes entreprises (2006 / C 194 / 02) ;
g) Ne pas être qualifiable d'entreprise en difficulté au sens des lignes directrices communautaires concernant les aides d'Etat au sauvetage et à la restructuration d'entreprises en difficulté ou relever des secteurs de la construction navale, de l'industrie houillère ou de la sidérurgie ;
h) Le montant des versements mentionnés au premier alinéa ne doit pas excéder le plafond fixé par décret. Ce plafond ne peut excéder 1,5 million d'euros par période de douze mois. ('.)
3.L'avantage fiscal prévu au 1 s'applique également aux souscriptions en numéraire au capital d'une société satisfaisant aux conditions suivantes :
a) La société vérifie l'ensemble des conditions prévues au 1, à l'exception de celles prévues aux b, f et h ;
b) La société a pour objet exclusif de détenir des participations dans des sociétés exerçant une des activités mentionnées au b du 1 (...)'»
En application des dispositions de l'article 299 septies de l'annexe III du code général des impôts alors en vigueur, le contribuable doit joindre à sa déclaration d'ISF un état individuel délivré par la société au capital de laquelle il a souscrit précisant l'objet pour lequel il est établi : application de l'article 885-O V bis du code général des impôts, la date, le montant des versements effectués au titre de la souscription capitale initiale aux augmentations de capital ainsi que le fait que «'la société satisfait aux conditions mentionnées aux a à e ou au a à h du 1 du I de l'article 885-O V bis du code précité».
La société Finaréa entreprises a remis à Monsieur V...:
-une attestation du 31 juillet 2009 selon laquelle Monsieur V... a, le 15 juin 2009 souscrit à une augmentation de capital de 813 180 €, 700 actions d'une valeur nominale de 10 €;
-une attestation du 7 mai 2010 selon laquelle Monsieur V... a souscrit, le 7 mai 2010 à une augmentation de capital d'un montant maximum de 2'500'000 €, 520 actions d'une valeur nominale de 10 €.
Sur les deux attestations, il est précisé par la société Finaréa entreprises que son «objet est à titre principal, la gestion et l'animation sous toutes formes et par tous moyens appropriés, de participations prises dans des sociétés éligibles au dispositif de la loi numéro 2007-1223 du 7 août 2007 dite loi TEPA satisfait tant les conditions mentionnées par l'article 885-O V bis du Cgi (section I, alinéa un de a) à e) ou de a) à h) ) et ses décrets d'application, que celles précisées par l'article 199 terdecies-O A du CGI (section I, alinéa 2 de c) à e) et ses décrets d'application»
En premier lieu, il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire que ces attestations confèrent à leurs bénéficiaires un droit au bénéfice d'un avantage fiscal.
En second lieu, les réponses ministérielles publiées les 3 mai 2005 et 11 avril 2006 à la suite de questions posées par Messieurs B... et N... au sujet de l'impôt sur le revenu et à propos des reçus délivrés par les associations ne sont pas une position formelle de l'administration pouvant lui être opposée dans le cadre de la contestation d'un redressement au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune, même si ces attestations et indiquent que «'le contribuable qui se prévaut de ce document n'encourt pour sa part aucune rectification sauf si la mauvaise foi ou l'existence de man'uvres frauduleuses, comme par exemple la collusion avec la personne ou l'organisme ayant délivré l'attestation, est démontrée par l'administration».
En troisième lieu, le fait qu'à la suite d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices 2010 et 2011 au regard des déclarations fiscales et portant sur la taxe professionnelle souscrite en 2009, la société Finaréa Gold, venant aux droits de la société Finaréa entreprises n'ait fait l'objet d'aucun redressement et d'aucune application de l'amende prévue à l'article 1740 A du code générale des impôts, ne constitue pas une prise de position formelle de l'administration sur la situation de fait de l'entreprise au regard d'un texte fiscal, que Monsieur V... pourrait lui opposer. Cette prise de position ne ressort pas davantage des échanges de courriels entre la société Finaréa et l'administration, qui ne font état que de l'existence du contrôle de l'activité d'animation, sans que l'administration se prononce de façon précise et non équivoque sur la reconnaissance de cette activité. C'est sans se contredire ou faire preuve de déloyauté que l'administration a pu décider de ne pas procéder au redressement de la société Finaréa au terme de sa vérification et invoquer le défaut de la qualité d'animatrice de groupe de cette société pour procéder à une rectification au regard des déclarations de Monsieur V....
Il résulte de tout ceci que les attestations remises au contribuable par la société Finaréa Entreprises ne sont pas de nature à obliger l'administration fiscale à s'en tenir à ce qui y est déclaré, même si ces attestations ont été produites de bonne foi.
Sur l'éligibilité de la société Finaréa entreprises à la réduction d'impôt au titre de l'ISF:
La Loi «'en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat» qui prévoit le régime de réduction de l'ISF pour les contribuables qui investissent dans une PME a donné lieu à la décision 596/A/2007 du 11 mars 2008, de la commission européenne. La commission a considéré qu'il y avait aide d'Etat au sens de l'article 87 du traité CE au niveau de l'entreprise dans lesquelles l'investissement est réalisé. Elle a examiné la compatibilité avec la réglementation de l'Union au regard de PME éligibles et via les holding dites «'passives'» (versements intermédiés par le biais des holding qui a pour objet exclusif de détenir des participations ). Cette décision ne comporte aucun examen des versements faits aux sociétés holding animatrices. Par voie de conséquence, il n'y a pas lieu à question préjudicielle au regard de cette décision sur le stade d'avancement requis de la société holding animatrice pour être éligible à la réduction d'impôt.
L'éligibilité à la réduction d'impôt des versements effectués à une holding animatrice résulte de l'instruction administrative du 28 avril 1989, qui constitue une interprétation administrative favorable au contribuable par exception au principe d'exclusion des parts ou actions des sociétés holding ayant pour activité principale la gestion de leur propre patrimoine mobilier ou immobilier posé par l'article 885 O quater du code général des impôts. Cette instruction n'a pas limité le champ d'application de cette mesure aux seules sociétés en phases initiales de développement sans être déjà animatrices.
Il appartient à Monsieur V... qui invoque le bénéfice de ce régime favorable, de justifier que la société Finaréa exerce un rôle d'animation effective du groupe qu'elle forme avec sa filiale Biovidis et qu'elle participe activement à la conduite de la politique de ce groupe et au contrôle de sa filiale.
Il ressort des pièces produites aux débats que:
-Par décision de l'assemblée générale extraordinaire des actionnaires de la société Finaréa Arobas du 7 avril 2009, il a été procédé à la scission de cette société et à la création de deux entités : Finaréa arobas et Finaréa entreprises. Il a été fait apport à la société Finaréa entreprises de la branche d'activité d'investissement par souscription au capital de sociétés.
-Par contrat d'investissement du 24 juillet 2009 entre la société Gambetta Finance et la société Finaréa entreprises, en présence de la société Biovidis, et pacte d'associés du 31 août 2009, la société Finaréa entreprises a pris une participation à hauteur de 33,33% des parts sociales de la société Biovidis. L'objet de ce pacte était d'associer la société Finaréa entreprises en qualité de holding animatrice, au sens de la réglementation fiscale applicable en matière d'investissement dans les entreprises éligibles aux réductions d'ISF. A l'issue de cette participation, le capital de la société Biovidis était détenu à hauteur de 66,67% par un associé, Monsieur J... et à 33,33% par la société Finaréa entreprises.
-le 31 décembre 2009, la société Finaréa Entreprises et la société Biovidis ont conclu un contrat d'animation.
Il ressort de ces éléments que lorsque Monsieur V... a procédé à un versement à la société Finaréa entreprises, le 15 juin 2009, la société Finaréa n'avait pas encore de contrôle, gestion et animation de filiales. Dès lors qu'elle n'exerçait pas effectivement l'activité de holding animatrice, elle ne peut recevoir cette qualification au regard du régime de réduction de l'impôt. Ainsi, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur V... de sa réclamation au titre du rappel d'imposition de l'année 2009.
En ce qui concerne l'année 2010, l'administration fiscale oppose que:
-l'actif brut en 2010 de la société Finaréa entreprises est composé majoritairement de liquidités et valeurs mobilières de placement et d'autres actifs, et non de participations;
-elle ne détient pas la majorité du capital social qui lui permet de contrôler la société Biovidis
-la réalité du rôle d'animation n'est pas démontrée.
Ainsi qu'il a été exposé plus haut, l'éligibilité des société Holding à la réduction de l'impôt ne résulte pas des dispositions de l'article 885-O Vbis du code général des impôts mais d'une extension de la doctrine de l'administration, qui lui est opposable. Dès lors, il ne peut lui être opposé davantage que ce que prévoit cette doctrine. En l'espèce, la doctrine administrative applicable prévoit que le bénéfice du régime de holding animatrice est réservé aux sociétés dont l'actif est principalement composé de participations.
L'administration fiscale produit l'imprimé 2050 du 15 octobre 2010 dont il ressort que l'actif brut du bilan de la société Finaréa est composé de titre de participation pour une valeur de 276 280 €, d'autres titres immobilisés pour une valeur de 154 658 €, des créances pour une valeur de 560 193 €. Ainsi l'actif de la société Finaréa n'était pas composé principalement de participations.
Par ailleurs, pour démontrer la réalité du rôle d'animation joué par la société holding, Monsieur V... se prévaut de l'existence d'un contrat d'animation, aux termes duquel la société Finaréa fournit à la société Biovidis les prestations suivantes : «définition conjointe et matérialisation par un document normalisé du plan d'action annuelle fixant la stratégie de l'entreprise ; listage des actions détaillées à mener en fixant le calendrier de la réalisation et les impacts en termes de traduction financière ; déclinaison de ces actions par les collaborateurs principaux de l'entreprise et les principaux indicateurs permettant de s'assurer de leurs réalisations ; vérification semestrielle du bon déroulement de ce plan de son adaptation pour tenir compte des différences écart constatées».
La convention prévoit que le prestataire est rémunéré de la façon suivante:
*une somme forfaitaire annuelle de 4 600 € HT au titre des prestations de conseil stratégique;
*une somme forfaitaire annuelle de 6 000 € HT au titre des prestations de contrôle de gestion;
*une somme forfaitaire de 3 000 € HT pour la mise en place du système de contrôle de gestion.
Au cours de l'exercice litigieux, la société Finaréa a dispensé ses conseils à la société Biovidis sur le rachat d'un domaine viticole «'La Rezé'», avant de décider de l'arrêt de l'opération, ce qui est rappelé au compte rendu du 15 juin 2010 du conseil de direction de Bovidis. Il est ajouté à ce compte rendu un point 8 ainsi rédigé :' «'Développement de Biovidis en 2010. Quelle stratégie maintenant '
Suivant le point précédent, PhG (A... J...) expose un projet de rapprochement par rachat de 50 % du capital d'un négoce conventionnel très dynamique et profitable car deux associés souhaitent se séparer. Il s'agit d'un investissement de montant élevé (autour de 4 millions € pour les titres, hors remboursement de CC) pour un groupe de sociétés qui vend à l'export et réalise un CA de 10 millions € en 2009 pour un résultat de 1 million €. PhG précise qu'il souhaite que Finaréa participe à l'opération et qu'il est disposé à mener à bien cette opération même si Finaréa ne suit pas. Finaréa donne son accord de principe pour étudier la cible dès que PhG peut avoir plus de détail à lui communiquer»
Ainsi, même s'il est prévu au pacte d'associés que la société Finaréa a, par sa présence au conseil de direction et le jeu de la majorité qualifié comprenant la voix du membre investisseur, le pouvoir de contrôle sur les engagements financiers les plus importants, Monsieur V... ne démontre pas que l'animation est effectivement faite par la société Finaréa. Il ressort au contraire du compte rendu du 15 juin 2010 du conseil de direction de Biovidis que l'animation de la filiale reste entre les mains de A... J..., actionnaire majoritaire, le rôle de la société Finaréa étant limité à des missions de conseil stratégique et la mise en place et réalisation de contrôle de gestion.
Il résulte ainsi de ce qui précède, qu'au titre de l'année 2010, la société Finaréa ne satisfaisait pas aux conditions requises pour faire bénéficier les souscripteurs à son capital de la réduction d'impôt de solidarité sur la fortune.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur V... de sa réclamation au titre du rappel d'imposition de l'année 2010.
PAR CES MOTIFS:
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Déboute Monsieur V... de sa demande de communication de pièces;
Rejette la demande de Monsieur V... tendant à ce qu'il soit posé une question préjudicielle à la Cour de Justice de l'Union européenne;
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions;
Déboute l'Etat de sa demande présentée au titre des frais irrépétibles;
Condamne Monsieur G... V... aux dépens en cause d'appel, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT